Les Racines du ciel

Les Racines du ciel est un roman de Romain Gary publié le aux éditions Gallimard. L'œuvre a obtenu le prix Goncourt la même année.

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Les Racines du ciel

Le héros du roman, Morel, cherche à protéger les éléphants d'Afrique.

Auteur Romain Gary
Pays France
Genre Roman
Distinctions Prix Goncourt
Éditeur Éditions Gallimard
Collection Collection Blanche
Lieu de parution Paris
Date de parution
ISBN 2-07-036242-6
Chronologie

Résumé

Morel, le protagoniste du roman, veut faire cesser l'extermination des éléphants en Afrique au milieu du XXe siècle. Dans le même temps, en Afrique-Équatoriale française (AEF), l'idée d'indépendance commence à se répandre ici et là.

L'histoire raconte la lutte de Morel, ses actions en faveur des éléphants, la traque dont il est l'objet de la part des autorités, et, en parallèle, les conflits d'intérêt entre les engagements des uns et des autres : pour les éléphants, pour l'indépendance, pour la puissance coloniale, pour la sauvegarde des traditions, pour la marche en avant de l'homme vers la modernité, pour l'intérêt à court terme, pour l'honneur de l'Homme.

Thème

L'idée centrale défendue par l'auteur est la protection de la nature et cette tâche est si immense, dans toutes ses implications », écrit l'auteur dans sa courte préface). Mais, par ce biais, il expose aussi la protection d'une « certaine idée de l'homme » que Morel, Minna, Schölscher et d'autres illustrent tout au long du roman.

Il ne faut pas choisir ce qu’on défend : la nature ou l’humanité, les hommes ou les chiens. Non, il fallait s'attaquer au fond du problème: la protection du droit d’exister. On commence par dire, mettons, que les éléphants c'est trop gros, trop encombrant, qu'ils renversent les poteaux électriques, piétinent les récoltes, qu'ils sont un anachronisme, et puis on finit par dire la même chose de la liberté. La liberté et l'homme deviennent encombrants à la longue... voilà comment je m'y suis mis. (...) Il est temps de nous rassurer sur nous-mêmes en montrant que nous sommes capables de préserver cette liberté géante, maladroite et magnifique, qui vit encore à nos cotés. (p 222)

Les Racines du ciel évoque aussi les parcours des différents personnages qui ont conduit chacun à se retrouver là, dans la condition où chacun se trouve. Et derrière le personnage de Morel, en particulier un archétype qui incarne l'espoir et la défense de la fragilité du vivant face aux puissances destructrices de l’humain.[1]

Morel, c'était un gars qui avait confiance en nous, d'une manière totale et inébranlable, et c'était quelque chose d'aussi élémentaire, d'aussi irraisonné que la mer, ou le vent - quelque chose, ma foi, qui finissait par ressembler comme deux gouttes d'eau à la force même de la vérité. Je dus vraiment faire un effort pour me défendre - pour ne pas succomber sous cette étonnante naïveté. Il croyait vraiment que les gens avaient encore assez de générosité, par les temps que nous vivons, pour s'occuper non seulement d'eux-mêmes, mais encore des éléphants.

Le roman est à plusieurs voix : le narrateur, bien sûr, mais aussi les témoignages des uns et des autres, le tout dans une mise en forme où ces voix s'entrecroisent pour faire un récit à fort relief.

Titre

L'expression "les racines du ciel" est utilisée dans le roman par le naturaliste danois Peer Qvist.

L'islam appelle cela "les racines du ciel", pour les indiens du Mexique, c'est "l'arbre de vie", qui les pousse les uns et les autres à tomber à genoux et à lever les yeux en se frappant la poitrine dans leur tourment.[2] (...) Les racines étaient innombrables et infinies dans leur variété et leur beauté et quelques-unes étaient profondément enfoncées dans l'âme humaine - une aspiration incessante et tourmentée orientée en haut et en avant - un besoin d'infini, une soif, un pressentiment d'ailleurs, une attente illimitée. [3]

Personnages

Le roman fait vivre de nombreuses personnalités riches :

  • Morel : Protagoniste de l'histoire, Français qui a décidé de tout donner pour lutter contre la chasse aux éléphants, d'abord avec une pétition, puis en prenant la brousse et en se livrant à des coups de main assez spectaculaires contre les chasseurs. Morel, considéré comme un « rogue » (fou) par certains, est en fait un homme lucide. Son combat atteint une forte notoriété dans le monde et il attire la sympathie de beaucoup de ceux qui sont chargés de le capturer. En luttant en faveur de la préservation des éléphants, il lutte plus largement pour la nature, la vie, et finalement l'honneur de l'humanité malgré son apparence de misanthropie (aux yeux de certains). La foi de Morel en son combat, et en son étoile, est totale. De son histoire passée, et notamment de sa période de camp de travail en Allemagne pendant la guerre, il a gardé une force d'âme et de caractère à toute épreuve. On n'apprendra qu'à la fin en quoi sa lutte ancienne pour la défense des hannetons, qui est parfois évoquée au cours du roman, était plus difficile que celle en faveur de la sauvegarde des éléphants...
  • Minna : Allemande de Berlin. Orpheline. Son oncle la prostitue. Puis, après la chute du Reich, elle tombe profondément amoureuse d'un officier russe qui sera ensuite fusillé. De fil en aiguille, elle se retrouve serveuse dans un "Café - Bar - Dancing" à Fort-Lamy (Tchad), le Tchadien. Elle sera l'une des très rares personnes à signer la pétition de Morel, avant de le rejoindre dans sa lutte. Elle est, finalement, la seule à comprendre réellement l'aventurier. Elle ajoute un motif personnel à sa participation : celui qu'une Allemande soit aux côtés de Morel, pour témoigner que tous les Allemands ne sont pas mauvais (nous sommes peu après la guerre). Minna est le second personnage principal du roman. Elle restera en compagnie de Morel jusqu'au-delà des limites de ses forces.
  • Forsythe : Major américain qui a combattu durant la guerre de Corée. Il a "avoué" à la radio coréenne que les Américains avaient employé des armes bactériologiques, ce qui était faux et ceci l'a mis au ban de la société américaine. Libéré par les Coréens, il s'est installé au Tchad. Il devient un compagnon de route de Morel. Comme la lutte de ce dernier a un très fort écho aux États-Unis (elle est couverte sur place par des journalistes), Forsythe redevient un héros aux yeux de ses concitoyens.
  • Waïtari : Africain, député français à l'Assemblée Nationale, dont il a démissionné pour entreprendre une lutte indépendantiste à laquelle il rallie bien peu de monde. Il a fait ses études secondaires et universitaires en France où il a d'ailleurs sa famille. Il essaye de se servir de Morel, en cherchant à faire passer le combat du Français comme un mode d'expression de la cause pan-africaine et indépendantiste. Mais il est indépendantiste dans une région du monde où les habitants ne cherchent pas l'indépendance et ignorent totalement le concept du "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes". Waïtari est un personnage à la fois courageux, calculateur, pathétique et flamboyant.
  • Fields : Photographe parti faire un reportage photo sur la sécheresse, en avion. Il s'écrase et est recueilli par Morel et son groupe ; il reste avec eux et réalise un reportage inédit. Il dit être un parfait cynique et ne s'intéresser qu'au parti qu'il peut tirer de ses photos. Mais il devient progressivement sensible au personnage de Morel. Fields, qui n'apparaît qu'au troisième tiers du roman, devient pour le lecteur un témoin important de l'épopée de Morel.
  • Schölscher : Officier méhariste, notamment chargé de traquer Morel. Amoureux de l'Afrique, il ne peut s'empêcher d'admirer Morel, plus ou moins secrètement. Il finira par arrêter Waïtari à l'issue d'un massacre de dizaines d'éléphants perpétré par l'ancien député et sa petite troupe afin de financer sa lutte (par la vente de l'ivoire) et surtout afin de tordre le cou définitivement à l'amalgame entre sa lutte indépendantiste et le combat de Morel (amalgame qu'il a favorisé, mais qui a fini par le gêner). Schölscher est un des liants de l'aventure.
  • Qvist : Naturaliste Danois, passionné par les animaux et leur protection (il s'est rendu célèbre notamment par sa lutte en faveur des baleines), aux méthodes parfois expéditives. Malgré son âge, il suit Morel en brousse.
  • Le Peuple Oulé, sur le territoire duquel se déroule la plus grande partie de l'action : peuple de chasseurs d'éléphants (afin de manger et pour satisfaire aux exigences du passage rituel des adolescents à l'âge adulte). Les Oulés ne peuvent comprendre Morel, mais pour eux, pourtant, le Français est "Ubaba Giva" : "l'ancêtre des éléphants". À défaut de le protéger activement, ils ne feront rien pour permettre aux autorités de le capturer.
  • Youssef : Jeune Africain qui accompagne Morel. En réalité, Waïtari lui a demandé d'abattre le Français si celui-ci se fait arrêter. Il ne faudrait pas qu'il y ait procès et que Morel réaffirme les buts non politiques de son combat. Sa mort, au contraire, permettrait d'en faire un héros de l'indépendance. Après une année avec Morel, Youssef, en proie à un profond cas de conscience, renonce à sa mission. Alors il apprend par Morel que celui-ci avait compris depuis longtemps.
  • Habib : Ancien marin, propriétaire du Tchadien, également trafiquant d'armes. Lorsqu'il est découvert, il s'enfuit avec Morel dans la brousse. Puis il rejoint Waïtari, par intérêt. Personnage relativement secondaire mais présent presque de bout en bout.

Et aussi, parmi d'autres :

  • Le gouverneur, représentant de l'État français dans la région où Morel agit ; Idriss, pisteur africain fidèle de Morel ; le père Tassin, prêtre jésuite et paléontologue (personnage inspiré du père Teilhard de Chardin) ; Haas, Néerlandais spécialiste de la capture des éléphanteaux ; Saint-Denis, administrateur colonial ; Orsini : Chasseur d'éléphants ; de Vries, associé de Habib ; Le père Fargue, prêtre non conventionnel et médecin ; Dwala : sorcier et vieil ami de Saint-Denis à qui celui-ci a acheté la promesse qu'après sa mort, il le fera renaître sous la forme d'un arbre.

Éditions

Adaptations

Les Racines du ciel a été adapté au cinéma par John Huston en 1958 sous un titre homonyme.

Les Racines du ciel a été adapté en comédie musicale en 2010 sous le nom Ubaba-Giva[5].

Références

  1. Nicolas Gelas, Fictions et Humanisme dans l’œuvre de Romain Gary, Université Lyon II, Thèse de doctorat, (lire en ligne), p 24.
  2. Les Racines du ciel, édition Folio, p. 222.
  3. Les Racines du ciel, édition Folio, p. 266.
  4. ISBN d'éditions ultérieures : (notice BnF no FRBNF34911858) et (notice BnF no FRBNF35224493). Autres notices BnF pour l'édition de 1956 : (notice BnF no FRBNF32147376) et (notice BnF no FRBNF41649148).
  5. Eric Ploquin, « Mise en comédie musicale du roman : Ubaba-Giva », tag musique, sur racinesduciel.over-blog.com, (consulté le ).

Liens externes

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