Joseph-Alexandre Le Turquier de Longchamp

Joseph-Alexandre Le Turquier de Longchamp était un prêtre et botaniste français, né à Bois-Héroult (Seine-Maritime) le 6 novembre 1748 et mort le 2 octobre 1829 à Rouen.

Son père, Joseph Alexandre Le Turquier, sieur de Longchamp, était garde du corps et écuyer du prince de Soubise. Il a eu deux fils et deux filles. Les deux fils entrent dans les ordres. L’ainé, Joseph Alexandre Le Turquier de Longchamp, fait sa philosophie et sa théologie au petit séminaire de Saint Nicaise de Rouen, où il est reçu boursier sur la recommandation du prince de Soubise, baron de Préaux[1].

Il est ordonné prêtre en 1775 en la paroisse de Butot, près de Clère. En janvier 1777, il est nommé à la paroisse de Colmare, près de Cailly, dont le curé est Jacques de Monsures, vieillard paralytique fort aimé de ses paroissiens. À la mort de ce dernier, l’abbé Le Turquier de Longchamp est nommé à la cure de Colmare, sur lettres de présentation du roi Louis XVI du 16 juillet 1780[2].

Durant cette affectation, il étudie les langues et les sciences, notamment la botanique, qui devenait une véritable passion, afin de connaître les vertus des plantes pour soigner les pauvres de la paroisse. Il acquiert ainsi la confiance de ses paroissiens qui, en 1790, l'élisent maire de Colmare[3].

Mais, en 1791, quand l'église doit passer sous le régime de l’État, il refuse de prêter serment. Pour éviter d'être condamné comme prêtre réfractaire, il choisit l'exil en Angleterre. Il se dirige d’abord vers la Belgique, la Westphalie et la Hollande où il est arrêté par les avant postes de l’armée française. Il avoue sa qualité de prêtre déporté et l'officier républicain qui, après un long interrogatoire, lui fournit un sauf-conduit. Il séjourne quelque temps à La Haye et passe enfin en Angleterre où il est attaché à la maison du comte de Provence, le futur Louis XVIII.

Ce séjour oisif lui permet de se consacrer à l'apprentissage des langues et de perfectionner ses connaissances en botanique. Il collecte des échantillons de végétaux qu’il compare avec l’herbier de Linné, conservé à Londres[4].

Un exil fécond outre-manche

À Londres, le jardin de Curtis fascine l'abbé de Longchamp par ces nombreuses plantes exotiques. L’herbier de Linné, que l’Angleterre conserve, devient son objet d’études favoris, en lui permettant de compléter les descriptions souvent trop succinctes du maître suédois. Il rentra en France en 1800, avec ses collections de plantes cueillies pendant son exil, d’autant plus précieuses qu’il avait pris le soin de confronter les espèces qu’elles renfermaient avec l’herbier de Linné. Hélas la douane française confisque son herbier pour l'examiner et, finalement l'égare. Profondément affecté par la perte du fruit d 'années de travail, il songe un instant à renoncer à l’étude de la botanique.

Précurseur de la botanique

L'abbé Le Turquier de Longchamp est le premier botaniste normand à avoir répertorié toutes les plantes de la région, Tréport à Gisors, en passant par Mantes, Vernon, Evreux, Bernav et Pont-Audemer. Le tout est rassemblé sous le nom de Flore des environs de Rouen, paru en 1816.

Il entretient une correspondance avec le marquis de Lafayette, passionné lui aussi de botanique et s'intéresse aux travaux du grand botaniste suédois Charles Linné, dont il adopte la classification et la méthode.

Rentré en France en 1800, il fait planter des arbres ("à l'anglaise") devenus majestueux (cèdres, séquoias, hêtres pourpres…)[5] aujourd'hui devenus Parc du Domaine de Bois-Héroult, de 7 ha, inscrit à l’Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques.

Il s'installe à l'Hospice-général de Rouen, où il retrouve son intérêt pour la botanique et commence à reconstituer son herbier. On pense son œuvre perdue, mais à sa mort, son herbier est récupéré par la Société des Amis des Sciences Naturelles de Rouen et une fois encore, on le déclare détruit pendant les bombardements de la Seconde guerre mondiale.

Il est élu à l'Académie de Rouen en 1814. Son discours d'entrée est resté mémorable: « Les végétaux doivent être considérés comme des êtres distincts [...] Quoi que les plantes soient dépourvues de sensation et privées de locomobilité, elles doivent être considérées comme des êtres vivants car, comme le dit LINNÉ, elles vivent comme des animaux, elles naissent et se nourrissent,elles acquièrent de l’âge, elles ont du mouvement, de la propulsion, elles sont sujettes à des maladies, elles meurent, on peut en faire l’anatomie, elles ont une organisation[6]...»

Une Association des amis de Le Turquier de Longchamp (400 Rue du Château 76750 Bois-Héroult) a été créée en juillet 2012[7]

Publications

  • "La Flore des environs de Rouen". Lire sur Gallica
  • Le Turquier De Longchamp et Levieux, Concordance des figures de plantes cryptogames de Dillen, Micheli, Tournefort, Vaillant et Bulliard, avec la nomenclature de De Candolle, Smith, Acharius et Persoon. Rouen. 1820. 8. Lire en ligne [archive]
  • «Catalogue de mes arbres étrangers au Bois Heroult », daté de «1775», liste exhaustive de tous les arbres plantés par le Marquis de Civille sous la dictée de Le Turquier de Longchamp.

Notes et références

  1. Le second fils, le chevalier de Longchamp, est également admis au Petit Séminaire, et, à sa sortie, nommé curé du Mesnil Raoult.
  2. Les termes de la pétition adressée à Mgr de la Rochefoucault, prouvent l’attachement inspiré à ses nouveaux paroissiens. (Extrait: « On adonné à M. de Monsures, pour desservir sa cure, un jeune ecclésiastique, homme d’un vrai mérite, qui joint à une naissance illustre toutes les qualités requises pour faire un excellent pasteur, de façon que, tant pour la tenue des pauvres que pour l’éducation des enfants et la discipline de la paroisse nous pouvons certifier et vous assurer que nous ne nous sommes point aperçus de la maladie de notre très respectable curé...».
  3. Étude sur Le Turquier de Longchamp, Précis de l'Académie de Rouen, 1870-1871, p.70-71,
  4. Séance publique de l’Académie des sciences, Belles-Lettres et Arts de Rouen, tenue le jeudi 10 août 1871, dans la grande salle de l’Hôtel de ville. Discours d’ouverture du Président M. le Dr. Emmanuel Blanche
  5. Hélas, la plupart ont été détruits par la tempête du millénaire.
  6. Discours de réception, prononcé par M. l'abbé Le Turquier Deslongchamp, 11 février 1814 à l’Académie de Rouen
  7. Objet de l'association : promouvoir, défendre, faire connaître, développer, mettre en valeur, l'image et l'euvre de le turquier de Longchamp, organiser et animer toutes manifestations dans ce but, en soulignant la contribution de l'oeuvre de le Turquier de Longchamp notamment en matière de développement de nouveaux concepts dans les domaines de l'écologie et de l'environnement

Bibliographie

Le Turq. est l’abréviation botanique standard de Joseph-Alexandre Le Turquier de Longchamp.

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