Théorème de Faltings

En théorie des nombres, le théorème de Faltings, précédemment connu sous le nom de conjecture de Mordell donne des résultats sur le nombre de solutions d'une équation diophantienne. Il a été conjecturé par le mathématicien anglais Louis Mordell en 1922 et démontré par Gerd Faltings en 1983, soit environ soixante ans après que la conjecture fut posée.

Énoncé

Soit l'équation définie de la manière suivante :

avec P un polynôme à coefficients rationnels. Le problème est de trouver le nombre X de solutions de cette équation dans l'ensemble des rationnels.

Le nombre de solutions dépend du genre de la courbe C associée à cette équation (on peut définir empiriquement le genre d'une courbe comme le nombre de fois où il est possible de couper cette courbe sans obtenir deux morceaux distincts) :

  • si le genre vaut 0 (cas des courbes unicursales, par exemple une droite), alors :
    • soit X = 0,
    • soit X = ∞ ;
  • si le genre vaut 1, alors :
  • si le genre est supérieur ou égal à 2, Mordell avait conjecturé qu'il n'y avait qu'un nombre fini de points. Ceci fut effectivement démontré par Gerd Faltings en 1983.

Application

Soit l'équation de Fermat :

dont on cherche les solutions entières. Si est une solution avec non nul, alors est une solution à coordonnées rationnelles de l'équation

Elle correspond à une courbe de genre . Ainsi, pour supérieur ou égal à 4, elle est de genre supérieur ou égal à 2, et n'admet donc qu'un nombre fini de solutions rationnelles. On sait borner le nombre de solutions, mais pas encore leur taille. Cette approche pour démontrer le dernier théorème de Fermat, alternative à celle suivie par Andrew Wiles, n'a donc pas encore abouti ; au demeurant, elle ne permettrait (en théorie) qu'une démonstration constructive pour chaque valeur de n donnée, mais non en général.

Démonstrations

Faltings a publié sa démonstration en 1983[1], avec un erratum en 1984[2]. Un exposé de la démonstration est donné par Pierre Deligne au séminaire Bourbaki en 1984[3]. Faltings obtient la médaille Fields en 1986.

Dans son travail, Faltings démontre aussi la conjecture de Tate (en) de John T. Tate et la conjecture d'Igor Chafarevitch, en appliquant un mécanisme de traduction de corps de fonctions en corps de nombres introduit par Souren Arakelov. Le fait que la conjecture de Mordell est une conséquence de la conjecture de Chafarevitch a été démontré par Alexeï Parchine en 1968 (communication au congrès international des mathématiciens de Nice en 1970[4]).

Après Faltings, le théorème a été démontré d'une autre manière par Paul Vojta[5]. La preuve de Vojta a été simplifiée par Faltings[6] lui-même et par Enrico Bombieri[7]. Des présentations sont données dans le livre de Bombieri et Gubler[8], et dans celui de Serge Lang[9].

Pour les corps de fonctions, la conjecture avait déjà été démontrée en 1963 par Yuri Manin[10], avec une lacune de la preuve repérée et comblée par Robert F. Coleman[11], en 1965 par Hans Grauert en 1965[12] et en 1968 par Alexeï Parchine[4].

Une nouvelle démonstration est donné par Brian Lawrence et Akshay Venkatesh en 2018. La preuve suit la démarche de Faltings, mais utilise l'analyse de la variation de représentations galoisiennes p-adiques[13].

Généralisations

Par le théorème de Mordell-Weil, le théorème de Faltings peut être reformulé comme un énoncé sur l'intersection d'une courbe C avec un sous-groupe finiment engendré Γ d'une variété abélienne A. Une généralisation consiste à remplacer C par une sous-variété arbitraire de A et Γ par un sous-groupe arbitraire de A de rang fini ; ceci conduit à la conjecture de Mordell-Lang (en) qui a été démontrée par Faltings en 1991[14],[15].

Une autre généralisation en dimension supérieure est la conjecture de Bombieri-Lang (en) selon laquelle, si X est une variété « pseudo-canonique » (c'est-à-dire une variété générale) sur un corps de nombres k, alors X(k) n'est pas dense dans X au sens de la topologie de Zariski. Des conjectures encore plus générales ont été énoncées par Paul Vojta.

Notes et références

Bibliographie

Livres et exposés

  • Enrico Bombieri et Walter Gubler, Heights in Diophantine Geometry, Cambridge University Press, coll. « New Mathematical Monographs » (no 4), , xvi+652 p. (ISBN 9780511542879, DOI CBO9780511542879, zbMATH 1115.11034).
  • Pierre Deligne, « Preuve des conjectures de Tate et de Shafarevitch », Séminaire Bourbaki, 36e année, 1983/84, Exposé 616, novembre 1983 ; Astérisque, t. 121-122, , p. 25-41 (zbMATH 0591.14026, lire en ligne)
  • Gerd Faltings et Gisbert Wüstholz (éditeurs), Rational points : Papers from the seminar held at the Max-Planck-Institut für Mathematik, Bonn, 1983/1984., Braunschweig-Wiesbaden, Friedr. Vieweg & Sohn, coll. « Aspects of Mathematics » (no E6), , vi+268 p. (ISBN 3-528-08593-2, Math Reviews 766568, zbMATH 0588.14027).
  • Marc Hindry et Joseph H. Silverman, Diophantine geometry, vol. 201, New York, Springer-Verlag, coll. « Graduate Texts in Mathematics », (ISBN 0-387-98981-1, DOI 10.1007/978-1-4612-1210-2, Math Reviews 1745599) — Contient la preuve par Vojta du théorème de Faltings.
  • Serge Lang, Survey of Diophantine geometry, Springer-Verlag, (ISBN 3-540-61223-8), p. 101–122

Articles

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