Mélamine

La mélamine, parfois appelée cyanuramide ou cyanurotriamine, est une amine aromatique de formule brute C3H6N6, dénommée chimiquement 1,3,5-triazine-2,4,6-triamine.

Ne pas confondre avec le pigment mélanine

Mélamine

Structure de la mélamine.
Identification
Nom UICPA 1,3,5-triazine-2,4,6-triamine
Synonymes

2,4,6-triamino-1,3,5-triazine
cyanurotriamide cyanurotriamine
cyanuramide

No CAS 108-78-1
No ECHA 100.003.288
No CE 203-615-4
PubChem 7955
SMILES
InChI
Apparence cristaux incolores à blancs[1]
Propriétés chimiques
Formule C3H6N6  [Isomères]
Masse molaire[2] 126,1199 ± 0,004 g/mol
C 28,57 %, H 4,8 %, N 66,64 %,
Propriétés physiques
fusion 345 °C (décomposition)[3]
Solubilité 3 240 mg·L-1 (eau, 20 °C)[3]
Masse volumique 1,6 g·cm-3[1]
d'auto-inflammation >500 °C[1]
Pression de vapeur saturante à 315 °C : 6,7 kPa[1]
Précautions
SIMDUT[4]

Produit non contrôlé
Classification du CIRC
Groupe 3 : Inclassable quant à sa cancérogénicité pour l'Homme[5]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

Les « résines mélamine-formaldéhyde » ou « mélamine-formol » (sigle MF) sont appelées « mélamine » dans le langage courant. Elles font partie de la famille des aminoplastes qui regroupe des résines thermodurcissables aminées, issues d'un comonomère tel l'urée ou la mélamine, parfois le thiocarbamide, le cyanamide hydrogène ou le dicyandiamide ; le second comonomère étant le formaldéhyde.

Chimie

Synthèse à partir de l'urée.

Le cyanuramide fond à 345 °C et est peu soluble dans l'eau.

Usages

Louche en « mélamine », une résine très dure permettant, avec des charges non colorées, la fabrication de matières blanches

Des « résines mélamine » avaient déjà été développées dans les années 1930 et 40 par des compagnies multinationales telles American Cyanamid, Ciba et Henkel[6], mais sans véritable succès commercial.

Leur dureté et rigidité exceptionnelles, ainsi que leur bonne résistance à la chaleur, à la lumière, à la plupart des produits chimiques, à l'abrasion et au feu, expliquent leur succès dans l’immédiat après-guerre.

Un matériau (feuilles stratifiées, obtenues sous pression et ensuite décorées...), plus connu sous le nom commercial de Formica en Europe, Arborite en Amérique du Nord, fut très largement utilisé[7] dans les cuisines, bistros, restaurants, etc. pour sa très grande facilité d’entretien.

Deux autres applications importantes furent l'utilisation de :

  • gobelets, assiettes, couverts, largement utilisés pour les enfants et le camping, ainsi que la fabrication de gadgets bon marché (cendriers, porte-clés...) ;
  • téléphones et petits objets électriques (prises, interrupteurs…) ;

toutes applications auxquelles la résine « mélamine » (qui remplaçait dans ces usages la bakélite plus cassante) se prêtait particulièrement bien.

Dans les années 1990, l'ABS, plus résistant et plus brillant, tend peu à peu à remplacer la « mélamine » qui est thermodurcissable (ne peut plus être mise en forme après polymérisation).

Usages alimentaires frauduleux

Nourriture pour animaux de compagnie en 2007

De la mélamine a plusieurs fois été volontairement introduite dans des aliments et des friandises pour accroître artificiellement son taux apparent[Note 1] de protéines. Le , Menu Foods (en) a rappelé 60 millions de boîtes de nourriture pour chiens et chats produites aux États-Unis avec des aliments importés, vendues sous 95 marques différentes aux États-Unis, au Canada et au Mexique, après la mort anormale d'au moins 14 animaux consécutive à une défaillance rénale dans la plupart des cas. Plus de 8 000 plaintes (pour certaines en nom collectif) ont été déposées à la Food and Drug Administration dans les semaines qui ont suivi aux États-Unis et au Canada. Ces boîtes contenaient du gluten de blé « enrichi » par de la mélamine, adjuvant illégal aux États-Unis et dans d'autres pays. Un mois plus tard, le gouvernement chinois a déclaré que cette pratique était illégale.

La mélamine pourrait dans certaines conditions bloquer les fonctions rénales, selon des chercheurs de l'Université de Guelph (Ontario), ce qui expliquerait certaines morts de chiens et chats ayant consommé ces aliments, de la mélamine ayant été détectée dans l'urine ou les reins de chats décédés, ainsi que de l'acide cyanurique (sous-produit métabolique de la mélamine), ces deux composés réagissant en formant des cristaux pouvant bloquer la fonction rénale, selon des chercheurs de l'université de Guelph[8].

Lait artificiel en 2008

En mai, juillet et , quatre bébés chinois sont morts et des dizaines de milliers sont tombés malades après avoir absorbé du lait artificiel pour nourrisson contaminé : on y avait ajouté de la mélamine, afin de le faire apparaître plus riche en protéines. Les autorités chinoises ont reconnu que deux des compagnies laitières incriminées dans le scandale exportaient leurs produits (vers le Burundi, Gabon, Bangladesh, Birmanie et Yémen). Le scandale s'est amplifié, impliquant d'autres entreprises, d'autres produits et touchant un nombre toujours plus important de personnes.

Autres

En , en Europe, un résultat d'analyse non conforme a été détecté dans des friandises produites en Chine et vendues dans des magasins asiatiques en Belgique (11,24 mg·kg-1)[9].

De la mélamine dans le soja des volailles bio : fin octobre, la coopérative Terrena, à Ancenis, a fait analyser trois lots de tourteaux de soja importés de Chine et débarqués par conteneurs. Dans le premier lot, on a identifié la présence de mélamine à une concentration de 116 mg·kg-1 alors que le seuil limite est de 2,5 mg·kg-1. Il s'agit d'une fraude visant à enrichir artificiellement le taux de protéine du tourteau pour en tirer un prix plus élevé. Le tourteau de soja a été livré à la société Bio nutrition animale, filiale de Terrena spécialisée dans la fabrication d'aliments destinés à la production d'animaux. 300 tonnes d'aliments de bétail avaient déjà été fabriqués avec le soja chinois et livrés à 127 élevages de volailles bio des Pays de la Loire. Les analyses sur ces aliments révèlent la présence de mélamine, à une dose comprise entre 16 et 75 mg·kg-1. La viande des volailles qui ont picoré l'aliment contaminé a été analysée. Pas de trace dans les volailles bio. Selon un toxicologue, la mélamine ne passerait pas dans la viande mais elle serait excrétée dans les urines sous 24 heures. Même son de cloche chez l'AFSAA, qui juge que le risque pour la santé humaine est nul. Finalement, aucune procédure de retrait n'a été ordonnée dans les lieux de vente des volailles[10].

En décembre 2008, l'Union européenne interdit les importations de Chine de produits contenant du soja destinés aux enfants, après détection de taux élevés de mélamine dans certains de ces produits[11].

En février 2021, la Commission européenne interdit l'utilisation de fibres de bambou dans des matériaux en plastique[12],[13]. Ceci en raison de l'absence d'évaluation pour ce type de matériau plastique[12]. En outre, il a été démontré une migrations de mélamine et de formaldéhyde à des températures dépassant 70°C[13]. Ces produits peuvent être distingués de ceux uniquement fabriqués en bambou par le fait que la structure en bois n'est pas clairement présente[12].

Toxicologie, écotoxicologie

Chez l'homme, la dose journalière admissible retenue par l'AESA est de 0,5 mg par kilogramme de poids corporel[14]. Elle est la même que celle retenue par l'Organisation mondiale de la santé[15]. L'organisme américain FDA parle de 1 mg·kg-1[16].

La toxicité est essentiellement rénale, avec formation de calculs rénaux pouvant obstruer la voie urinaire et provoquer une insuffisance rénale aiguë[17]. Un dérivé de la mélamine, l'hexaméthylmélamine, a été testé un temps comme médicament anticancéreux[18].

Notes et références

Notes

  1. Le taux réel de protéines est inchangé, mais il est généralement extrapolé à partir du taux d'azote total (considérant que les protéines ont un taux moyen d'azote de l'ordre de 15 % en masse). Comme la mélamine est composée à 66 % d'azote, l'ajout de mélamine fausse les résultats : si on dose plus d'azote, on en déduit faussement une plus grande quantité de protéines.

Références

  1. MELAMINE, fiche(s) de sécurité du Programme International sur la Sécurité des Substances Chimiques, consultée(s) le 9 mai 2009
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. (en) « Mélamine », sur ChemIDplus, consulté le 6 juillet 2009
  4. « Mélamine » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 25 avril 2009
  5. IARC Working Group on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans, « Évaluations Globales de la Cancérogénicité pour l'Homme, Groupe 3 : Inclassables quant à leur cancérogénicité pour l'Homme », sur http://monographs.iarc.fr, CIRC, (consulté le )
  6. (en) Website of the Plastics Historical Society
  7. À tel point qu'on a pu parler d'« années Formica ».
  8. Source : conférence de presse de l'Agence américaine de l'alimentation et des médicaments (FDA) ayant généré de nombreux articles, dont Les Chinois ajoutent de la mélamine aux aliments pour animaux, du (Presse Canadienne)
  9. [PDF] AFSCA, « COMMUNIQUE - Résultat d'analyse de mélamine non conforme », sur www.afsca.be, AFSCA,
  10. , le 28/11/2008, ouestfrance
  11. L'UE interdit les importations chinoises de produits au soja pour enfants, le 4/12/2008, AFP
  12. « La Commission européenne n'autorise plus l'utilisation de fibres de bambou dans des matériaux en plastique », sur RTBF Info, (consulté le )
  13. « Fini, les tasses en “bambou” », sur www.test-achats.be (consulté le )
  14. Communiqué de l'EFSA, « L’EFSA évalue les risques éventuels liés à la mélamine dans les aliments composites provenant de Chine », 2008
  15. WHO, Experts set tolerable level for melamine intake, 5 décembre 2008
  16. FDA, Melamine contamination
  17. Ingelfinger JR, Melamine and the global implications of food contamination, N Eng J Med, 2008;359:2745-2748
  18. Hauge MD, Long HJ, Hartmann LC, Edmonson JH, Webb MJ, Su J, Phase II trial of intravenous hexamethylmelamine in patients with advanced ovarian cancer, Invest New Drugs, 1992;10:299-301

Articles connexes

Liens externes

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