Krim Belkacem

Krim Belkacem (en kabyle: Krim Belqasem), né le à Aït Yahia Moussa, dans la région de Kabylie, en Algérie, et mort assassiné le à Francfort, en Allemagne, par la Sécurité Militaire algérienne, est un homme politique algérien, chef historique du Front de libération nationale (FLN) durant la guerre d'indépendance algérienne. C'est Krim Belkacem qui signera l'acte d'indépendance de l'Algérie en bas des accords d'Évian en tant que plus gradé des anciens maquisards et seul membre des six qui ont déclenché le premier novembre encore en vie et non prisonnier et en tant que vice-président du GPRA[1].

Pour les articles homonymes, voir Krim Belkacem (homonymie) et Belkacem.

Krim Belkacem

Krim Belkacem à la fin des années 1940.

Surnom Le Lion des Djebels
Naissance
Aït Yahia Moussa (Algérie)
Décès  48 ans)
Francfort (Allemagne de l'ouest)
Origine Algérie
Allégeance FLN
Arme Armée de libération nationale
Grade Colonel
Années de service 19421962
Commandement Wilaya III
Conflits Seconde Guerre mondiale
Guerre d'Algérie
Faits d'armes Opération Oiseau bleu
Batailles en Kabylie
Bataille d'Alger
Hommages 1er novembre au carré des martyrs d'El Alia (Alger)
Autres fonctions Membre fondateur du FLN
(1954)
Membre fondateur et chef d'état-major de la Zone autonome d'Alger
(1956)
Membre du CNRA et du CCE
(1956)
Vice-président du GPRA
et ministre des Forces armées
(1958)
Négociateur et signataire des Accords d'Évian
(1961-62)
Fondateur du Mouvement démocratique pour le Renouveau algérien (MDRA)
(1968)
Famille Quatre enfants (deux filles et deux garçons)

Biographie

1945-1955 : jeunesse

Karim Belkacem est le fils d'un caïd, Hocine Krim[réf. nécessaire]. Il fréquente l'école Sarrouy à Alger et y obtient son certificat d'études. Le , il s'engage aux chantiers de jeunesse à Laghouat[2]. Son père, inquiet de l'intérêt de son fils pour les idées nationalistes, hâte son passage sous les drapeaux et le fait entrer dans l'armée en devançant l'appel de sa classe, le . Il devient un excellent tireur. Le , il est nommé caporal-chef au 1er régiment de tirailleurs algériens. Démobilisé le , il revient vivre à Draâ El Mizan où il occupe le poste de secrétaire auxiliaire de la commune.

Krim Belkacem adhère au PPA et commence à implanter des cellules clandestines dans douze douars autour de Draâ El Mizan, armé d'un pistolet-mitrailleur Sten. Les autorités françaises se rendant compte de son influence sur la population le convoquent le pour « atteinte à la souveraineté de l'État ». Après avoir pris l'avis du PPA, il prend le maquis (sous le pseudonyme de Si Rabah) avec Moh Nachid, Mohamed Talah, Messaoud Ben Arab. Des menaces et des mesures de rétorsion sont exercées sur son père qui refuse de livrer son fils. En représailles, il dresse une embuscade contre le caïd (son propre cousin) et le garde-champêtre. Le garde-champêtre est tué. En 1947 et 1950 il est jugé pour différents meurtres et condamné à mort par contumace.

Il devient responsable du PPA-MTLD pour toute la Kabylie, et à la tête des 22 maquisards qui composent son état-major il multiplie les contacts directs avec les militants et la population, il réussit à entraîner au moins 500 éléments dans son maquis à la veille de l'insurrection de novembre 1954. Son plus proche collaborateur est Amar Ouamrane, de trois ans son aîné. Le , Belkacem rencontre à Alger Mostefa Ben Boulaïd, puis Mohammed Boudiaf et Didouche Mourad, qui parviennent à le convaincre de la nécessité d'une troisième force.

Il ne rompt pas pour autant avec les messalistes, puisque deux de ses représentants (Ali Zamoum et Aït Abdesslam) participent en au congrès d'Hornu, en Belgique. Il passe un accord avec les cinq responsables du « groupe des 22 », rompt avec Messali en , sans tenir au courant les militants de son initiative. Devenu le sixième membre de la direction intérieure du FLN les six chefs historiques »), Belkacem est le responsable de la zone de Kabylie au moment du déclenchement de l'insurrection.

Belkacem encourage Abane Ramdane à accélérer les préparatifs de la réunion dont le bilan appellera à doter la Révolution d'un programme cohérent et de structures unifiées : le congrès de la Soummam qui se tient dans sa zone le et au terme duquel il devient l'un des membres les plus influents du CNRA et du CCE. Il s'installe dès lors avec le CCE à Alger mais continue à suivre de près le fonctionnement de sa wilaya[réf. nécessaire].

Durant l'été 1955, la résistance du FLN en Kabylie est de plus en plus virulente, or depuis l'insurrection, le MNA est devenu l'ennemi avéré du FLN. Les autorités civiles et militaires françaises vont utiliser stratégiquement à leur profit ces rivalités sanglantes[réf. nécessaire].

1956-1962 : opération Oiseau bleu

Le groupe des six, Belkacem en bas à gauche.

À l'automne 1956, les services secrets du SDECE, menèrent en Kabylie, dans la ville d'Azzazga d'abord puis chez les Iflissen, l'opération « Oiseau bleu », connue sous l'autre nom de « Force K ». Elle consistait dans la création de « contre maquis » clandestins destinée à lutter contre Belkacem et ses hommes. Les services secrets ont recruté 300 hommes, auxquels sont livrées armes et munitions : 200 armes de guerre arrivent en , et 80 en février-mars. Or, Mehlal Said, Zaidet Ahmed, Omar Toumi, Makhlouf Said et Hammadi réussissent à déjouer avec intelligence cette opération qui va tourner à leur avantage. Le chef de cette opération, le capitaine Hentic, découvre avec stupéfaction que les hommes recrutés sont de vrais militants du FLN, qui profitaient grâce à la « Force K » de la naïveté des Français. Le FLN put ainsi recevoir des armes de guerre qui lui servirent à exécuter ses rivaux du MNA et tout le personnel pro-français dont les cadavres, après mise en scène macabre, étaient présentés comme des maquisards FLN.

L'armée française se rend enfin compte qu'elle a été bernée. Il faut effacer cette humiliation. Le , la 27e DIA et le 3e RPC de Bigeard lancent l'opération « Djenad » avec 10 000 hommes afin d'anéantir les hommes de la « Force K », mais il est trop tard. La plupart des militants du FLN ont eu le temps de rejoindre les rangs de Krim Belkacem avec armes et bagages. La « Force K » a été immédiatement prise en main par le FLN. Krim Belkacem n'aura pas laissé passer l'occasion d'utiliser le paravent d'un prétendu maquis MNA pour se faire approvisionner en armes et en munitions par la France.

Krim Belkacem écrit une lettre au Gouvernement général :

« Monsieur le Ministre,

Vous avez cru introduire, avec la « Force K » un cheval de Troie au sein de la résistance algérienne. Vous vous êtes trompé. Ceux que vous avez pris pour des traîtres à la patrie algérienne étaient de purs patriotes qui n'ont jamais cessé de lutter pour l'indépendance de leur pays et contre le colonialisme. Nous vous remercions de nous avoir procuré des armes qui nous serviront à libérer notre pays. »


Cette sanglante mystification, réussie par Belkacem, a coûté à l'armée française plus de 250 fusils de guerre. Sous le couvert de la « Force K » le FLN avait éliminé en plus tous les militants du parti rival et ceux qui s'étaient placés du côté de la France. Depuis cette affaire Krim Belkacem jouit d'un prestige immense et son nom prend une dimension quasi mythique.

Novembre - , Krim Belkacem a pour mission de créer à Alger la Zone autonome d'Alger (ZAA), avec ses compagnons du CCE : Abane Ramdane, Larbi Ben M'hidi et Benyoucef Benkhedda, pour superviser la guérilla urbaine dans Alger, il s'attribua les liaisons avec toutes les wilayas, ce qui faisait de lui le chef d'état-major de la zone algéroise et le stratège de la lutte armée. Après la capture de son collègue Ben M'hidi durant la bataille d'Alger, il quitte précipitamment la capitale (). Accompagné de Benkhedda puis de Bentobbal, il rejoint la Tunisie par la voie du maquis.

Délégation du FLN - EVIAN

Krim Belkacem constitue désormais, avec Bentobal et Boussouf, le noyau dur des chefs sans lesquels rien ne peut se faire ou se défaire. À la formation du GPRA, le , Belkacem est au faîte de sa puissance: dernier membre actif du FLN, il est vice-président et ministre des Forces armées[3]. À la fin de l'automne, il est pourtant visé personnellement par la tentative de coup d'État des colonels Lamouri, Naouaoura et Aouacheria, soutenue par Gamal Abdel Nasser[4]. Dans le deuxième GPRA ( - ), il conserve la vice-présidence mais passe aux Affaires étrangères. Enfin dans le troisième, il cumule vice-présidence du GPRA et ministère de l'Intérieur. C'est à lui qu'est confiée la délégation aux négociations d’Évian et c'est lui qui signe, du côté algérien, les accords du même nom.

Dans la course au pouvoir qui suit le cessez-le-feu, Krim Belkacem s'oppose à Ben Bella et à l'État-major général. Lorsque se crée le groupe de Tlemcen (), il réplique en s'installant à Tizi Ouzou pour organiser la résistance au coup de force ben belliste (). Mais il est dépassé par la rapidité des évènements et leur complexité. Après la victoire de Ben Bella et de l'État-major, il se retrouve écarté de la vie politique, se consacre aux affaires et s'installe un moment en France.

1963-1984: Après l'indépendance

Krim Belkacem, Boudiaf, Ait Ahmed, Si Hmimi et autres a Beni Maouche en 1962.

Après le coup d'État du 19 juin 1965, il repasse dans l'opposition. Accusé d'avoir organisé au mois d' un attentat contre Boumédiène, manipulé et trahi par une partie de son entourage, il est condamné à mort par contumace. Selon sa fille Karima, dans un entretien accordé à El Moudjahid le , Belkacem renonça définitivement à la politique au mois d' : « Le , raconte-t-elle, il entassa précipitamment toute sa famille avec quelques effets dans la Volkswagen familiale et roula toute la nuit jusqu'au Maroc. Le lendemain, il est condamné par contumace ».

Commence alors un exil amer. Le , il crée avec des amis dont Slimane Amirat, les colonels Amar Ouamrane et Mohand Oulhadj, le Mouvement pour la défense de la révolution algérienne (MDRA)[5], parti clandestin destiné à lutter contre le régime de Boumédiène. Deux ans plus tard, le , on le retrouve étranglé avec sa cravate dans une chambre d'hôtel à Francfort, par les services secrets algériens de Kasdi Merbah, sur les ordres de Boumédiène[6],[7].

Il fut enterré dans le carré musulman de la ville allemande jusqu'au , date à partir de laquelle, réhabilité, il repose au « Carré des Martyrs » à El Alia, à Alger.

Notes et références

  1. « Krim Belkacem, un «blacklisté» de l’histoire | El Watan », sur www.elwatan.com (consulté le )
  2. https://www.memoria.dz/jui-2012/dossier/krim-belkacem
  3. « 20 août – 28 août 1957 : Le CNRA occulte le Caire - Algerie360 », sur www.algerie360.com, (consulté le )
  4. « Le complot des colonels », sur Guerre d'Algérie (consulté le )
  5. Achour Cheurfi, La classe politique algérienne: de 1900 à nos jours : dictionnaire biographique, Alger, Casbah Editions, , 511 p. (ISBN 9961642929), p.423
  6. Historia Magazine numéro 194, La Guerre d'Algérie, numéro 2, 29 septembre 1971.
  7. Assassinat de Krim Belkacem : Un hebdomadaire français s’interroge sur l’implication de Bouteflika, elwatan.com, 28 février 2019

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

  • Portail de l’Algérie
  • Portail de la Kabylie
  • Portail des Berbères
  • Portail de l’histoire militaire
  • Portail de la politique
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.