Dong Qichang

Dǒng Qíchāng (1555-1636) était un peintre, calligraphe et critique d'art de la fin de la période Ming. Il eut, en tant que critique, une énorme influence sur une certaine idée de la peinture lettrée, en Chine même mais aussi au Japon, en opposant de manière radicale une certaine « École du Nord » à une certaine « École du Sud ». Ses conceptions ont été remises en question à la fin du XXe siècle seulement, lorsqu'une étude systématique de toute l'histoire de la peinture de lettrés put se faire au regard des œuvres.

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Peinture

Son œuvre valorise davantage l'expressivité que la ressemblance. Il refuse toute mièvrerie et sentimentalisme, sans pour autant tomber dans l'abstraction. Ses recherches l'ont amené, néanmoins, à des effets très surprenants, détachés des contraintes de la vraisemblance naturaliste. Par exemple, dans ses Huit scènes d'automne de 1620, sur la troisième feuille, il emploie les mêmes couleurs pour le premier plan comme pour le lointain, ce qui aurait certainement bien plu à Cézanne, s'il l'avait connu. Par ailleurs, pour séparer les plans, il laisse le papier totalement vierge, et n'opère aucune transition, ce qui rend l'interprétation d'un tel « blanc » ambigue : s'agit-il réellement d'une rivière ? ou d'un autre phénomène qui justifierait ce vide et sa découpe abrupte ? Pour Liu Jianlong, « cela confère à son œuvre un aspect naïf et maladroit, dénué de virtuosité, et qui signe une authentique recherche d'amateur ». « Tout en préconisant le retour à l'ancien, il s'est permis de tirer la peinture à un degré d'expressionnisme jamais atteint »[1].

Quelques œuvres

Critique d'art

Pour reprendre l'analyse qu'en propose Danielle Elisseeff, le classement qu'opère Dong Qichang ne repose pas sur l'histoire, que ce soit celle des peintres ou celle des œuvres, mais sur des critères qu'il va trouver dans l'univers des moines bouddhistes (dont certains relevant du bouddhisme Chan) du Ier millénaire. Ce classement a néanmoins permis à des générations de peintres et d'étudiants de s'expliquer les deux pôles entre lesquels oscille la création lettrée chinoise.

« [Selon le classement de Dong Qichang:] Tout ce qui est confucéen, sérieux, descriptif et lié à la pratique du style strict (gongbi) relève de l'école du Nord; et ce qui s'apparente à l'expression personnelle, au taoïsme, à la rêverie, aux brumes, en s'appuyant sur le style libre (xieyi) se classe dans l'école du Sud.

C'est seulement à la fin du XXe siècle, à partir du moment où commence un important travail sur les archives, que les historiens de l'art osent dénoncer les incohérences et les partis pris, souvent sclérosants, de ce système[2]. »

Ailleurs[3], Danielle Elisseeff précise que son immense succès a nui à la portée révolutionnaire, en son temps, des valeurs toutes nouvelles qu'il oppose aux conservateurs en donnant toute son importance à la personne, dans la création comme dans l'interprétation. Il soutient par là de nombreux artistes qui ont fait la réputation de Suzhou : le collectionneur Wen Zhengming (1470-1559) et l'érudit professionnel Qiu Ying (fin XVe-milieu XVIe), parmi tant d'autres. En suivant sa logique, il a rejeté le romantisme des Song du Sud et de leurs héritiers :Dai Jin (1388-1462) et l'école du Zhe (Zhepai, pour Zhejiang) qui ne furent finalement reconnus qu'hors de Chine et particulièrement au Japon.

Sa classification[4] mettait en avant dans la dite "école du Sud" : Wang Wei des Tang, Jing Hao, Guantong, Dong Yuan,et Juran des Cinq Dynasties, Mi Fu et son fils Mi Youren des Song, les quatre maîtres des Yuan: Huang Gongwang, Wu Zhen, Ni Zan,et Wang Meng.

Carrière bureaucratique

Dong Qichang était le fils d'un professeur et fut un enfant précoce. À 12 ans, il passa avec succès l'examen du service civil et obtint une place convoitée à l'école du gouvernement préfectoral. Sa calligraphie maladroite le fit arriver derrière un cousin à l'examen du service impérial. Il s'entraîna jusqu'à devenir un remarquable calligraphe et grimpa alors les échelons, atteignant le plus haut grade à l'âge de 35 ans. Toutefois, sa carrière fut assez agitée : en 1605, une manifestation de candidats le conduisit à se retirer temporairement. Sa maison fut également brûlée par une foule furieuse après qu'il eut battu et insulté une femme qui était venue lui faire des reproches.


Notes et références

  1. Liu Jianlong in Lesbre et Jianlong, 2004, p. 315 et 316
  2. Danielle Elisseeff 2010, p. 221
  3. Danielle Elisseeff 2010, p. 70
  4. [[#Chang Lin-Sheng, Jean-Paul Desrosches, Hui Chung Tsao, Hélène Chollet, Pierre Baptiste, François Cheng, Simon Leys, Jacques Giès1998-1999|Chang Lin-Sheng, Jean-Paul Desrosches, Hui Chung Tsao, Hélène Chollet, Pierre Baptiste, François Cheng, Simon Leys, Jacques Giès 1998-1999]], p. 368

Bibliographie

  • Danielle Elisseeff, Histoire de l'art : De la Chine des Song (960) à la fin de l'Empire (1912), Paris, École du Louvre, Éditions de la Réunion des Musées Nationaux (Manuels de l'École du Louvre), , 381 p. (ISBN 978-2-904187-28-6 (édité erroné), 978-2-904187-28-5 et 978-2-7118-5520-9, notice BnF no FRBNF42242578) Ouvrage de référence, bibliographie et Sites Internet.
  • Chang Lin-Sheng, Jean-Paul Desrosches, Hui Chung Tsao, Hélène Chollet, Pierre Baptiste, François Cheng, Simon Leys, Jacques Giès, Trésors du Musée national du Palais, Taipei. Mémoire d'Empire Galeries Nationales du Grand Palais, Paris, Éditions de la Réunion des Musées Nationaux, 1998-1999, 423 p. (ISBN 978-2-7118-3651-2 et 2-7118-3651-7)
  • Yang Xin, Richard M. Barnhart, Nie Chonghzeng, James Cahill, Lang Shaojun, Wu Hung (trad. de l'anglais), Trois mille ans de peinture chinoise, Arles, Philippe Piquier, , 402 p. (ISBN 2-87730-667-4).
  • Emmanuelle Lesbre et Liu Jianlong, La Peinture chinoise, Paris, Hazan, , 479 p. (ISBN 2-85025-922-5).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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