Georges Mathieu (artiste)

Georges Mathieu[1], né le à Boulogne-sur-Mer et mort le à Boulogne-Billancourt[2], est un peintre français considéré comme un des pères de l'abstraction lyrique.

Pour les articles homonymes, voir Mathieu et Georges Mathieu.

Ne doit pas être confondu avec Georges Victor Mathieu, résistant et collaborateur français pendant la Seconde Guerre mondiale.

Il est également célèbre pour sa pièce de dix francs de 1974, son logotype d'Antenne 2 de 1975, et ses timbres postaux.

Biographie

Débuts

Né au sein d'une famille de banquiers, Georges Mathieu s'oriente d'abord vers des études de droit, de lettres et de philosophie. Dès 1942, il se tourne vers les arts plastiques et réalise ses premières peintures à l'huile. Il exerce pendant quelques années le métier de professeur avant de se lancer dans une carrière artistique. En 1946, il réalise sa première exposition à Paris au Salon des moins de trente ans.

En 1947, il expose au Salon des réalités nouvelles des toiles à la texture faite de taches directement jaillies du tube, revendiquant la paternité du dripping, technique attribuée à Janet Sobel en 1944 et développée par Jackson Pollock dès 1945, les couleurs étant, dans le cas de Mathieu, écrasées par le doigt de l'artiste dès 1944. Il participe cette même année au 14e Salon des surindépendants.

Années 1950 et 1960

Dès 1950, il expose aux États-Unis et au Japon.

À partir de 1954, il crée une multitude de tableaux, souvent lors de performances ou happenings minutées devant un public, qui mettent en valeur la rapidité et la virtuosité du geste. Ainsi, en 1956 au théâtre Sarah-Bernhardt à Paris, Mathieu, devant près de 2 000 spectateurs, crée un tableau de 4 × 12 mètres en utilisant au moins 800 tubes de peinture (cette toile intitulée Hommage aux poètes du monde entier disparaît en 1968 lors de l'incendie de son atelier[3].). Outre-Atlantique, la diffusion de ses créations fait l'objet d'entraves importantes. En 1958, à New York, il tente également de créer des œuvres en public, mais cela lui est interdit. Il en vient à peindre en solitaire dans les galeries de son hôtel. Les galeries new-yorkaises refusent de l'exposer. Cette ostracisation de la part des institutions et des galeries américaines durera jusqu'à sa mort[4].

De 1953 à 1962, il est rédacteur en chef de la revue United States Lines Paris Review. En 1963, année de sa « Grande Rétrospective » au musée d'art moderne de la ville de Paris, il accède enfin à la consécration officielle. Entre 1968 et 1969, il créera plusieurs décors dorés pour des céramiques de la Manufacture de Sèvres, et notamment des services de table pour l'Exposition universelle de 1967 à Montréal et l'Exposition universelle de 1970 à Osaka.

Années 1970

En 1973, il réalise son unique œuvre architecturale. À la demande de l'industriel Guy Biraud, fabricant de transformateurs, il dessine les plans d'une usine à Fontenay-le-Comte[5]. L'usine Mathieu qui en résulte est un ensemble original en étoile à sept branches inégales, et dont le pourtour intégralement vitré est vu par l'artiste comme un moyen de lier le lieu de travail à la nature environnante.

Années 1980

Tombe du peintre au cimetière de Montmartre.

À partir de 1980, son œuvre peint témoigne d'une nouvelle maturité où il rompt avec les derniers vestiges de classicisme et abandonne alors la figure centrale, en même temps que sa palette se fait plus vaste. Grâce à la médiation de Paul Facchetti et Rodolphe Stadler, plusieurs rencontres et une correspondance animée ont eu lieu depuis la fin des années 1970 entre Georges Mathieu et Rolf Lauter, conservateur de la galerie de Margarete Lauter à cette époque. L'amitié qui a commencé a ensuite conduit à une vaste rétrospective à Mannheim en 1980 avec plus de 60 œuvres de 1944 à 1979[6]. Cette amitié a abouti à de nombreux projets communs jusqu'en l'an 2000 et à l'invitation de Mathieu à l'Université de Heidelberg pour une conférence célèbre[7].

Il meurt le à l'hôpital Ambroise-Paré de Boulogne-Billancourt. Il repose à Paris au cimetière de Montmartre (13e division).

Distinctions et décorations

Principales œuvres

Logotype d'Antenne 2 en 1975.

Le choix des titres

Les titres des toiles de Georges Mathieu se rapportent parfois aux mathématiques (Théorème d'Alexandrov), à la physique (Principe de Pauli), ou encore à la logique (Grand syllogisme conjonctif), mais le plus souvent à l'Histoire (La Bataille de Bouvines, Les Capétiens partout, La Bataille de Hastings, Le massacre de la Saint-Barthélemy, L’Élection de Charles Quint, etc.). Plutôt que d'attribuer un numéro à une toile, l'artiste préfère en effet des références par exemple historiques, certes gratuites, mais potentiellement évocatrices[17].

Genèse d'une œuvre

En 1956, Georges Mathieu est invité à réaliser une exposition à Londres, occasion à laquelle il décide de peindre, notamment des tableaux de grand format. L'atelier initialement prévu étant trop exigu, Georges Mathieu s'installe en pleine rue, étalant pinceaux, couleurs et matériel divers à même le sol, captant ainsi l'attention des passants. Le critique d'art Toni del Renzio note alors minute par minute chaque geste, coup de pinceau, changement de couleur, et mouvement de recul du peintre pour mieux saisir l'ensemble[18],[19]. Au bout d'une performance de 113 minutes, la toile de La Bataille de Hastings est achevée.

Cette chronologie rend concrète la genèse d'une œuvre en temps réel. Elle a ainsi permis au public de suivre le déroulement sur la toile de la bataille de Hastings. Le tableau final est une huile sur toile, de 200 × 500 cm, conservée aux Abattoirs de Toulouse.

Publications

  • Au-delà du tachisme,
  • Le Privilège d'être,  ; réédité en 2006 aux Éditions Complicités
    Texte accompagné d'un entretien inédit de Georges Mathieu daté de décembre 2005.
  • De la révolte à la Renaissance, Gallimard, (ISBN 978-2-07-035279-1)
  • L'Abstraction prophétique, Paris, Gallimard,
  • Désormais seul en face de Dieu, Lausanne, L'Âge d'Homme, , 349 p. (ISBN 2-8251-1144-9, OCLC 40815288, lire en ligne)
    Autoportrait esthétique et spirituel composé de documents de et sur Georges Mathieu rassemblés par lui-même.

Notes et références

  1. Né Georges Victor Mathieu, dit parfois « Georges Victor Mathieu d'Escaudœuvres ». L'ajout de la mention « d'Escaudœuvres » à son patronyme reposerait sur une question posée par Georges Mathieu lui-même : « Suis-je le dernier héritier des Sires Gérard et Jean, chevalier d'Escaudœuvres et bienfaiteurs de l'abbaye de Prony, en même temps, comme on l'a toujours prétendu dans la famille de ma mère, que le descendant de Godefroy de Bouillon… » dans son livre Désormais seul en face de Dieu (1998), mais elle ne figure pas sur sa fiche sur le site de l'Académie des beaux-arts.
  2. Notice d'autorité de la BNF.
  3. Georges Mathieu, Le privilège d'être : précédé d'un entretien inédit avec Christine Blanchet-Vaque, Paris, Les Éditions Complicités, 2006 (initialement publié en 1967 aux éditions robert morel, à forcalquier), 158 p. (ISBN 978-2-35120-004-9 et 2-35120-004-7).
  4. Aude de Kerros, « Conflits autour de l'art abstrait », La Nouvelle Revue d'histoire, no 75, novembre-décembre 2014, p. 35-36.
  5. William Chevillon, À la découverte de Fontenay-le-Comte, La Roche-sur-Yon, Centre vendéen de recherches historiques, , 128 p. (ISBN 9782491575007), p. 121-122
  6. Rolf Lauter, Georges Mathieu: Retrospektive. Bilder, Gouachen, Aquarelle und Zeichnungen aus den Jahren 1944-1979. Galerie Lauter, Mannheim 25. Januar - 19. April 1980.
  7. Conférence en 1996. Mathieu était enthousiaste à propos de la "ville du romantisme".
  8. Photo du tableau sur le site de l'espace Fernet Branca.
  9. (en) « GEORGES MATHIEU (1921-2012) , Le Grand Dauphin », sur www.christies.com (consulté le )
  10. echosciences-grenoble.fr.
  11. « Hommage à Jean Cabot | Collection Musée national des beaux-arts du Québec », sur collections.mnbaq.org (consulté le )
  12. Affiches qui furent le thème d'une exposition proposée au cours de l'été 1970 en l'église Saint-Étienne d'Azé, à l'initiative du père Gabriel Duru, membre de la communauté de prêtres de Lugny. Une mise en scène qui satisfit l'artiste, qui écrivit : « Cette exposition de mes affiches dans votre église et l'intérêt que vous manifestez à l'endroit de mon œuvre – intérêt que vous avez fait partager aux visiteurs – me touchent infiniment plus que si l'inauguration de ces mêmes affiches avait eu lieu au Metropolitan Museum de New York ou quelque lieu plus prestigieux encore ! ». Source : Vacances culturelles, article de Fernand Nicolas paru dans la revue « Images de Saône-et-Loire » n° 6 d'octobre 1970, pp. 28-29.
  13. Académie-des-beaux-arts.fr.
  14. Christophe Bodin, « Disparition mystérieuse d’une œuvre de Georges Mathieu à Limoges », sur france3-regions.francetvinfo.fr, (consulté le )
  15. « Le tableau à 150.000 euros disparu de l'université de Limoges a été retrouvé », sur lepopulaire.fr, (consulté le )
  16. Georges Mathieu, Désormais seul en face de Dieu, L'Âge d'homme, , 349 p. (ISBN 978-2-8251-1144-4, lire en ligne), « Le Massacre des 269 Coréens », p. 251
  17. Georges Mathieu [1984], p. 34.
  18. Georges Mathieu [1998], p. 226-229.
  19. Mathieu : Autour de la bataille de Hastings, Toulouse, Éditions ARPAP, , 48 p. (ISBN 2-905992-57-3).

Voir aussi

Bibliographie

Filmographie

  • 1954 : La Bataille de Bouvines, Robert Descharnes
  • 1956 : Le Couronnement de Charlemagne, R. Descharne
  • 1959 : La Saint-Barthélémy, ORTF productions
  • 1959 : Hommage au Connétable de Bourbon, A. Rainer
  • 1961 : Georges Mathieu, J. Mousseau et J. Feller
  • 1965 : Paris, capitale des arts, ORTF prod.
  • 1967 : Georges Mathieu, F. Warin
  • 1968 : Georges Mathieu, P. Lhoste et G. Roze
  • 1971 : Georges Mathieu, L. Thorn
  • 1971 : Georges Mathieu ou la fureur d'être, documentaire de Frédéric Rossif montrant le peintre en train de peindre deux toiles ; texte de François Billetdoux, musique de Vangelis (voir site du film)
  • 1979 : À la recherche de Georges Mathieu, D. Lecomte
  • 1986 : Georges Mathieu, P. Ducrest
  • 1992 : Spectacle son et lumière donné en août 1992 dans la cour du château-musée de Boulogne-sur-Mer, Th. Choumitzky

Liens externes

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