Meurtre de Mireille Knoll

Le meurtre de Mireille Knoll a été commis le dans le 11e arrondissement de Paris. Mireille Knoll, âgée de quatre-vingt-cinq ans et rescapée de la Shoah, a été poignardée à son domicile de l'avenue Philippe-Auguste. Dans les jours qui ont suivi, deux suspects ont été mis en examen pour meurtre antisémite.

Ne doit pas être confondu avec Affaire Sarah Halimi.
Pour les articles homonymes, voir Knoll (homonymie).

Meurtre de Mireille Knoll
Type Meurtre antisémite
Pays France
Localisation Paris (11e arrondissement)
Coordonnées 48° 51′ 13″ nord, 2° 23′ 34″ est
Date
Bilan
Morts 1
Répression
Arrestations 2

Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Paris
Géolocalisation sur la carte : 11e arrondissement de Paris

Survenu presque un an après l'homicide de Sarah Halimi dans le même arrondissement, et le même jour que les attaques terroristes de Carcassonne et Trèbes, l'événement a suscité un vif émoi.

Faits

Le vendredi vers 18 h 30, les pompiers entrent chez elle après qu'un voisin a signalé un incendie dans son appartement. Le corps sans vie et en partie brûlé de Mireille Knoll est étendu sur son lit. Elle a reçu onze coups de couteau[1].

En mai 2020, le parquet de Paris requiert un procès des deux suspects pour meurtre à caractère antisémite[2].

Victime

Mireille Knoll naît le à Paris. Avec sa mère, elle quitte la ville peu de temps avant la rafle du Vélodrome d'Hiver en et se réfugie au Portugal grâce au passeport brésilien hérité de son père. Après la guerre, elle épouse un survivant d'Auschwitz et le couple part s'installer au Canada, avant de revenir plus tard à Paris. Son mari tient alors un atelier de vêtements imperméables dans le Sentier, un des quartiers juifs de la capitale. Le couple a deux fils.

Son époux meurt au début des années 2000. En 2018, Knoll, handicapée par la maladie de Parkinson, ne peut plus sortir de chez elle autrement qu'en fauteuil et accompagnée de son auxiliaire de vie[1].

Enquête et suites judiciaires

Appelés sur place, les techniciens du Laboratoire central de la préfecture de police relèvent cinq départs de feu dans l'appartement. Le caractère antisémite du meurtre est retenu par la justice le . Le voisin de Madame Knoll, Yacine Mihoub, 28 ans, est rapidement soupçonné, arrêté et mis en garde à vue. Il a été condamné pour avoir agressé sexuellement, en , la fille âgée de douze ans de l'aide-soignante de Mireille Knoll, et poursuivi pour des violences et des menaces de mort.

Un deuxième suspect est arrêté près de l'opéra Bastille. Les deux hommes s'accusent alors mutuellement d'avoir porté les coups[1]. Tous deux sortaient de prison[3]. Le second suspect, Alex Carrimbacus, 21 ans, qui a rencontré son complice allégué en prison, a un long casier judiciaire[4]. Il affirme que « Yacine a reproché aux Juifs d'avoir des moyens financiers et une bonne situation avant de poignarder l'octogénaire sur son lit médicalisé en criant "Allahou akbar"[5] ».

Début , la mère de Mihoub est soupçonnée d'avoir nettoyé le couteau et fait disparaître les verres dans lesquels Mireille Knoll avait offert du porto à ses assassins[6],[7]. Elle est mise en examen pour « destruction ou modification des preuves d'un crime »[7].

Selon Le Parisien, qui a consulté l'audition policière effectuée le , le suspect Alex C. revient sur les déclarations faites pendant sa garde à vue. Il déclare que Yacine M. n’aurait finalement pas reproché à la victime « les moyens financiers et la bonne situation des Juifs », et concernant le caractère antisémite au crime, son avocat « n’exclut pas de demander une requalification des faits[8]. »

Les policiers explorent aussi la piste du crime crapuleux, ou d'une possible vengeance pour la condamnation de Mihoub à la suite de son agression de la fille de l'aide-soignante de Mireille Knoll[8].

Après que les deux suspects ont fait appel devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris de leur renvoi devant les assises pour « meurtre sur personne vulnérable et commis en raison de la religion de la victime », la cour d'appel de Paris confirme le 19 novembre 2020 le caractère antisémite du meurtre de Mireille Knoll[9].

Réactions

L’événement provoque de vives réactions au sein de la communauté juive - où il est rapproché de l’affaire Sarah Halimi[10] — puis au sein du monde politique.

Monde politique

Le président de la République française Emmanuel Macron fait part de son « émotion devant le crime abominable ». Le , lors de l'hommage national au colonel Arnaud Beltrame égorgé par un djihadiste, le président français cite Mireille Knoll, « assassinée parce qu'elle était juive » et victime du même « obscurantisme barbare » que l'officier[11]. Quelques heures plus tard, il assiste à ses obsèques au cimetière parisien de Bagneux (Hauts-de-Seine) « à titre personnel, en soutien à la famille[11] ». Les enfants de Mireille Knoll sont ensuite reçus à l'hôtel Matignon par le Premier ministre, Édouard Philippe. Celui-ci, devant l'Assemblée nationale, évoque le meurtre de Mireille Knoll, « un assaut d'une infâme brutalité », reflet de cet « antisémitisme qui ne passe pas, qui demeure, se transforme, reparaît, mute[12] ».

Marches blanches

Marche blanche pour Mireille Knoll à Strasbourg le .
Marche blanche pour Mireille Knoll le à Paris.
« Mireille n'était qu'amour » proclame le panneau.

À l’appel du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et de la plupart des partis politiques[1], une marche blanche est organisée à Paris le soir du mercredi , jour de l'hommage national au colonel Arnaud Beltrame.

Francis Kalifat, président du CRIF, indique que Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ne sont pas les bienvenus à l’hommage organisé. Il a déclaré que la présence du chef de La France insoumise n’était pas souhaitée en raison de son soutien au boycott d’Israël (BDS) et que lors de l’université d’été du Front de gauche en 2014, qu'il coprésidait, il avait « félicité la jeunesse française qui avait su selon lui se mobiliser avec une discipline parfaite lors de manifestations en soutien aux Palestiniens durant la guerre à Gaza ». Lors de ces manifestations, des incidents avaient eu lieu dans Paris et à Sarcelles aux cris de « Mort aux Juifs[13] ».

Malgré ce souhait, les deux personnalités politiques confirment leur présence[14] et prennent part au cortège.

La Conférence des évêques de France « encourage tout un chacun à se joindre à la marche blanche », et fait part de « sa profonde tristesse devant l’horreur » du meurtre de Mireille Knoll et « en assurant de son soutien et de sa prière sa famille et toute la communauté juive, encore une fois touchée, en raison de sa religion[15] ». Des rassemblements similaires sont organisés dans toute la France[16].

Plusieurs milliers de participants se rassemblent dans la soirée place de la Nation, en présence des ministres Gérard Collomb et Marlène Schiappa, de diverses personnalités politiques comme Anne Hidalgo, maire de Paris, Stéphane Le Foll et Laurent Wauquiez, et du philosophe Alain Finkielkraut. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon sont bien là, mais leur présence suscite des échauffourées.

Mélenchon et les députés de La France insoumise qui l’accompagnent sont pris à partie par des membres de la Ligue de défense juive (LDJ) et d'autres manifestants qui scandent « Insoumis dehors » et « collabos » alors qu'ils cherchent à rejoindre le cortège boulevard Voltaire. Protégés par les CRS, ils finissent par quitter la manifestation.

Le Pen est, elle aussi, la cible de huées. Après s'être réfugiée derrière un car de CRS, elle rejoint la fin du cortège et termine la manifestation sous la protection d'un service de sécurité, composé en partie de militants de la LDJ. Ces débordements sont déplorés par la plupart des participants. La marche se termine dans le calme devant le domicile de Mireille Knoll, où sont déposés fleurs, bougies et messages.

Une Marseillaise est spontanément entonnée avant que les manifestants ne se séparent[17].

Références

  1. « Ce que l’on sait du meurtre de l’octogénaire juive Mireille Knoll », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  2. « Dans l’affaire Mireille Knoll, le parquet de Paris réclame un procès pour meurtre à caractère antisémite », sur Le Monde, .
  3. « Mort de Mireille Knoll : ses meurtriers présumés sortaient de prison », lemonde.fr, .
  4. Voir sur lexpress.fr.
  5. Voir sur francetvinfo.fr.
  6. « La voisine de la vieille dame et mère d'un des suspects mise en examen », 20minutes.fr, .
  7. « La mère d'un suspect mise en examen », lefigaro.fr, .
  8. Le mobile antisémite remis en doute par un suspect, Le Parisien, .
  9. « Le caractère antisémite du meurtre de Mireille Knoll confirmé en appel », sur Le Parisien,
  10. (en) Adam Nossiter. A Survivor Of the Nazis Is Killed In Her 80s. The New York Times, mars , p. A7.
  11. AFP, « Macron s’est rendu aux obsèques de Mireille Knoll », Le Figaro, .
  12. « Marche blanche pour Mireille Knoll : Édouard Philippe applaudi par toute l'Assemblée », huffingtonpost.fr, .
  13. Voir sur leparisien.fr.
  14. Mathilde Siraud, « Mélenchon et Le Pen participeront à la « marche blanche » pour Mireille Knoll en dépit du refus du Crif », Le Figaro, .
  15. Jean-Marie Guénois, « Les évêques de France invitent les catholiques à se joindre à la marche blanche pour Mireille Knoll », Le Figaro, .
  16. « Rassemblements à la mémoire de Mireille Knoll », Fondation pour la Mémoire de la Shoah, .
  17. Cécile Bouanchaud et Olivier Faye, « Marche pour Mireille Knoll : un message d’unité gâché par des échauffourées », sur lemonde.fr, (consulté le ).

Articles connexes


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