Mesure de la longitude

La mesure de la longitude révèle un écart est ou ouest par rapport à un axe nord-sud de référence. C'est une mesure complémentaire à celle de la latitude, essentielle pour la navigation. Plus complexe à réaliser, la mesure de la longitude fut un enjeu scientifique, technologique et économique majeur du XVIIIe siècle, en particulier pour les Anglais et les Hollandais, grands conquérants des mers.

Historique

De longue date les marins savaient aisément mesurer la latitude grâce aux étoiles ou à l'aide d'un sextant, mais jusqu'au XVIIIe siècle il leur était difficile de mesurer la longitude avec exactitude, ce qui était un problème majeur pour les trajets en haute mer. Le problème est que la Terre tourne sur elle-même, à 464,99 m/s à l’Équateur. La mesure de longitude est très difficile à effectuer si l'on ne possède pas de montre précise, car la Terre pivote d'un tour en 86 164 s (jour sidéral).

Les solutions antérieures au XVIIIe siècle

Les ouvrages de cette époque indiquaient encore comme méthodes possibles pour résoudre le problème des longitudes :

  • L'observation d'une éclipse dont les différentes phases sont repérées en heures du méridien de Paris, dans les recueils astronomiques. Pour résoudre un problème qui se pose chaque jour, ce phénomène est trop peu fréquent.
  • L'observation d'une occultation d’étoile.
  • L’utilisation de l'éclairement et de l'obscurcissement des taches de la Lune durant les progrès de la lunaison.
  • L'observation des éclipses des satellites de Jupiter, que Galilée avait découverts au nombre de quatre, dès 1610. Ces éclipses se produisent plusieurs fois par jour.
  • Le mouvement d'une tache de Jupiter dont on avait reconnu qu'elle achevait son tour en neuf heures.

L'observation de ces phénomènes réclamaient des lunettes astronomiques puissantes dont les observatoires commençaient à peine à être équipés au XVIIe siècle.

Le quartier anglais, apparu vers 1600, constituait un notable progrès sur l'arbalestrille.

On fit aussi de vaines tentatives pour conserver à bord l'heure du méridien de référence au moyen d'horloges, de sabliers de 24 heures, de clepsydres à eau et à mercure, d'horloges à balancier suspendues à la Cardan, mais ces instruments de mesure manquaient de précision : à l'équateur, une erreur d'un dixième de seconde correspond à une erreur de 46 m !

Les Hollandais et les Anglais, très tournés vers la mer, sont évidemment prêts à investir des sommes importantes pour résoudre ce problème de repérage en mer. En 1714, le Parlement britannique promit une récompense considérable à qui trouverait une solution acceptable au problème.

Les distances lunaires

La construction en 1731 de l'octant, à double réflexion, d'Hadley, qui a servi de base aux sextants modernes, permit de donner aux observations une précision qui dépassait de beaucoup ce qu'on avait obtenu jusque-là. Avec la création de l'octant devait débuter l'ère des distances lunaires, étape importante vers une solution satisfaisante du problème des longitudes.

La Lune se déplace relativement vite dans le champ des étoiles - elle fait un tour sidéral en 27,3 jours moyens environ, soit un déplacement quotidien de 13,2°. Sa distance angulaire aux autres astres varie donc constamment. La variation horaire de cette distance est maximum pour les astres qui sont placés sur la trajectoire du centre de la Lune ou pratiquement à proximité tant que la distance reste assez grande, c'est-à-dire pour le Soleil, les étoiles zodiacales et les planètes. Supposons donc que, pour un lieu donné (Greenwich par exemple), on ait calculé des tables donnant de 3h en 3h de temps moyen, la distance de la Lune aux astres précités, il devient possible de se situer en longitude. Comme la Lune est relativement proche de la Terre, elle ne se projette pas au même endroit du ciel suivant le point de la Terre d'où on l'observe. Les distances lunaires sont donc calculées pour l'observateur situé au centre de la Terre. Dans le lieu dont on veut déterminer la longitude, on observera au sextant la distance angulaire entre la Lune et le Soleil ou un astre figurant dans les tables de la Lune. On en déduira la distance angulaire vraie au même instant pour un observateur situé au centre de la Terre. Les tables de la Lune nous permettront alors de déterminer par interpolation pour quelle heure temps moyen de Greenwich AHmp a lieu la distance angulaire vraie que nous venons de calculer.

Ayant fait un calcul d'heure du lieu AHmg au moment de l'observation de la distance, la comparaison de cette heure et de l'heure simultanée de Greenwich AHmp donnera la longitude du lieu par rapport à Greenwich, G = AHmp - AHmg.

On remarquera que cette méthode ne suppose pas un garde-temps, conservant l'heure du méridien origine.

Il semble que la méthode des distances lunaires fut utilisée pour la première fois en 1749 par un navigateur français : Jean-Baptiste d'Après de Mannevillette. Est-elle précise ? Toute erreur sur la distance observée produit une erreur trente fois plus forte sur la détermination de la longitude. La solution n'était pas là; elle devait se trouver dans un procédé permettant d'emporter à bord et de conserver avec précision l'heure du 1er méridien.

Le chronomètre

C'est John Harrison, un horloger anglais, qui réussit à résoudre le problème en 1736, à l'aide de son chronomètre à longitude.

En France, les horlogers Le Roy et Ferdinand Berthoud firent éprouver en mer à partir de 1767 des chronomètres qu'ils améliorèrent jusqu'à en faire de bons instruments.

Les navigateurs étaient arrivés à connaître plusieurs méthodes de calcul de la latitude, en dehors de la latitude méridienne, en utilisant par exemple deux hauteurs du même astre et l'intervalle de temps écoulé entre les observations. Mais depuis la fin du XVIIIe siècle, la méthode générale pour déterminer le point à la mer avec les chronomètres consistait à obtenir la latitude par la hauteur méridienne du Soleil et la longitude par une hauteur horaire (Ancienne méthode du point à midi).

Comparaison des méthodes

Jusque vers la fin du premier tiers du XIXe siècle, la méthode des distances lunaires l'a emporté sur la méthode chronométrique car les montres imparfaites demandaient un contrôle permanent par les observations astronomiques.

Les chronomètres devenant de plus en plus sûrs, les méthodes lunaires devaient être de moins en moins employées, pour être complètement délaissées avant la fin du siècle. Le degré de perfection atteint par les chronomètres ne permettait plus de considérer comme moyen de contrôle efficace une méthode astronomique dont les résultats étaient moins précis que ceux qu'il s'agissait de vérifier. Car l'observation et le calcul d'une distance lunaire sont des opérations longues et délicates, et la confiance que l'on peut accorder à des résultats obtenus avec des observations médiocres ne peut pas être très grande.

La méthode n'était pas à n'importe quel moment utilisable par le navigateur à la recherche d'un point, puisqu'il était nécessaire que la Lune soit levée et à plus de deux ou trois jours de la nouvelle lune. Dans ces conditions, sur des navires à grande vitesse, la méthode aurait été déficiente. Dans la méthode chronométrique qui utilise la mesure de la hauteur d'un astre, tous les astres sont en principe équivalents dès l'instant que l'observateur possède leurs éphémérides. Pour observer, il suffit que le ciel et l'horizon soient découverts. Les observations sont simples, les calculs courts, le résultat relativement précis si le chronomètre est bien réglé. On comprend dès lors la recherche constante du perfectionnement des chronomètres et, ceux-ci ayant atteint d'excellentes qualités de justesse et de précision, l'emploi final exclusif des méthodes chronométriques[1].

Conclusion

Les cartes inexistantes ou inexactes, les latitudes observées sans grande précision, le point obtenu à l'estime, n'empêchèrent pas les navigateurs de parcourir le monde, ni d'établir des plans de grande précision. On arrive à cette constatation étonnante, qu'au moment où le problème de la mesure de la longitude était résolu, vers la fin du XVIIIe siècle, les grandes découvertes du globe étaient terminées.

Notes et références

  1. Guy Boistel, « De quelle précision a-t-on réellement besoin en mer ? », Histoire & mesure, vol. XXI, , p. 121–156 (ISSN 0982-1783, DOI 10.4000/histoiremesure.1748, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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