Gémination

En phonétique, la gémination est une unité suprasegmentale consistant en un redoublement de consonne, laquelle possède ainsi une durée accrue perceptible à l'oreille. C'est un cas particulier de la quantité consonantique longue car on dit d'une consonne qu'elle est géminée quand, phonologiquement parlant, la consonne longue est répartie entre la fin (ou coda) d'une syllabe et le début (ou attaque) de la syllabe suivante. Par exemple, dans un mot qu'on analyserait [kalla], la consonne /l/ serait géminée dans un découpage en syllabes [kal.la]. Une consonne géminée ne peut donc pas apparaître dans un monosyllabe.

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Dans l'alphabet phonétique international, les géminées sont le plus souvent notées par le redoublement du symbole notant la consonne concernée, ce qui les distingue des consonnes longues, dont le symbole est suivi par le signe habituel d'allongement [ː]. Cette distinction n'est cependant pas systématique et dépend de l'analyse phonologique privilégiée par le transcripteur.

De nombreuses langues utilisent la gémination pour distinguer des mots (constituant des paires minimales) : par exemple, l'italien, le finnois, le suédois, le norvégien, l'arabe, le pali, le japonais, l'estonien, etc.

Corrélation avec la quantité vocalique

Dans certaines langues, la gémination est mise en relief par une corrélation à la quantité de la voyelle précédente. En italien, par exemple, c'est le cas lorsque la voyelle porte l'accent tonique : la voyelle accentuée s'allonge devant une consonne simple, et elle est brève devant une géminée comme devant tout autre groupe de consonnes : fata /ˈfata/ [ˈfaːta] « fée » ~ fatta /ˈfatta/ [ˈfat.ta] « faite ». Le suédois et le norvégien font généralement aussi de même.

Ce n'est pas le cas de toutes les langues comportant des géminées. En finnois, par exemple, la gémination et la quantité vocalique sont toutes deux distinctives, et varient indépendamment. On peut donc avoir des oppositions telles que ceci :

  • tuli /tuli/ [ˈtuli] « feu » avec consonne simple et voyelle brève ;
  • tuuli /tuːli/ [ˈtuːli] « vent » avec consonne simple et voyelle longue ;
  • tulli /tulli/ [ˈtul.li] « douane » avec consonne géminée et voyelle brève ;
  • tuulla /tuːlla/ [ˈtuːl.lɑʔ] « souffler » avec consonne géminée et voyelle longue.

En français

En français, la gémination n'est généralement pas phonologique et ne permet donc pas de distinguer des mots : elle est le plus souvent paralinguistique et correspond, le cas échéant, à un accent d'insistance (« c'est terrifiant » réalisé [ˈtɛʁʁifiɑ̃]) ou répond à des critères d'hypercorrection : on « corrige » sa prononciation, en dépit de la phonologie usuelle, pour être plus proche d'une réalisation que l'on se figure plus correcte : ainsi, le mot illusion se prononce parfois [illyˈzjɔ̃] par influence de la graphie.

Toutefois, la gémination est distinctive dans quelques cas. On peut couramment distinguer par la gémination des énoncés comme Elle a dit ~ Elle l'a dit /ɛl a di/ ~ /ɛl l‿a di/. Dans une prononciation plus soutenue, la gémination permet de distinguer le conditionnel (et éventuellement le futur) de l'imparfait : courrais ~ courais /kuʁʁɛ/ ~ /kuʁɛ/ ou encore l'indicatif du subjonctif, comme dans croyons ~ croyions /-j-/ ~ /-jj-/.

Bibliographie

  • André Martinet, La Gémination consonantique d'origine expressive dans les langues germaniques, Levin et Munksgaard, , 227 p.

Voir aussi

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