Dénervation sympathique rénale

La dénervation sympathique rénale est une technique consistant à pratiquer une brûlure superficielle de l'intima des artères rénales à l'aide d'un cathéter relié à un générateur de radiofréquences. Elle est utilisée dans certains cas d'hypertension artérielle réfractaire aux traitements médicamenteux avec de bons résultats.

Mécanisme d'action

La stimulation du système nerveux sympathique rénal entraîne une baisse du volume d'urine (diurèse et de l'excrétion de sodium de manière indépendante des conditions de perfusion[1]. Cette stimulation se fait par le biais de nerfs passant dans la paroi de l'artère rénale.

Historique

La résection chirurgicale des nerfs splanchniques a été fait dès les années 1950[2]. Les premiers essais par ablation par radiofréquence par voie endovasculaire remontent à 2009[3].

Technique

Le geste doit être fait sous anticoagulants (le plus souvent, injection d'héparine peu avant ou pendant l'intervention) afin d'éviter la formation d'un thrombus (caillot) sur la paroi artérielle.

L'abord se fait par voie fémorale artérielle et sous contrôle radiologique. L'acte se réalise sous anesthésie générale, la brûlure de l'artère étant douloureuse.

dans un premier temps, une artériographie les artères rénales est réalisée afin de visualiser les positions et le nombre de ces dernières (dans le cas le plus simple, une de chaque côté). Le cathéter d'ablation est positionné à l'intérieur de l'artère et une brûlure est réalisée sur tout le pourtour de l'artère par l'application d'un courant alternatif de moyenne fréquence (entre 350 et 500 Hz). L'ensemble des artères rénales est traitée ainsi le plus souvent en une seule procédure. La sonde est retirée et l'artère fémorale est comprimée manuellement, puis par un pansement compressif, ou, parfois, fermée par un système dédié.

Le cathéter d'ablation peut comporter une seule électrode distale, ou plusieurs électrodes, ce qui permet de raccourcir la durée de l'acte[4].

L'ablation doit éviter les zones où existe un athérome. La procédure demande entre une demi-heure et une heure[5].

Le patient est mis systématiquement sous antiagrégants plaquettaires pendant au moins quatre semaines après l’intervention[5].

Résultats

La réduction de la tension artérielle n'est pas immédiate et peut demander plusieurs semaines[5].

La pression systolique est réduite, en moyenne, d'un peu plus de 30 mmHg[6]. Les effets sur les chiffres tensionnels persistent, avec un recul atteignant deux ans[7]. La rigidité artérielle est diminuée, comme l'atteste une diminution de la vitesse de propagation de l'onde de pouls[8]. Il existe également une amélioration de la sensibilité à l'insuline[9], des apnées du sommeil lorsqu'elles existent[10] ainsi que de meilleurs résultats sur l'absence de récidive d'arythmie lorsque la dénervation est couplée avec une isolation des veines pulmonaires (traitement ablatif de la fibrillation auriculaire)[11]. À moyen terme, cette technique permet la réduction de la masse ventriculaire gauche et l'amélioration des paramètres de remplissage (fonction diastolique)[12].

Cette réduction de la tension artérielle s'observe chez les hypertendus sévères malgré un traitement médical lourd, mais aussi chez les patients présentant une HTA plus modérée, toujours malgré un traitement médical adapté[13].

La réduction de la pression artérielle moyenne, mesurée par le monitoring ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) semble cependant moindre[14].

L'échec de la procédure peut être secondaire à une dénervation insuffisante mais aussi à des facteurs autres (par exemple, incapacité du lit artérielle à se vasodilater malgré la levée de la stimulation sympathique) et il n'est donc pas évident qu'une deuxième intervention du même type soit intéressante[5].

La technique étant récente, il n'existe pas d'évaluation de son efficacité à long terme, en particulier sur le risque de survenue de maladie cardiovasculaire. De plus, la totalité des études concernant la dénervation rénales sont des études ouvertes (c'est-à-dire, le patient connaissant son traitement) ne pouvant exclure un effet placebo. Pour pallier cela, une étude en simple aveugle a été lancé entre 2011 et 2013 (le groupe témoin ayant une artériographie simple, sans dénervation) et n'a pas prouvé de supériorité de la dénervation[15], ce qui remet en cause l'intérêt de la technique. Elle pourra être relancée une fois que nous auront de meilleurs connaissances anatomiques, neurologiques et neurophysiologiques pouvant supporter la dénervation rénale[16]. Une dénervation chirurgicale mini-invasive par abord direct du plexus rénal pourrait être une approche nouvelle et plus exhaustive.

Accidents et incidents

Ils sont rares, en rapport avec l'abord artériel ou l'anesthésie[4]. Un cas de sténose de l'artère rénale séquellaire de la procédure, a été rapporté[17].

Indications

En 2013, la technique est considérée comme encore expérimentale aux États-Unis[4] et n'est théoriquement réalisée que dans le cadre de protocoles de recherche. La Société européenne de cardiologie a publié en 2013 des recommandations sur ses indications[18].

la dénervation rénale est avant tout proposée dans les hypertensions artérielles essentielles (sans cause retrouvée), sévères et non maîtrisées par un traitement médicamenteux optimal (trithérapie, dont un diurétique). La présence d'une insuffisance rénale doit rendre très prudente l'indication proposée devant le risque théorique de la technique[5].

Notes et références

  1. Bell-Reuss E, Trevino DL, Gottschalk CW, Effect of renal sympathetic nerve stimulation on proximal water and sodium reabsorption, J Clin Invest, 1976;57:1104–1107
  2. Smithwick RH, Thompson JE, Splanchnicectomy for essential hypertension: results in 1,266 cases, JAMA, 1953;152:1501–1504
  3. (en) Krum H, Schlaich M, Whitbourn R et al. « Catheter-based renal sympathetic denervation for resistant hypertension: a multicentre safety and proof-of-principle cohort study » Lancet 2009:373;1275-1281
  4. Thukkani AK, Bhatt DL, Renal denervation therapy for hypertension, Circulation, 2013;128:2251-2254
  5. Schlaich MP, Schmieder RE, Bakris G et al. International Expert Consensus Statement: Percutaneous transluminal renal denervation for the treatment of resistant hypertension, J Am Coll Cardiol, 2013;62:2031-2045
  6. (en) Esler MD, Krum H, Sobotka PA et al. « Renal sympathetic denervation in patients with treatment-resistant hypertension (The Symplicity HTN-2 Trial): a randomised controlled trial » Lancet 2010;376:1903-1909
  7. Investigators Symplicity HTN-1, Catheter-based renal sympathetic denervation for resistant hypertension: durability of blood pressure reduction out to 24 months, Hypertension, 2011;57:911–917
  8. (en) Brandt MC, Reda S, Mahfoud F et al. « Effects of renal sympathetic denervation on arterial stiffness and central hemodynamics in patients with resistant hypertension », J Am Coll Cardiol. 2012;60:1956-1965
  9. Mahfoud F, Schlaich M, Kindermann I et al. Effect of renal sympathetic denervation on glucose metabolism in patients with resistant hypertension: a pilot study, Circulation, 2011;123:1940–1946
  10. Witkowski A, Prejbisz A, Florczak E et al. Effects of renal sympathetic denervation on blood pressure, sleep apnea course, and glycemic control in patients with resistant hypertension and sleep apnea, Hypertension, 2011;58:559–565
  11. Pokushalov E, Romanov A, Corbucci G et al. A randomized comparison of pulmonary vein isolation with versus without concomitant renal artery denervation in patients with refractory symptomatic atrial fibrillation and resistant hypertension, J Am Coll Cardiol, 2012;60:1163–1170
  12. Brandt MC, Mahfoud F, Reda S et al. Renal sympathetic denervation reduces left ventricular hypertrophy and improves cardiac function in patients with resistant hypertension, J Am Coll Cardiol, 2012;59:901–909
  13. Ott C, Mahfoud F, Schmid A et al. Renal denervation in moderate treatment-resistant hypertension, J Am Coll Cardiol, 2013;62:1880–1886
  14. Mahfoud F, Ukena C, Schmieder RE et al. « Ambulatory blood pressure changes after renal sympathetic denervation in patients with resistant hypertension », Circulation, 2013;128:132–140
  15. Bhatt DL, KandzariDE, O'NeillWW et al. A controlled trial of renal denervation for resistant hypertension, N Eng J Med, 2014;370:1393-1401
  16. (en) « SYMPLICITY HTN-3 : Renal Denervation Fails in Major Study », sur Medscape (consulté le ).
  17. Kaltenbach B, Id D, Franke JC, Sievert H, Hennersdorf M, Maier J, Bertog SC, Renal artery stenosis after renal sympathetic denervation, J Am Coll Cardiol, 2012;60:2694–2695
  18. Mahfoud F, Luscher TF, Andersson B et al. Expert consensus document from the european society of cardiology on catheter-based renal denervation, Eur Heart J, 2013;34:2149–2157
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