Olivier Christin

Olivier Christin (né le à Sannois) est un historien moderniste français, spécialiste de l'histoire religieuse et politique. Il est professeur d'histoire moderne à l'université de Neuchâtel[1], directeur d’études à l’École pratique des hautes études (EPHE)[2] à Paris et directeur du Centre européen des études républicaines (CEDRE)[3]. Il est le fils de Pierre Christin, écrivain et scénariste de bande dessinée, et de Rosine Christin, sociologue.

Domaines de recherche

Les recherches d'Olivier Christin portent sur les enjeux tant religieux que politiques des affrontements confessionnels aux XVIe-XVIIe siècles, qu’il analyse en vue de montrer par quelles pratiques et suivant quels schémas de pensée les contemporains tentent de répondre à ce bouleversement du monde social. Soucieux de montrer la diversité des expériences et leur irréductibilité à un modèle unique, il travaille sur des objets issus aussi bien du royaume de France et de la Confédération suisse que du Saint-Empire romain germanique. Depuis quelques années, il s'intéresse aussi à l'histoire des républicanismes, aux doctrines républicaines et aux pratiques politiques qu'elles inspirent[4].

Accordant une place importante aux images comme source et objet d’histoire, Olivier Christin a étudié les manifestations de l’iconoclasme protestant dans lequel il voit une « révolution symbolique » qui, loin de n’être qu’une manifestation de vandalisme, participe de la constitution des identités confessionnelles, oblige les acteurs à produire de nouveaux discours de légitimation et transforme profondément l’art religieux[5]. Il s’est aussi intéressé à l’iconographie luthérienne des Dix Commandements[6] et aux démonstrations savantes de l'efficacité des images miraculeuses par les auteurs de la Compagnie de Jésus. Avec Nicolas Balzamo et Fabrice Flückiger, il a proposé la première édition critique de la plus citée des topographies sacrées traitant des images de Marie, l’Atlas Marianus du père jésuite Wilhelm Gumppenberg[7].

Dans son livre sur La paix de religion, prenant le contre-pied de l’interprétation des divergences confessionnelles comme longue suite d’affrontements sanglants, Olivier Christin a montré comment les acteurs s’efforcent de restaurer la paix en organisant la coexistence religieuse à travers l’invention de nouvelles formes d’appartenance à la communauté détachées de l’unité de la foi et fondées sur l’autonomisation de la raison politique[8]. Ses recherches portent aussi sur l’histoire du vote avant le suffrage universel, dont il a retracé les avatars au sein des conseils de villes, des universités et monastères ou lors de l’élection du Pape. Dans Vox Populi (2014), il décrit les modalités du vote lors de l'élection d'un magistrat vertueux ou pour choisir un prélat digne de sa fonction aux yeux de Dieu ; il dévoile aussi les stratégies de reproduction des élites dont le vote est souvent l'instrument[9]. Dans la continuité de cet ouvrage, il a initié un projet de recherche sur la transformation des pratiques de la décision collective engendrée par la division religieuse à l’époque moderne dans la Confédération suisse au XVIe siècle[10].

Proche de Pierre Bourdieu, avec qui il a travaillé de nombreuses années, Olivier Christin anime aussi un réseau de recherche consacré à l’historicisation réflexive des concepts historiques, en vue de sensibiliser chercheurs et chercheuses aux enjeux propres à la circulation des mots entre les disciplines et les traditions linguistiques. Les premiers résultats ont fait l’objet d’un Dictionnaire des concepts nomades en sciences humaines[11].

En 2016, il a fondé le Centre européen des études républicaines (CEDRE), rattaché à l'université Paris sciences et lettres. Ce centre de recherche a pour vocation d'étudier « les théories de la République, l’histoire des idées et des doctrines républicaines, les pratiques politiques spécifiques à l’œuvre dans les systèmes républicains, l’histoire des expériences politiques républicaines »[12]. Revendiquant une approche résolument interdisciplinaire et transnationale, le CEDRE espère servir de plate-forme d'échange aux chercheurs et chercheuses issus de divers pays et traditions académiques afin de décloisonner l'approche de l'histoire des républicanismes et sortir du seul modèle français.

Parcours universitaire

Principaux travaux d'Olivier Christin

  • Une révolution symbolique : l'iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique, Paris, Minuit, .
  • Les Réformes : Luther, Calvin et les protestants, Paris, Éditions Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard / Religions » (no 237), , 160 p. (ISBN 978-2-0705-3228-5), trad. italienne, japonaise, russe, sud-coréenne et chinoise simplifiée.
  • La paix de religion : l'autonomisation de la raison politique au XVIe siècle, Paris, Seuil, .
  • Les yeux pour le croire : les Dix commandements en image (XVe-XVIIe siècles), Paris, Seuil, .
  • (avec Patrick Champagne) Pierre Bourdieu : mouvements d'une pensée, avec Patrick Champagne, Paris, Bordas, 2004 (rééd. Lyon, PUL, 2012).
  • Le Roi-Providence : trois études sur l'iconographie gallicane, Lyon, Chrétiens et Sociétés, 2007.
  • Confesser sa foi : conflits confessionnels et identités religieuses dans l'Europe moderne (XVIe-XVIIe siècles), Seyssel, Champ Vallon, 2009.
  • (Dir.) Un nouveau monde : naissance de la Lorraine moderne. Catalogue d'exposition,( Paris, Somogy, 2013.
  • Vox populi : une histoire du vote avant le suffrage universel, Paris, Seuil, 2014.
  • (Dir. avec Fabrice Flückiger et Naïma Ghermani) Marie mondialisée : l'Atlas Marianus de Wilhelm Gumppenberg et les topographies sacrées de l'époque moderne, Neuchâtel, Alphil, 2014.
  • (Dir.) Dictionnaire des concepts nomades en sciences humaines, 2 tomes, Paris, Métailié, 2010 et 2016.
  • (Dir.) Demain, la République, Lormont, Le Bord de l'eau, 2018.
  • (Dir.) Républiques et républicanismes : les cheminements de la liberté, Lormont, Le Bord de l'Eau, 2019.
  • (Dir. avec Marion Deschamp) Critique de la langue politique : les concepts nomades et l'histoire des idées, Lormont, Le Bord de l'eau, 2019.

Notes et références

  1. « Olivier Christin sur le site de l'Université de Neuchâtel », sur Université de Neuchâtel (consulté le )
  2. « Olivier Christin », sur www.ephe.fr (consulté le )
  3. « L'équipe du CEDRE », sur cedre.univ-psl.fr (consulté le )
  4. Olivier Thomas, « Olivier Christin : L’œil de la Réforme », sur www.lhistoire.fr, L'Histoire, (consulté le )
  5. Nicole Lemaître, « Compte-rendu: Olivier Christin, Une révolution symbolique. L'iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique », Revue d'histoire moderne et contemporaine, vol. 41-1, , p. 161-163 (www.persee.fr/doc/rhmc_0048-8003_1994_num_41_1_1711_t1_0161_0000_1)
  6. Matthieu Arnold, « Compte-rendu: Olivier Christin, Les yeux pour le croire. Les Dix Commandements en images (XVe – XVIIe siècle) », Revue d'histoire et de philosophie religieuses, vol. 83-3, , p. 371-372 (www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_2003_num_83_3_1041_t8_0371_0000_1)
  7. Mariel Mazzocco, « Compte-rendu: L’Atlas Marianus de Wilhelm Gumppenberg, édition et traduction par Nicolas Balzamo, Olivier Christin et Fabrice Flückiger, avec la collaboration de Laurent Auberson, Naïma Ghermani et Anton Serdeczny », Revue de l'histoire des religions, vol. 3, , p. 570-571 (lire en ligne)
  8. Alain Tallon, « Compte-rendu: Olivier Christin, La paix de religion. L'autonomisation de la raison politique au XVIe siècle », Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 55-2, , p. 484-486 (www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_2000_num_55_2_279855_t1_0484_0000_2)
  9. Rémy Caveng, « Compte-rendu: Olivier Christin, Vox populi. Une histoire du vote avant le suffrage universel », Lectures, (consulté le )
  10. « Réformation et votations », sur p3.snf.ch, (consulté le )
  11. Serge Audier, « Dictionnaire des concepts nomades en sciences humaines : l'internationale des concepts », sur lemonde.fr, (consulté le )
  12. « La vocation du CEDRE », sur cedre.univ-psl.fr (consulté le ).

Liens externes

  • Portail de l’éducation
  • Portail des universités françaises
  • Portail de l’historiographie
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.