Man Ray

Man Ray, pseudonyme d’Emmanuel Radnitsky[1], est un peintre, photographe et réalisateur de cinéma américain né le à Philadelphie (États-Unis) et mort le à Paris (France).

Pour les articles homonymes, voir Ray.

Acteur du dadaïsme à New York, puis du surréalisme à Paris, Man Ray a perfectionné la technique du photogramme de Christian Schad et inventé, aux côtés de la photographe Lee Miller, le procédé dit de solarisation.

Biographie

Né en 1890 à Philadelphie, Emmanuel Radnitsky dit Man Ray[2] passe sa jeunesse à Brooklyn.

Il fréquente la Modern School du Ferrer Center qui fonctionne à Manhattan puis Harlem selon les principes de l'éducateur libertaire catalan Francisco Ferrer. Formation anarchiste déterminante, puisqu'elle le libère très tôt du respect des valeurs établies, désacralise à ses yeux les techniques d'expression traditionnelles et l'encourage à ne suivre que sa propre nécessité individuelle dans toutes ses innovations.

Refusant toute hiérarchie entre la peinture et la photographie, il considère la caméra et le pinceau comme des instruments équivalents à ce qu'est la machine à écrire pour un écrivain[3].

New York

Sa carrière commence à New York. Avec son ami proche Marcel Duchamp, ils forment la branche américaine du mouvement dada. Après quelques expériences artistiques infructueuses, notamment une publication sur le dada new-yorkais en 1920, Man Ray conclut que « Dada ne peut pas vivre à New York ».

Paris

Le , Man Ray débarque au Havre (Seine-Maritime), puis arrive à Paris, à la gare Saint-Lazare, où Marcel Duchamp l'accueille.

Le soir même, il est présenté aux surréalistes Louis Aragon, André Breton, Paul Éluard et Gala, Théodore Fraenkel, Jacques Rigaut et Philippe Soupault. Il s'installe dans le quartier du Montparnasse, rencontre et tombe amoureux de la chanteuse française et modèle Kiki de Montparnasse.

Il fréquente les bals des Beaumont ainsi que des cabarets, dont le Bœuf sur le Toit et le Jockey[4].

Il rencontre également le couturier Paul Poiret. Il réalise de nombreuses photos de mode qui sont publiées dans les magazines et contribuent à le faire connaître. À son grand regret, il n'aura jamais l'occasion de faire le portrait du couturier. Dans son livre de souvenirs, il confie qu'à la mort de Paul Poiret il a envoyé à un journal une photo du médecin personnel du couturier comme étant un portrait de Poiret et que cette photo a été publiée comme telle. En 1922[5], l'agent de Marcel Duchamp, Pierre Roché, un ami rencontré en à New York qui a fait travailler avant guerre Hélène Perdriat pour Paul Poiret et qui est un intime de Marie Laurencin, l'amante de la sœur du couturier, Nicole Groult, lui prête l'argent pour ouvrir un studio de photographie. En échange, il y développe les photographies érotiques des uns et des autres, telle celle d'Hélène Hessel se déshabillant sur la plage.

Avec Jean Arp, Max Ernst, André Masson, Joan Miró et Pablo Picasso, il présente ses œuvres à la première exposition surréaliste de la galerie Pierre à Paris en 1925.

Salvador Dalí et Man Ray photographiés par Carl Van Vechten à Paris en 1934.

Ami de Marie-Laure de Noailles et de Charles, vicomte de Noailles, il tourne en 1928 à Hyères à la Villa Noailles son troisième film Les Mystères du château de Dé.

En 1929, il commence à travailler avec Lee Miller qui, en plus d'être sa muse et son assistante, devient sa maîtresse. Jusqu'en 1932, ils entretiennent cette relation créative, développant ensemble le potentiel esthétique de la solarisation[6].

En 1931, il réalise une œuvre à vocation publicitaire intitulée Electricité. Il s'agit d'un album composé d'un ensemble de photographies commandé par la Compagnie Parisienne d'Electricité. Cet ensemble de rayogrammes a pour objectif la promotion de l'électricité à usage domestique, en tant que symbole de la modernité[7].

À Montparnasse, durant vingt ans, Man Ray révolutionne l'art photographique. Les grands artistes de son temps posent sous son objectif, comme James Joyce, Gertrude Stein ou Jean Cocteau. Il contribue à valoriser l'œuvre d'Eugène Atget qu'il fait découvrir aux surréalistes et à son assistante Berenice Abbott. Avec le groupe surréaliste, il participe d'octobre à au 6e Salon des surindépendants[8].

En 1934, Meret Oppenheim pose pour Man Ray, cette série de photographies de nus devient l'une de ses séries les plus célèbres.

Fin 1934, il fait la connaissance de la jeune guadeloupéenne Adrienne Fidelin[9]. Il a 46 ans et elle presque 20. Elle devient sa compagne, son modèle et sa muse. Inséparables, Man Ray l'introduit dans son cercle d'amis artistes et écrivains, adeptes du surréalisme, mouvement alors en vogue. Dans son autobiographie, Man Ray décrit le groupe constitué par Pablo Picasso, Dora Maar, Paul Éluard et son épouse Nusch, Max Ernst et Leonora Carrington, ainsi que Lee Miller et Roland Penrose, André Breton[9]. C'est ainsi le début d'une histoire d'amour étroitement mêlée à une vie artistique intense, au sein de la communauté surréaliste. Elle prend alors le nom d'Ady Fidelin[9]. C'est l'un des membres les plus fascinants de l’avant-garde internationale[10].

Hollywood

En 1940, après la défaite de la France, et inquiété du fait de ses origines juives, Man Ray parvient à rejoindre Lisbonne et s'embarque pour les États-Unis en compagnie de Salvador et Gala Dalí et du cinéaste René Clair. Après quelques jours passés à New York, il gagne la côte ouest avec le projet de quitter le pays pour Tahiti où il resterait quelques années. Arrivé à Hollywood, il reçoit des propositions d'exposition, rencontre sa deuxième femme, Juliet, et décide de se remettre à peindre. Il peint notamment des sculptures mathématiques qu'il avait découvertes et photographiées à l'institut Henri Poincaré dans les années 1930, donnant à chacune d'elles le titre d'une œuvre de Shakespeare[11]

Retour à Paris

En 1951, il revient à Paris, et habita par la suite à l'hôtel Istria, au 31 bis, rue Campagne-Première[12].

Il devient satrape du Collège de 'Pataphysique en 1963.

Il meurt à Paris le et est inhumé au cimetière du Montparnasse (7e division). Sa tombe porte l'épitaphe : « Unconcerned, but not indifferent » (« Détaché, mais pas indifférent »).

Entre le 18 et le , la tombe de Man Ray a été profanée[13] à cinq reprises. Le médaillon représentant le couple a été brisé et la stèle de son épouse Juliet Man Ray, née Browner (1911-1991) a été détruite.

Œuvres

Objet

  • Autoportrait, assemblage, 1916[14]
  • Boardwalk, 1917[15]
  • Cadeau, fer à repasser garni de clou sur la semelle, 1921[16]
  • Objet indestructible, 1923[17],[18]
  • The Fisherman's Idol , 1926, morceaux de liège récupérés sur la plage de Biarritz puis assemblés[19]
  • Les Vingt jours et nuits de Juliette, 1952, paravent[20]
  • Boule de neige[21]

Photographie

Marcel Duchamp en Rrose Sélavy (1921), photographie de Man Ray.

Film

Peinture

  • 1914 : The Lovers (Les Amants), huile sur toile, 24,7 × 35,2 cm[44].
  • 1916 : Danseuse de corde s'accompagnant de son ombre[45].
  • 1931: Autoportrait, photographie obtenue à partir d'une solarisation[réf. nécessaire].
  • 1938 : Le Rébus, huile sur toile, 55 × 46 cm, Paris, musée national d'Art moderne[46].
  • 1939 : Le Beau Temps, huile sur toile, 210,2 × 200 cm[47][réf. nécessaire].
  • 1952 : Rue Férou, Bielefeld, Kunsthalle.
  • 1958 : Peinture naturelle[réf. nécessaire].

Dessin

Ouvrages et monographies

  • Revolving doors, Paris, Éditions Surréalistes, 1917.
  • Les Champs délicieux, Paris, hors commerce, 1922.
  • Man Ray photographs 1920-1934, James Thrall Soby.
  • Facile with Paul Éluard, Paris, Éd. GLM, 1935.
  • La Photographie n'est pas l'art : 12 photographies, Paris, Éd. GLM, 1937, avec un avant-propos d'André Breton, Convulsionnaires[48].
  • Alphabet for adults, Berverly Hills, California, Copley Galleries, 1948.
  • Photographs-Portraits, Paris, Édition Prisma.
  • Self Portrait, Londres, André Deutsch, 1963 ; Autoportrait, traduit de l'américain par Anne Guérin, Paris, Robert Laffont, 1964 ; réédité chez Seghers, 1986.

Récompenses

Expositions

Hommages

Voir aussi

Bibliographie

  • Georges Ribemont-Dessaignes, Man Ray, collection « Les peintres nouveaux », no 37, Paris, Gallimard, 1929.
  • Pierre Descargues, Man Ray, avant-propos de Dora Vallier, Paris, Artcurial, 1991.
  • Chantal Vieuille, Nusch, portrait d'une muse du Surréalisme, Artelittera, avec des photographies de Man Ray, Paris, 2010 (ISBN 2-9536-2490-2).
  • Isabelle Fortuné, « Man Ray et les objets mathématiques », Études photographiques, no 6, (lire en ligne).
  • Michel Butor, L'Atelier de Man Ray, photographies de Maxime Godard, Paris, Bernard Dumerchez, 2005.
  • Noriko Fuku et John P. Jacob, préface de Marc Restellini, Atelier Man Ray. Unconcerned but not indifferent, [catalogue de l'exposition], Éd. Pinacothèque de Paris, 2008.
  • Alain Jouffroy, « Man Ray (1890-1976) », in Encyclopædia Universalis (en ligne sur Universalis-edu.com).

Archives

Filmographie

Article connexe

Liens externes

Notes et références

  1. Son pseudonyme emprunte trois lettres à son prénom et trois à son nom, et signifie littéralement « homme rayon » (de lumière), ce qui doit être entendu comme « l'homme qui écrit avec la lumière », c'est-à-dire le sens étymologique du mot « photographe ».
  2. Man Ray sur American art.edu
  3. « Man Ray », in Encyclopédie Universalis.
  4. Valérie Duponchelle, « Man Ray, l'homme au double visage », Le Figaro, encart « Le Figaro et vous », 17 février 2018, page 32.
  5. X. Rockenstrocly, dir. C. Martin, Henri-Pierre Roché : profession écrivain - Thèse de doctorat, III, B, 1, Université Lyon-II, Lyon, 1996.
  6. Guy Duplat, « Couples d'artistes : Lee Miller et Man Ray », La Libre Belgique, .
  7. (en) Jeff L. Rosenheim, « Electricité », sur MetMuseum (consulté le )
  8. Agnès De La Beaumell, Alberto Giacometti, le dessin à l'œuvre, Paris, Éditions du Centre Pompidou, 2001, 256 p. (ISBN 9782844260109).
  9. Wendy A Grossman et Sala Patterson, « Adrienne Fidelin », sur academia.edu, in Le modèle noir, Musée d’Orsay/Flammarion, Paris, pages 306-311, (consulté le )
  10. (en-US) Sala Elise Patterson, « Yo, Adrienne », The New York Times, (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le ).
  11. Fabrice Nicot et Olivier Lascar, « Man Ray et les équations shakespariennes », Sciences et Avenir,
  12. Collectif, Étrangers célèbres et anonymes du 14e arrondissement, Mairie du 14e, octobre 2011, p.8.
  13. La tombe de l’artiste surréaliste Man Ray saccagée au cimetière du Montparnasse à Paris, Libération, 28 mars 2019.
  14. « Autoportrait, 1916 », sur Centre Pompidou (consulté le )
  15. « Boardwalk - 1917 », sur Centre Pompidou (consulté le )
  16. (en-GB) Tate, « ‘Cadeau’, Man Ray, 1921, editioned replica 1972 », sur Tate (consulté le )
  17. (en-GB) Tate, « ‘Indestructible Object’, Man Ray, 1923, remade 1933, editioned replica 1965 », sur Tate (consulté le )
  18. « Indestructible Object », sur Philadelphia Museum of Art.org (consulté le )
  19. (en) « SAAM Linked Open Data », sur edan.si.edu (consulté le )
  20. « Les vingt jours et nuits de Juliette », sur Centre Pompidou (consulté le )
  21. Reproduction dans Beaux Arts magazine no 68, mai 1989, p. 115.
  22. « Three Heads | Object:Photo | MoMA », sur www.moma.org (consulté le )
  23. « Tristan Tzara | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  24. « Luisa Casati | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  25. « André Breton | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  26. « Picabia | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  27. « Jean Cocteau | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  28. « Antonin Artaud | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  29. Reproduction dans Connaissance des arts no 658, mars 2008, p. 79.
  30. « Louis Aragon | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  31. « Karin van Leyden | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  32. « Salvador Dali | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  33. « Gala Dali | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  34. « Lee Miller | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  35. « Juliet Man Ray | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  36. « L'énigme d'Isidore Ducasse | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  37. « Marcel Proust sur son lit de mort | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  38. Paris, MNAM. Reproduction dans Connaissance des arts no 658, mars 2008, p. 83.
  39. « Noire et blanche | Centre Pompidou », sur www.centrepompidou.fr (consulté le )
  40. Reproduit en couverture de Lettres à Denise Lévy de Simone Breton, éditions Joëlle Losfeld, Paris, 2005
  41. Le Retour à la raison sur Ubu.com [vidéo]
  42. Emak-Bakia sur Ubu.com [vidéo]
  43. Les Mystères du château de Dé sur vimeo.com [vidéo]
  44. Collection Sylvio Perlstein, Anvers. Reproduction dans Giovanni Lista, Dada libertin & libertaire, Paris, L'Insolite, 2005, p. 67.
  45. « Man Ray », sur Universalis.fr (consulté le )
  46. Reproduction dans Artpress 2, no 13, mai 2009, p. 11.
  47. « Philadelphia Museum of Art », sur https://www.philamuseum.org/ (consulté le )
  48. Marguerite Bonnet, André Breton, œuvres complètes t. 1 : notes, Gallimard, La Pléiade, Paris, 1988, p. 1965.
  49. Progress Medal
  50. pinacotheque.com.
  51. « Man Ray et la mode, à Cantini et au musée Borély »


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