Mossad

Le Mossad (nom complet : המוסד למודיעין ולתפקידים מיוחדים - HaMossad leModiʿin uleTafkidim Meyuḥadim, ce qui signifie « Institut pour les renseignements et les affaires spéciales », Mossad signifiant « Institut ») est l’une des trois agences de renseignement d’Israël, avec le Shabak (plus connu sous le nom de « Shin Bet », qui est le service de sécurité intérieure) et l'Aman (chargé de la sécurité militaire).

Mossad
המוסד למודיעין ולתפקידים מיוחדים

« Quand la prudence fait défaut le peuple tombe, le salut est dans le grand nombre des conseillers. » Proverbes 11:14
(Ancienne devise : « Par la ruse tu fais la guerre » Proverbes 24:6)[2]

Création Décembre 1949
Juridiction Bureau du Premier ministre
Siège Tel Aviv, Israël
Coordonnées 32° 08′ 40″ N, 34° 48′ 16″ E
Employés (Classifié) 7 000 estimés[3]
Budget annuel (Classifié) 2,7 milliards de $ estimés[3]
Ministre responsable Naftali Bennett (Premier ministre)
Direction David Barnea (en)
Site web http://www.mossad.gov.il
Géolocalisation du siège
Géolocalisation sur la carte : Israël

Contrairement au gouvernement, au parlement (Knesset), à l'Armée de défense d'Israël (Tsahal) et à l'agence de sécurité intérieure (Shin Bet), les objectifs, la structure et les pouvoirs du Mossad sont exemptés des lois constitutionnelles de l'État. Son activité est soumise à des procédures secrètes qui n'ont jamais été révélées. Son directeur (appelé le Ramsad, abréviation de « Rosh Ha-Mosad »), actuellement David Barnea, relève directement et uniquement du Premier ministre.

Objectifs

Le Mossad fait partie des agences de renseignement israéliennes comme, entre autres, l’Aman (renseignement militaire) et le Shabak (sécurité intérieure), mais son directeur ne rend compte — contrairement au Shabak — qu’au Premier ministre, qui le nomme et peut proroger son mandat (cas de Meïr Dagan) et autorise seul les éventuels assassinats - « executions » - (il peut éventuellement en informer le ministre de la Défense)[4]. Le domaine d’action du Mossad recouvre le renseignement, les opérations spéciales et la lutte anti-terroristes, à l’extérieur d’Israël et des territoires palestiniens occupés (qui sont de la responsabilité du Shabak, autrefois Shin Beth, service intérieur de contre-espionnage et d’antiterrorisme). Son état-major est basé à Tel Aviv où environ 1 500 personnes seraient employées.

Le rôle et la fonction du Mossad sont comparables à ceux de la DGSE, du Secret Intelligence Service britannique ou de la CIA. Mais il possède aussi ses particularités liées à l’histoire et la politique d'Israël ; il est ainsi, par exemple, chargé de faciliter l’aliyah (retour en Israël) lorsqu’elle est interdite.

Histoire

Le Mossad est né des survivances du SHAY, le service de renseignement de la Haganah, une milice juive clandestine chargée de la sécurité des habitants juifs en terre de Palestine depuis le début du XXe siècle. La Haganah (« défense » en hébreu) a notamment constitué le noyau dur de l’armée israélienne à la suite de la création de l’État d’Israël en .

Les agents de renseignement de la « section arabe » du Palmakh et ceux de l'Alyah Bet (appareil d'immigration clandestine de la Haganah avant 1948, devenu Mossad Le'aliyah Bet) intègrent le Mossad aussi à la création de l’État[5].

En , Reuven Shiloah, un proche collaborateur de David Ben Gourion, propose la création d’une institution centrale pour organiser et coordonner les services de renseignements et de sécurité. Le , Ben Gourion autorise l’établissement de cet institut de coordination s’occupant du département politique et coordonnant les services de sécurité intérieure de renseignement militaires : le Mossad est officiellement né ce jour-là.

Assassinats, enlèvements et opérations célèbres

En 1960, le Mossad enlève le criminel de guerre nazi Adolf Eichmann, à Buenos Aires en Argentine, après plusieurs années de traque dirigées par Rafi Eitan. Eichmann fut conduit en Israël pour y être jugé et condamné à mort. Une opération similaire prévoyait la capture de Joseph Mengele, mais elle échoua.

Eli Cohen est un célèbre espion israélien, recruté par le Mossad dans les années 1960. Ayant infiltré les hautes sphères du gouvernement syrien, Eli Cohen transmit des informations stratégiques à son pays pendant deux ans avant d’être démasqué. Malgré les protestations internationales, il fut pendu sur la place publique.

Un autre agent israélien, Wolfgang Lotz, se lia d’amitié avec des hauts gradés de l’armée et de la police égyptienne, obtenant ainsi des informations précises sur les sites de missiles et sur le projet de missile balistique développé par des scientifiques allemands. Entre 1962 et 1963, une opération d’intimidation visant les Allemands obtient un grand succès, notamment avec l’assassinat de plusieurs responsables clés du projet égyptien.

En , le Mossad déroba sept vedettes commandées à la France, mises sous embargo par le général de Gaulle. L’opération fut popularisée comme l’affaire des vedettes de Cherbourg.

Durant les années 1970 sous l’impulsion du Premier ministre Golda Meir, le Mossad assassina plusieurs membres du groupe terroriste Septembre noir, responsable de la prise d’otages et du massacre de 11 athlètes israéliens aux Jeux olympiques de Munich en 1972. Ces opérations sont placées sous la direction de Michael Harari.

Selon Richard Labévière, le Mossad pourrait être derrière la tuerie d’Ehden perpétrée au Liban en 1978, qui avait vu le dirigeant chrétien Tony Frangié et une trentaine d'autres personnes, dont son épouse et sa fille de trois ans, assassinés. L'objectif aurait été de favoriser Bachir Gemayel, proche d’Israël, dans son ascension vers le pouvoir en éliminant l'un de ses principaux rivaux[6].

Un autre enlèvement consista à ramener Mordechaï Vanunu en Israël, après qu’il eut révélé en 1986 à un quotidien anglais l’existence d’ogives nucléaires dans les sous-sols de la centrale nucléaire de Dimona, en plein désert du Néguev (sud d’Israël).

En , une unité spéciale envahit une résidence sous surveillance de Tunis et y tue Abou Jihad, bras droit de Yasser Arafat et présumé responsable de la planification d’attentats contre Israël.

Gerald Bull, scientifique canadien et concepteur du projet de « Super Gun » (canon à très longue portée) pour l’Irak, est assassiné dans son appartement bruxellois en , provoquant ainsi l’abandon du programme. Le Mossad fait partie des services soupçonnés d'avoir commis cet assassinat.

Salfati Ernest Pinhas âgé de 22 ans Rav Samal "Officier" dans l'armée de Tsahal sera capturé et fait prisonnier en Syrie en 1973 pendant la guerre de yom kippour, à sa libération il intègre le Mossad y est formé et son rôle sera déterminant dans l'arrestation en 1992 au Liban de deux dirigeants importants du "Hamas"

Cependant, le Mossad connut également certains échecs retentissants.

Le , à Lillehammer (Norvège), dans le cadre de l’opération Colère de Dieu, le Mossad assassine par erreur Ahmed Bouchiki, un serveur marocain, présentant une ressemblance frappante avec Ali Hassan Salameh, cerveau du massacre de 1972. Les agents impliqués dans cette opération sont arrêtés par la police. Cinq d’entre eux sont reconnus coupables et condamnés à de courtes peines de prison, bien que le gouvernement israélien ait nié avoir une quelconque responsabilité dans cette opération. Cependant en 1996, Israël versa à la famille Bouchiki des dommages-intérêts. Plus récemment, à la suite de la controverse sur la responsabilité des services de renseignements dans l’assassinat d’Yitzhak Rabin en , le directeur général du Mossad, Shabtaï Shavit est poussé à la démission. Le général Danny Yatom lui succède.

Le , deux agents passent la frontière entre Israël et la Jordanie munis de passeports canadiens, pour vaporiser[7] un poison sur l’un des leaders politiques du Hamas, Khaled Mechaal. Après avoir exécuté leur mission, les deux agents sont découverts. La Jordanie négocie leur libération contre l’antidote du poison, qui permettra au numéro deux du Hamas de survivre, et la libération du fondateur du Hamas, le cheikh Ahmed Yassine.

Agents célèbres

  • Otto Skorzeny, ingénieur et ancien commando SS devenu agent du Mossad sous la responsabilité de Rafael Eitan
  • Wolfgang Lotz (1921-1993), agent d’origine allemande infiltré en Égypte
  • Eli Cohen (1924-1965), agent d’origine égyptienne, infiltré pendant trois ans en Syrie
  • Reuven Merhav (1936-), diplomate et expert de l'islam et du Moyen-Orient
  • Tzipi Livni, ancienne ministre des Affaires étrangères - ancienne membre de l’unité d’assassinat du service (Kidon)
  • Rafael Eitan, ancien chef des opérations de l’Institut, impliqué dans l'enlèvement d'Eichmann, la mort d’Ali Hassan Salameh, l’affaire Pollard, notamment.
  • Victor Ostrovsky (1949-), agent licencié de l'organisation après 3 ans de formation et 3 mois de service. Il a publié ses mémoires dans un livre où il attaque certains dirigeants de l'organisation et où il parle des Sayanim
  • Cheryl Ben Tov, agente qui attira Mordechai Vanunu dans un piège à Rome
  • Michael Ross (1965-), ancien de la branche clandestine du Mossad, 1988-2001
  • Zvi Henkine, agent d’origine française, directeur adjoint du Mossad ayant joué un rôle important dans l’affaire des frégates[réf. nécessaire]
  • Salfati Pinhas, officier de Tsahal, d'origine française[réf. nécessaire]

Féminisation

Au sujet de la féminisation de l'agence, Le Figaro écrit : « Le Mossad a longtemps enflammé les imaginations à l'étranger ». Historiquement, ses membres féminines étaient utilisées comme des appâts. De nos jours, l'accent est davantage mis sur « l'égalité des sexes, leurs performances et la qualité de leur travail ». En 2021, 40 % des membres du Mossad sont des femmes et 30 % dirigent des unités ; en 2019, 47 % des nouvelles recrues sont des femmes. Des dispositifs ont été mis en place afin de les aider à mener leur carrière en parallèle de leur vie familiale[8],[9].

Organisation

Départements

Le Mossad se compose de 8 divisions, mais le détail de l’organisation interne de l’agence est classifié.

  • Renseignement : la division du renseignement est la plus importante. Elle est responsable des opérations d’espionnage à l’étranger à travers ses antennes officielles ou clandestines. Ce département se divise lui-même en bureaux, chacun d’entre eux étant responsable d’une zone géographique, des antennes qui s’y trouvent, et des agents qui y opèrent.
  • Recherche & Étude : la division de la Recherche est responsable de l’interprétation des renseignements. Elle fournit un rapport quotidien, un bulletin hebdomadaire et un carnet mensuel détaillé. Ce département se divise en 15 zones géographiques qui sont les États-Unis, le Canada, l’Europe de l'Ouest, la CEI, la Chine, le Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), la Libye, l’Égypte, le reste de l'Afrique, l’Irak, la Jordanie, la Syrie, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Iran. Un bureau annexe suit l’évolution des projets d’armement des pays voisins.
  • Guerre psychologique : cette division, appelée Lohamah Psichologit, s’occupe de la guerre psychologique, de la propagande/contre-propagande et des opérations de mystification/démystification.
  • Technologie et techniques : division responsable la création et du développement de technologie et de technique pour le Mossad.
  • Planification, coordination & relations internationales : la division des relations internationales s’occupe des relations et des opérations communes avec les agences des pays amis, mais aussi avec les pays n’entretenant pas de relations normalisées avec l’État d’Israël. Dans les antennes de grande importance comme Paris, le Mossad dispose, sous le couvert de l’ambassade, d’un responsable affilié à la division de l’Information et d’un responsable des Relations Internationales.
  • La division des opérations spéciales : la division des opérations spéciales (METSADA en hébreu) conduit les opérations paramilitaires, de sabotage et d’assassinat.
  • Formation.
  • Administration.

Directeurs

Directeurs du Mossad
PortraitIdentitéPériodeDurée
DébutFin
Reuven Shiloah
(he) ראובן שילוח
( - )
3 ans
Isser Harel
(he) איסר הראל
( - )
11 ans
Meir Amit
(he) מאיר עמית
( - )
5 ans
Zvi Zamir
(he) צבי זמיר
(né en )
6 ans
Yitzhak Hofi
(he) יצחק חופי
( - )
8 ans
Nahum Admoni
(he) נחום אדמוני
(né en )
8 ans
Shabtai Shavit
(he) שבתי שביט
(né en )
6 ans
Danny Yatom
(he) דני יתום
(né en )
2 ans
Ephraim Halevy
(he) אפרים הלוי
(né en )
4 ans
Meïr Dagan
(he) מאיר דגן
( - )
8 ans
Tamir Pardo
(he) תמיר פרדו
(né en )
5 ans
Yossi Cohen
(he) יוסי כהן
(né en )
5 ans et 4 mois
David Barnea (en)
(he) דוד ברנע
(né en )
En cours3 mois

Directeurs-adjoints

Slogan

Le premier slogan du Mossad était : « be-tachbūlōt ta`aseh lekhā milchāmāh » (en hébreu : בתחבולות תעשה לך מלחמה). C'est un verset issu de la Bible (Livre des Proverbes 24:6) : « Par la ruse tu fais la guerre. » (traduction de Louis Segond). Le slogan a été ensuite modifié pour un autre passage des Proverbes : « be-'éyn tachbūlōt yippol `ām; ū-teshū`āh be-rov yō'éts » (en hébreu : באין תחבולות יפול עם, ותשועה ברוב יועץ, Livre des Proverbes 11:14), qu'on peut traduire par : « En l'absence de directives, le peuple tombe ; le salut réside dans un grand nombre de conseillers. »

Le logo du Mossad a été conçu par Shlomo Cohen-Abarbanel, un agent qui opéra en Egypte entre 1952 et 1954, et qui était réputé pour ses talents graphiques[10]. Il contribua également à l'élaboration de faux documents d'identité pour d'autres agents.

Terminologie

  • Apam : ensemble des moyens et procédés permettant d'assurer la sécurité du renseignement tels que le contre-renseignement et la contre-filature.
  • Sayan : agent passif appelé plus communément « agent dormant », établi en dehors d’Israël, prêt à aider les agents du Mossad en leur fournissant une aide logistique.
  • Kidon (mot signifiant baïonnette en hébreu) : service spécial du Mossad, petite unité chargée des éliminations physiques.
  • Katsa : officier du renseignement.
  • Bodel : courrier
  • Yhalom, yahalomin : spécialiste, spécialistes en communications
  • Mabuah : informateur non-juif
  • Pakam : ordre de mission
  • Hamisrad : (« le bureau ») dénomination du service par ses employés, le mot « Mossad » n’étant jamais utilisé

Notes et références

  1. מיתוס המוסד: כשארגון ביון ומיתוג נפגשים, Ynet, 31 October 2011.
  2. מיתוס המוסד: כשארגון ביון ומיתוג נפגשים, Ynet, 31 October 2011.
  3. (en) Chaim Levinson, « A golden age for the Mossad : More targets, more ops, more money » , sur Haaretz, (consulté le ).
  4. Marc Henry, L'autonomie du Mossad mise en cause en Israël, Le Figaro, 2 mars 2010
  5. Ilan Lévy Journaliste, « Matti Friedman : « La « section arabe » préfigure de manière importante le Mossad » », sur Actualités Juives (consulté le )
  6. « La tuerie d’Ehden, ou la malédiction des Arabes chrétiens. », sur www.lesclesdumoyenorient.com,
  7. (en) David Blair, « Khaled Meshaal: How Mossad bid to assassinate Hamas leader ended in fiasco », sur telegraph.co.uk, (consulté le ) : « They ambushed Mr Meshaal on a street corner and sprayed poison into his left ear, inflicting instant paralysis and, so they hoped, death within 48 hours »
  8. Thierry Oberlé, « David Barnea, un réformateur discret à la tête du Mossad », Le Figaro, , p. 13 (lire en ligne).
  9. Thierry Oberlé, « "Les femmes espions ont des capacités que les hommes n’ont pas" », Le Figaro, , p. 13 (lire en ligne).
  10. Ronen Bergman, Raise and kill first, p.33

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Ronen Bergman (trad. de l'anglais par Johan-Frédérik Hel Guedj), Lève-toi et tue le premier : L'histoire secrète des assassinats ciblés commandités par Israël [« Rise and Kill First »], Paris, Éditions Grasset, , 944 p., 15,3 x 4,5 x 23,5 cm (ISBN 978-2-246-82139-7, présentation en ligne)
  • Uri Dan, Mossad, 50 ans de guerre secrète, Presses de la Cité, 1995
  • David Elkaïm et Éric Denécé, Les services secrets israéliens, Tallandier, 2014.
  • Frédéric Encel, Géopolitique d’Israël : dictionnaire pour sortir des fantasmes, Seuil, Paris, 2004, (ISBN 2020638207)
  • Ephraim Halévy, Mémoires d’un homme de l’ombre, les coulisses de la politique internationale au Moyen-Orient par l’ex-directeur du Mossad, Albin Michel, Paris, , (ISBN 2226174958)
  • Isser Harel, La Maison de la rue Garibaldi, le chef des services secrets israéliens raconte la recherche et la capture de Adolf Eichmann, Robert Laffont, 1976
  • Claire Hoy et Victor Ostrovsky, Mossad, un agent des services secrets israéliens parle, Presses de la Cité, 1990
  • Peter Man et Uri Dan, Capturer Eichmann, témoignage d’un agent du Mossad, Édition N̊1, 1987
  • Michael Ross, The Volunteer, the incredible true story of an Israeli spy, Skyhorse Publishings,
  • Christian Salignon, Journal des actions internes, Filippachi, 1987
  • Gordon Thomas, Histoire secrète du Mossad, de 1951 à nos jours, Nouveau Monde, , (ISBN 2847361588)
  • Gordon Thomas, Mossad : les nouveaux défis, Nouveau Monde, , (ISBN 284736191X)

Filmographie

Lien externe

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