Deir el-Médineh

Deir el-Médineh (ou Deir al-Médîna) est le nom arabe d'un village de l'Égypte antique où résidait la confrérie des artisans chargés de construire les tombeaux et les temples funéraires des pharaons et de leurs proches durant le Nouvel Empire (de la XVIIIe à la XXe dynastie). Le village se situe sur le chemin qui mène du Ramesséum à la vallée des Reines.

Deir el-Médineh
Ville d'Égypte antique

Vue du village
Noms
Nom égyptien ancien Set Maât her imenty Ouaset
Nom arabe Deir el-Médineh
Administration
Pays Égypte
Région Haute-Égypte
Nome 4e : Nome du Sceptre
Géographie
Coordonnées 25° 43′ 41″ nord, 32° 36′ 05″ est
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Égypte
Deir el-Médineh
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Deir el-Médineh

    Son nom antique, Set Maât her imenty Ouaset, signifie « La place de Maât (ou Place de vérité) à l'occident de Thèbes ». En effet, le village se trouve à l'ouest de Thèbes, sur la rive opposée du Nil. Le nom arabe de Deir el-Médineh signifie « le couvent de la ville » car, à l'époque de la conquête de l'Égypte par les Arabes, le temple du village avait été converti en monastère chrétien au Ve siècle. Les artisans vénéraient Amenhotep Ier comme fondateur et protecteur de la confrérie.

    Les habitants de Deir el-Médineh sont à l'origine d'une grande partie des tombes de la vallée des Rois et des temples funéraires qui longent la rive ouest du Nil, entre autres des tombes des Amenhotep, des Thoutmôsis, des Ramsès et de Toutânkhamon. On leur doit également le temple monumental d'Hatchepsout sur le site de Deir el-Bahari. Sur le flanc de la colline bordant le village, les tombes des ouvriers ont été construites et décorées par les ouvriers de la nécropole eux-mêmes. On trouve y entre autres les tombes d'Ipy, de Pached, et de Senedjem. Les fouilles ont permis de retrouver un grand nombre d'ostraca[1] et de papyri, qui renseignent d'une façon détaillée sur la vie quotidienne des ouvriers. Ceux-ci apparaissent comme un personnel très qualifié de petits fonctionnaires, bien logés, nourris, soignés, bénéficiant d'un statut enviable. Ces grands travaux n'ont donc pas été réalisés, contrairement à une légende tenace, par une population d'esclaves. Cependant, le village compte des esclaves étrangers. De plus, l'isolement et la claustration des habitants reviennent à une situation d'esclavage[2].

    Le village fut abandonné, puis pillé, durant la Troisième Période intermédiaire qui débuta à la fin du règne de Ramsès XI.

    La Cime (montagne thébaine), vue depuis la vallée des Rois.

    La déesse Mertseger était la protectrice du village. Elle résidait au sommet de la pyramide naturelle, la Cime, formée par un pic de la montagne thébaine (450 m).

    Architecture du village

    À son apogée, le village couvrait une superficie de 5 600 m2 et comptait environ 120 ouvriers (soit 1 200 personnes au total, en comptant les familles)[3].

    Ceint par une muraille haute de cinq mètres environ percée d'une porte gardée nuit et jour, le village est composé de soixante-huit maisons mitoyennes donnant sur une rue principale. Chaque maison, construite en brique crue sur des fondations de pierre, comprend trois pièces en enfilade : une entrée avec une chapelle surélevée ; une pièce de vie au plafond également surélevé et percé de petites fenêtres laissant passer le jour, équipées d'une sorte de capte-vent destiné à apporter un peu de fraîcheur à l'intérieur ; une ou deux pièces donnant sur une cour équipée d'un four en argile et servant de cuisine. Ces cours étaient protégées du soleil par des canisses de roseau. Enfin, les maisons étaient complétées par une cave destinée à maintenir au frais les denrées alimentaires. Le toit plat constituait un espace supplémentaire de couchage et de stockage. Les murs intérieurs étaient enduits et peints de motifs colorés géométriques imitant des tissus décoratifs.

    Le mobilier était limité et simple, les pièces étant petites et le bois rare et onéreux. Les vêtements, cosmétiques et objets de valeur étaient entreposés dans des paniers, des pots ou des coffres en bois. Les maisons les plus riches disposaient de lits, de chaises et de tabourets mais dans les plus modestes - la majorité de celles de Deir el-Médineh -, des banquettes en brique crue servaient pour dormir et s'asseoir. Les repas étaient servis sur des plateaux, parfois soutenus par des tréteaux mobiles.

    Les tombes des artisans étaient hors de l'enceinte et jouxtaient le village.

    Un temple de construction ptolémaïque y fut édifié par Ptolémée IV pour les déesses Hathor et Maât.

    Équipes de travailleurs

    Deux équipes se partageaient les tâches d'aménagement et de décoration des sépultures pharaoniques. Chacune comptait contremaitres, maçons, peintres, graveurs, sculpteurs, etc. La cité se développa jusqu'à compter sous Ramsès IV quelque 1 200 personnes nourries par une noria de pêcheurs, cultivateurs et porteurs d'eau.

    À la fin du règne de Ramsès III (vers -1166 suivant les sources), le village est le lieu d'un événement mémorable : une grève des ouvriers. Celle-ci, en effet, est l'objet du premier document connu de l'Histoire relatant un conflit social, le Papyrus de la Grève conservé au Musée de Turin.

    Temples et divinités vénérées à Deir el-Médineh

    Divinités vénérée

    La déesse Mertseger
    • Maât, la rectitude, règle primordiale de la confrérie ;
    • Mertseger, protectrice du village ;
    • Thot, patron des scribes et des dessinateurs ;
    • Khnoum, patron des potiers et des sculpteurs.
    • Hathor, déesse de l'amour
    • Amenhotep Ier, pharaon divinisé en tant que fondateur de la ville

    Le temple ptolémaïque

    D'époque ptolémaïque, le petit temple de Deir el-Médineh (neuf mètres de large sur vingt-deux mètres de long) comporte trois sanctuaires juxtaposés précédés d'un vestibule soutenu par deux colonnes à chapiteau hathorique.

    Ici étaient vénérés Amon--Osiris, Amon-Sokar-Osiris et Hathor[4] et on trouve dans un des sanctuaires une très rare représentation de la pesée du cœur devant Osiris qui devait définir si le défunt était apte ou non à entrer dans le royaume des morts.

    Bien que fort modeste, le temple est pourvu d'un mammisi, actuellement visible sous la forme d'un renfoncement dans un des murs extérieur du temple, lui-même entouré par une enceinte en briques crues typique.

    Autres constructions

    Outre le temple de Deir el-Médineh, le site est parsemé de fondations d'autres temples plus anciens, notamment le petit temple d'Amenhotep Ier et la chapelle d'Hathor construite par Séthi Ier[5] alors que d'autres éléments remontent à Ramsès II.

    Fouilles archéologiques

    À partir de 1810, les voleurs pillent Deir el-Médineh, dont les nombreuses tombes et les maisons étaient encore en excellent état. Auguste Mariette met fin à ce pillage sauvage dans les années 1850. TT1, la tombe de Sennedjem, est découverte en 1885[6].

    Le village est fouillé dans sa partie nord par Ernesto Schiaparelli de 1905 à 1909 pour le compte du Musée égyptologique de Turin, et les années suivantes, le Français Baraize s'intéresse au petit temple ptolémaïque. Il y a ensuite quelques fouilles dirigées par l'Allemand Müller et les Français Girard et Kuentz. Mais le véritable explorateur du site est Bernard Bruyère qui y consacra près de vingt-cinq ans de sa vie. Il y entreprend l'exploration systématique et méthodique entre 1917 et 1947 ainsi que l’égyptologue tchèque Jaroslav Černý. En 1934/1935, Bernard Bruyère y découvre la tombe de la dame Madja et de son époux, un ouvrier du village des artisans.

    Notes et références

    1. débris de matériaux sur lesquels on a écrit ou dessiné
    2. Nicolas Grimal, p. 370.
    3. Nicolas Grimal, p. 368.
    4. R. H. Wilkinson, p. 190.
    5. R. H. Wilkinson, p. 189.
    6. Nicolas Grimal, p. 366.

    Bibliographie

    • Pierre du Bourguet, Le temple de Deir al-Médîna, éd. par Luc Gabolde, dessins de Leïla Ménassa, Le Caire, 2002 (Mémoires publiés par les membres de l'Institut français d'archéologie orientale du Caire, 121).
    • Richard H. Wilkinson, The Complete Temples of Ancient Egypt.
    • Nicolas Grimal, Histoire de l'Égypte ancienne [détail des éditions]
    • Bernard Bruyère :
      • Deir el-Médineh, La nécropole de l'ouest, FIFAO 14, IFAO, Le Caire, 1937.
      • Deir el-Médineh, la nécropole de l'est, FIFAO 15, IFAO, Le Caire, 1937.
      • Rapport sur les fouilles de Deir el-Médineh de 1923 à 1947, FIFAO 2 à 21 Le Caire, 1925 à 1952.
    • Dominique Valbelle, Les ouvriers de la tombe. Deir el-Médineh à l'époque ramesside, IFAO, 1985
    • Robert Mingam, Deir el-Médineh, le village des Artisans de la XVIIIe dynastie
    • Michel Malaise, Alimentation des ouvriers de Deir el-Médineh au Nouvel Empire
    • Guillemette Andreu, Les Artistes de Pharaon, Musée du Louvre, 2001
    • Jérôme Prieur, Rendez-vous dans une autre vie, Paris, Seuil, coll. « La librairie du XXIe siècle », 2010, 181 p., (ISBN 2-0210-1210-7)

    Œuvres de fiction

    En 2000, Christian Jacq a écrit une série intitulée La Pierre de Lumière, traitant de ce village d'artisans et composée de quatre volumes : Néfer le silencieux, La femme sage, Paneb l'ardent et La place de Vérité.

    En 2010, un album de la série de bande dessinée, Les Gardiens du sang écrite par Didier Convard, a pour titre Deir el-Médineh.

    C'est un des lieux du jeu Égypte : 1156 av. J.-C. - L'Énigme de la tombe royale.

    Voir aussi

    Liens externes

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