Hippolyte Aucouturier

Hippolyte Aucouturier, né le à La Celle (Allier) et mort le à Paris, est un cycliste français. Surnommé « le Terrible », il a notamment remporté plusieurs étapes du Tour de France, dont il s'est classé deuxième en 1905. Il s'est également illustré dans des courses renommées comme Paris-Roubaix, qu'il a remporté en 1903 et 1904, et Bordeaux-Paris, qu'il a gagné à deux reprises, en 1903 et en 1905.

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Biographie

Hippolyte Aucouturier naît à La Celle, dans le département de l'Allier, le . Il exerce tout d'abord la profession de caviste, dans une épicerie. Il travaille ensuite comme inspecteur des appareils récepteurs télégraphistes utilisées dans les agences bancaires pour suivre les cotes de la Bourse et s'installe à Commentry[1].

Débuts chez les professionnels (1900-1902)

Il commence sa carrière de cycliste professionnel en 1900, année où il prend la 5e place de Bordeaux-Paris et la 8e de Paris-Roubaix[2]. La même année, il remporte sa première victoire le 2 octobre sur la course Toulouse-Luchon-Toulouse devant Maurice Garin[3]. En décembre, il participe aux Six jours de New York sur la piste du Madison Square Garden en compagnie de Rodolfo Muller[4].

En 1901, Hippolyte Aucouturier abandonne sur Paris-Roubaix puis se classe 2e de Bordeaux-Paris le 5 mai derrière Lucien Lesna, qu'il accompagne en début de course avant de lâcher prise entre Ruffec et Couhé-Vérac[5]. Cette seconde place dans l'épreuve lui offre une prime de 1 000 francs[6]. Le 9 juin, il remporte la première édition de Bruxelles-Roubaix en devançant le Belge Marcel Kerff de 28 secondes[7],[8]. Fin juillet, Hippolyte Aucouturier de distingue au championnat de la presse sportive, organisé au vélodrome du Parc des Princes. Associé à Charles Jué, il devance la paire Lucien Lesna-Jean Fischer dans un match de poursuite par équipes. Aucouturier et Jué rejoignent leurs adversaires après 7,2 km de course[9].

En août, il est engagé sur la deuxième édition de Paris-Brest-Paris, dont il prend la tête avec Lucien Lesna jusqu'à Dreux avant d'être victime d'une crevaison. Avec Maurice Garin et Jean Fischer, il forme un groupe de chasse et tente de revenir sur Lucien Lesna[10], sans succès dans un premier temps puisqu'au virage à Brest, Lucien Lesna compte deux heures d'avance sur ses poursuivants. Sur le chemin du retour, Hippolyte Aucouturier est distancé par Maurice Garin et passe seulement en 3e position au contrôle du Guingamp. Il est rejoint par Gaston Rivierre entre Rennes et Vitré puis distancé par ce dernier avant Laval[11]. Fatigué et touché par un coup de soleil, Lucien Lesna abandonne avant Alençon après avoir été dépassé par Maurice Garin. Ce dernier s'impose finalement au vélodrome d'Auteuil en 52 h 11 de course. Alors que Gaston Rivierre prend la 2e place, Hippolyte Aucouturier doit faire face au retour de Michel Frédérick qui l'a rejoint à quelques kilomètres de l'arrivée. Au terme des deux derniers tours de piste sur le vélodrome, Aucouturier s'impose au sprint et se classe 3e de Paris-Brest-Paris[12], à plus de 2 h 30 du vainqueur[13].

Le , pour sa dernière course sur route de la saison, Hippolyte Aucouturier se classe 4e de Toulouse-Luchon-Toulouse, une épreuve remportée par Édouard Wattelier devant Jean Fischer et Pierre Chevalier[14].

Lors de l'année 1902, Hippolyte Aucouturier est atteint d'une fièvre typhoïde, ce qui le prive de vélo pendant plusieurs mois. Il déclare ainsi forfait pour l'une des épreuves les plus attendues de la saison, Marseille-Paris[15]. Il n'obtient comme résultat marquant qu'une 3e place sur Paris-Rennes et sur Toulouse-Luchon-Toulouse, deux courses de faible renommée. Le 10 août il prend le départ de Paris-Rennes, une épreuve de 344 kilomètres dont il est l'un des favoris en l'absence notamment de Maurice Garin et Lucien Lesna. Au point de contrôle du Mans, il passe en troisième position, loin derrière Michel Frédérick et Louis Trousselier. Ce dernier s'impose finalement en solitaire au vélodrome Laënnec de Rennes, tandis qu'Aucouturier, qui ne parvient pas à refaire son retard, termine 3e de la course, à 1 h 13 du vainqueur[16]. Le 26 août, il se classe à nouveau 3e sur l'épreuve Toulouse-Luchon-Toulouse, derrière Louis Trousselier et Henri Gauban[17].

Victoires dans les classiques et sur le Tour de France (1903)

En 1903, Hippolyte Aucouturier se distingue sur les classiques du printemps et y remporte ses plus importants succès. Le 12 avril, il gagne Paris-Roubaix devant Claude Chapperon et Louis Trousselier, alors que les journalistes, à l'image de Géo Lefèvre du quotidien L'Auto, ne le comptaient pas parmi les favoris[18]. Hippolyte Aucouturier déclare à l'occasion : « Une chose m'a particulièrement rendu enragé pendant la course et dans les moments pénibles, j'y pensais pour m'exciter : vos pronostics, monsieur Lefèvre[1]. » Le 10 mai, il s'impose sur Bordeaux-Paris. Légèrement distancé dès les premiers kilomètres de course, il concède un retard de quinze minutes sur le coureur de tête, Léon Georget, au point de contrôle de Ruffec. L'écart se réduit au passage de Couhé-Vérac, puis de Poitiers. Aucouturier prend la tête de la course près de Chatellerault, bénéficiant de la crevaison de Georget. Repris par Louis Trousselier avant Blois, Hippolyte Aucouturier se détache à nouveau au profit d'une succession de côtes aux environs de Dourdan[19]. Il s'impose finalement devant Trousselier et Georget, puis déclare : « J'ai changé neuf fois de machine, j'ai ramassé cinq bûches, j'ai fait 35 km sur la jante et je suis premier. Ouf[18] ! » La performance remarquable que constitue ces deux succès dans la même année lui vaut alors la reconnaissance du public et des observateurs, qui le surnomment « le Terrible » ou « l'hercule de Commentry »[1].

Les coureurs au départ du Tour de France 1903, parmi lesquels se trouve Hippolyte Aucouturier.
Premier Tour de France 1903, Hyppolite Aucouturier arrive avec le meilleur temps au vélodrome du Bazacle de Toulouse, le 8 juillet.

Il est alors naturellement considéré comme l'un des favoris du Tour de France 1903, première édition de l'épreuve organisée par L'Auto et à laquelle il participe avec sa bicyclette Crescent de la firme américaine ABC. Lors de la 1re étape disputée entre Paris et Lyon, Hippolyte Aucouturier est en difficulté. Il est d'abord victime d'un problème de selle à la sortie de Cosne-Cours-sur-Loire, puis arrive au contrôle fixe de Moulins avec plus d'une heure de retard sur son rival Maurice Garin en tête de la course, se plaignant de problèmes d'estomac. Géo Lefèvre, commissaire de course, le réconforte et le convainc de repartir, mais il abandonne finalement à Lapalisse, une cinquantaine de kilomètres plus loin, abandonnant son rêve de remporter le Tour de France. Pour autant, le règlement de l'époque autorise les coureurs à prendre part aux étapes suivantes malgré leur abandon, sans toutefois pouvoir disputer le classement général. Hippolyte Aucouturier décide alors de continuer la course[20].

Dans la 2e étape qui mène les coureurs de Lyon à Marseille, il se distingue dans la descente du col de la République. Il se présente à l'arrivée, jugée dans le petit village de Saint-Antoine, à 13 km du centre-ville de Marseille, en compagnie de Léon Georget, mais le bat au sprint pour remporter la victoire d'étape[21]. Directeur du Tour, Henri Desgrange annonce alors une modification du règlement, faisant que les coureurs disputant seulement l'étape sont obligés de s'élancer dans un second groupe, une heure après le départ du peloton des favoris. Cela provoque la colère d'Hippolyte Aucouturier, qui estime être lésé par ce changement de règlement qui le contraint à rouler avec des coureurs moins performants, ce qui pourrait réduire ses chances de victoire[22]. Malgré cette décision, il s'impose à nouveau dans la troisième étape entre Marseille et Toulouse[23]. Dans la quatrième étape, entre Toulouse et Bordeaux, il est victime d'une chute à l'entrée du village de Golfech, peu avant le contrôle fixe d'Agen, heurté par un chien qui traverse la route. Blessé à la jambe, il est contraint à l'abandon[24].

Hippolyte Aucouturier participe en août au Bol d'or, une épreuve sur piste de 24 heures disputée derrière tandem au vélodrome Buffalo. Après trois heures de course, il occupe la tête en compagnie de Léon Georget avec un total de 121,5 kilomètres[25]. Les deux hommes conservent la première place du classement à la quatrième heure, puis Aucouturier recule peu à peu au classement avant d'abandonner[26]. En septembre, il participe aux Huit jours de Buffalo[27]. Le 2 octobre, il est suspendu pour six mois par la commission sportive de l'Union vélocipédique de France pour voies de faits envers un entraîneur lors de cette course[28].

La confirmation (1904-1905)

Louis Trousselier remporte le Tour de France 1905 devant Hippolyte Aucouturier.

En 1904, Hippolyte Aucouturier remporte Paris-Roubaix pour la deuxième année consécutive et obtient ainsi une prime de 1 000 francs[29]. Favori de la course Bordeaux-Paris, il abandonne cependant[30]. Sur le Tour de France, il réalise une véritable performance, en gagnant quatre des six étapes disputées. Il prend alors la 4e place du classement général, derrière Maurice Garin, Lucien Pothier et César Garin. Toutefois, dans un Tour de France entaché par de nombreuses tricheries et des actes de violence de la part des spectateurs envers les coureurs[31], la commission sportive de l'Union vélocipédique de France, s'appuyant sur des rapports des commissaires du Tour, prend la décision de disqualifier les quatre premiers coureurs du classement général. Contrairement à Lucien Pothier, Hippolyte Aucouturier évite la suspension, mais ses quatre victoires d'étape lui sont retirées[32].

Il poursuit sa moisson de victoire lors de l'année 1905 : il s'impose d'abord dans Bordeaux-Paris, pour la deuxième fois de sa carrière, puis sur le Tour de France, il remporte trois des onze étapes disputées. Il gagne à Besançon, Toulon et La Rochelle[33]. Au classement général, qui est établi par points sur cette édition et non selon le temps, Hippolyte Aucouturier prend la 2e place derrière Louis Trousselier, son coéquipier chez Peugeot[34].

Fin de carrière

L'année 1906 marque le déclin d'Hippolyte Aucouturier. Cinquième de Bordeaux-Paris, sixième de Paris-Roubaix, il abandonne dans la 7e étape du Tour de France, n'ayant obtenu au mieux une 9e place dans la 4e étape entre Dijon et Grenoble. En 1908, il participe à son dernier Tour, mais abandonne une nouvelle fois, dès la 3e étape[2].

Palmarès

Résultats sur le Tour de France

  • 1903 : abandon (1re étape), puis vainqueur de deux étapes[Note 1]
  • 1904 : déclassé
  • 1905 : 2e du classement général et vainqueur de trois étapes
  • 1906 : abandon (7e étape)
  • 1908 : abandon (3e étape)

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Paul Vespini, 1903, Le Premier Tour de France, Paris, Jacob-Duvernet, , 278 p. (ISBN 978-2-84724-466-3)

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. Lors du premier Tour de France, les coureurs qui abandonnaient devaient renoncer à la course au classement général mais pouvaient disputer les étapes suivantes.

Références

  1. Vespini 2013, p. 23.
  2. « Palmarès d'Hippolyte Aucouturier », sur http://www.memoire-du-cyclisme.eu/.
  3. « Toulouse-Luchon et retour », Le Petit Parisien, no 8741, , p. 4 (lire en ligne).
  4. « Les 6 jours de New-York », Le Petit Parisien, no 8741, , p. 3 (lire en ligne).
  5. « Bordeaux-Paris », Le Petit Parisien, no 8955, , p. 3 (lire en ligne).
  6. « La course de Paris Bordeaux », L'Ouest-Éclair, no 635, , p. 1 (lire en ligne).
  7. « Bruxelles-Roubaix », Le Petit Parisien, no 8991, , p. 3 (lire en ligne).
  8. « Bruxelles-Roubaix 1901 », sur siteducyclisme.net (consulté le ).
  9. « Le championnat de la presse », Le Petit Parisien, no 9040, , p. 4 (lire en ligne).
  10. « La course de Paris-Brest », Le Petit Parisien, no 9059, , p. 3 (lire en ligne).
  11. « La course de Paris-Brest », Le Petit Parisien, no 9060, , p. 2-3 (lire en ligne).
  12. « La course de Paris-Brest », Le Petit Parisien, no 9061, , p. 3 (lire en ligne).
  13. « Paris-Brest-Paris 1901 », sur paris-brest-paris.org (consulté le ).
  14. « Toulouse-Luchon », Le Petit Parisien, no 9075, , p. 4 (lire en ligne).
  15. « Marseille-Paris », Le Journal, no 3518, , p. 3 (lire en ligne).
  16. « Paris-Rennes », Le Petit Parisien, no 9418, , p. 2 (lire en ligne).
  17. « Vélocipédie », Le Journal, no 3617, , p. 5 (lire en ligne).
  18. Vespini 2013, p. 24.
  19. « Bordeaux-Paris », Le Petit Parisien, no 9691, (lire en ligne).
  20. Vespini 2013, p. 65.
  21. Vespini 2013, p. 269.
  22. Vespini 2013, p. 118.
  23. Vespini 2013, p. 143.
  24. Vespini 2013, p. 157.
  25. « Le Bol d'Or », Le Petit Parisien, no 9796, , p. 4 (lire en ligne).
  26. « 9e Bol d'Or 1903 », sur memoire-du-cyclisme.eu (consulté le ).
  27. « Les Huit jours », Le Petit Parisien, no 9823, , p. 5 (lire en ligne).
  28. « Une suspension », Le Petit Parisien, no 9836, , p. 4 (lire en ligne).
  29. « Paris-Roubaix », Le Petit Parisien, , p. 5 (lire en ligne).
  30. « Bordeaux-Paris », Le Petit Parisien, , p. 2 (lire en ligne).
  31. Adrien Pécout, « En 1904, le pire Tour de France de l'histoire », sur lemonde.fr, Le Monde, (consulté le ).
  32. « L'historique du Tour - Année 1904 », sur letour.fr (consulté le ).
  33. « L'historique du Tour - Année 1905 », sur letour.fr (consulté le ).
  34. Christian-Louis Eclimont, Le Tour de France en 100 Histoires Extraordinaires, Paris, First, , 380 p. (ISBN 978-2-7540-5044-9), p. 15-17.
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