Aulus Cornelius Palma Frontonianus

Aulus Cornelius Palma Frontonianus est un sénateur et militaire romain, connu principalement sous le règne de Trajan (98 - 117). Cornelius Palma est consul ordinaire en 99 et 109 et semble avoir été apprécié par Trajan pour ses compétences administratives et militaires. Il est mis à mort au début du règne d'Hadrien en 118.

Biographie

Début de carrière

Il est peut-être originaire de Volsinii en Étrurie[1], mais l'identification d'un ancêtre de Cornelius Palma parmi la noblesse volsinienne est loin d'être assurée[2].

Cornelius Palma est peut-être légat prétorien en Asie sous le règne de Domitien et, par ailleurs, commande une légion dans les années 94-97 au moment où Nerva succède à Domitien[3].

Il est, avec Quintus Sosius Senecio, le premier consul ordinaire du règne de Trajan, en l'an 99. C'est une marque d'estime et d'importance pour Cornelius Palma, signe d'une relation étroite avec l'empereur, qui souhaite le distinguer particulièrement.

Après son consulat, entre 99/100 et 101/103, il est gouverneur en Tarraconaise (legatus augusti pro praetore Hispaniae citerioris). Le poète Martial, qui vit de 98 à sa mort en 104 dans sa ville natale de Bilbilis[4], en Tarraconaise, fait l'éloge du gouverneur[5] :

« Palma gouverne notre chère Ibérie, ô le plus clément des Césars ! Ses douces lois assurent à ces provinces étrangères la paix la plus heureuse. Reçois donc nos joyeuses actions de grâces pour un si grand bienfait : tu nous as envoyé un second toi-même. »

 Martial, Épigrammes, livre XII, vers l'an 101.

En foncé, la Syrie. En rouge, la province romaine d'Arabie Pétrée créée en 106.

Gouvernorat de Syrie

Il est ensuite gouverneur en Syrie (legatus augusti pro praetore) de 104 à 108, remplaçant Caius Antius Aulus Iulius Quadratus qui est aussi resté pour un mandat de quatre années.

Pendant ce mandat, sans doute après la mort du roi Rabbel II en 106, il annexe le royaume nabatéen de Pétra sur ordre de Trajan[6], alors en campagne en Dacie. Ce royaume était alors l'un des derniers territoires protégés par Rome mais non intégrés à l'Empire[7] avec l'État client d'Osroène autour d'Édesse, quelques territoires dans le Caucase et le cas épineux du royaume d'Arménie[8].

Il n'y a apparemment aucun combat, mais l'annexion fait peut-être suite à une campagne militaire à la tête des légions de Syrie et d'Égypte commencée en 105 qui n'a, semble-t-il, rencontré aucune résistance[7],[9]. Dion Cassius[6] et Ammien Marcellin[10], qui écrivent respectivement près d'un siècle et plus de deux siècles après les faits, indiquent que la conquête du royaume s'est faite avec résistance. Toutefois, les pièces de monnaie contemporaines frappées à la suite de l'annexion parlent d'une acquisition (Arabia adquisita : « l’Arabie acquise »), et non d'une conquête militaire. De plus, Arabicus n'a pas été ajouté à la titulature impériale de Trajan, ce qui semble indiquer qu'il s'agit donc d'une annexion pacifique[11],[12].

Cette annexion permet de renforcer la frontière orientale de l’Empire en vue d'une campagne contre les Parthes, de rendre sûre la liaison commerciale entre l'Égypte, la Judée et la Syrie[9] et de mettre fin au monopole des bédouins caravaniers comme intermédiaires sur le commerce de la mer Rouge[7],[13],[14].

L'empereur Trajan (98 à 117).

Cornelius Palma engage des travaux dans sa province de Syrie et dans les terres nouvellement annexées. Par ses soins, Canatha, ainsi que d'autres cités, font l'objet d'importants travaux d'adduction d'eau, grâce à des captages réalisés dans la montagne proche[15],[16],[17]. Une voie romaine reliant Pétra à Gérasa paraît dater de l'époque de l'annexion ainsi que la construction ou la réfection d'un aqueduc à Pétra[18].

Il fait de Bosra la capitale de la nouvelle province impériale d'Arabie Pétrée (provincia Arabia), qui est créée le [11] et formée du royaume conquis et de la décapole déjà romaine[19]. L'empereur Trajan renomme Bosra (alors appelée Bostra) en Nea Traiane Bostra, ou « Nouvelle Bostra de Trajan » et Pétra reçoit le titre honorifique de métropole (metropolis) au même moment[20],[21].

Probablement pour l'annexion du royaume nabatéen[12], Cornelius Palma est honoré des ornements triomphaux[12],[22] et, de son vivant, d'une statue[23] de bronze dans le forum d'Auguste[12],[22], honneur seulement réservé à deux autres consulaires (Quintus Sosius Senecio pour son rôle décisif dans les guerres daciques et Lucius Publilius Celsus pour des raisons inconnues) par Trajan[23]. Son successeur à la tête de la Syrie est Lucius Fabius Iustus.

Fin de carrière et exécution

En 109, il est à nouveau consul ordinaire aux côtés de Publius Calvisius Tullus Ruso.

Selon l'Histoire Auguste, Cornelius Palma et Lucius Publilius Celsus (deux fois consul sous Trajan, dont un consulat ordinaire en 113) sont en état de disgrâce à la toute fin du règne de Trajan, alors qu'ils « avaient toujours été [les] ennemis [d'Hadrien][24] ». Trajan a alors désigné à l'attention générale Hadrien comme successeur, bien que cela n'ait jamais été officialisé[25].

L'empereur Hadrien (117 à 138).

En 117, Trajan, malade, décède en août et Hadrien est aussitôt acclamé par les troupes comme imperator. Pour autant, sa position est délicate : la rumeur veut que Trajan n'ait pas voulu désigner de successeur, et que l'adoption soit l'œuvre de Plotine[24],[26]. Hadrien craint un coup d'État de ceux ayant acquis influence, gloire et fortune auprès de Trajan[27].

Sur ordre du Sénat, Cornelius Palma et d'autres considérés comme conspirateurs sont exécutés, dont les principaux sont Lucius Publilius Celsus (consul en 113), Caius Avidius Nigrinus (consul en 110 et gouverneur de la Dacie) et Lusius Quietus (l'un des principaux généraux de Trajan et gouverneur de Judée)[28],[27],[29], car ils sont suspectés d'avoir attenté à la vie du nouvel empereur[27] ou d'aspirer au trône[24]. Hadrien, alors en Syrie, nie avoir ordonné les exécutions[24],[29] de ces quatre sénateurs influents durant le règne de Trajan[27],[29]. On y voit parfois la main du préfet du prétoire Publius Acilius Attianus. Ces assassinats font beaucoup de tort à la popularité d'Hadrien, qui démet Attianus de ses fonctions, réservées aux chevaliers, en le nommant sénateur[30].

Palma aurait été mis à mort à Terracine[31], dans le Latium, en l'an 118[30].

Bibliographie

  • E. Dabrowa, The governors of Roman Syria from Augustus to Septimius Severus, Bonn, 1998, pp. 81-83
  • PIR ² C 1412 / PIR, 1897

Notes et références

  1. The Oxford Classical Dictionary (3 rev ed.), Oxford University Press, 2005, « Cornelius Palma Frontonianus, Aulus ».
  2. Francis Tassaux, Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité, 1987, « Pour une histoire économique et sociale de Bolsena et de son territoire », p. 535.
  3. John D. Grainger, Nerva and the Roman Succession Crisis of AD 96-99, London, Routledge, 2004.
  4. Hubert Zehnacker, Jean-Claude Fredouille, Littérature latine, p. 307.
  5. Martial, Épigrammes, livre XII, IX, traduction de MM. V. Verger, N.-A. Dubois et J. Mangeart, Paris, Garnier frères, 1864, relue et corrigée par Philippe Remacle.
  6. Dion Cassius, Histoire romaine, livre 69 (Nerva et Trajan), 14.
  7. Paul Petit, Histoire générale de l'Empire romain, tome 1 - Le Haut-Empire, éd. Seuil, 1978, pp. 217-218.
  8. Maurice Sartre, Le Haut-Empire romain, les provinces de Méditerranée orientale d'Auguste aux Sévères, Seuil, 1997, p. 29.
  9. Jean-Pierre Martin, Le Haut-Empire dans Histoire romaine, Armand Collin, coll. « U », p.237.
  10. Ammien Marcellin, Histoire de Rome, livre XIV, VIII, 13.
  11. Dominique Hollard, Revue numismatique, 2004, « Le monnayage de la Legio III Cyrenaica frappé à Bostra sous Antonin le Pieux », p. 155.
  12. Adrien Blanchet, Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1944, « La figure de l'Arabie », p. 231.
  13. R. E. Brunnow et A. Von Ddomszewski, Die Provinz Arabien, 3 vol., 1904-1909.
  14. Y. Yadin, « The Nabatean Kingdom, Pronvincia Arabia, Petra and En-Geddi in the Documents from Nahal-Hever », Jaarb. Voor-Aziat., Egypt. Gezelschap (Leyde), 17, 1963, 227-241.
  15. Maurice Dunand, Syria, 1930, « Kanata et Kanaqa », p. 272.
  16. Maurice Sartre, Syria, 1981, « Le territoire de Canatha », p. 344.
  17. Frank Braemer, Syria, 1988, « Prospections archéologiques dans le Hawran », p. 134.
  18. Daniel Panzac, Histoire économique et sociale de l'Empire Ottoman et de la Turquie (1326-1960), Peeters, 1995, p.657.
  19. (en) « A Shift to the North », Petra: Lost City of Stone, American Museum of Natural History
  20. Christian Augé et Jean-Marie Dentzer, Pétra, la cité des caravanes, Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard / Archéologie » (no 372), 1999, page 119.
  21. Dominique Hollard, Revue numismatique, 2004, « Le monnayage de la Legio III Cyrenaica frappé à Bostra sous Antonin le Pieux », p. 156.
  22. CIL VI, 1386.
  23. Dion Cassius, Histoire romaine, livre 69 (Nerva et Trajan), 16.
  24. Histoire Auguste, Vie d'Hadrien, 4.
  25. Jean-Pierre Martin, Le Haut-Empire dans Histoire romaine, Armand Collin, coll. « U », p.230.
  26. Dion Cassius, Histoire romaine, livre 70 (Hadrien), 1.
  27. Dion Cassius, Histoire romaine, livre 70 (Hadrien), 2.
  28. Anthony Birley, Hadrian, Londinii 1997, pp.87-88.
  29. Paul Petit, Histoire générale de l'Empire romain, tome 1 - Le Haut-Empire, éd. Seuil, 1978, p. 169.
  30. Françoise Des Boscs-Plateaux, Un parti hispanique à Rome ?, Casa de Velazquez, 2006, p. 611.
  31. Histoire Auguste, Vie d'Hadrien, 7.
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