Démographie de l'Afrique

La démographie de l'Afrique est l'ensemble des données et des études concernant la population de l'Afrique à toutes les époques.

Population de l'Afrique
  • Source : Worldometers à partir des données de l'ONU[1]

De 100 millions d’habitants en 1900, la population de l'Afrique est passée à environ 275 millions dans les années 1950-1960, puis à 640 millions en 1990 et à 1,3 milliard en 2019 soit 17 % de la population mondiale.

Depuis 1950, les projections de l'ONU à 30 ou 50 ans se sont révélées relativement correctes. La population de l'Afrique subsaharienne uniquement pourrait tripler entre 2020 et la fin du siècle, passant de 1 à 3 milliards d'habitants[2].

Selon la projection démographique intermédiaire de l'ONU tenant compte des scénarios moyens d'évolution prévue, principalement de la mortalité, de la fécondité et de la structure par âge, dans les années 2050 la population de l'Afrique se situerait aux environs de 2,5 milliards puis, projection beaucoup plus incertaine, vers 4,4 milliards en 2100 ce qui entraînerait des bouleversements politiques, culturels et écologiques majeurs à l’échelle de la planète tout entière.

Histoire

Les sources écrites et archéologiques

En l'absence de recensements ou de registres, il est difficile de mesurer la population noire africaine avant les premières enquêtes de l'administration coloniale, française, anglaise ou allemande[3]. Les historiens ont été obligés de recouper les témoignages écrits avec les vestiges archéologiques souvent imposants, en comparant le tout avec plusieurs éléments de la civilisation des sociétés noires africaines[3]. Ce travail est passé par un inventaire exhaustif et détaillé des écrits des auteurs arabes et des premiers voyageurs européens des XVIe et XVIIe siècles furent les seuls à avoir vu l'Afrique noire avant les actions portugaises et marocaines, et les razzias arabes et portugaises qui ont évolué vers la traite négrière, orientale ou atlantique, à grande échelle[3].

La démographie de l'Afrique d'avant la colonisation évolue aussi dans sa structure et sa répartition. Les grands empires et les royaumes se sont disloqués, les nouveaux petits royaumes ont commencé à se faire une guerre incessante, comme au Moyen Âge en Europe[3], en particulier dans les zones attaquées très tôt par les Portugais, au sud-ouest, ou par les Arabes au nord-est. Entre 1641 et 1680, la population de Luanda double et atteint 40 000 habitants[3] mais la variole[4] et les guerres intestines et razzias pour capturer des esclaves déciment l'arrière-pays, la population des villages chutant[3].

L'impact des relations commerciales et militaires

Les recherches sur l'histoire des maladies ont aussi montré l'impact des relations commerciales et militaires avec les populations arabes, dans de nombreuses régions comme l'Oubangui-Chari. La comparaison avec les études de l'historien Jean Noël Biraben, qui fut directeur de recherche à l'INED, Institut national d'études démographiques en charge des l'histoire des maladies a permis aux historiens de faire un parallèlle avec la baisse de la population de l'Amérique latine, selon lui passée de 39 millions en 1500 à 10 millions en 1600 et 1700, en un seul siècle, suivie d'un autre siècle de stagnation[3]. L'historien Pap Ndiaye, dans un historique des évaluations successives de la population indienne à l'arrivée de Colomb (de 16 millions en 1830 à trente-deux fois moins en 1900 ) montrera en particulier qu'il est difficile d'évaluer ce phénomène même si les évaluations s'étaient resserrées en 2003 dans une fourchette entre 6 et 8[5]

La chute démographique en Afrique est cependant plus facile à évaluer car étalée sur trois siècles, avec une accélération brutale dans le dernier tiers du XVIIIe siècle, par un processus plus lent et différent[3], auquel a contribué les traites négrières. Les travaux des historiens Raymond Mauny, William G. L. Randies et Pierre Kalck ont établi qu'il fallait en moyenne compter 3 à 5 morts, pour un esclave déporté[3].

Les travaux des démographes et historiens avaient depuis les années 1980 montré que trois traites se sont complétées et recoupées, et qu'elles ont convergé pour croître fortement entre le 16e et le 18e siècle, profitant toutes les trois du morcellement, de la militarisation et de l'appauvrissement des royaumes africains. La géographe et historienne Marie-Louise Maes a parlé d'« une Guerre de Cent Ans qui a duré trois siècles (17e, 18e et 19e), avec les armes de la Guerre de Trente Ans »[6], qui a provoqué selon l'universitaire une hémoragie démographique[6] du même impact et de la même ampleur que ce qu'avait connu la France pendant la Guerre de Cent Ans[7]. A la ponction directe des traites orientales et atlantique s'est ajouté l'impact de l'introduction d'armes à feu[6] dans les royaumes africains, causant à la fois leur fragmentation et une croissance exponentielle de la traite interafricaine. Ce morcellement s'est produit à partir de 1580, quand les relations entre Portugais et Angolais s'envenimèrent[6]. Les portugais ne se satisfaisaient plus qu'on ne leur livre que les condamnés à mort. En 1583, ils «ont conquis la moitié du royaume et battu quatre armées du roi. Des milliers de ses vassaux ont été tués... d'innombrables esclaves ont été capturés... »[7].

« La sollicitation extérieure provoqua une grande extension et la prolifération de l’esclavage en Afrique noire » malgré des résistances locales. Le Roi du Portugal répondit par la négative aux lettres de protestation au milieu du XVe siècle du roi Alphonse Ier du Kongo, pourtant converti, comme son père, au christianisme, dont un successeur fut assassiné, et qui écrivit aussi au Pape. Plus tard c'est le comptoir français du Sénégal qui a livré des armes aux Maures pour combattre le Damel car il s'opposait au passage des caravanes de la traite orientale[6].

Les recherches dans plusieurs régions (Tchad, Soudan nilotique, Gabon, Congo, et République Centrafricaine) ont indiqué qu'entre 1860 et 1930, l'Afrique noire a perdu le tiers ou plus de sa population, qui aurait été approximativement de 200 millions en 1860[3].

Il y a quatre siècles environ, l'Afrique représentait près de 17 % de la population mondiale. Ce chiffre a chuté pour atteindre 7 % en 1900. En 2019, l'Afrique représente de nouveau 17 % de la population mondiale[8].

Histoire postcoloniale

Année Population de l'Afrique Population mondiale Part de l'Afrique
1950 227 794 000 2 536 431 000 9,0 %
1960 283 361 000 3 034 950 000 9,3 %
1970 363 448 000 3 700 437 000 9,8 %
1980 476 386 000 4 458 004 000 10,7 %
1990 630 350 000 5 327 231 000 11,8 %
2000 810 984 000 6 143 494 000 13,2 %
2010 1 039 304 000 6 956 824 000 14,9 %
2020 1 340 598 000 7 794 799 000 17,2 %

En 2100, l'Afrique pourrait représenter plus de 39 % de la population mondiale[8].

Liste des pays d'Afrique par population

Ci-dessous une liste des pays d'Afrique classés par population[9] :

Rang Pays Population Année
1 Nigeria 214 028 302 2020
2 Éthiopie 108 113 150 2020
3 Égypte 104 124 440 2020
4 République démocratique du Congo 101 780 263 2020
5 Tanzanie 58 552 845 2020
6 Afrique du Sud 56 463 617 2020
7 Kenya 53 527 936 2020
8 Soudan 45 561 556 2020
9 Algérie 43 972 878 2020
10 Ouganda 43 252 966 2020
11 Maroc 35 561 654 2020
12 Angola 32 522 339 2020
13 Mozambique 30 098 197 2020
14 Ghana 29 340 248 2020
15 Cameroun 27 744 989 2020
16 Côte d'Ivoire 27 481 086 2020
17 Madagascar 26 955 737 2020
18 Niger 22 772 361 2020
19 Malawi 21 196 629 2020
20 Burkina Faso 20 835 401 2020
21 Mali 19 553 397 2020
22 Zambie 17 426 623 2020
23 Tchad 16 877 357 2020
24 Sénégal 15 736 368 2020
25 Zimbabwe 14 546 314 2020
26 Bénin 12 864 634 2020
27 Rwanda 12 712 431 2020
28 Guinée 12 527 440 2020
29 Burundi 11 865 821 2020
30 Somalie 11 757 124 2020
31 Tunisie 11 721 177 2020
32 Soudan du Sud 10 561 244 2020
33 Togo 8 608 444 2020
34 Libye 6 890 535 2020
35 Sierra Leone 6 624 933 2020
36 Érythrée 6 081 196 2020
37 République centrafricaine 5 990 855 2020
38 République du Congo 5 293 070 2020
39 Liberia 5 073 296 2020
40 Mauritanie 4 005 475 2020
41 Namibie 2 630 073 2020
42 Botswana 2 317 233 2020
43 Gabon 2 230 908 2020
44 Gambie 2 173 999 2020
45 Lesotho 1 969 334 2020
46 Guinée-Bissau 1 927 104 2020
47 Maurice 1 379 365 2020
48 Eswatini 1 104 479 2020
49 Djibouti 921 804 2020
50 Comores 846 281 2020
51 Guinée équatoriale 836 178 2020
52 Sahara occidental 652 271 2020
53 Cap-Vert 583 255 2020
54 Sao Tomé-et-Principe 211 122 2020
55 Seychelles 95 981 2020
56 Sainte-Hélène, Ascension et Tristan da Cunha 7 862 2020

Liste des régions d'Afrique par population

Régions d'Afrique :
  • Afrique du Nord
  • Afrique de l'Ouest
  • Afrique centrale
  • Afrique de l'Est
  • Afrique australe

Les cinq régions d'Afrique classées par population[8] :

Rang Région Population en 2013
Afrique 1 110 635 000
1 Afrique de l'Est 373 202 000
2 Afrique de l'Ouest 331 255 000
3 Afrique du Nord 210 002 000
4 Afrique centrale 135 750 000
5 Afrique australe 60 425 000

Densité de population

Densité de population en Afrique

La population est très inégalement répartie. En 2019, la densité est légèrement supérieure à 43 habitants au kilomètre carré, soit trois fois inférieure à celle de l'Union européenne[10].

Cependant la densité utile (par Km carré utile) est beaucoup plus forte que la densité générale (2,5 fois pour l'Afrique subsaharienne et 6 fois pour l'Afrique du Nord). Selon la FAO, la superficie utile ou utilisée est la somme de trois ensembles : les "terres arables", les "cultures permanentes" et les "prairies et pâturages permanents". La surface des terres non cultivables est largement majoritaire et la qualité moyenne des sols cultivables est nettement plus faible que sur les autres continents, selon le géographe Pierre Gourou. Cette qualité risque de se détériorer encore avec la pression démographique et le réchauffement climatique.

Entre 1950 et 2010, la densité est passée de 8 à 34 habitants au km2, restant toutefois largement en deçà de la moyenne mondiale (47 hab./km2). Les zones les plus densément peuplées sont la côte du Maghreb d'Agadir à Tunis, la vallée du Nil jusqu'à Assouan, l'Éthiopie, l'Afrique de l'Ouest au sud d'une ligne reliant Dakar, Bamako, Ouagadougou et Abuja ainsi que la côte de l'Afrique australe entre Le Cap et Maputo. Aux extrêmes se trouvent l'île Maurice (600 hab./km2) et la Namibie (2 hab./km2). Contrairement à l'Asie, les grandes vallées fluviales ne sont pas très densément peuplées, à l'exception des bassins du Nil et du Niger.

Fécondité

En 2019, l'indice synthétique de fécondité en Afrique est estimé à 4,4 enfants par femme, à peu près à mi-chemin entre le maximum de 6,8 en 1960 et l'indice correspondant au simple remplacement des générations (2,1), niveau qu'ont atteint l'Asie et l'Amérique latine en 2019.

Le record mondial de la fécondité appartient au Niger avec 6,8 enfants par femme en 2019, en recul par rapport à 2012 (7,6 enfants par femme). Tous les pays d'Afrique sont maintenant dans la phase de baisse de la fécondité, soit la seconde phase de la Transition démographique, ce qui accroit la part des 15-65 ans, donc le taux d'activité qui à condition qu'il soit élevé (problème du taux de chômage) peut contribuer à accélérer le développement -mais également la consommation de ressources énergétiques et minières et les problématiques environnementales accompagnant le développement économique, dont agricole.

La population de l'Afrique est très jeune : 41 % a moins de 15 ans[10]. En 2012, l'âge médian du continent est de 20 ans[11]. L'Ouganda et le Niger sont les pays les plus jeunes du monde : 49 % des habitants ont moins de 15 ans[10].

Espérance de vie

Espérance de vie par pays (chiffres World Factbook, 2007)

L'espérance de vie à la naissance (Evn) en Afrique est de 63,5 ans en 2019. Elle est en très forte progression par rapport à 1950 ( Evn de 40 ans) mais elle reste nettement plus faible que la moyenne mondiale de 73 ans[8].

Urbanisation

En 1960, deux villes seulement – Le Caire et Johannesburg – dépassaient le million d'habitants. En 1999, elles sont 25 ; en 2009, il y a 57 mégalopoles africaines[10]. Les 5 villes les plus peuplées sont : Kinshasa (13,9M), Le Caire (20,5M), Lagos (22,8M), Khartoum (5,2M), Luanda (4,8M)[10].

Le taux d'urbanisation de l'Afrique est de 40 % en 2019. La croissance urbaine est en moyenne de 4 % par an (doublement tous les 17 ans). Les bidonvilles sont importants. Les logements et les infrastructures urbaines de transport, d'adduction d'eau, de santé et d'éducation etc. sont généralement insuffisantes. L'emploi informel , comme dans les zones rurales, est majoritaire.

Ethnies

Groupes ethniques d'Afrique en 1996.

Les États nouvellement indépendants, notamment au cours des années 1960, ont tenté d'éliminer le sentiment d'appartenance ethnique pour lui substituer l'identité nationale au sein des frontières héritées du Traité de Berlin – l'un des slogans du Front de libération du Mozambique proclamait que « Pour le bien de la Nation, la tribu doit mourir. » L'ethnie n'en est pas moins restée un fort vecteur d'identité, notamment depuis la récession économique des années 1980 lorsque les États se sont montrés peu aptes à prendre le relais de la famille élargie dans la satisfaction des besoins de base[12].

Notes

  1. (en) « Population of Africa (2020) - Worldometers », sur www.worldometers.info (consulté le )
  2. « La population de l’Afrique pourrait tripler d’ici à 2100 », sur CNEWS (consulté le )
  3. "Essai d'évaluation de la population de l'Afrique Noire aux XVe et XVIe siècles", par Louise-Marie Diop-Maes, dans la revue Population en 1985  
  4. selon les termes de Manuel Fernandès n 1670
  5. " Autopsie de l'idéologie coloniale" article de Philippe-Jean Catinchi dans Le Monde du 23 janvier 2003
  6. "Conséquences sur l’Afrique", par Louise Marie Diop-Maes, en novembre 2007 dans Le Monde Diplomatique
  7. " Essai d'évaluation de la population de l'Afrique Noire aux XVe et XVIe siècles", par Louise-Marie Diop-Maes, dans la revue Population en 1985
  8. (en)World Population Prospects: The 2019 Revision.
  9. Source : instituts officiels nationaux, ONU ou World Factbook de la CIA.
  10. Dossier « Un milliard d'Africains ! », in Jeune Afrique, no 2550, du 22 au 28 novembre 2009, p. 24-31.
  11. GEO N°403 de septembre 2012 p. 91.
  12. Stephen Smith, Atlas de l'Afrique, Éditions Autrement, pages 16-17.

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Marc Éla et Anne-Sidonie Zoa, Fécondité et migrations africaines, les nouveaux enjeux, L'Harmattan, 2006, 356 p. (ISBN 2-296-00354-0)
  • Benoît Ferry (dir.), L'Afrique face à ses défis démographiques : un avenir incertain, Agence française de développement, Karthala, Paris ; Centre population et développement, Nogent-sur-Marne, 2007, 379 p. (ISBN 978-2-84586-944-8)
  • Philippe Leymarie et Thierry Perret, « Démographie », in Les 100 clés de l'Afrique, postface d'Elikia M'Bokolo, Hachette littératures, RFI, Paris, 2006, p. 149-153 (ISBN 978-2-01-279270-8)

Liens externes

  • Portail de l’Afrique
  • Portail de la démographie
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.