Hélène Brion

Hélène Brion née le à Clermont-Ferrand et morte le à Ennery est une institutrice, féministe, syndicaliste CGT et pacifiste, auteure de La Voie féministe.

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Biographie

Hélène Brion, à la suite du divorce de ses parents en 1892 - elle a 10 ans - est recueillie par sa grand-mère paternelle à Authe dans les Ardennes. A 12 ans, en 1894, elle entre à l'école primaire supérieure de jeunes filles Sophie-Germain à Paris et obtient le brevet supérieur en 1900 ; les jeunes filles ne pourront passer le baccalauréat qu'à partir de 1924. Sa mère décède en 1900 et son père en 1902.

En 1905, elle réussit le concours d'auxiliaire de l'enseignement et devient institutrice. Elle s'inscrit au syndicat des instituteurs et des institutrices ainsi qu'à la SFIO. Elle s'engage aussi dans de nombreuses organisations féministes : Le Suffrage des femmes, l’Union fraternelle des Femmes, la Fédération féminine universitaire, la Ligue pour le droit des femmes, l’Union française pour le suffrage des femmes, la Ligue nationale du vote. Elle milite pour que les droits de la femme tant au travail qu'à la maison soit reconnus. À cette époque en effet, la femme ne possédait aucun droit politique, ne pouvait pas être tutrice de ses propres enfants et était souvent sous-payée dans le monde du travail.

En 1911, elle est titularisée à l'école maternelle de la rue Candale à Pantin[1]. En 1912, elle est élue au conseil fédéral du syndicat des instituteurs, dont elle est secrétaire adjointe en 1914. La guerre et la mobilisation réduisant le bureau, Hélène Brion en devient secrétaire générale par intérim. Elle entre également au comité confédéral de la CGT. En 1915, un fort courant pacifiste nait au sein de la CGT, courant dont Hélène Brion va devenir porte-parole. Elle adhère à la section française du Comité international des femmes pour une paix permanente[2], présidée par Gabrielle Duchêne. Empêchée par la police française, elle ne peut pas se rendre à la conférence pacifiste de 1915 à Zimmerwald, ni à celle de Kienthal, mais elle correspond par lettres sur ce sujet. Celles-ci, interceptées par la police, serviront au dossier d'accusation monté contre elle à la fin de la guerre. Elle publie aussi des manifestes pacifistes et envoie le une lettre au Comité pour la reprise des relations internationales, comité pacifiste dirigé par Alphonse Merrheim, dont elle est membre.

Hélène Brion devant le conseil de guerre.

En 1917, la pression se resserre sur ses activités. Le son appartement est perquisitionné et le elle est suspendue sans traitement. En , peu de temps après l'arrivée de Clemenceau comme président du conseil, elle est arrêtée pour propagande défaitiste et envoyée à la prison des femmes de Saint-Lazare. Elle subit de la part des journaux de l'époque, le Matin, l'Écho de Paris et l'Homme libre, une campagne de désinformation. On la juge pour le moins anormale, elle porte des vêtements masculins, elle aurait correspondu avec des soldats, des fabricants de munitions, des prisonniers allemands, aurait caché des personnes bizarres, aurait visité la Russie et se serait rendue à la conférence de Zimmerwald. On l'accuse d'être anarchiste, d'être une partisane du Bonnet rouge. Le Petit Parisien la soupçonne d'avoir reçu de l'argent d'Allemagne pour organiser sa campagne pacifiste[3]. Accusée de trahison et de faire du pacifisme sous couvert de féminisme, Hélène Brion se défendra :

« L'accusation prétend que sous prétexte de féminisme, je fais du pacifisme. Elle déforme ma propagande pour les besoins de sa cause : j'affirme que c'est le contraire (...) Je suis ennemie de la guerre parce que féministe, la guerre est le triomphe de la force brutale, le féminisme ne peut triompher que par la force morale et la valeur intellectuelle. Il y a antinomie entre les deux (...)[4] »

Elle comparaît devant le premier conseil de guerre du 25 au . Elle y plaide principalement la cause du féminisme[5], faisant remarquer que, privée de droit politique, elle ne peut être poursuivie pour un délit politique, et axe sa défense sur les droits qui sont niés aux femmes[4]. Elle déclare notamment :

«  Je comparais ici comme inculpée d’un délit politique. Or je suis dépouillée de tous droits politiques. La loi devrait être logique et ignorer mon existence lorsqu’il s’agit de sanctions autant qu’elle l’ignore lorsqu’il s’agit de droits. Je proteste contre son illogisme[6] »

Défendue par l'avocate Agathe Dyvrande-Thévenin[7], elle est soutenue par des témoins de moralité, Jean Longuet, Jeanne Mélin[8], Marguerite Durand et la journaliste Séverine, qui vont faire de ce procès l'apologie du pacifisme et du féminisme.

Elle est condamnée à trois ans de prison avec sursis. Elle est révoquée de l'enseignement, avec effet au . Elle ne sera réintégrée que sept ans plus tard (en ) sous le gouvernement du cartel des gauches.

« Femme, ose être ! »

 Félix Pécaut

Sous-titre de La Voie féministe

Après la guerre, Hélène Brion se détache du mouvement syndicaliste. Elle abandonne son poste de secrétaire générale de la FNSI. De à , elle publie la revue La Lutte féministe, « organe unique et rigoureusement indépendant du féminisme intégral ». En , elle fonde, avec Maurice Foulon, l'université populaire de Pantin. Attirée par le communisme, elle effectue plusieurs voyages en Russie dans les années 1920-1922[9] et adhère au nouveau Parti communiste dès le congrès de Tours de 1920. Elle participe ensuite à l'opposition à la bolchevisation, et quitte le PC au milieu des années 1920. Elle est alors proche de la revue La Révolution prolétarienne.

En , elle est réintégrée dans ses fonctions d'institutrice à l'école maternelle de la rue Candale à Pantin, où elle exercera jusqu'au début de la Seconde Guerre mondiale.

Après la guerre, elle continue ses activités féministes. C'est aussi une adepte du spiritisme[1]. Elle meurt le à la clinique de diététique et de gérontologie d'Ennery (Val-d'Oise). Enterrée dans le carré des indigents, sa dépouille est ensuite transportée dans un caveau trentenaire, payé par un cousin, René Cholet.

Durant toute sa vie, elle a travaillé à sa Grande Encyclopédie féministe, dans laquelle elle avait le projet de regrouper des notices biographiques sur toutes les femmes qu'elle jugeait exemplaires, que ce soit pour leur activités littéraires, scientifiques ou artistiques, ou leur présence dans des faits divers[1]. Plusieurs volumes de cette encyclopédie - non éditée - sont consultables à la Bibliothèque Marguerite Durand, dans le 13e arrondissement de Paris (fonds Hélène Brion).

Postérité

Une rue du 13e arrondissement de Paris porte son nom depuis le , ainsi qu'un mail à Pantin, au bord du canal[10],[11].

Œuvres

Références

  1. André Caroff, Hélène Brion, l'insoumise
  2. Françoise Blum, D'une guerre à l'autre : itinéraires d'intellectuelles pacifistes in Intellectuelles : du genre en histoire des intellectuels, p. 231.
  3. Margareth H. Darrow, French women and the First World War: war stories of the home front, p. 294 - 303.
  4. Déclaration d'Hélène Brion devant le Conseil de Guerre : Texte intégral
  5. Françoise Blum, D'une guerre à l'autre : itinéraires d'intellectuelles pacifistes in Intellectuelles : du genre en histoire des intellectuels, p. 238.
  6. Source : https://www.archivesdufeminisme.fr/ressources-en-ligne/articles-et-comptes-rendus/articles-historiques/avrane-c-helene-brion-institutrice-feministe/ Archives du Féminisme.
  7. « Agathe Dyvrande-Thevenin », memoire.avocatparis.org, consulté le 9 mai 2020.
  8. Luc Capdevila, Variations, numéro 24, p. 239
  9. Sophie Cœuré,Hélène Brion en "Russie rouge" (1920-1922). Une passagère du communisme (en ligne).
  10. Mairie de Paris, Rue Hélène-Brion.
  11. Voir le débat.

Voir aussi

Bibliographie

Article connexe

Liens externes

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