Ourdou

L'ourdou ou urdu (autonyme : اُردُو, urdū ou لشکری, lashkari, sous une forme plus longue lashkari zūban لشکری زبان[1]) est une langue appartenant au groupe indo-iranien de la famille des langues indo-européennes. Il est parlé dans le Nord de l'Inde, ainsi qu'au Pakistan, dont il est la langue officielle et le support de l'identité nationale. En Inde, il est une langue officielle reconnue par la Constitution. Il s'écrit avec l'alphabet perso-arabe modifié pour répondre aux besoins linguistiques. Plus de 165 millions de personnes utilisent l'ourdou, dont 60 à 80 millions comme première langue[3].

Ourdou (alternativement Lashkari)
اُردُو (urdū),
لشکری زبان (lashkari zubān)[1]

« Ourdou » écrit en ourdou.
Pays Inde, Pakistan
Nombre de locuteurs 170 208 780[2]
Typologie SOV, flexionnelle, à fracture d'actance, syllabique
Écriture Écriture arabe (en) et alphabet en ourdou (en)
Classification par famille
Statut officiel
Langue officielle Pakistan
Inde (Jammu-et-Cachemire, Delhi, Bihar, Uttar Pradesh, Jharkhand, Bengale-Occidental, Telangana)
Codes de langue
ISO 639-1 ur
ISO 639-2 urd
ISO 639-3 urd
IETF ur
Linguasphere 59-AAF-q
Glottolog urdu1245
Échantillon
دفعہ ۱ ۔
تمام انسان آزادی اور حقوق و عزت کے اعتبار سے برابر پیدا ہویٔے ہیں۔ انہیں ضمیر اور عقل و دیعت ہویٔی ہے۔ اس لیٔے انہیں ایک دوسرے کے ساتھ بھایٔی چارے کا سلوک کرنا چاہیء۔

Histoire et étymologie

Origine

Cette langue s'est développée dans les armées et les bazars au contact des conquérants musulmans du sous-continent indien aux xiie et xiiie siècles. Très vite l'ourdou intégra un nombre important de mots au persan, langue qui elle-même véhiculait de nombreux mots arabes. On sait que vers la fin du xive siècle, l'ourdou était devenu une langue véhiculaire et qu'on le parlait dans la plus grande partie de l'Inde du nord, avant qu'elle ne s'étende à l'ensemble du sous-continent indien[4]. À la suite de la colonisation britannique de l'Inde, l'ourdou a également fait de très nombreux emprunts à l'anglais[4].

Le nom d'une langue

Le mot « ourdou » est une abréviation de l'expression zabān-e urdu-e mu'alla, qui signifie « langue des camps royaux »[5] ou aussi « des camps glorieux »[4]. Il s'agit d'une langue qui se fonde sur le dialecte qui était parlé à Delhi et dans ses environs, appelé khaṛī bolī (la « langue correcte »), et qui s'est nourri ensuite des traditions littéraires de sultanats comme Hyderabad[5],[4].

En fait, pendant une longue période, l'ourdou n'a pas eu de nom spécifique : en fonction de son avancée géographique sous l'influence des marchands et des prédicateurs, on parlait tantôt de hindvī, langue des hindous (expression utilisée par les élites persanophones), de gujrī, langue du Gujarat, ou dakhinī, langue du Deccan (par exemple dans les cours des royaumes de Golconde et de Bijapur, où l'ourdou devint une langue littéraire à partir du xvie siècle)[4]. Dans la région de Delhi on utilisait plutôt l'expression rekhta (ou rexta), terme signifiant « (langue) mêlée »[4],[5]. Et ce n'est qu'au xixe siècle que l'on va utiliser le terme de « ourdou », mot en réalité d'origine turque, qui a aussi donné « horde » en français[4].

Proximité avec d'autres langues

« Lashkari zaban » (un des noms désignant l'ourdou) calligraphié en nastaʿlīq.

Très proche du hindi par sa syntaxe et sa morphologie (avant 1947 on appelait hindoustani le hindi et l'ourdou, qui ne constituaient qu'une seule langue), l'ourdou a fait de nombreux emprunts lexicaux à l'arabe et au persan, langues qui ont introduit dans son système phonologique des phonèmes supplémentaires. L'écart avec le hindi a eu tendance à s'accroître après la séparation de l'Inde et du Pakistan (1947) du fait d'une « repersanisation » de la langue et d'une élimination des termes sanskrits. L'ourdou s'écrit selon la graphie arabo-persane dite nastaʿlīq.

Toutefois l'écart avec le hindi a, depuis quelques décennies, tendance à se réduire en raison de l'influence croissante de l'économie et du cinéma indien[réf. nécessaire]. Avec les antennes paraboliques, les chaînes télévisées indiennes en hindi sont beaucoup regardées au Pakistan, et de nombreux films en hindi y sont diffusés, ce qui maintient la compréhension du hindi et tend à rapprocher l'ourdou du hindi.

Dans les faits, si un locuteur parlant l'ourdou s'adresse à un locuteur parlant le hindi sans utiliser de termes ou d'expressions relevant du domaine religieux, les deux locuteurs se comprendront parfaitement. Seuls les accents, propres à certaines régions, indiqueront une légère différence, parfaitement surmontable.

Distribution géographique

Monument relatif à la Première Guerre mondiale, avec inscription en ourdou, à Barton on Sea.

L'ourdou est la langue officielle du Pakistan. Utilisé dans le système éducatif, la littérature et les cours, considéré comme langue identitaire de l'islamité du sous-continent indien. Parlé dans les centres urbains, notamment à Karachi par la minorité muhadjir (laquelle demeure souvent réputée allogène car réfugiée du nord de l'Inde après la partition du sous-continent en 1947), il n'est l'idiome principal que de 8 % de la population et demeure à la cinquième place au nombre des locuteurs natifs (le pendjabi étant, lui, usité en première langue par 44 % de la population — soit 60 millions —, tandis que le pachto, le sindhi et le saraiki sont, respectivement, les idiomes premiers de 15 % (20 millions), 14 % et 11 % des Pakistanais)[6].

En Inde, l'ourdou est également une langue officielle reconnue par la Constitution. L'ourdou est aussi la langue officielle des États d'Andhra Pradesh, Bihar, Jammu-et-Cachemire, et Uttar Pradesh, ainsi que de la capitale nationale, Delhi. Dans quelques universités de l'Inde, l'ourdou est considéré comme une langue de prestige. C'est vrai pour les villes du Lucknow, Aligarh et Hyderabad.

Situations linguistiques apparentées

Le hindi et l'ourdou, deux langues très proches, sont parlées par environ 530 à 540 millions de personnes (2018) en langue maternelle et seconde dans tout le sous-continent Indien, et cet exemple de deux langues très proches est similaire à des langues très proches comme le yiddish et l'allemand, comme le serbe, le croate, et le bosniaque, qui jadis formaient le serbo-croate, ou même de l'exemple des langues scandinaves (suédois, danois et norvégien). En Asie, l'indonésien est une langue véhiculaire, synthèse de parlers malais, très proche du malais parlé en Malaisie, et qui est devenu la langue nationale de l'Indonésie.

Nombre de locuteurs

Pays Locuteurs Dont L1 Dont L2
Pakistan[2] 109 100 000 15 100 000 94 000 000
Inde[2] 58 340 000 50 800 000 7 540 000
Arabie saoudite[7] 757 000
Népal[8] 691 546
Royaume-Uni[9] 400 000
États-Unis[10] 300 000
Bangladesh[2][11] 250 000
Canada[12] 206 000
Qatar[13] 173 000
Oman[14] 95 000
Iran[15] 88 000
Bahreïn[16] 74 000
Norvège[17] 34 000
Turquie[18] 24 000
Allemagne[19] 23 000
Monde entier[2] 176 188 117 68 988 177 107 199 940

Phonologie

Voici l'ensemble des phonèmes de l'ourdou (les romanisations sont données selon le système de Hunter)[20],[21] :

Consonnes

Les sons indiqués entre parenthèses n'existent que dans certains dialectes.

Bilabiales Dentales Alvéolaires Rétroflexes Palatales Vélaires Uvulaires Glottales
Nasales nasales [m] م m [n] ن n [ŋ] ن n, ṅ
murmurées ([mʱ]) مھ mh ([nʱ]) نھ nh
Occlusives sourdes [p] پ p [] ت t [ʈ] ٹ t, ṭ [t͡ʃ] چ ch [k] ک k [q] ق q ([ʔ]) ع
aspirées [pʰ] پھ ph [ʰ] تھ th [ʈʰ] ٹھ th, ṭh [t͡ʃʰ] چھ chh [kʰ] کھ kh
voisées [b] ب b [] د d [ɖ] ڈ d, ḍ [d͡ʒ] ج j [g] گ g
murmurées [bʱ] بھ bh [ʱ] دھ dh [ɖʱ] ڈھ dh, ḍh [d͡ʒʱ] جھ jh [gʱ] گھ gh
Fricatives sourdes [f] ف f [s] س s [ʃ] ش sh [x] خ kh, k͟h ([h]) ہ/ح h
voisées [v] و v [z] ز z [ʒ] ژ zh [ɣ] غ gh, g͟h [ɦ]
Battues voisées [ɾ] ر r [ɽ] ڑ r, ṛ
murmurées ([ɾʱ]) رھ rh ([ɽʱ]) ڑھ rh, ṛh
Spirantes voisées [ʋ] و v [l] ل l [j] ی y
murmurées ([lʱ]) لھ lh

Voyelles

Les sons indiqués entre parenthèses n'existent que dans certains dialectes.

Antérieures Centrales Postérieures
courtes longues courtes longues
Fermées orales [ɪ] [iː] [ʊ] [uː]
nasales [ɪ̃] [ĩː] [ʊ̃] [ũː]
Mi-fermées orales ([e]) [eː] ([o]) [oː]
nasales [ː] [õː]
Moyennes orales [ə]
nasales [ə̃]
Mi-ouvertes orales ([ɛ]) [ɛː] ([ɔ]) [ɔː]
nasales [ɛ̃ː] [ɔ̃ː]
Ouvertes orales [æː] [ɑː]
nasales [ɑ̃ː]

Alphabet

L'alphabet urdu est une forme modifiée de l'alphabet perso-arabe. Il se compose de 35 signes[22] (ou 37[23],[24], voire 38[25], selon les distinctions introduites entre graphies). Ce nombre plus élevé que celui de l'alphabet perso-arabe (32 ou 33 signes) vient de la nécessité de retranscrire des sons propres aux langues indo-aryennes.

L'alphabet ourdou (avec 38 caractères), avec la transcription des noms de lettres en alphabets latin et devanagari. Lire le tableau de droite à gauche.

Références

  1. Dar, Shafat et Hassan 2017.
  2. Ethnologue [urd].
  3. (en) « Urdu language », sur britannica.com, màj 4 juin 2021 (consulté le ).
  4. Denis Matringe, « Urdû ou ourdou - Langues et littérature », sur universalis.fr (consulté le ).
  5. Richard Delacy, Read and Write Urdu Script, Teach yourself, 2010, p. xxii (ISBN 978-1-444-10393-9).
  6. (en) « Population by mother tongue » [PDF] sur pbs.gov.pk
  7. (en) « Urdu in Saudi Arabia », sur joshuaproject.net
  8. (en) Bureau Central de Statistiques du Gouvernement du Népal, « Recensement népalais 2014 », sur nepal.unfpa.org
  9. (en) « United Kingdom », sur Ethnologue.
  10. (en) « Urdu in United States », sur joshuaproject.net
  11. (en) The UN Refugee Agency, « Note on the nationality status of the Urdu-speaking community in Bangladesh », sur www.refworld.org
  12. (en) « Urdu in Canada », sur joshuaproject.net
  13. (en) « Urdu in Qatar », sur joshuaproject.net
  14. (en) « Urdu in Oman », sur joshuaproject.net
  15. (en) « Urdu, Islami in Iran », sur joshuaproject.net
  16. (en) « Urdu in Bahrain », sur joshuaproject.net
  17. (en) « Urdu in Norway », sur joshuaproject.net
  18. (en) « Urdu in Turkey », sur joshuaproject.net
  19. (en) « Urdu in Germany », sur joshuaproject.net
  20. (en) Center for Language Engineering (CLE), « Urdu Phonetic Inventory », sur www.cle.org.pk (consulté le ).
  21. (en) South Asia Language & Area Center, University of Chicago, « Urdu Phonology », sur dsal.uchicago.edu, (consulté le ).
  22. Delacy, Read and Write Urdu Script, 2010.
  23. (en) Tej K. Bhatia & Ashok Koul, Urdu. The Complete Course for Beginners, London, Routledge, (ISBN 978-0-415-58695-5).
  24. (en) M. Imran Qadir, « Pronunciation of alphabets: educate the children scientifically », Educational Technology, no 52, , p. 11459-11460 (lire en ligne, consulté le ).
  25. Voir le tableau de l'alphabet ci-dessous.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Christopher Shackle & Rupert Snell, Hindi and Urdu Since 1800: A Common Reader, New Delhi, Heritage Publisher, , xvi, 222 p. (ISBN 8-1-702-6162-7)
  • (en) Kamran Shaukat Dar, Ahmad Bin Shafat et Muhammad Umair Hassan, « An efficient stop word elimination algorithm for Urdu language », 14th International Conference on Electrical Engineering/Electronics, Computer, Telecommunications and Information Technology (ECTI-CON), (lire en ligne)

Article connexe

Liens externes

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