Fyre Festival

Sur le continent, 5 000 billets sont vendus et un service aérien est mis en place pour les festivaliers provenant de Miami. Un service médical et un traiteur sont mis en place mais ce dernier se désiste quelques semaines avant l'ouverture du festival[6]. Deux semaines avant l'ouverture, un nouveau service de restauration est engagé avec un budget de 1 million de dollars, à comparer aux 6 millions de dollars originellement attribués pour ce qui est prévu comme « une cuisine locale authentique... fruits de mers locaux, sushis style bahaméen et même un cochon grillé »[4]^,[2].

En mars 2017, l'entreprise Fyre engage un producteur expérimenté, Yaron Lavi, qui constate qu'il est impossible de préparer à temps ce genre d'événement envisagé par McFarland et Ja Rule sur l'île. Il suggère de reporter l'événement au mois de novembre. Cependant, lorsque McFarland et Ja Rule disent à Lavi que l'événement aura tout de même lieu au printemps, ce dernier leur demande d'abandonner l'idée des villas et de commencer à planter des tentes, seul mode d'hébergement susceptible d'être livré dans le temps restant. Lavi leur conseille en outre d'expliquer la démarche aux festivaliers afin de ne pas nuire à la marque. Selon lui, l'entreprise s'assure qu'un mail est rédigé mais ne s'assure pas qu'il est correctement envoyé[6].

Comcast Ventures envisage d'investir 25 millions de dollars dans l'application Fyre : McFarland semble avoir espéré pouvoir financer son festival grâce à cette rentrée d'argent, mais l'entreprise se désiste quelques jours avant l'événement[12]. McFarland évalue Fyre Media à 90 millions de dollars, mais est incapable de justifier cette estimation lorsque Comcast lui demande des preuves[6].

Dans un article écrit a posteriori pour le New York magazine, l'un des organisateurs de l'événement note que des problèmes significatif d'organisation s'accumulent depuis la mi-mars, de sorte que le report du festival à 2018 est envisagé[13]. Cette idée est cependant abandonnée au dernier moment et les organisateurs décident de tenir les délais initialement prévus. « On le fait et on devient des légendes », dit l'un des organisateurs[13]. Plus tard, courant mars, Page Six commence à rapporter des rumeurs selon lesquelles les promoteurs sont trop désorganisés et s'attaquent à un événement trop ambitieux pour eux[14].

Après l'échec de l'implication de Comcast, McFarland obtient un prêt à court terme de la part de l'investisseur Ezra. Celui-ci exige que la société lui rembourse au moins 500 000 dollars sous seize jours[6]. Afin de lever des fonds pour le festival, et cela deux semaines avant la soirée d'inauguration, Fyre informe les personnes ayant déjà réservé leurs places que l'événement sera « sans cash, sans carte [bancaire] », et les encourage à charger jusqu'à plusieurs milliers de dollars d'avance sur des bracelets RFID afin de payer leurs dépenses sur le site, selon l'une des procédures judiciaires[15]. Cette décision est prise en dépit du fait que la couverture Wi-Fi du site est sous-dimensionnée, rendant les bracelets numériques inutilisables[4]. McFarland, qui appose sa signature sur le mail, suggère que chaque festivalier mette sur son compte numérique entre 300 et 500 dollars pour chaque jour qu'il compte passer sur le site. La manœuvre permet de récolter deux millions de dollars, dont environ 40 % sont utilisés pour rembourser partiellement l'emprunt à court terme souscrit auprès de Birnbaum, d'après une procédure judiciaire lancée plus tard par le prêteur[6]^,[16].

Billy McFarland lors d'un événement Magnises en 2014.

Avec 3 100 000 dollars US de capital risque et 25 employés, McFarland fonde en 2013 une société de cartes bancaires appelée Magnises, qui promet à ses membres, en échange d'une cotisation annuelle de 250 dollars, de « débloquer leur ville et de passer à l'étape suivante », comprenant des concerts réservés aux membres, des dégustations avec des chefs réputés et des avant-premières artistiques exclusives dans les meilleurs musées[23]. The Washington Post rapporte que « certains de ces avantages ne se sont jamais matérialisés ou sont loin de ce qui est annoncé »[24]. « Ils envoient le même courriel pour chaque problème, mais c'est comme combler les trous pour savoir quel est le problème », déclare un membre à Business Insider[25]. L'entreprise Magnises devient rentable en 2015[5].

The Washington Post rapporte également que McFarland a un passé de promesses excessives dans ses précédentes entreprises commerciales, et cite de nombreux exemples comme une vente de billets VIP pour la comédie musicale Hamilton pour 430 dollars, annulée à la dernière minute. Dans une plainte adressée au Better Business Bureau, un client demandant un remboursement a déclaré n'avoir reçu aucune réponse à de multiples demandes de renseignements pendant plus d'un mois et demi[24].

Ce carré orange est utilisé pour promouvoir le Fyre Festival par les célébrités sur Instagram.

L'événement est promu sur Instagram par Kendall Jenner, Bella Hadid, Emily Ratajkowski, Hailey Baldwin, Elsa Hosk, Chanel Iman, Lais Ribeiro, Alessandra Ambrosio, Shanina Shaik, Rose Bertram, Gizele Oliveira, Hannah Ferguson et d'autres célébrités[26]. Ratajkowski déclare être la seule à ajouter le #ad à la fin de son post mais l'a depuis supprimé[27]. Ce n'est que plus tard qu'il est rapporté que Jenner et les autres sont payés pour faire les posts, ce qu'ils sont tenus de divulguer en vertu de la loi fédérale. La Commission fédérale du commerce déclare que le #ad ne fonctionne qu'au début des posts rémunérés, et que le hashtag seul ne constitue pas une preuve suffisante[27]^,[28]. Hadid avoue et s'excuse d'avoir participé à la promotion[29]. Baldwin révèle avoir fait don de la totalité de son paiement à une organisation caritative après avoir vu les conséquences de l'événement[30]. Jerry Media est partiellement responsable de la promotion et du marketing des médias sociaux, et est peut-être responsable du documentaire Netflix post-événement qui oublie de reconnaître leur implication et leur participation dans le marketing de l'événement[31].

À la suite du festival, McFarland et Ja Rule sont accusés et un procès à 100 millions de dollars s'ouvre en Californie. 150 plaignants et l'avocat Mark Geragos portent plainte contre les deux créateurs du festival et demande le statut d'action collective pour ce procès[39]. Selon le dossier, l'action en justice invoque la fraude, la rupture de contrat (en partie à cause de la décision des organisateurs de se rendre au festival sans argent afin que les participants ne paient pas pour les taxis), la violation du pacte de bonne foi (en partie à cause de la restauration inadéquate et de l'incident où les participants sont enfermés à l'aéroport) et une fausse déclaration négligente[40]. Ben Meiselas du cabinet Geragos s'engage à tenir pour responsables « tous ceux qui ont promu le festival de manière imprudente et aveugle », ce qui est interprété comme étant destiné à Jenner, Hadid et les autres influenceurs des réseaux sociaux[41]. Geragos déclare que le Fyre Festival envoie des lettres de cessation et d'abstention aux dénonciateurs aux personnes ayant tweeté l'envers du décor du festival[42].

Une deuxième action collective contre Fyre Media, McFarland, Ja Rule et les promoteurs de l'événement identifiés comme Does 1-100 est déposée à Los Angeles par l'avocat John Girardi, spécialiste des dommages corporels, au nom de trois festivaliers[43]. Le plaignant prétend qu'ils dupent les clients pour qu'ils assistent au festival en payant plus de 400 personnalités des réseaux sociaux pour en faire la promotion. Les parties sont accusées de rupture de contrat, de fausse déclaration par négligence et de fraude[44]. Un journaliste de Bloomberg dépose une demande d'accès à l'information auprès de la FTC concernant leurs connaissances sur Instagram, après le deuxième recours collectif[43].

Un troisième procès est intenté devant le tribunal de New York contre Ja Rule, McFarland, Fyre Media et le directeur du marketing Grant Margolin. Les plaignants accusent les organisateurs du festival de fausses représentations, omissions matérielles... négligence, fraude, et violations des lois sur la protection des consommateurs[45]. « À l'arrivée des festivaliers sur l'île de Great Exuma pour le premier week-end, l'île manque d'équipements de base, est couverte de terre et les festivaliers doivent dormir dans des tentes avec des couvertures mouillées. Il n'y a pas de douches ou de salles de bain communes comme prévu ; à la place, il y a des toilettes portables (seulement un tous les 200 mètres) qui sont renversés et seulement trois douches alors qu'il y a des centaines de personnes qui arrivent » affirme une plaignante[46].

Le 4 mai, un autre procès est intenté par le National Event Services, qui fournit des services médicaux pour le festival et prétend avoir un dédommagement de 250 000 dollars, alléguant une rupture de contrat, une fraude et une négligence de la part des organisateurs[47]. Le procès reproche à Fyre d'avoir « échoué et/ou refusé d'acheter une assurance annulation » et « d'avoir échoué à obtenir un contrat avec un hélicoptère ou un avion d'évacuation médicale ». Les employés du NES déclarent que la clinique médicale locale est fermée et que le logement est inhabitable avec une invasion d'insectes, des matelas tachés de sang, et pas de climatisation[47].

En mai également, un participant au festival, intente une action en justice devant le tribunal fédéral du New Jersey, affirmant que les organisateurs ont violé la loi de l'État sur la fraude à la consommation et ont commis une rupture de contrat[48].

Une sixième action en justice, déposée devant le tribunal fédéral de Floride en tant que recours collectif, fait état de violations présumées, notamment de fraude, de négligence et de rupture de contrat. Les plaignants accusent les organisateurs d'avoir envoyé des lettres de cessation et d'abstention aux personnes qui critiquent le festival sur les réseaux sociaux[49].

Un septième procès est déposé devant le tribunal fédéral de Manhattan en tant que recours collectif. En plus des infractions mentionnées dans les autres procès, cette action invoque l'enrichissement sans cause et la violation du droit des affaires de l'État de New York, en affirmant que les organisateurs continuent à offrir des surclassements VIP et des possibilités de déposer de l'argent dans le système de paiement Fyre Band après l'annulation du festival[50].

Un huitième procès est intenté devant la Cour supérieure du comté de Suffolk à Boston au nom du vendeur de billets Tablelist. La société estime que les organisateurs du festival et les bailleurs de fonds commettent une rupture de contrat et trompent de manière frauduleuse l'entreprise et les acheteurs de billets. Tablelist demande 3,5 millions de dollars pour rembourser les clients, ainsi que les dommages résultant de la perte d'activité après avoir licencié 40 % de sa main-d'œuvre[51].

Le 3 juillet 2018, deux festivaliers de Caroline du Nord reçoivent 5 millions de dollars de dommages et intérêts. Le jugement est rendu contre Billy McFarland in absentia pour ne pas avoir répondu à la procédure judiciaire. Ja Rule est nommé en qualité de co-défendeur, mais est ensuite retiré du procès après un accord privé non divulgué avec l'avocat des deux festivaliers[52].

Le 21 mai 2017, The New York Times rapporte que McFarland et ses associés font l'objet d'une enquête pénale fédérale menée par le Federal Bureau of Investigation pour vente de billets frauduleuse, escroquerie et investissement frauduleux. L'affaire est supervisée par le procureur des États-Unis pour le district sud de New York[53]. Le 30 juin 2017, McFarland est arrêté et accusé de vente de billets frauduleuse[54].

En mars 2018, McFarland plaide coupable pour vente de billets frauduleuse que le ministère américain de la justice appelle un stratagème pour frauder les investisseurs et le vendeur de billets[55]. En octobre 2018, McFarland est condamné à six ans de prison et à verser 26 millions de dollars[56].

Le 24 juillet 2018, la SEC annonce que McFarland, deux sociétés qu'il a fondé, un ancien cadre supérieur et un ancien sous-traitant acceptent de régler les frais résultant d'une fraude à l'offre étendue et pluriannuelle d'au moins 27,4 millions de dollars provenant de plus de 100 investisseurs. McFarland reconnaît les accusations de la SEC contre lui, obtient le poste permanent de directeur et d'officier et accepte le versement. Grant H. Margolin, Daniel Simon, Fyre Media et Magnises Inc. acceptent le règlement sans admettre ou nier les accusations. Margolin accepte un mandat de sept ans et doit payer une amende de 35 000 dollars, et Simon accepte un mandat de trois ans et doit payer plus de 15 000 dollars de dommages et intérêts. Les règlements sont soumis à l'approbation du tribunal[57].

Lors de la pandémie de COVID-19, Billy McFarland demande une libération compassionnelle de prison en avril 2020 pour se protéger de la contamination du virus. Sa demande est rejetée[58].