Gaston de Galliffet

Le marquis Gaston Alexandre Auguste de Galliffet, né à Paris le [1] et mort dans cette même ville le , est un militaire français du XIXe siècle issu de la famille de Galliffet, dernier prince de Martigues.

Gaston de Galliffet

Photographie de Gaston de Galliffet par Nadar

Surnom « Marquis aux talons rouges »
« Massacreur de la Commune »
Naissance
Paris, Seine
(France)
Décès
Paris, Seine
(France)
Origine Français
Allégeance  République française (1848-1852)
 Empire français (1852-1870)
République française (1870-1899)
Grade Général de division
Années de service 18481899
Commandement 3e Régiment de chasseurs d'Afrique
15e Division d'Infanterie
9e Corps d'Armée
Conflits Guerre de Crimée
Expédition du Mexique
Guerre de 1870
Campagne de 1871 à l'intérieur
Faits d'armes Bataille de Sedan
Semaine sanglante
Distinctions Grand-croix de la Légion d'honneur
Autres fonctions Ministre de la Guerre
Famille Maison de Galliffet

Liste des ministres français de la Défense

Officier de cavalerie resté connu pour avoir mené une répression brutale contre la Commune de Paris en (semaine sanglante), il participe par la suite à la réorganisation de l’armée à la suite de la guerre franco-allemande de 1870. Il est également ministre de la Guerre dans le gouvernement de gauche de Waldeck-Rousseau en 1899-1900, et suit à ce titre une politique d’apaisement au cours de l'Affaire Dreyfus.

Biographie

Famille

Issu d'une famille de militaires en partie ruinée par la Révolution, petit-fils d'Auguste-Joseph Baude de la Vieuville, il fut élevé très durement par un père qui le mit très tôt en pension. Après de médiocres études et l’obtention de son baccalauréat ès lettres (1846), il s’engage le dans la cavalerie légère. Il est brigadier le puis sous-officier le . Il devient sous-lieutenant en 1853, est nommé au régiment des guides, garde personnelle de Napoléon III, et fait chevalier de la Légion d'honneur.

Par la suite, plus intéressé par la vie mondaine, le jeu et les femmes que par la carrière militaire et, en 1854, ayant hérité de ses parents une petite fortune, des titres de marquis de Gallifet et de prince de Martigues il songe à démissionner de l’armée.

Il épouse en Florence Georgina Laffitte, fille du comte Charles Laffitte et petite-nièce du banquier Jacques Laffitte. Ils ont trois enfants, Charles (1860-1905), d'où Jacqueline (1903-1942) qui épouse en 1926 René de Rochechouart de Mortemart, Marguerite (1863-1898) qui épouse Alexandre Seillière, et Gaston.

Il dépense alors sans compter et vit avec faste, la plupart du temps à Paris.

Un brillant officier

Il sert cependant avec éclat durant la guerre de Crimée au régiment des guides de la Garde Impériale. Le il est cité à l'ordre de l'Armée comme s'étant particulièrement distingué dans l'enlèvement de vive force des redoutes russes en avant de Sébastopol.

Lieutenant en 1857, il est envoyé en Algérie et prend part à toutes les expéditions de la période. Il sert également lors de la campagne d'Italie. Capitaine en 1860 au 2e Spahis à Mascara, il est nommé, la même année, officier d'ordonnance de l'Empereur Napoléon III. Il est également conseiller général du canton de Martigues (Bouches-du-Rhône).

Chef d'escadron le au 1er Régiment de hussards, il sert à nouveau en Algérie à Tlemcen et est promu officier de la Légion d'honneur. Nommé successivement au 6e Hussards, puis 12e Chasseurs, il participe à l'expédition du Mexique et est cité à l'ordre du corps expéditionnaire le comme ayant rendu, alors qu'il remplissait les fonctions d'aide-major des tranchées, des services signalés lors de la prise du couvent de Guadalupe dans la nuit du au 1er avril.

Le il est très grièvement blessé au ventre lors du siège de Puebla dans l'attaque contre le cadre 29, obligé de « porter ses tripes dans son képi » comme il le racontera plus tard. Apprenant sa grave blessure à la fin d'un déjeuner, l'impératrice Eugénie dont il fut le favori, aurait alors, selon un de ses biographes, "juré de ne plus manger de sorbets tant qu'il ne serait pas guéri". Il portera désormais une plaque d'argent au ventre.

C'est lui qui ramène en France les drapeaux pris à l'ennemi. Rétabli, il retourne au Mexique et remplace à la tête de la contre-guérilla française le colonel Charles-Louis Du Pin. Il est promu au grade de lieutenant-colonel le et cité une nouvelle fois à l'ordre du corps expéditionnaire le , pour avoir donné une impulsion ferme et intelligente à toutes les opérations de la contre-guérilla et avoir conduit l'affaire de Medellin[2],[alpha 1],[3] le avec un coup d'œil et une vigueur remarquables.

Promu le au grade de colonel du 3e Régiment de chasseurs d'Afrique, il est admis en 1re section des officiers généraux avec le grade de général de brigade le . Il commande la brigade de chasseurs à cheval qui charge héroïquement à Sedan, faisant l'admiration du roi de Prusse qui prononcera une phrase devenue historique (« Ah, les braves gens ! »), mais il est fait prisonnier.

Le Massacreur de la Commune

À l'issue de sa captivité, il retourne en France pour commander une brigade de cavalerie de l'armée de Versailles et participe aux opérations contre la Commune où il se distingue par sa férocité envers les insurgés et gagne le surnom du « Marquis aux talons rouges » ou « Massacreur de la Commune » lors de la tragique Semaine Sanglante. Regardant passer les prisonniers communards se dirigeant sur Versailles, « la badine à la main, il sélectionne ses victimes d'une manière absolument arbitraire, sur leur mine ». Un jour, il ordonne : « Que ceux qui ont des cheveux gris sortent des rangs ! » ; 111 captifs s'avancent. « Vous, leur dit-il, vous avez vu , vous êtes plus coupables que les autres ! » ; il les fait mitrailler dans les fossés des fortifications[4],[5].

Marcel Gouzil indique que ces exécutions sommaires ont eu lieu « un dimanche de Pâques dans les fossés de Passy ».

« On estime à 3 000 le nombre de ses victimes, car il s'octroyait un droit de vie ou de mort ; selon son bon plaisir, il « prélevait » sur les convois de prisonniers la dime du sang […]. Ses victimes étaient choisies de préférence parmi les vieillards ou les blessés[6],[7]. »

Ces actes inspirèrent à Georges Clemenceau ce mot terrible : « Galliffet n'a pas fusillé de prisonniers depuis plus de vingt ans. Monotone, la vie. Quelles joies nous resteront, bientôt[8] ? »

A Henri-Rochefort, journaliste, qui lui dit : " Je suis le seul Communard que vous n'ayez pas fait fusiller ! " il répond : " Ce sera le regret de toute ma vie ! "

Derniers postes d'officier général

Galliffet commande ensuite la subdivision de Batna puis la 31e brigade (1874-1875) et est promu commandeur de la Légion d'Honneur en 1873.

Général de division le , il commande la 15e Division (1876-1878), puis le 9e Corps d'Armée (1879-1881).

Il obtint une voix (sur 669) à l'élection présidentielle de 1879.

Élevé à la dignité de grand officier de la Légion d'Honneur en 1880, il est distingué par Léon Gambetta et nommé gouverneur de Paris[9]. Il commande ensuite le 12e corps d'armée (1882-1886). Président du comité de cavalerie (1881-1885), il réorganise la cavalerie française. Il est fait grand croix de la Légion d'Honneur en 1887. Il appartient au Conseil Supérieur de la Guerre, est inspecteur général de l’École d’application de cavalerie, de la section de cavalerie de l’École spéciale militaire et du manège de l’École de Guerre, et directeur permanent des manœuvres de cavalerie.

Caricature antidreyfusarde de Gaston de Gallifet, alors ministre de la Guerre (Musée des Horreurs no 17, février 1900). Les ossements sont une référence aux morts de la Commune de Paris.

Ministre de la Guerre

Au moment de l'affaire Dreyfus, c'est à ce militaire à la retraite, à la réputation sulfureuse, que Pierre Waldeck-Rousseau confie le ministère de la Guerre dans son gouvernement dit de « Défense républicaine » constitué le à la suite de la crise de régime consécutive à l'Affaire, son républicanisme et son opportunisme d'un côté, sa réputation de « bourreau de la Commune » de l'autre côté, faisant paradoxalement de ce personnage, original, détesté de tous les bords, un homme sûr et prêt à appliquer des décisions impopulaires pour l'armée.

Son cynisme provocant est tout entier dans sa réponse provocante aux députés de gauche qui l'accueillaient à son entrée dans l'hémicycle en criant « Assassin ! » : « Assassin ? Présent ! »[10]

Dans une lettre à Marie de Castellane, princesse Radziwill, qui vivait à Berlin, il dit être "convaincu de l'innocence du capitaine, mais obligé de « suivre »…[11]

C'est cependant lui qui décide de demander la révision du procès de Dreyfus, dont la réhabilitation avait été soutenue par Émile Zola. Ainsi, le , il peut déclarer à la Chambre à propos de l'affaire Dreyfus, à la suite de la grâce présidentielle de celui-ci et de sa remise en liberté : « l'incident est clos. »[12]

Sa carrière ministérielle s'achève par sa démission le du fait de critiques du président du Conseil sur certains membres de son administration.

Son successeur au portefeuille de la Guerre est le général Louis André qui poursuivra efficacement, mais plus maladroitement, sa politique de « républicanisation » de l'armée.

Habitué des salons de Laure de Chevigné et de la comtesse Greffulhe (modèles de la duchesse de Guermantes), familier de nombreux souverains européens, allant jusqu'à jouer dans des pièces de théâtre, Galliffet inspire à Marcel Proust le vaniteux personnage du général de Froberville dans À la recherche du temps perdu[13].

Autres informations

Il est représenté sur le tableau Le Cercle de la rue Royale (James Tissot, 1868).

Il est partie requérante à l’affaire du canal de Craponne, que la Cour de cassation conclut par un grand arrêt confirmant la force obligatoire du contrat même en cas d’imprévision.

Bibliographie

  • Thomas Louis, Le Général de Galliffet, Aux Armes de France, 1941 ;
  • H. de Rolland, Galliffet, Les éditions de la Nouvelle France, 1945 ;
  • Christophe Monat, Galliffet, le marquis aux talons rouges, Jean-Cyrille Godefroid, 1985 ;
  • André Gillois, Galliffet, « le fusilleur de la Commune», Éditions France-Empire, 1985 ;
  • Georges Gugliotta, Le Général de Galliffet, éditions Bernard Giovanangeli, 2014[14] ;
  • Philippe Oriol, L'Histoire de l'affaire Dreyfus de 1894 à nos jours, Les Belles Lettres, 2014.

Notes et références

Notes

  1. Il s'agit d'un coup de main où la contre-guérilla gérée par Galiffet s'allie aux troupes régulières (entre autres le 2e régiment de tirailleurs algériens), pour faire fuir les dissidents qui avaient pris Medellin.

Références

  1. « Le général de Galiffet (notice nécrologique) », Le Temps, (lire en ligne)
  2. Pierre Paul Jean Jacques Maurice Martin, Historique du 2e Régiment de Tirailleurs Algériens, London, Forgotten Books, (lire en ligne), p. 326-327
  3. William Serman, La Commune de Paris, Arthème-Fayard.
  4. P.-O. Lissagaray, Histoire de la Commune de 1871
  5. Dommanget cité par Gouzil, La Commune de Paris 1871. t. III, La Répression, 1er juillet 1971, p. 11- arch pers.
  6. L’acharnement sanglant de Galliffet, in Chronique de la France et des Français, Larousse, 1987, p. 940
  7. Lettre citée par Jean-Noel Jeanneney, Clemenceau, portrait d'un homme libre, éditions Menges, ) repris dans sa Correspondance (1854-1929), Robert Laffont et B.N.F, , p. 24.
  8. Armand Dayot, L'Invasion, le Siège, la Commune Flammarion, 1901
  9. (en) Harvey Goldberg, The Life of Jean Jaures, University of Wisconsin Press, 2003, p. 255
  10. D'une correspondance inédite de 600 lettres appartenant à la duchesse de Maillé citée par Roger Peyrefitte dans Propos Secrets, Albin Michel, tome 2, 1980, p. 173-174
  11. Sur son opinion, ambivalente, et son rôle dans l'affaire Dreyfus, voir Philippe Oriol, L'Histoire de l'affaire Dreyfus de 1894 à nos jours, Les Belles Lettres, 2014.
  12. George Painter, Marcel Proust, Paris, Mercure de France, 1966, p. 205, tome I
  13. Concernant ces volumes, voir : http://affaire-dreyfus.com/2014/08/08/une-nouvelle-biographie-de-galliffet/

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • Portail de la France au XIXe siècle
  • Portail du Second Empire
  • Portail de la Légion étrangère
  • Armée et histoire militaire françaises
  • Portail de la politique française
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.