Indépendance du Guyana

L'indépendance du Guyana a lieu entre 1966, lorsqu'est rédigée une nouvelle constitution, et 1970, lorsque le parlement guyanais choisit le statut de République socialiste dite « coopérative ».

Drapeau du Guyana
Situation géographique du Guyana

Cette ancienne colonie britannique, alors appelée « Guyane britannique », prend le nom de Guyana lors de son indépendance. Le Guyana subit dans les années 1950 la mouvance internationale d'indépendance. Au Guyana, cette volonté d'indépendance est le fruit de deux faits : une division ethnique interne importante entre les Indiens, Métis, et Africains ce qui empêche toute unité nationale. Et une importante main mise de la Couronne sur les institutions du pays qui favorisent un climat belliqueux entre la colonie et sa métropole. Ces dissensions sont portées par un mouvement, le People's Progressive Party (PPP) mené par Cheddi Jagan. Ce parti est multiracial et regroupe toutes les communautés du pays. Son appartenance aux idées communistes est très fortement revendiquée du fait de son rapprochement avec des partis communistes comme ceux de l'URSS, de l'Inde et de la Jamaïque.

En 1953, les revendications des populations sont entendues et la Couronne décide de créer une nouvelle constitution. Cela donne pour la première fois aux guyanais le suffrage universel et un bicaméralisme. C'est une volonté pour la Grande-Bretagne de préparer le pays à son indépendance. Les premières élections législatives connaissent un grand succès et donne au PPP un score important. Ce parti occupe dix-huit sièges sur vingt-quatre à l'Assemblée. C'est sans compter sur une importante répression armée de la Grande-Bretagne, qui supprime cette constitution et démantèle le parti.

Quelques années plus tard, à la suite de divisions internes du PPP, apparait le People's National Congress (PNC) dirigé par Forbes Burnham. Ce nouveau parti crée en 1970 une république dite « coopérative ». Cette république donne une entière indépendance officielle au Guyana, même si le pays continue à faire partie du Commonwealth. À la suite de son indépendance le pays connait d'importants bouleversements, notamment économiques. Le régime communiste ne fonctionne pas et plonge le pays dans une importante crise économique et le pouvoir devient autoritaire. De plus, par ses positions politiques, le pays s'éloigne du bloc de l'Ouest et, notamment, se trouve en conflit avec son ancienne métropole[1]. [2].

Volonté d'indépendance

Colonie de la Couronne

Dans les années 1950, une mouvance internationale d'indépendance se crée, cette volonté d'indépendance est marqué par le climat belliqueux qui nait entre les blocs soviétique et Américain. Ce deux pôles prônent des idéologies communistes et capitalistes très différentes. Notamment l'idéologie communiste accélère l'indépendance de certains pays colonisés. Cela dans une volonté de s'émanciper du système capitaliste et de l'emprise des Européens. Cette succession d'élément extérieur influe sur l'accélération de l'indépendance de la Guyane britannique. Le climat intérieur du pays est également acteur de cette émancipation. Et ainsi dirige le pays vers des tendances communistes à but indépendantiste.

Le Guyana, anciennement appelé « Guyane britannique » devient un état indépendant de la Grande-Bretagne en 1966, tout en restant dans le Commonwealth. Cette ancienne colonie est la seule colonie de l'Empire britannique en Amérique du Sud. En 1815, trois colonies hollandaises, Essequibo, Berbice et Démérara, sont cédées au Royaume-Uni. Ces colonies vont garder des administrations distinctes jusqu'en 1831, année où elles sont rassemblées en une seule colonie[3].

Évolution du système institutionnel du pays

Le système administratif hollandais est conservé temporairement. Un Gouverneur et une Court of Policy possèdent les pouvoirs exécutifs. Le Court of Policy est composé de huit membres, dont quatre représentants sont des planteurs, élus par un collège restreint dit des « Kiesers » et quatre autres membres sont nommés. Six autres membres s'ajoutent à cette assemblée, toutes les fois où il faut traiter des mesures fiscales où financières, cette assemblée s'élargit et s'appelle alors le Combined Court (en). Une large majorité des membres sont élus au suffrage censitaire. Ce système fonctionne jusqu'en 1834, également la date de l'abolition de l'esclavage dans le pays. Cette assemblée ne siège qu'occasionnellement, et elle retarde l'instauration d'un nouveau système politique et institutionnel instauré par la Couronne. C'est notamment à la suite d'un rapport de l'inspection médicale défavorable aux planteurs, que des modifications s'opèrent dans la constitution. Les représentants élus protestent contre cette inspection durant plusieurs mois et refusent de sièger au Court of Policy. Cela bloque toutes procédures et de cette façon, en 1891 est mis en place une réforme. Cette réforme prévoit d'abolir le collège des Kiesers, prévoit l'instauration du scrutin direct , l'abaissement du Cens ainsi que la réduction de la durée de la législature qui passe de sept à cinq ans. Ses mesures sont mises en place dans le but d'affaiblir le pouvoir de l'Assemblée au profit d'un Conseil exécutif. De cette manière la Couronne britannique possède davantage de main mise sur la politique de sa colonie[4],[5].

C'est une commission ad hoc qui abolit l'Assemblée afin de créer un nouveau conseil législatif. Cette fois, les membres sont nommés, cette réforme a lieu en 1927 et met la Guyane britannique au même régime que les autres colonies de la Couronne. Cette même année, la Guyane britannique adopte officiellement le statut de « Colonie de la Couronne ».

Cette réforme institutionnelle, c'est-à-dire la nomination des membres de l'Assemblée, est très mal accueillie. Dans l'ancien système, les assemblées élisaient des membres de la classe moyenne, des Portugais et des métis par exemple. Cela était l'occasion pour ces membres de se voir confier des responsabilités politiques et d'ainsi accéder à des positions sociales plus importantes. Ce nouveau système est le témoin d'une main mise très importante de la Grande-Bretagne sur la politique et sur les institutions de la Guyane britannique[4].

Division interne

Par ailleurs, le pays connait déjà des divisions internes par ses différentes communautés : Métis, Indiens, Chinois, Africains. Elles ont des tempéraments et intérêts qui divergent beaucoup. De cela nait un fort esprit d'opposition et ne donne aucune unité nationale au pays. C'est dans un climat interne très délicat socialement que la Guyane britannique évolue au sein de l'Empire britannique[6].

Création du PPP

Cheddi Jagan, leader du PPP.

Le People's Progressive Party est fondé en 1949 par un jeune dentiste d'une trentaine d'années formé aux États-Unis : le docteur Cheddi Jagan, de souche Hindoue. Le pays traverse dans les années 1940 une crise interne, la politique de la Grande-Bretagne sur le pays est de plus en plus oppressante et les différentes communautés ont besoin d'être guidées par une même voix. Ce climat est très favorable à l'implantation du PPP. Cheddi Jagan s'efforce dans un premier temps de réconcilier le pays en se présentant comme un parti multiracial. En effet, avant l'arrivée du PPP, chacune des Communautés possèdent un mouvement politique qui défend ses intérêts spécifiques. Ainsi ses mouvements politiques s'opposent les uns aux autres. Cheddi Jagan veut réconcilier le pays mais également, son parti a pour objectif l'indépendance de la Guyane britannique. Le PPP s'inspire du parti progressiste constitué aux États-Unis par Wallace et Robeson, afin de combattre la politique de Guerre froide des États-Unis. Également le PPP s'inspire du People's National Party, le parti de Michael Manley en Jamaïque. Le People's Progressive Party apparait dans le contexte de la guerre froide et est fortement sympathisant du camp soviétique dès ses débuts. L'émergence de ce parti est important en Guyane britannique, d'autant plus à la suite des élections législatives de 1953. Cette victoire inquiète très fortement la Couronne, qui à une réaction très brutale. Nul doute sous la pression américaine, Londres envoie des forces armées sur place[7],[8],[9].

Le tournant de l'année 1953

L'année 1953 est marquée par deux événements importants politiquement.

Constitution de 1953

Drapeau du PPP.

L'année 1953 est marquée par la mise en place d'une nouvelle Constitution plus libérale par le gouvernement de Winston Churchill. Cette constitution introduit pour la première fois le Suffrage universel et prévoit également un Système Bicamérisme. Ce système bicaméral est composé d'une chambre d'Assemblée et d'un Conseil d'État. Ainsi, c'est la première fois dans l'histoire de cette colonie que les deux pouvoirs : Exécutif et Législatif sont distincts d'un de l'autre. Le Pouvoir exécutif correspond au conseil des ministres et comprend la présidence du Gouverneur. Ce dernier a une voix prépondérante mais perd sa prérogative de vote. Également trois grands officiers de la Couronne sont au Pouvoir exécutif: un secrétaire colonial, un chef de l'administration, un secrétaire financier du procureur général. Ainsi que des fonctionnaires issus de la chambre haute ou du conseil législatif. Le pouvoir législatif comporte une Chambre de vingt-quatre membres élus au suffrage universel. Cette constitution a pour but d'exercer une vie Démocratique(sous la direction des hauts officiers de la Couronne) à la population guyanaise. Et d'accéder progressivement à l'autonomie interne. Cela dans le cadre du Commonwealth tel que d'autres Colonies britanniques comme la Jamaïque ou encore Trinidad. Par ailleurs, cette constitution est la dernière étape imaginable avant une l'autonomie interne. Le Gouverneur est obligé sauf cas exceptionnel, de consulter le Conseil d'État avant de prendre des décisions. Il est important de rappeler que même avec une nouvelle constitution, la Couronne conserve sa main mise sur la politique guyanaise car le Gouverneur du pays est nommé et élu par le pouvoir britannique. Cette nouvelle constitution débouche sur de nouvelles élections générales qui ont lieu la même année[10],[11].

Élection législative de 1953

Le deuxième événement important est l'élection législative de l'année 1953. En effet, ces élections sont marquées par l'important score du People's Progressive Party qui obtient 51 % des votes, soit 18 sièges sur 24 à la Chambre d'Assemblée. Ce parti multiracial en faveur de l'indépendance du pays est un parti à tendance communiste. Ces élections sont les premières faites au suffrage universel et elles rencontrent un réel succès avec une très forte participation de 74,8 % de votants. À l'issue de cette élection le PPP obtient six ministères et le leader Cheddi Jagan devient ministre de l'Agriculture, puis est élu président de la Chambre d'Assemblée. Le PPP détient six sièges sur dix au Conseil d'État. Cette importante victoire du People's Progressive Party témoigne de la volonté d'accéder à l'indépendance des guyanais[12].

Intervention de la Couronne

La décision est prise d'envoyer de toute urgence une force militaire et navale en Guyane britannique « en vue de préserver la paix et la sécurité de toutes les classes », selon le Colonial Office. Sur place, les autorités britanniques poursuivent une politique de répression importante. Par exemple, les organisations annexes au PPP telles que la Ligue des jeunes pionniers ou le Comité de la paix sont déclarées illégales. En mai 1954, la police ferme le siège central du PPP à Georgetown. Le leader, Cheddi Jagan, est limité dans ses déplacements puis est condamné à six mois de prison avec travaux forcés. Pour la Grande-Bretagne, ce parti veut uniquement accéder au pouvoir pour instaurer un État communiste et est à l'origine de nombreux incidents. Par exemple, la Couronne reproche au leader du PPP en fonction des abus de droit de nomination au Conseil d'État et à la Chambre d'Assemblée. Ou encore de saper le loyalisme de la police et tenter de s'emparer du contrôle des services publics. Il est prouvé[réf. nécessaire] que durant leur réunion, Cheddi Jagan et ses ministres ont mis au point un plan afin d'incendier les immeubles/résidences d'Européens influents et de membres du gouvernement. Le pays se trouve ainsi dans une situation de détérioration très avancée de l'inefficacité de son administration, de son économie et de sa sécurité. Cette détérioration menace le peuple guyanais lui-même.

Face à cette situation, le Gouvernement britannique suspend la Constitution de 1953 et prive les ministres de leurs pouvoirs. En attendant un arrêté du Conseil d'État, sur la Constitution, des mesures sont prises afin que le Gouverneur ne soit plus obligé d'agir sur ordre du Conseil exécutif, mais librement. L'action du gouvernement britannique est perçue comme un soulagement sur le territoire et par le Parlement britannique. Cette répression n'endigue pas le People's Progressive Party pour autant[13]. Cette répression durera de 1953 à 1955. Les États-Unis font pression sur la Grande-Bretagne pour intervenir militairement[réf. nécessaire]. Cette pression incite le gouvernement britannique à agir de manière très répressive. Les États-Unis s'intéressent au Guyana, en effet depuis 1940, et ont manifesté leur intérêt politique et militaire pour le pays. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement britannique a autorisé les Américains à établir une base navale sur le fleuve Essequibo et une base aérienne à Atkinson Field, à Timehri. Depuis que le PPP a gagné les élections législatives, les États-Unis sont très attentifs à ce qui se passe dans le pays. En effet si le pays prend son entière indépendance, les installations militaires américaines seraient inaccessibles[14].

Vers l'indépendance

Une mouvance hindouiste à l'origine de l'indépendance

Le PPP est important dans l'histoire de la Guyane britannique car il unit les différentes communautés vers lui avec un objectif commun : l'indépendance. Malgré une forte répression des Britanniques sur les leaders et les différents organismes du PPP, le mécanisme d'indépendance est mis en place. Cette transition par étape va prendre quelques années et quelques influences, notamment communistes[15].

Le People's Party Progress est sans nul doute le parti des Hindous. La communauté hindoue est unie par une étrange solidarité raciale malgré leurs différences de fortune. En effet, un grand nombre d'hindous, dans les années 1950, forme une partie importante de la fortune du Guyana. Celle-ci se trouve entre les mains d'un grand nombre d'hindoue car nombre d'entre eux sont des propriétaires terriens. Venus pour remplacer les esclaves noirs affranchis au milieu du XIXe siècle, ils sont restés dans leur condition de paysans et d'une manière misérable. De plus, les Britanniques se sont plus préoccupés d'en faire de bons agriculteurs ou de bons ouvriers qualifiés, que d'en faire des citoyens avertis de leurs devoirs[16].

Ces hindous s'identifient très bien avec le nationalisme que l'on observe s'éveiller chez les peuples coloniaux. En effet, l'accession à l'indépendance de l'Inde a stimulé chez eux l'éveil d'un sentiment national. Cela s'observe notamment par le fait qu'ils fêtent l'anniversaire de l'indépendance de l'Inde. Habillés de blanc et coiffés d'un calot blanc, les femmes drapées de saris. Les campagnes de la Guyane britannique sont aux couleurs de l'Inde et les fêtes hindoues font voyager dans les faubourgs de Bombay. Ce sentiment nationaliste refait surface dans les années 1950. C'est aussi un regain de la religion musulmane et hindouiste en Guyane britannique qui est conducteur de cette volonté d'indépendance, notamment mené par le PPP[16][17].

Division politique interne

Forbes Burnham, dirigeant du PNC.

Cheddi Jagan est Chief Minister jusqu'en 1961, mais le pouvoir réel reste entre les mains du gouverneur, nommé par la Grande-Bretagne. Comme il l'écrit, le PPP est en charge mais non au pouvoir. Constitutionnellement, les ministres ne sont que des conseillers du gouverneur. Cheddi Jagan est ministre du Commerce et de l'Industrie. Forbes Burnham est le porte-parole des citoyens d'origine africaine. En , de nouvelles élections ont lieu et le pays connait une nouvelle évolution institutionnelle vers l'autonomie. Trois partis s'affrontent, le People's Progressive Party (PPP) de Cheddi Jagan, le People's National Congress (PNC) de Forbes Burnham, et le United Force de Peter d'Aguiar. En 1961, le PPP obtient vingt sièges, le PNC onze sièges, et United Force quatre sièges[18][17].

L'objectif de Cheddi Jagan demeure l'indépendance. La puissance coloniale britannique paraît prête à l'accorder, suivant un certain délai. Un accord est obtenu pour la tenue d'une conférence en mai 1962 afin d'étudier les questions de l'accession de la Guyane britannique à son indépendance. En fait, la conférence ne s'ouvre qu'en , interrompue, puis elle reprend en octobre 1963. Le processus d'évolution institutionnelle est affecté par les troubles qui affaiblissent l'autorité de Cheddi Jagan[19].

En 1962, la politique fiscale du gouvernement est mise en cause. Cette politique consiste à réaliser un plan d'épargne en prélevant 100 dollars guyanais par mois sur les revenus, les profits : les sommes prélevées par le gouvernement donnent lieu à des bons portant 3,75 % d'intérêt. Cette politique suscite l'opposition de Forbes Burnham et de Peter d'Aguiar. Des manifestations sont organisées en à Georgetown avec comme mot d'ordre : « Axe the tax, slavery if Jagan get independence ». Ces incidents prennent une tournure d'une extrême gravité avec des incendies, pillages, le meurtre d'un policier, et plusieurs manifestants tués. En avril 1963, une grève générale démarre le et va durer 80 jours. Elle est provoquée par le Labour Relation Rule. Les désordres sont tels que Cheddi Jagan est obligé de demander l'intervention des troupes britanniques. La grève ne s'arrêtera que le . En 1964 une nouvelle crise sociale éclate avec la grève du Guyana Workers Union, lequel demeure le seul syndicat reconnu. Cette grève entraîne de graves troubles à connotations raciales, 176 personnes seront tuées. Le Gouverneur britannique assume le pouvoir exécutif[18].

Des élections générales se tiennent en sur la base de la proportionnelle. Le PPP obtient 45,8 % des voix, soit vingt-quatre sièges, le PNC 40,5 %, soit vingt-deux sièges, et le United Force 12,4 % des voix, soit sept sièges. Le gouvernement est dirigé par Forbes Burnham, qui n'hésite pas à s'allier avec la United Force et obtient l'indépendance proclamée le [19].

Après l'indépendance

Direction politique du nouvel État

Drapeau du People's National Congress.

Le Guyana accède à l'indépendance dans un contexte international et interne particulier. Des divisions sociales, ethniques et politiques se font ressentir. Cela crée d'importants changements notamment par de nouvelles directions politiques, économiques et diplomatiques. Ces nouvelles politiques affectent les relations entre le Guyana et son ancienne métropole, la Grande-Bretagne[11].

Le Guyana connait après son indépendance des évolutions institutionnelles. Notamment le , lorsqu'elle devient une république « coopérative ». La République coopérative avait été définie précédemment par Forbes Burnham dans un discours prononcé lors d'une conférence régionale du PNC le . Au travers de cette coopérative, une volonté que l'homme humble puisse posséder une part des grandes entreprises. Dans cette république, Forbes Burnham ne veut plus que sa population soit faite de tireurs d'eau et de travailleurs forestiers. C'est un système qui se présente différent des mouvements coopératifs dans les pays capitalistes ou des systèmes socialistes des pays de l'Europe de l'Est. Car dans ces cas, le pouvoir appartient à des capitalistes ou à des dirigeants du Parti communiste. Ce que Forbes Burnham veut, c'est concurrencer l'entreprise privée[11].

Le Guyana est une république mais fait toujours partie du Commonwealth, il est doté d'un président au pouvoir plutôt honorifique. Il s'agit dans un premier temps d'Arthur Chang, un homme d'origine chinoise. Puis, lors d'une nouvelle étape en octobre 1980, est promulguée une constitution élaborée par une assemblée constituante en 1978, laquelle comporte 232 articles[11].

Gouvernement autoritaire de Burnham

Forbes Burnham passe avant 1966 pour un anticommuniste face à Cheddi Jagan. Mais depuis, Burnham s'est rapproché de Cuba et de l'Union soviétique, deux pays ayant des ambassades dans la capitale du Guyana, Georgetown. En ce qui concerne l'organisation des pouvoirs publics, la constitution rompt avec le système de Westminster. Le Chef de l'État, le Président, le chef de la majorité parlementaire, détient effectivement le pouvoir exécutif. C'est lui qui désigne le Cabinet, même s'il y a un Premier ministre. Une Assemblée nationale est élue au suffrage universel, elle comprend 53 membres élus pour cinq ans. À ces cinquante-trois membres s'ajoutent douze membres représentant les régions. Cette nouvelle constitution prévoit deux organes originaux :

  • Le Congrès national des organes démocratiques locaux, représentant les intérêts des dix régions ;
  • Le Suprême Congrès du peuple, constitué des membres de l'Assemblée nationale et des membres du Congrès national des organes démocratiques locaux. Cet organe a un rôle plus consultatif que délibératif.

C'est Forbes Burnham qui devient président en même temps que la promulgation de la Constitution en 1980. Il restera président jusqu'à sa mort en août 1985. Son parti, le PNC, emporte les élections de 1980 avec 77 % des suffrages, ceci non sans accusations de fraude de la part des dirigeants de l'opposition, le PPP de Cheddi Jagan. Les pratiques électorales exercées par le PNC sont douteuses et s'accompagnent d'une politique de restrictions des libertés. Notamment en 1981, quand les dirigeants de l'opposition sont arrêtés et poursuivis en justice. Le régime de Forbes Burnham va évoluer vers une forme d'autoritarisme[20].

Politique économique de nationalisation

L'orientation de ce nouvel État est socialiste. Cette orientation est affirmée par le pays, qui se dit en transition du capitalisme vers le socialisme. Par exemple, l'économie se développe en accord avec les lois économiques du socialisme[Lesquelles ?] ou encore, la planification de l'économie nationale sur le principe de base du développement et de la gestion de l'économie. De 1971 à 1976 le gouvernement nationalise presque toutes les sociétés étrangères, faisant passer sous le contrôle de l'État 80 % de l'économie. Par la même occasion sont nationalisées cinq banques, trois compagnies d'exploitation de la bauxite et toutes les sociétés sucrières. Cette politique favorise l'émergence d'une bureaucratie chargée de gérer les entreprises nationalisées. Cette politique économique est fondée sur un arrière-plan de revanche ethnique. Cette politique suscite des difficultés, par exemple, le prix des denrées d'exploitation fléchissent alors que le prix du pétrole, dont le Guyana est importateur, augmente. Les conséquences des difficultés économiques : raréfaction des denrées de première nécessité, difficulté en matière de fourniture et d'eau potable. Le chômage et le marché noir se développent et en dépit de son orientation, le régime doit faire face à des grèves en 1984. En décembre, Forbes Burnham est amené à concéder une augmentation des salaires minimum quotidiens, la première augmentation depuis 1979. Avec cette politique, copiée sur le modèle soviétique, le pays bascule vers l'autoritarisme[21],[10].

Des conséquences diplomatiques

Au niveau international, le globe est plongé dans la guerre froide. Le Guyana exprime ouvertement son allégeance au Bloc soviétique en partisan avec l'URSS, la Jamaïque, l'Inde... Ces rapprochements et la politique autoritaire menée par Forbes Burnham affectent les relations avec les États-Unis et la Grande-Bretagne, pays qui sont directement ou indirectement bailleurs de fonds. L'invasion de la Grenade par les forces armées américaines est condamnée par les dirigeants et inversement le Guyana refuse de condamner la destruction d'un Boeing sud-coréen par l'aviation soviétique en 1983. Les attitudes du Guyana ne sont pas de nature à susciter la compréhension américaine. Le rapprochement avec le Bloc de l'Est est notamment palpable lorsqu'en août 1985, Forbes Burnham meurt des suites d'une opération et son corps est envoyé en Union soviétique pour y être momifié gratuitement. Il s'agit là d'un ultime acte d'allégeance au camp socialiste[22],[23].

Notes et références

  1. Adélaïde-Merlande 2002, p. 59-65.
  2. Barbiche 1989, p. 87-92.
  3. Barbiche 1989, p. 90.
  4. Barbiche 1989, p. 88.
  5. Adélaïde-Merlande 2002, p. 162.
  6. Barbiche 1989, p. 89-92.
  7. Adélaïde-Merlande 2002, p. 60-61.
  8. Barbiche 1989, p. 132.
  9. Odeen 2014, p. 406.
  10. Legray 1953, p. 317-318.
  11. Adélaïde-Merlande 2002, p. 166.
  12. Bulmer-Thomas 2015, p. 84-85.
  13. Bulmer-Thomas 2015, p. 61.
  14. Odeen 2014, p. 447.
  15. Legray 1953, p. 318.
  16. Legray 1953, p. 319.
  17. Adélaïde-Merlande 2002, p. 169.
  18. Legray 1953, p. 316.
  19. Adélaïde-Merlande 2002, p. 165-166.
  20. Adélaïde-Merlande 2002, p. 167.
  21. Adélaïde-Merlande 2002, p. 168-169.
  22. Adélaïde-Merlande 2002, p. 168.
  23. Barbiche 1989, p. 95.

Annexes

Bibliographie

Ouvrages
  • (fr + en) Jacques Adélaïde-Merlande, Histoire contemporaine de la Caraïbe et des Guyanes, Paris, Karthala, .
  • Jean-Paul Barbiche, les Antilles britanniques, Paris, L'Harmattan, .
  • Ivor Bulmer-Thomas, Empire Britannique, Bruxelles, Institut de Sociologie de l'université de Bruxelles, .
  • Jean-Claude Giacottino, Les Guyanes, Paris, PUF, .
  • (en) Ishmael Odeen, The Guyana Story, États-Unis, Xlibris, .
Article

Articles connexes

Lien externe

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