Jeux floraux (Catalogne et Valence)

Les Jeux floraux (en catalan Jocs florals ; Jochs florals en catalan ancien ; ou encore Jocs de la Gaia Ciència) sont des joutes poétiques en langue catalane instaurées à Barcelone et à Valence au XIXe siècle, inspirées de celles autrefois célébrées par l'Académie des Jeux floraux du Languedoc.

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L'instauration des Jeux floraux marque une étape importante dans le mouvement de renouveau des langue et culture catalanes connu sous le nom de Renaixença (« Renaissance »), et qui en Catalogne constitue le prélude à la politisation du catalanisme[1].

Au début du XXe siècle, ils inspirent l'instauration des Jeux floraux internationaux, concours espérantiste similaire célébré en Catalogne.

Origines

L'origine des Jeux floraux de Catalogne et Valence se trouve dans ceux que célébrait l'Académie des Jeux floraux de Toulouse, instaurés en 1323 et célébrées jusqu'en 1484, auxquels participaient également des troubadours et poètes de la couronne d'Aragon (l'occitan étant alors considéré comme la langue savante et utilisé dans la plupart des manifestations littéraires, particulièrement poétiques). À partir de 1393, et à l'initiative du roi Jean Ier d'Aragon, les jeux furent instaurés à Barcelone et se tinrent jusqu'à la fin du XVe siècle sous la bienveillance des monarques de la couronne d'Aragon.

Jeux floraux de Barcelone

Le premier dimanche de , les Jeux floraux sont réinstaurés à Barcelone à l'initiative d'Antoni de Bofarull et Víctor Balaguer, sous le slogan Patria, Fides, Amor (« Patrie, foi, amour ») en référence aux trois prix traditionnels : la Fleur naturelle ou prix d'honneur (octroyée à la meilleure poésie amoureuse), l'Églantine d'or (à la meilleure poésie patriote) et la Violette d'or et d'argent (au meilleur poème religieux). Celui remportant éventuellement les trois prix est investi du titre de « Maître en gai savoir ». Il existe également des prix exceptionnels comme la Coupe artistique, concédée à la meilleure composition en prose, ou d'autres procurés par des mécènes ou des institutions particulières.

Les Jeux reçoivent le soutien d'amples secteurs intellectuels ou politiques de Catalogne, contribuant à conférer un certain prestige à la littérature catalane savante. Ils sont l'occasion de la manifestation de divergences concernant le modèle de langue à adopter : Marià Aguiló défend un modèle prenant en considération les auteurs issus de toutes les variantes dialectales ; Antoni de Bofarull milite pour sa part pour l'adoption d'un modèle basé sur les classiques littéraires des XVIe et XVIIe siècles et le dialecte barcelonais ; il existe enfin une troisième voie (parfois partiellement convergente avec la précédente) ne disposant pas d'un défenseur notoire dans les Jeux et qui promeut l'utilisation du catalan contemporain parlé à Barcelone.

Les Jeux floraux rassemblent des participants issus d'idéologies distinctes et parfois opposées, en particulier républicains et conservateurs. Les discours tenus aux Jeux reflètent cette diversité idéologique et sont devenus un point de référence important dans l'étude du débat interne sur la langue et les évolutions rencontrées par les participants[2].

À partir de la fin du siècle, les Jeux commencent à être perçus comme une institution anachronique et diverses tentatives de modernisation ont lieu. La plus importante et celle de 1914, proposée par Josep Carner et ses proches, mais ne rencontre pas de succès significatif. Le point le plus débattu est la question de l'utilisation ou non de normes orthographiques conformes à celles récemment élaborées par Pompeu Fabra et promues par l'Institut d'Estudis Catalans. Le dilemme ne sera tranché qu'en 1934 avec l'adoption définitive de ces normes. Ainsi, l'adoption en 1932 des Normes de Castelló (adaptation au valencien des Normes ortogràfiques de 1913) et leur apparition dans les Jeux floraux de Valence tenus par l'institution Lo Rat Penat, précède l'adoption des normes de Fabra par les participants aux Jeux de Barcelone.

En raison de la répression des langues vernaculaires durant la Dictature de Primo de Rivera (1923-1930), les Jeux sont célébrés à Toulouse en 1924. En 1925, leur célébration étant interdite, ils sont remplacés par un hommage au cours duquel les maîtres en gai savoir encore en vie élisent les meilleurs poèmes des maîtres défunts. De 1926 à 1929, en l'absence de cérémonie publique la remise des prix se tient en privé, au domicile des présidents du consistoire des jeux.

En raison de la guerre civile (1936-1939) puis de l'instauration de la dictature franquiste (1939-1975), les derniers Jeux floraux de Barcelone sont tenus en 1936. Ils sont repris par les Catalans en exil et célébrés à divers lieux dans le monde à partir de 1941 sous le nom de « Jeux floraux de la langue catalane ». Les fonds d'archives des Jeux sont conservés par la municipalité de la ville[3].

Jeux floraux de la ville et du royaume de Valence

Lo Rat Penat.

Les Jeux floraux sont également introduits à Valence au XIXe siècle, sous la direction de l’association culturelle Lo Rat Penat et sous le nom de « Jeux floraux de la ville et du royaume de Valence » (Jocs Florals de la Ciutat i Regne de València). Les prix ordinaires sont au nombre de 17 et plusieurs autres prix sont décernés par des entités publiques ou privées (chacune des trois députations provinciales de la région, ainsi que la Généralité valencienne, l'archidiocèse de Valence etc.)

Depuis la fin des années 1970 et en conséquence du conflit identitaire de la Bataille de Valence survenu durant la Transition démocratique, les Jeux floraux accueillent des auteurs suivant les Normes del Puig, utilisées par des secteurs considérant le valencien comme une langue différente du catalan.

En 2008 est célébrée leur 125e édition.

Bien qu'avec une ancienneté moindre, d'autres Jeux floraux sont également célébrés dans la ville de Nules (province de Castellón), les Jocs Florals de la Vila de Nules, dont la 55e édition est tenue en 2008.

Jeux floraux du Pays basque

Les Jeux floraux ont démarré au Pays basque sous l'impulsion d'Antoine d'Abbadie d'Arrast afin de revitaliser la culture et identité basques, lesquelles étant plongées dans la crise après la perte de leur cadre légal et institutionnel pendant la Révolution française. En 1851, les premiers Lore jokoak sont tenus à Urrugne avec des concours de littérature et bertsos écrits. Ils ont continué avec cette dénomination jusqu'à la mort d'Abbadia en 1897, mais leur influence a continué aux deux côtés de la frontière franco-espagnole longtemps après son décès.

Les Lore jokoak ont contribué notamment à la renaissance de la conscience basque lors de la deuxième moitié du XIXe siècle.

Jeux floraux de la Gineste d'or

La Compagnie littéraire de la Gineste d'or (Companyia Literària de la Ginesta d'Or en catalan) est créée à Perpignan en 1923 sous l'impulsion d'Horace Chauvet. La première édition des jeux floraux de la Gineste d'or a lieu en 1924, pour coïncider avec le sixième centenaire de ceux de Toulouse. La participation peut s'y faire en catalan ou en français. Le succès de cette manifestation fut considérable, considérant l'oppression subie alors par le catalan en Espagne. Ces jeux permettront notamment de révéler le poète et écrivain Jordi Pere Cerdà[4].

Quelques auteurs s'étant distingués par leur participation aux Jeux floraux

Notes et références

  1. Jordi Casassas et Carles Santacana (trad. Paul Aubert), Le Nationalisme catalan, Paris, Ellipses, coll. « Les essentiels de civilisation espagnole », , 207 p. (ISBN 978-2-7298-0786-3), p. 25
  2. (ca) Joan Manuel Prado (dir.), Història de la Literatura Catalana, col. « fascicles de l'Avui », Edicions 62, 1989, vol I.
  3. (ca) Fons de l'Arxiu Medieval i Modern, site de la municipalité de Barcelone.
  4. Enciclopedia.cat

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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