Évolution insulaire

L'évolution insulaire caractérise la modification spécifique de certaines espèces endémiques, isolées  en particulier, mais pas nécessairement  sur des îles (domaine géographique à échanges extérieurs limités - dispersion faible) qui peuvent être océaniques ou continentales.

Squelette d'éléphant nain de Crète.

Ces espèces, d'aspect similaire à celui de leur ancêtre continental, ont évolué en étant isolées de celui-ci. On parle de syndrome d'insularité pour ces espèces. Il peut se manifester de différentes façons.

Syndrome d'insularité

Il résulte de divers ajustements écologiques (habitat d'une superficie restreinte, peu de ressources), de l'isolement (peu de brassage génétique) et des stratégies adaptatives qui en découlent. Suivant leur situation insulaire, les peuplements présentent différentes manifestations de ce syndrome. Les conséquences de ce syndrome sont relativement faibles pour les espèces ayant un haut potentiel de dispersion, comme certaines plantes, certains reptiles (tortues, lézards) ou les oiseaux. À l'inverse, elles sont plus importantes chez les espèces ayant un faible potentiel de dispersion comme les amphibiens, les serpents, les poissons d'eau douce et les mammifères.

Les manifestations du syndrome d'insularité

Gigantisme insulaire

Un dragon de Komodo, cas de gigantisme insulaire.

Dans le cas du gigantisme insulaire, la nouvelle espèce est nettement plus grande que son ancêtre continental : cela est généralement expliqué par l'absence de certains de ses prédateurs dans son environnement isolé.

Parmi les cas de gigantisme, on peut citer Leithia melitensis, rongeur de Malte, proche du loir commun mais dont le crâne était quatre fois plus long, Amblyrhiza inundata, qui est une espèce éteinte de rongeur géant endémique du banc d'Anguille dans les Petites Antilles qui pesait entre 50 et 200 kilogrammes.

On peut citer, pour la période actuelle, les tortues géantes et le dragon de Komodo.

Nanisme insulaire

Dans le cas du nanisme insulaire, la nouvelle espèce est plus petite que son ancêtre continental ; plusieurs facteurs expliquent le renouvellement naturel de la biodiversité insulaire dans ce sens : absence de certains prédateurs (grands carnivores) qui a pour conséquence une diminution des structures permettant la défense (réduction des moyens de fuite, acquisition d'une petite taille), rareté des ressources alimentaires (difficulté pour un grand animal de trouver suffisamment de nourriture). Les mécanismes de cette évolution en milieu insulaire font généralement appel à deux modèles de génétique des populations, l'effet fondateur et la dérive génétique[1].

Parmi les cas de nanisme, on peut citer le cas de l’éléphant nain de Sicile, dont les crânes fossilisés sont peut-être à l'origine de la légende du Cyclope, de l’Homo floresiensis, probablement issu de l’Homo erectus, sur l'île de Florès, ou encore les mammouths nains de l'île Wrangel ou les mammouths nains des îles de Californie.

Il existe aussi des exemples d'espèces non éteintes, tel le paresseux nain sur l'île Escudo de Veraguas ou le caméléon Brookesia micra de l'île malgache Nosy Hara (en).

Compatibilité entre nanisme et gigantisme

Le grand public s'étonne parfois de voir cohabiter dans la même île des lignées dont certaines évoluent vers des formes naines, alors que d'autres en revanche évoluent vers des formes géantes. Les scientifiques expliquent que les petites espèces y subissent une moindre pression de prédation ou de concurrence alimentaire que sur les continents et donc grandissent (cas du Pika sarde ou du Papagomys de Florès) tandis que les grandes espèces y trouvent moins de ressources alimentaires que sur les continents, donc rapetissent (cas de l’Homo floresiensis)[2].

Le cas particulier des espèces introduites

L'Homme est responsable de l'introduction volontaire ou involontaire d'un très grand nombre d'espèces dans les îles. Or, ces dernières (comme les lacs) sont particulièrement vulnérables aux espèces exotiques envahissantes Selon D. Zarzoso-Lacoste (2013) « Il est aujourd’hui clairement établi que les invasions biologiques constituent la première cause d’extinctions locales ou globales d’espèces en contexte insulaire et provoquent de profonds changements et perturbations au sein de ces écosystèmes (Courchamp et al. 2003; Clavero & Garcıa-Berthou 2005; Blackburn 2004, 2005; Rickett et al. 2005; Duncan & Blackbunrn 2007; Donlan & Wilcox 2008; Sax & Gaines 2008). Ainsi, 80 % des extinctions d’espèces (tous taxons confondus) qui se sont produites depuis 500 ans concernaient des espèces insulaires (197 sur 245 extinctions) (Ricketts et al. 2005; Sax & Gaines 2008; Loehle & Eschenbach 2012). En particulier, parmi les espèces de vertébrés reconnues éteintes durant cette même période, 90 % des 30 espèces de reptiles et amphibiens (Honegger 1981), 93 % des 176 espèces et sous-espèces d’oiseaux (King 1985) et 81 % des 65 espèces de mammifères (Ceballos & Brown 1995) étaient des formes insulaires »[3].

Richesse spécifique

Pour une surface égale, il y a toujours plus d'espèces sur le continent que sur une île, donc plus la surface est élevée, plus le nombre d'espèces est grand.

Amplitude écologique

Les espèces insulaires occupent une plus large gamme d'habitats que sur le continent. Ceci est surement provoqué par des contraintes de prédation et de compétition plus fortes sur le continent.

Densité

Les densités de population sont plus élevées sur les îles que sur des zones semblables sur le continent.

Sédentarité

Les espèces insulaires ont un pouvoir de dispersion plus faible que celles qui occupent des espaces équivalents sur le continent.

Docilité

Les espèces insulaires perdent souvent leur capacité à s'effaroucher après avoir évolué sans pression prédatrice.

Causes possible du syndrome d'insularité

  • Isolement : Plus une île est éloignée du continent moins elle a d'espèces, car elle est loin de la source.
  • Habitat : il y a un manque d'habitat favorable causé par la faible surface d'une île qui limite leur diversité.
  • Compétition : les ressources étant limitées, on observe une compétition très active.

Sources et références

  1. (en) P. Raia, S. Meiri, « The island rule in large mammals: paleontology meets ecology », Evolution, vol. 60, no 8, , p. 1731–1742.
  2. Jacques Blondel, Biogéographie, approche écologique et évolutive, Masson-Elsevier, Paris 1995
  3. Zarzoso-Lacoste, D. (2013). Vers une meilleure compréhension des interactions trophiques directes et indirectes entre prédateurs invasifs et espèces natives au sein des écosystèmes insulaires (Doctoral dissertation, Aix-Marseille).

Voir aussi

Bibliographie

  • Benton, M. J., Csiki, Z., Grigorescu, D., Redelstorff, R., Sander, P. M., Stein, K., & Weishampel, D. B. 2010. Dinosaurs and the island rule : The dwarfed dinosaurs from Haţeg Island. Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology, 293, 438-454.
  • Lomolino, M. V. (1985). Body size of mammals on islands: the island rule reexamined. The American Naturalist, 125(2), 310-316.
  • Lomolino, M. V. (2005). Body size evolution in insular vertebrates: generality of the island rule. Journal of Biogeography, 32(10), 1683-1699.
  • Blondel, J. (1995). Biogéographie, approche écologique et évolutive. ELSEVIER MASSON, 296p.

Articles connexes

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