Nur Ed-Din Al Betrugi

Nur al-Din Ibn Ishaq Al-Bitruji, Abu Ishâk ibn al-Bitrogi, aussi connue sous le nom d'Al Bidrudschi et plus connu en Occident sous son nom latinisé d'Alpetragius, est un célèbre astronome, philosophe et juge marocain[1] du XIIe siècle.

Il est notamment connu pour avoir été le premier astronome à présenter un système astronomique non ptolémaïque et le premier à proposer des causes physiques des mouvements célestes. Son système alternatif s'est répandu à travers la majeure partie de l'Europe au cours du XIIIe siècle.

Biographie

Le lieu de naissance d'Al Betrugi est controversé. Certains historiens le font naître à Séville, d'autres pensent qu'il est né dans le Maghreb al-Aqsa (Maroc)[2]. On peut aussi supposer que son gentilé vient de Al-Bitrawsh (l'actuelle Valle de los Pedroches), une région proche de Cordoue. On sait qu'il a vécu en Andalousie, qu'il était un disciple du polymathe Ibn Tufayl et contemporain d'Averroès.

Dans ses écrits (Kitab-al-Hay’ah ; en arabe كتاب الحياة), il avance la théorie des orbites planétaires comme étant de natures épicycles et excentriques. Ses Principes d'astronomie furent traduits par Michel Scot à Tolède en 1217 et vont devenir la base de l'astronomie en Europe jusqu'au XVIe siècle, et son modèle planétaire sera repris par les principaux acteurs de la nouvelle conception du monde qui vont s'en inspirer[3]. Nur Al Din meurt en l'an 1204.

Œuvres et modèle planétaire

Il est le premier astronome à présenter un système astronomique non ptolémaïque, avec les planètes portées par les sphères géocentriques, comme une alternative aux modèles de ses prédécesseurs. Un autre aspect original de son système est qu'il propose une cause physique des mouvements célestes. On lui doit une très curieuse théorie astronomique développée dans un de ses ouvrages nommé Kitab Al Hai'a (Le livre d'astronomie/cosmologie théorique, littérallement en arabe : كتاب الهيئة ), qui fait revivre, d'une manière fondamentalement modifiée, la théorie des sphères homocentriques (système de mouvement planétaire proposé par ses prédécesseurs), et permet de rendre compte des phénomènes propres aux étoiles errantes, en mélangeant des rotations de sphères homocentriques. Les conceptions d'Alpetragius ont le mérite d’ébranler une tradition séculaire, de mettre en doute les systèmes antécédents et préparer leur écroulement annoncé. Pour ses contemporains, ses idées sont considérées comme un important apport positif : on va même jusqu'à dire qu'il fonde une nouvelle astronomie[4]. Son apport est si décisif pour l'avenir de l'astronomie que les écrivains juifs de son époque le surnomment celui qui fait vaciller la doctrine des cieux. Il établit la théorie du mouvement spiral des planètes et ouvre ainsi la voie à l'astronomie moderne. Grâce à lui, la trigonométrie, considérée jusque-là comme une branche de l'astronomie, devient une science indépendante. Selon lui : "Vénus et Mercure ont leur lumière propre puisqu'elles n'ont pas de phase comme la Lune."

Un des aspects originaux du système d'Alpetragius est sa proposition d'une cause physique de mouvements célestes. Il combine l'idée d'impetus et le concept de shawq (désir) d'Abu'l-Barakāt al-Baghdādī, pour expliquer comment l'énergie est transférée d'un premier moteur placé dans la dite sphère à d'autres sphères, expliquant les vitesses variables des autres sphères et des mouvements différents. Il contredit l'idée selon laquelle il existe un type particulier de dynamique pour chaque monde, en appliquant plutôt la même dynamique aux mondes sublunaires et célestes.

Il écrit le célèbre livre Kitab Al Hai'a sur l'almageste, qui demeure une des bases de l'astronomie du monde. Alpetragius y présente des critiques de ce livre d'un point de vue physique. Son livre est étudié jusqu'au XVIe siècle, et les critiques vont jusqu'à qualifier son livre d'alternative valable à l'almageste[5]. Cet ouvrage a été traduit en latin par Michael Scot en 1217 comme De motibus celorum (imprimé pour la première fois à Vienne en 1531). Une traduction en hébreu de Moses ibn Tibbon a été réalisée en 1259.

Héritages et postérité

Un cratère lunaire porte aujourd'hui son nom latinisé: le cratère Alpetragius.

Le professeur Feliciano Pérez Varas, de l'Université de Salamanque, considère que le Parzival, fait référence à ce savant dans la figure du sage astronome Flegetanis, qui aurait mentionné le Graal.

Références

  1. (en) Michael Maunder et Patrick Moore, « Transits of Mercury », dans Transit When Planets Cross the Sun, Springer, coll. « Practical Astronomy », (ISBN 978-1-4471-0373-8, DOI 10.1007/978-1-4471-0373-8_4, lire en ligne), p. 23–27
  2. Sánchez Pérez et Pérez Gómez, 1921 , pp. 45-47.
  3. (en) Robert S. Cohen, P. K. Feyerabend et Marx W. Wartofsky, Essays in Memory of Imre Lakatos, Springer Science & Business Media, , 768 p. (ISBN 978-94-010-1451-9, lire en ligne)
  4. Aldo Mieli, La Science Arabe, Ardent Media, (lire en ligne)
  5. Samsó, Julio (2007). "Biṭrūjī: Nūr al‐Dīn Abū Isḥāq [Abū Jaʿfar] Ibrāhīm ibn Yūsuf al‐Biṭrūjī". In Thomas Hockey; et al. The Biographical Encyclopedia of Astronomers. New York: Springer. pp. 133–4.
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