Nucléation

La nucléation (ou germination[alpha 1]) est l'apparition de petits domaines (appelés nuclei ou germes) d'une nouvelle phase à l'intérieur ou à la frontière d'une phase homogène devenue instable (en raison d'une modification de la température, de la pression ou de sa composition).

La nucléation est une étape indispensable à la réalisation de la plupart des transitions de phase (fluide ↔ fluide, solide ↔ solide et fluide → solide). Les principales exceptions sont les transitions solide → fluide (fusion ou sublimation d'un solide) et les transformations solide ↔ solide displacives.

La nucléation est beaucoup étudiée en raison du rôle crucial qu'elle joue dans de nombreux phénomènes naturels (comme les précipitations atmosphériques ou la différenciation des roches magmatiques) et, au plan technique, dans le contrôle des propriétés structurelles (taille, pureté, morphologie et structure des cristaux) et mécaniques (dont la résistance à la fracturation) des matériaux cristallins confectionnés par l'industrie.

Ces études sont difficiles au plan expérimental en raison de la petite taille des nuclei  typiquement de l'ordre de cent à mille atomes , de leur courte durée de vie et de leur mobilité[1], et au plan théorique parce que la nucléation ne s'explique pas dans le cadre de la thermodynamique macroscopique classique et nécessite de prendre en considération les fluctuations statistiques (qui mettent en jeu des grandeurs physiques mal connues quantitativement).

Théorie

Nucléation homogène et nucléation hétérogène

Les germes de la nouvelle phase peuvent se former au sein même de la phase devenue instable (nucléation homogène) ou bien sur les parois du récipient ou à la surface d'autres phases (bulles, gouttelettes ou cristaux) déjà présentes sous forme dispersée dans cette phase (nucléation hétérogène).

En pratique la nucléation est très généralement hétérogène dans l'air et dans les solutions aqueuses en raison de l'abondance des particules solides ou fluides d'autres phases (poussières, gouttelettes, bulles), sauf quand ils sont particulièrement purs[alpha 2]. Elle est en revanche souvent homogène dans les sels fondus[alpha 3].

Une ou deux étapes

Il existe actuellement deux modèles pour expliquer la germination des cristaux issus de solutions sursaturées :

  • le premier modèle, dit classique, s'applique au cas où la taille des amas cristallins fluctue par ajout ou retrait d'espèces monoatomiques ("monomères")[2]. La croissance est favorisée par l'énergie de formation du cristal, tandis que la dissolution est favorisée par la tension superficielle de l'interface créée entre l'amas cristallin et son environnement liquide. Les deux effets se contrebalancent pour une taille d'amas particulière, dite "taille critique". Par conséquent, les amas cristallins plus petits que la taille critique tendent à se redissoudre sous l'effet des fluctuations thermiques; inversement, les amas cristallins plus grands que la taille critique tendent à croître en moyenne, jusqu'à former des cristaux macroscopiques ;
  • le second modèle, dit à deux étapes, a été initialement proposé pour décrire la cristallisation des protéines et s'appuie sur la formation d'un amas cristallin (cluster) renfermant une solution des espèces à cristalliser, suivie de la réorganisation de façon ordonnée de ces espèces pour donner un germe qui à l'instar du modèle classique grossit pour donner un cristal volumineux.

Notes et références

Notes

  1. Le terme germination est surtout employé pour la nucléation d'une phase solide.
  2. Parmi les applications, voir les chambres à bulles et les chambres à brouillard.
  3. Notamment, en géologie, lors des premiers stades du refroidissement d'une chambre magmatique.

Références

  1. (en) Ferdi Schuth, Patrick Bussian et Patrick Ågren, « Techniques for analyzing the early stages of crystallization reactions », Solid State Sciences (en), vol. 3, no 7, , p. 801-808 (DOI 10.1016/S1293-2558(01)01199-2, lire en ligne).
  2. (de) R. Becker et W. Döring, « Kinetische Behandlung der Keimbildung in übersättigten Dämpfen », Annalen der Physik, vol. 416, no 8, , p. 719-752 (DOI 10.1002/andp.19354160806).

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Collin J. Wilkinson, Daniel R. Cassar, Anthony V. DeCeanne, Katelyn A. Kirchner, Matthew E. McKenzie et al., « Energy landscape modeling of crystal nucleation », Acta Materialia (en), vol. 217, , p. 1-8, article no 117163 (DOI 10.1016/j.actamat.2021.117163)

Articles connexes

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