Explosion de Halifax

L'explosion de Halifax se produisit le à Halifax, en Nouvelle-Écosse au Canada, lorsque le cargo français Mont-Blanc, transportant des munitions (du nitrate d’amonium broyé) à destination de l'Europe alors en guerre, entra en collision avec un navire norvégien, l'Imo. Le Mont-Blanc prit feu et explosa vingt minutes plus tard, tuant 2 000 personnes et en blessant des milliers d'autres. L'explosion engendra un tsunami et une onde de choc si puissante qu'elle cassa des arbres, plia des rails de chemin de fer et démolit des édifices, projetant des débris à des centaines de mètres. L'explosion fut entendue à 420 kilomètres de distance.

Explosion de Halifax

Photographie du nuage peu après l'explosion.

Type Explosion
Pays Canada
Localisation Halifax (Nouvelle-Écosse)
Coordonnées 44° 40′ 09″ nord, 63° 35′ 47″ ouest
Date
Bilan
Blessés environ 9 000
Morts environ 2 000

Géolocalisation sur la carte : Nouvelle-Écosse
Géolocalisation sur la carte : Canada

Ce fut la plus puissante explosion causée par l'activité humaine jusqu'au premier essai atomique en juillet 1945. Hors explosions atomiques d'Hiroshima et Nagasaki, elle est toujours aujourd'hui celle ayant fait le plus de dégâts et celle d'origine accidentelle ayant fait le plus de victimes (le record de l'explosion accidentelle la plus forte, estimée à 10 kilotonnes d'équivalent TNT, est détenu par l'explosion le de la seconde version du lanceur lunaire N-1 soviétique qui retomba sur son pas de tir et le détruisit totalement, mais sans faire de victimes).

Événements

Bâtiment partiellement soufflé par l'explosion de Halifax.
Maison partiellement détruite par l'explosion de Halifax.

En 1917, Halifax est alors avec Sydney le principal port canadien pour l'acheminement de troupes et de matériels vers l'Europe en guerre. La population de Halifax et de Dartmouth située juste sur l'autre rive est alors d'environ 65 000 personnes.

Le , à 8 h 45, le navire de transport français Mont-Blanc, un cargo d'un tonnage de 3100 t. et de 98 m de long appartenant à la Compagnie générale transatlantique et le navire de secours norvégien Imo entrèrent en collision dans les détroits du port d'Halifax. Le Mont-Blanc, en provenance de New York où il avait chargé des munitions, arrivait à Halifax afin de joindre un convoi pour traverser l'Atlantique. Il attendait d'être admis au port le 5 décembre, car il était arrivé trop tard. Le port était protégé par des filets qui empêchaient les sous-marins allemands d'entrer ainsi que les autres navires. Au même moment, le Imo attendait de pouvoir sortir du port. Le 6 décembre, le Imo tenta de sortir par le canal droit, mais un autre navire bloquait le passage. Il s'engagea donc dans le canal gauche. Le Mont-Blanc était à ce moment en train d'entrer par le canal droit, et aucun des deux navires n'accepta de céder le passage. Finalement, le Mont-Blanc décida de passer à côté du Imo par le centre. Le Imo stoppa alors complètement ses machines, mais cette action sur les propulseurs poussa le navire au centre, et les deux navires entrèrent en collision. Le Imo tenta alors de faire marche arrière, ce qui créa des étincelles qui mirent le Mont-Blanc en feu.

Les vapeurs du benzène qui était entreposé sur le pont du Mont-Blanc s'étaient répandues sur le côté du navire, et elles furent enflammées par les étincelles provoquées par la collision. Le Mont-Blanc transportait de grandes quantités de munitions pour l'Europe, qui était plongée dans la Première Guerre mondiale. Sa cale contenait plus de 2 400 tonnes d'explosifs, incluant du TNT, du fulmicoton et de l'acide picrique. Le feu, en se propageant, empêcha l'équipage d'accéder à l'équipement de lutte contre l'incendie et les marins abandonnèrent rapidement le navire sur les ordres du capitaine. L'équipage s'enfuit dans deux canots de sauvetage, rejoignant le rivage de Dartmouth, tandis que le navire en feu continuait de dériver vers le rivage d'Halifax. Pendant qu'il brûlait, d'autres navires tentèrent de lui venir en aide, et des spectateurs s'assemblèrent sur le rivage. Par la suite, le vaisseau en feu frappa la jetée, et le feu se propagea à terre. À 9 heures, 4 minutes et 35 secondes précisément, le contenu du Mont-Blanc explosa. Le navire fut instantanément pulvérisé, la plus grande partie étant vaporisée en une gigantesque boule de feu qui s'éleva à plus de 6,1 km dans les airs, formant l'un des premiers nuages champignons faits par l'homme. La puissance de la détonation déclencha un raz-de-marée qui s'éleva à plus de 18 mètres au-dessus du niveau des hautes eaux. Le raz-de-marée emporta le Imo jusqu'au rivage.

Plus de 2,5 km2 de la ville de Halifax furent rasés et des vitres furent fracassées jusqu'à 16 kilomètres de distance. Une ancre provenant du Mont-Blanc fut retrouvée à près de quatre kilomètres[Note 1] du port. On a retrouvé, dans les archives de la Bedford Academy de Halifax, une correspondance entre deux instituteurs traitant de l'événement : selon ces lettres, lors d'une sortie scolaire près de la ville, 11 enfants ont été balayés par un canot de sauvetage pneumatique en feu provenant du Imo[1].

Approximativement 2 000 personnes sont mortes dans le désastre (dont environ 1 600 sur le coup), et 9 000 blessées (dont 6 000 gravement). Selon une estimation minimale, environ 35 millions de dollars (en dollars canadiens de 1917) de dommages ont été occasionnés. Quelque 160 hectares d'aire urbaine furent détruits, laissant 6 000 sans-abris. Un recensement des victimes montrait que parmi les personnes tuées : 600 avaient moins de 15 ans ; 166 était des travailleurs manuels ; 134 étaient des soldats et/ou marins ; 125 étaient artisans ; et 39 étaient des travailleurs du chemin de fer[2]. Beaucoup des blessures furent handicapantes à vie, bien des gens étant rendus partiellement aveugles par les éclats de verre. Le très grand nombre de blessures oculaires entraîna de grands efforts de la part des médecins, à l'origine de grands progrès accomplis dans le traitement des yeux endommagés.

Suite et séquelles

Vue du port après le blizzard.
Autre explosion à Halifax, moins importante, d'un magasin d'explosifs (le 18 juillet 1945).

Le lendemain, un blizzard frappa la ville, faisant obstacle aux secours. De l'aide immédiate arriva rapidement du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve. Dans la semaine qui suivit, de l'assistance arriva de partout en Amérique du Nord, et des dons parvinrent de partout dans le monde. L'effort le plus célèbre et le plus complet vint de la Croix-Rouge de Boston et du Comité de sécurité publique du Massachusetts. Depuis ce jour, les citoyens de Halifax font don d'un grand sapin de Noël chaque année à la ville de Boston. Cette amitié explique aussi pourquoi bon nombre de Néo-Écossais sont, encore aujourd'hui, fans des équipes sportives bostoniennes comme les Bruins et les Red Sox.

Une bonne partie du folklore local contemporain s'inspire de cet événement. Une histoire concerne une fenêtre du côté à l'abri du vent, dans l'église St. Paul, sur Parade Square : le trou fait par l'explosion dans la vitre ressemble au buste d'un moine, et un morceau des débris provenant du désastre est encore incrusté dans le mur du vestibule au-dessus de l'entrée du sanctuaire. Un des héros les plus célèbres de l'événement fut Vince Coleman ; il prit le risque de retourner à son bureau du télégraphe pour envoyer un message à un train de passagers qui se rendait à la station de North Street pour les alerter du danger imminent. Il fut tué dans la déflagration, mais les trains reçurent son avertissement et s'arrêtèrent à l'orée de la ville de Rockingham ; ils échappèrent aux dommages de l'explosion et relayèrent le message pour appeler à l'aide.

Avant l'explosion de Halifax, l'explosion minière de Nanaimo en 1887 avait été la plus grande explosion artificielle au monde.

Plus d'un siècle après la catastrophe, on trouve encore au fond du port de la cordite (très peu soluble dans l'eau) et des munitions non-explosées qui polluent le milieu avec les oxydes de cuivre (colorant les douilles en bleu)[3]. Les munitions contenaient par ailleurs du mercure (sous forme de fulminate de mercure) et du plomb qui risquent un jour de contaminer l'environnement marin, la faune et la flore du port et des environs[4].

Filmographie

Un téléfilm fut réalisé en 2003 sur l'explosion de Halifax : Touchée en plein cœur (Shattered City: The Halifax Explosion), réalisé par Bruce Pittman.

Littérature

L'explosion est évoquée :

  • par W.D. Wetherell dans son roman A century of November, traduit en français sous le titre Un siècle de Novembre,
  • par Alex Capus dans son roman Le Faussaire, l'Espionne et le faiseur de bombes (2013),
  • par Ami McKay dans son roman L'Accoucheuse de Scots Bay.
  • par Hugh MacLennan dans son roman Barometers Rising, traduit en français sous le titre Le temps tournera au beau (1941)
  • Par Anita Shreve dans son roman La maison du bord de mer (sea glass), 2002

Voir aussi

Notes

  1. Exactement 2,35 miles, soit 3,78 kilomètres.

Références

  1. (en)
  2. (en) Les chiffres cités dans ce paragraphe sont tirés du Halifax Explosion Remembrance Book, base de données officielle publiée en 2002 par la Nova Scotia Archives.
  3. « Photo de balles et cordite, sur le fond du port d'Halifax où l'explosion du 6 décembre 1917 a détruit le cargo Mont-Blanc ; cargo chargé d'explosifs et de munitions à destination du front de la Première Guerre mondiale ».
  4. « Mont-Blanc », Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux, mis à jour le 27 juillet 2011, consulté le 25 janvier 2014.

Articles connexes

Liens externes

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