Marguerite Burnat-Provins

Marguerite Provins, dite Marguerite Burnat-Provins, née à Arras le et morte à Grasse le , est une écrivaine, peintre et dessinatrice franco-suisse.

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Biographie

Marguerite Provins, d’une famille aisée d'Arras, accomplit des études artistiques à Paris à partir de 1891 à l'Académie Julian et à l'Académie Colarossi. Elle achève sa formation en 1896 à l'École des Beaux-Arts, lorsqu'enfin en est levée l'interdiction aux femmes[1]. Elle épouse, en 1896, un architecte de Vevey, Adolphe Burnat. C'est le début d'un séjour de quelque douze années en Suisse romande. Elle peint, notamment en 1899 Profil à la coiffe[2] et en 1904 Frise au gui. En 1905, elle crée, après avoir publié dans La Gazette de Lausanne un article où elle déplorait l'avilissement des paysages suisses, la Ligue pour la Beauté, futur Heimatschutz, aujourd'hui Patrimoine suisse (organisation suisse de protection du paysage naturel et construit)[3]. Son mariage avec Adolphe est rompu en 1908, événement à l'origine de son départ définitif de la Suisse. Remariée à Paul de Kalbermatten, ingénieur valaisan, pour qui elle écrit Le Livre pour toi, une série de cent poèmes en prose, elle connaît bien des demeures éphémères, et voyage au Proche-Orient : Syrie, Liban[4], et en Afrique du Nord, en particulier au Maroc, qui sera un temps son pays d'élection et animera ses rêveries exotiques. Puis elle se retire au Clos des Pins, à Grasse, où elle passe ses dernières années. Son œuvre d'écrivaine est forte d'une vingtaine de volumes de proses poétiques, tandis que son œuvre de peintre comporte des tableaux de la vie rurale proches de ceux de l'école de Savièse en Valais (elle était une intime d'Ernest Biéler), des compositions décoratives.

À partir de 1914, elle réalisa une importante série de dessins étranges nés d'hallucinations récurrentes, tels Les êtres de l'abîme[5]. Cette série, que Marguerite Provins nommait Ma Ville, est riche de quelque 3000 dessins, et fut intégrée parmi les productions médiumniques de l'art brut.

Les années veveysannes (1896-1907)[6]

Après son union à Adolphe Burnat, Marguerite Burnat-Provins s'installe à Vevey avec son époux dans l'hôtel particulier de la famille Burnat. Une année après son arrivée à Vevey, Burnat-Provins s'ennuie et se sent livrée à elle-même, la tranquillité des bords du Léman contrastant fortement avec l'agitation de la vie parisienne qu'elle venait de quitter. Elle souffre également du milieu protestant très étroit dans lequel elle évolue chez les Burnat ; son beau-père surveille ses allers-venues et les dames de la famille ne voient pas d'un bon œil son indépendance et son besoin d'activité culturelle.

Pour tromper l'ennui, elle donne des leçons de dessin dans son atelier veveysan et à l'École Vinet à Lausanne. Elle commence également à écrire pour La Gazette de Lausanne. En 1900, elle ouvre une boutique qui porte comme enseigne "À la Cruche verte" et qui propose des objets de décoration destinés à un intérieur bourgeois. Pour échapper à ce contexte veveysan et familial qui l'oppresse, Burnat-Provins fait de nombreux séjours hors du Canton de Vaud ; à l'étranger, en Allemagne, en France, en Belgique, en Hollande, mais également à plusieurs reprises en Valais où elle s'installera en 1907.

En 1901, pour détendre la situation entre Burnat-Provins et sa belle-famille, le couple déménage dans la ville voisine de Vevey, à La Tour-de-Peilz.

André Gide parle de l'artiste et de son atelier dans une lettre à Francis Jammes daté du 5 mai 1905 : "Une extraordinaire créature [...] ; elle a l'air d'une créole et de vivre sous un cocotier, et elle est flamande. Elle vit complètement seule, à Vevey, dans un merveilleux atelier qu'elle s'est fait construire par son mari, qui est architecte. Elle a un grand chien et cultive elle-même son jardin...".

En 1903, Burnat-Provins publie son premier livre, Petits Tableaux valaisans, chez les imprimeurs veveysans Säuberlin et Pfeiffer. L'ouvrage, salué dans le monde des imprimeurs comme le triomphe de la typographie suisse, contient 130 aquarelles gravées sur bois et imprimées en 260 tons différents. Les quatre ouvrages suivants de l'artiste - Heures d'automne (1904), Chansons rustiques (1905), Le Chant du verdier (1906), Sous les noyers (1907) - seront également imprimés à Vevey, chez Säuberlin et Pfeiffer.

L'écrivain et critique Henri Malo écrit dans un article publié en juillet 1910 au Mercure de France à propos de ce premier ouvrage : "Tout ce qui pouvait concourir à faire donner à la gravure sur bois son maximum de rendement, et aussi à produire un beau livre, s'est trouvé réuni par une suite de circonstances très exceptionnelles, lorsqu'il n'y a pas bien longtemps une artiste française, Mme Marguerite Burnat-Provins, s'avisa de publier ses Petits Tableaux valaisans. Le résultat mérite qu'on s'y arrête. On peut seulement regretter, avec l'auteur, qu'un tel livre n'ait pas été fabriqué en France, mais à Vevey." Henri Malo consacrera une étude à l'artiste en 1920.

En 1905, Marguerite Burnat-Provins réalise l'affiche de la septième Fête des Vignerons s'étant déroulée la même année.

Honneurs

Le 11 mai 2015, l'association VIBISCUM (Association des amis du vieux Vevey) et la municipalité de Vevey ont baptisé « Espace Marguerite Burnat-Provins » l'endroit où l'artiste avait ouvert sa boutique d'art décoratif « À la cruche verte » (aujourd'hui englobé dans un autre bâtiment). VIBISCUM a apposé sur le bâtiment une plaque en l'honneur de l'artiste[7].

Œuvre

Littérature

  • Petits Tableaux valaisans, (réimpr. 1985 - Slatkine, Genève)
  • Heures d'automne, (réimpr. 2004 - Éditions Plaisir de Lire, Lausanne)
  • Chansons rustiques,
  • Le Chant du verdier,
  • Sous les noyers,
  • Le Livre pour toi, (réédition 2006, Éditions de l'Aire, Vevey) (réédition 2020, Infolio/microméga, Gollion)
  • Le Cœur sauvage, 1909, récit.
  • Cantique d'été, (réédition 2020, Infolio/microméga, Gollion)
  • La Fenêtre ouverte sur la vallée, (réimpr. 1986 - Éditions Plaisir de Lire)
  • La Servante,
  • Poèmes de la boule de verre,
  • Nouveaux poèmes de la boule de verre,
  • Vous, (réimpr. 2001 - Éditions Plaisir de Lire)
  • Heures d'hiver, (réimpr. 2004 - Éditions Plaisir de Lire)
  • Poèmes troubles, (réimpr. 1999 - L'Escampette, Bordeaux)
  • Le Livre du Pays d'Ar Mor,
  • Poèmes de la soif, 1921 (réimpr. 2006 - Zoé, Genève), suivis de Une nuit chez les Aïssaouas
  • Poèmes du scorpion,
  • Contes en vingt lignes,
  • Le Voile, 1929 (réimp. 2002 - Éditions Plaisir de Lire)
  • Près du rouge-gorge, (réimpr. 2003 - Éditions Plaisir de Lire)
  • La Cordalca,
  • Heures de printemps et Heures d'été, Éditions Plaisir de Lire,
  • Hôtel, Éditions Plaisir de Lire, 2010.

Peinture

  • Primitivisme rural et art décoratif, en particulier Jeune fille de Savièse[8] (1900) : musée d'art de Sion (Valais, Suisse).
  • Dessins hallucinatoires[9] : Collection de l'art brut, section Neuve Invention, Lausanne (Vaud, Suisse).
  • Une exposition en 2018 au Manoir de la ville de Martigny[10]
  • Une exposition lui est consacrée au musée Jenisch de Vevey en 2020-2021[11].
  • Un ensemble d'oeuvres inédites de Burnat-Provins est exposé en juin 2021 à la Galerie Laura Pecheur à Paris.
  • Une exposition portant sur son oeuvre au musée des Beaux-Arts d'Arras, sa ville natale, a lieu jusqu'au 15 août 2021[12].

Bibliographie critique (esquisse)

  • Georges de Morsier, , Neuchâtel, La Baconnière, 1969 Collection « Langages et Documents »
  • Catherine Dubuis, Pascal Ruedin, Marguerite Burnat-Provins, Lausanne, Payot, 1994.
  • Catherine Dubuis, Les Forges du paradis / Histoire d'une vie: Marguerite Burnat-Provins, Vevey. L'Aire, 1999.
  • Helen Bieri Tomson et Catherine Dubuis (Dir.), Marguerite Burnat-Provins, de l'Art nouveau à l'art hallucinatoire, Paris, Somogy, 2003.
  • Anne Murray-Robertson, Marguerite Burnat-Provins. Cœur sauvage, Gollion (CH), Infolio, 2019, 352 p.
  • Anne Murray-Robertson, Marguerite Burnat-Provins. Oser la liberté, Gollion, Infolio, 2019, 61 p.

Références

  1. Valentin Grivet, « Marguerite Burnat-Provins, visions d’un monde perdu », gazette-drouot.com, 27 mai 2011.
  2. Crayon, plume, encre, aquarelle, gouache blanche et rehauts dorés.
  3. Son rôle de militante pour la protection du patrimoine est encore bien connu aujourd'hui : voir « Première grande rétrospective consacrée à Marguerite Burnat-Provins », laliberte.ch, 27 octobre 2020.
  4. https://www.bilan.ch/opinions/etienne-dumont/le-musee-jenisch-de-vevey-decline-marguerite-burnat-provins-sur-tous-les-tons
  5. Aquarelle et mine de plomb sur carton, 1921.
  6. Catherine Dubois, « Marguerite Burnat-Provins et Vevey : Histoire d'un Malentendu », Annales veveysannes / VIBISCUM, vol. 4, , p. 125-147
  7. « 43e plaque inaugurée », sur vibiscum.ch, (consulté le )
  8. Crayon, aquarelle, gouache, fusain et pastel sur papier de couleur.
  9. Voir article et reproduction d'une œuvre : « Marguerite Burnat-Provins - Du 22 mai au 14 septembre 2003 », artbrut.ch, consulté le 23 juin 2021.
  10. https://www.burnat-provins.ch/web/24/activites/expositions
  11. « Marguerite Burnat-Provins, le périple d’une intranquille », letemps.ch, 11 décembre 2020.
  12. « Mais qui est donc Marguerite Burnat-Provins ? », arras.fr, consulté le 23 juin 2021.

Voir aussi

Liens externes

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