Musée Rodin

Le musée Rodin est un musée assurant depuis 1919 la conservation et la diffusion de l’œuvre d’Auguste Rodin (1840-1917). À travers ses deux sites, l'hôtel Biron de la rue de Varenne dans le 7e arrondissement à Paris et la villa des Brillants à Meudon (Hauts-de-Seine), l’établissement conserve une collection composée de près de 6 800 sculptures, 8 000 dessins, 10 000 photographies anciennes et 8 000 autres objets d’art. Avec 700 000 visiteurs par an, le musée Rodin compte parmi les musées français les plus importants.

Pour les articles homonymes, voir Rodin (homonymie).

Il a le statut d'établissement public à caractère administratif depuis 1993[1],[2].

Les collections

Le musée conserve des collections d’une grande diversité car Rodin était un artiste collectionneur ; il présente principalement des sculptures et quelques peintures, car les dessins et photographies anciennes ne peuvent, pour des raisons de conservation, être exposés de façon permanente dans la galerie dédiée du premier étage.

Type Nombre Photographié (1) %age
Sculptures6 7973 67454,05
Dessins7 9417 15390,08
Gravures1 1671 14097,69
Photographies10 051 œuvres
sur 17 130
13 42678,38
Peintures20720297,58
Antiquités6 4802 35136,28
Mobiliers25622286,72
Total 2016[3]32 899 œuvres
sur 39 978
28 16870,46

Rodin sculpteur

Le Penseur dans le jardin du musée.

Les sculptures de Rodin sont celles d’un artiste qui choisit de rompre avec les usages de son temps. Parmi ses œuvres de jeunesse, L’Homme au nez cassé apparaît ainsi en décalage par rapport aux standards de l’époque, tandis que l’Age d’Airain renie les artifices traditionnellement utilisés pour privilégier l’expressivité du corps. Cette absence d’artifices, comme la nudité observée chez Le Penseur ou Adam et Ève, a également pour but de garantir l’intemporalité des œuvres de Rodin.
L’artiste se distingue aussi par le caractère monumental de ses créations. Balzac, Les Bourgeois de Calais ou Le Penseur impressionnent par leur puissance celui qui les observe. L’exemple le plus marquant est probablement la Porte de l’Enfer, jamais achevée par l’artiste et surchargée d’éléments parmi lesquels figurent les sujets majeurs de l’œuvre de Rodin (Ugolin, Le Baiser, Le Penseur, Les Trois Ombres).

Rodin peintre et dessinateur

La production graphique de Rodin concerne près de 8 000 créations rattachée à plusieurs périodes : dessins d’observation (paysages de Belgique et d’Italie, puis architecture), représentations imaginaires inspirées par Dante ou Baudelaire, nombreux nus parfois érotiques, ou encore portraits. Il constitue également une collection de dessins d'Honoré Daumier, etc., et de gravures, dont près de 200 gravures japonaises acquises après 1900[4].

Rodin et la photographie

Les quelque 10 000 photographies anciennes conservées au musée (mais rarement exposées pour des raisons de conservation) sont le fruit du grand intérêt porté par Rodin à la photographie qui gagne de l’importance à cette époque.

Le sculpteur collabore avec de nombreux photographes, tels que Eugène Druet, Jacques-Ernest Bulloz, Adolphe Braun, dont certains, comme Edward Steichen, Stephen Haweis, Henry Coles ou Jean-François Limet, appartiennent au courant pictorialiste. Ces derniers dépassent la simple reproduction photographique des œuvres de Rodin pour faire de leurs clichés des œuvres artistiques à part entière[5].

Rodin collectionneur

Pendant les vingt dernières années de sa vie, Rodin constitue une collection hétéroclite, accumulant avec frénésie les objets du passé. Passionné par l’Antique, il glane 6 480 pièces, qui envahissent peu à peu ses lieux de vie et de travail. En 2017, les catalogues en ligne du musée en répertorient 1 311, dont 871 venant d’Égypte, une de Perse, 23 de Grèce ou de Grande Grèce, 64 de Rome, 7 du Levant, 103 de Chine ou du Japon, 23 d'Inde, du Cambodge ou d'Indonésie, 29 d'Amérique centrale ou du sud ou datant du Moyen-Âge.

Rodin, dont le musée expose aussi plusieurs esquisses, aime aussi la peinture et acquiert au cours de sa vie des œuvres de grands maîtres, dont Le Père Tanguy et Les moissonneurs de Vincent van Gogh, Femme nue d'Auguste Renoir ou de François Lemoyne. Il échange également ses œuvres avec celles d'autres artistes comme Claude Monet (Belle-île), Eugène Carrière (11 toiles dont Le théâtre de Belleville), Edvard Munch (Le Penseur de Rodin dans le parc du docteur Linde à Lübeck), Jean-Paul Laurens, Alexandre Falguière, Jules Dalou, Alphonse Legros, Charles Cottet, Fritz Thaulow, Ignacio Zuloaga, John Singer Sargent, ou Jacques-Émile Blanche. Ces œuvres sont visibles au musée.

Camille Claudel (1864-1943)

Camille Claudel a occupé une place importante dans la vie de Rodin, au point de vue artistique comme sentimental. Rodin lui a transmis son savoir, avant de s’en inspirer comme modèle pour plusieurs de ses œuvres (Fugit amor, La Danaïde).

Le talent de la jeune femme est tel qu’elle devient une véritable collaboratrice du maître, travaillant avec lui à la réalisation de certaines de ses créations les plus fameuses, comme la Porte de l’Enfer.
C’est donc en toute logique qu’une salle Camille Claudel est créée à l’hôtel Biron en 1952. Elle reçoit alors plusieurs donations de Paul Claudel, le frère de l’artiste, en particulier L’Âge mûr, Clotho, et Vertumne et Pomone, parmi ses 45 œuvres conservées au musée, dont La Petite Châtelaine.

La collection comporte également des œuvres d'autres amis sculpteurs ou élèves de Rodin comme Albert-Ernest Carrier-Belleuse, Alexandre Falguière, Constantin Meunier, Jules Dalou, Henri Bouchard, Aristide Maillol, Medardo Rosso, Séraphin Soudbinine, Josef Mařatka, Jules Desbois, Antoine Bourdelle ou François Pompon.

Les expositions temporaires

Expositions

  • La sculpture dans l’espace, Rodin, Brancusi, Giacometti (-) : 82 000 visiteurs
  • Rodin et les danseuses cambodgiennes, sa dernière passion (-) : 91 000 visiteurs
  • Rodin, les figures d’Eros (-) : 84 000 visiteurs
  • Camille Claudel, une femme, une artiste (-) : 150 000 visiteurs
  • La Passion à l’œuvre, Rodin et Freud, collectionneurs (-)
    Auguste Rodin, le sculpteur, et Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, partagent une passion commune pour la collection des antiques. Rodin, à sa mort en 1917, laisse plus de 6 000 antiques, tandis que Freud n’en possède pas moins de 3 000 lorsqu’il s’éteint en 1939. L’exposition présente une sélection d’environ 140 antiques, ainsi que de nombreux documents écrits et photographiques qui viennent éclairer ces collections.
  • Corps et décors. Rodin et les arts décoratifs (-)
  • Rodin, la chair, le marbre (-)
  • Rodin, la lumière de l'antique ( - )
  • Mapplethorpe Rodin ( -)
  • Rodin. Le laboratoire de la création (du au )
  • Entre sculpture et photographie ( au )
  • L'Enfer selon Rodin ( au )

Expositions d'art contemporain

Le musée Rodin s’ouvre depuis plusieurs années à l’art contemporain, réactivant ainsi une démarche entreprise dès 1949 (le musée accueillit cette année-là le premier Salon de la jeune sculpture). Après avoir invité Anthony Caro et Eugène Dodeigne dans la Cour d’Honneur du musée, Michel Verjux, Bill Viola, Adel Abdessemed et Mircea Cantor pour les précédentes éditions de la « Nuit des musées », le musée Rodin a accueilli à l’automne 2008 l’artiste Étienne Bossut, qui a investi les lieux en écho à l’exposition La Passion à l’œuvre, Rodin et Freud collectionneurs.

En 2010, une sélection d'œuvres du plasticien belge Wim Delvoye y sont exposées, ainsi qu'un cycle (en partenariat avec le Centre Pompidou) de vidéo-performances d'artistes mettant en scène leur propre corps, parmi lesquels Vito Acconci, Sanja Iveković, Marina Abramovic ou encore Mona Hatoum.

La fin de l'année voit l'exposition Henry Moore, avec une scénographie sur son atelier : sculptures et dessins, du au .

Les deux sites du musée

L'hôtel Biron, à Paris

Vue du fond du jardin

Situé à l’angle de la rue de Varenne et du boulevard des Invalides, dans le 7e arrondissement de Paris, l’hôtel Biron a connu plusieurs occupants depuis l’achèvement de sa construction en 1730 pour Abraham Peyrenc de Moras, seigneur de Saint-Étienne : la duchesse du Maine, belle fille de Louis XIV ; le maréchal de Biron, qui donna son nom à la demeure ; le duc de Charost ; la Légation Pontificale ; l’Ambassade de Russie ; ou encore la Société du Sacré-Cœur de Jésus, congrégation religieuse fondée par Madeleine-Sophie Barat[6]. La future impératrice des Français, Eugénie de Montijo, reçoit son éducation au sein du couvent entre 1835 et 1839.

La Société du Sacré-Cœur de Jésus fit démonter nombre de ses boiseries Louis XV, laissant l’hôtel dans un état alarmant, au moment où elle quitta les lieux en 1905, à la suite de la loi de séparation des Églises et de l'État.

On autorise alors plusieurs artistes à y établir leurs ateliers ; c’est ainsi que Rodin, Jean Cocteau, ou encore Henri Matisse font leur entrée à l’ex-hôtel Biron.

En 1911 l’État achète le domaine tandis que Rodin décide de lui céder ses collections à la condition qu’un musée soit consacré à son œuvre, au sein de l’hôtel ; le projet aboutit en 1919, mais Rodin, mort deux ans auparavant, ne pourra assister à l’ouverture du musée. Avant son ouverture, l'hôtel accueille un temps une œuvre caritative fondée par Isabelle Viviani.

C'est l'architecte du Gouvernement et de la Ville de Paris Henri Eustache, second grand prix de Rome en 1891, qui effectuera les travaux dans l'ancien hôtel devenu couvent afin de le transformer en musée (il existe un portrait photographique dans la notice nécrologique dans L'Illustration du ).

De 2012 à 2015, l'hôtel Biron a été rénové pour rouvrir au public en .

L’hôtel est entouré d’un domaine exceptionnel, en plein cœur de Paris. L’ancienne chapelle XIXe siècle, construite du temps de la congrégation religieuse et restaurée en 2005, accueille une salle d’exposition entièrement rénovée, un nouvel auditorium, ainsi que la billetterie et l’administration du musée.

Le jardin, s’étend sur trois hectares boisés - surface du parc de l'Hôtel Matignon, réputé le plus vaste espace vert privé de Paris - et agrémentés d’un bassin et d’une cafétéria. Les visiteurs s’y promènent au fil des sculptures monumentales de Rodin qui y sont disposées.

Ce site est desservi par la station de métro Varenne.

Musée Rodin de Meudon, la villa des Brillants

Si le site de l’hôtel Biron met en exergue l’œuvre de l’artiste, la visite de Meudon offre un regard beaucoup plus personnel sur le personnage d’Auguste Rodin, dont la tombe est située sur le site.

Il s’agit tout d’abord de la demeure habitée par Rodin et Rose Beuret à partir de 1893, avec ses meubles et les photographies de ses occupants ; on pénètre ainsi dans la vie quotidienne de l’artiste.

En contrebas de cette demeure bourgeoise dont le jardin descend vers la vallée de la Seine, se trouve un bâtiment atypique, le Pavillon de l’Alma : Rodin y avait exposé ses œuvres à l’occasion de l’exposition universelle de 1900, et l’avait acquis pour le faire reconstruire à Meudon. D’abord atelier-musée jouxtant la maison, il fut ensuite déplacé un peu plus bas, derrière la façade récupérée du château d'Issy, incendié en 1871.

Ce pavillon a été remplacé en 1930 par un vaste bâtiment d'exposition en béton. La façade du château d'Issy a été conservée, servant de décor au Penseur qui surplombe la tombe de l'artiste et de son épouse.

C’est à cet endroit, où Rodin sculptait, que sont aujourd’hui disposées les œuvres montrées au public. On y voit de nombreux originaux en plâtre, à partir desquels ont été fondus ses bronzes les plus célèbres : ceux du Baiser, du Monument à Victor Hugo, de Balzac, des Bourgeois de Calais ou encore de la Porte de l’Enfer sont ainsi conservés à Meudon. C’est donc à Meudon que le visiteur se rapproche le plus de l’état original de l’œuvre de Rodin. Le domaine de la villa des Brillants était un lieu de création important, animé par une cinquantaine de praticiens dont les différents ateliers étaient installés sur des parcelles achetées par Rodin.

Le musée Rodin de Meudon est ouvert du vendredi au dimanche de 13h à 18h.

Rayonnement du musée

Fréquentation

Le musée Rodin accueille aujourd’hui autour de 700 000 visiteurs par an. Les touristes étrangers représentent la majorité du public. Il s’agit de l’un des musées les plus fréquentés de France (en 8e position en 2007)[7].

Rayonnement international

La renommée mondiale de l’œuvre de Rodin pousse le musée à maintenir une politique internationale active.

Participation à l'étranger

Collaboration avec d’autres établissements consacrés à Auguste Rodin

  • Le musée Rodin de Séoul, Corée (depuis 1999) : une trentaine de bronze, dont une Porte de l’enfer.
  • Le musée Rodin de Bahia, Brésil (depuis 2010), dont les collections seront constituées par des dépôts d’œuvres accordés par les musées de France
  • Le musée Rodin de Philadelphie, qui doit tout au collectionneur Jules Matsbaum (1872-1926) qui meurt trois ans avant l’ouverture de l’établissement en 1929.

Sculptures renommées

Films tournés au musée Rodin

Notes et références

  1. Dominique Jamet (dir.), Jean Fosseyeux (dir.) et Christian Pattyn (dir.), Les établissements publics sous tutelle du ministère de la Culture : Histoire administrative, Comité d'histoire du ministère de la Culture et La Documentation française, coll. « Travaux et documents » (no 18), Paris, 2004, 346 p. (ISBN 2-11-094279-7), « Historique des établissements publics », p. 46.
  2. Décret no 93-163 du 2 février 1993 relatif au musée Rodin, JORF no 31 du 6 février 1993, p. 2023–2025, NOR MENB9200456D.
  3. Base de données interne des collections, selon les annexes 5 et 8 combinées du rapport d'activités 2016, pp. 56 et 62.
  4. Exposition « Rodin, le rêve japonais », Musée Rodin, site musee-rodin.fr.
  5. Romane Fraysse, « Rodin en son jardin, une jolie promenade au gré des sculptures et de leurs tirages | Arts in the City »
  6. Histoire de l'hôtel Biron
  7. Muséostat 2007
  8. « Monument à Victor Hugo – Paris, 75016 », sur e-monumen.net/ (consulté le ).
  1. À noter qu'une autre version de l'œuvre se trouve dans le 16e arrondissement de Paris, à l'interection de l'avenue Henri-Martin et de l'avenue Victor-Hugo[8].

Annexes

Bibliographie

  • Catherine Chevillot, Hélène Marraud et Hélène Pinet, Rodin. Le Laboratoire de la création, Éditions Faton, Dijon, 2014. (ISBN 978-2-87844-201-4)
  • Judith Cladel, Rodin, sa vie glorieuse et inconnue, Grasset, Paris, 1936.
  • Gustave Coquiot, Rodin à l’hôtel Biron et à Meudon, Ollendorff, Paris, 1917.

Liens externes

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