Île Clipperton

L’île Clipperton[1], aussi appelée île de Clipperton ou simplement Clipperton, anciennement dénommée île de la Passion, est une possession française composée d'un unique atoll situé dans l'Est de l'océan Pacifique nord, à 1 081 kilomètres au sud-ouest de l'État mexicain du Michoacán, à 2 500 kilomètres au nord-ouest des Îles Galápagos[2], à 5 408 kilomètres à l'est-nord-est de Papeete (île de Tahiti) et à 10 666 kilomètres à l'ouest-sud-ouest de Paris. Son lagon est le seul d'eau douce au monde[3]. L'île Clipperton est aussi la seule possession française du Pacifique nord[4]. Cette île est le quatrième territoire français du Pacifique et le cinquième de l'Outre-mer français par son extension maritime[5]. Bien que l’île soit un territoire français, elle ne possède aucun statut au sein de l’Union européenne.

« Clipperton » redirige ici. Pour les autres significations, voir John Clipperton.

Ne pas confondre avec l'Île Clapperton, île des Territoires du Nord-Ouest au Canada.

Île Clipperton
Île de la Passion 

Image satellite de l'île Clipperton par SPOT.
Géographie
Pays France
Archipel Aucun
Localisation Océan Pacifique
Coordonnées 10° 18′ 14″ N, 109° 13′ 04″ O
Superficie 1,7 km2
Côtes 12 km
Point culminant Rocher de Clipperton (29 m)
Géologie Atoll ou presqu'atoll
Administration
Statut Possession française sous l'autorité directe du gouvernement
Démographie
Population Aucun habitant
Autres informations
Découverte
Fuseau horaire UTC-8
Site officiel www.outre-mer.gouv.fr/polynesie-francaise-lile-de-clipperton
Géolocalisation sur la carte : océan Pacifique
Île Clipperton
Géolocalisation sur la carte : Amérique
Île Clipperton
Géolocalisation sur la carte : Amérique du Nord
Île Clipperton
Îles en France

Géographie

Isolement géographique

Carte des territoires outre-mer français représentant l'île Clipperton.

L'île Clipperton  de son nom de baptême français « île de La Passion »  est le seul territoire que possède la France dans le Pacifique nord. Celui-ci se situe à 1 081 kilomètres au sud-ouest des premières côtes continentales, celles de l'État de Michoacán, au Mexique, et à 949 kilomètres au sud-sud-est de la première terre, la petite île Socorro, dans l’archipel mexicain des Revillagigedo, tandis que Hiva Oa, aux îles Marquises, terre française la plus proche, est à 3 980 kilomètres à l'ouest-sud-ouest. Honolulu, aux îles Hawaii, est à 5 326 kilomètres vers l'ouest-nord-ouest.

Selon le comité français de l'UICN, c'est l'atoll le plus isolé du monde[6].

Atoll corallien

Seul atoll corallien de cette partie de l'océan Pacifique, appelée Pacifique oriental, l'île a une forme sub-circulaire de douze kilomètres de circonférence. La superficie des terres émergées n'est que de 1,7 km2. L'atoll a un diamètre de 2,4 à 3,9 km. Son altitude est au maximum de m pour la partie récifale, mais le point culminant est un rocher volcanique de 29 mètres d’altitude, le rocher de Clipperton, qui émerge du lagon au sud-est de l'atoll. La présence de ce reliquat de l'ancienne île volcanique fait de l'île Clipperton un presqu'atoll et non un véritable atoll au sens strict du terme[7],[8].

L'atoll encercle totalement un lagon sans communication avec l'océan, d'une superficie d'environ 710 hectares, et qui comprend dix îlots, notamment les îles aux Œufs (ainsi nommées en raison de leur population de fous). La surface totale de tous ces îlots est inférieure à 5 000 m2. Le sol en est constitué de graviers et sables coralliens souvent cimentés de guano. La houle importante dans cette région rend périlleux tout débarquement.

Lagon

Le lagon de l'île Clipperton, seul lagon d'eau douce au monde.

Un temps ouvert par deux passes (au sud-est et au nord-est), le lagon (7,2 km2) s’est fermé entre 1840 et 1858, probablement du fait de tempêtes et peut-être de travaux. L’isolement des eaux du lagon de l’océan a entraîné la mort de nombreux coraux et une eutrophisation du milieu, qui forme ainsi un écosystème spécifique[9].

Le lagon est considéré comme le seul lagon d'eau douce de la planète[10] ; en effet, l’évaporation des eaux du lagon est inférieure aux précipitations : l’eau y est donc douce en surface, salée et légèrement acide à partir de 6 mètres de profondeur. Les tentatives d’exploration du fameux Trou sans fond du lagon (qui est un puits sous-marin, hypothétiquement un vestige d'une ancienne cheminée volcanique) par le commandant Cousteau ont été empêchées par une trop forte concentration d’hydrogène sulfuré[11].

Entre 2004 et 2005 une expédition scientifique a été menée. Jean-Louis Étienne a sondé le lagon pendant plusieurs mois et estimé la profondeur maximale du lagon à 34 mètres[12].

En 2015, la mission Passion 2015[13], conduite par des scientifiques de l’université de Polynésie française, a effectué des mesures bathymétriques du lagon. Elle a conclu qu'il présentait notamment plusieurs cuvettes de plus de 25 mètres de profondeur, et qu'en outre sa profondeur maximale atteignait même 55 mètres[14] (au niveau de la fosse orientale). Elle a également mis en évidence que le Trou sans fond n'était pas le point le plus profond du lagon, à l'inverse de ce que son nom pouvait laisser entendre. En effet, selon ces nouvelles mesures  et contrairement aux indications des anciennes cartes qui le faisaient descendre jusqu'à plus de 90 mètres  le Trou ne posséderait en réalité qu'une profondeur de 35 mètres au maximum et de 30 à 32 mètres en moyenne[14].

Histoire

Découverte (1706-1711)

La découverte de l'île aurait été le fait du flibustier, pirate et naturaliste anglais John Clipperton en 1704[15], alors qu'il vient de faire défection de l'expédition de William Dampier. Toutefois, aucune preuve de son passage à proximité de l'atoll n'a été conservée. Le premier débarquement attesté sur Clipperton intervient le vendredi saint . Les Français Mathieu Martin de Chassiron[16] et Michel Dubocage, commandant respectivement les frégates la Princesse[17] et la Découverte[18], y débarquent et en dressent la première carte. En souvenir de cette journée, ils la baptisent « île de la Passion », en référence à la Passion du Christ.

Mention dans les cartes

Le fait est que ni les portulans ibériques, comme celui d'Andreas Homen en 1559, ni le planisphère portugais de 1585 ne mentionnent cette île ; pas plus que l'atlas du Dieppois Jean Guérard en 1634, pourtant très au courant des découvertes espagnoles. De même, ni l'atlas français de Sanson d'Abbeville en 1667, ni la carte de l'Amérique méridionale du Père Feuillée [réf. souhaitée] de 1714 ne font mention d'une île Clipperton dans ces parages. Elle apparaît sous le nom d'île de la Passion sur la carte réduite de la Mer du Sud dessinée en 1753 par Bellin ingénieur de la marine, hydrographe du roi, nom repris dans son Hydrographie française de 1755. [réf. souhaitée] L'atlas de Malte-Brun de 1812 confirme cette appellation. C’est en 1835, sur une carte de l'Océanie dressée par le géographe A. R. Fremin pour l'atlas anglais d'Arrowsmith, qu'elle apparaît sous le nom d'île Clipperton, alors qu'Arrowsmith lui-même l'avait indiquée sous le nom d'île de la Passion sur sa carte de l'Amérique septentrionale datée de 1835 également. [réf. souhaitée].

La confusion s'installe à un point tel que, sur son Atlas de 1850, Berthe positionne une île de la Passion dans l'archipel des Revillagigredo au large du Cap Corrientes, une île Cliporton [sic] plus au sud ; et encore plus bas, un Rocher de la Passion, ancienne Isla Medanos, découverte en 1527 par le navigateur espagnol Alvaro Saabreda, et que les Mexicains confondent aujourd'hui avec l'île de la Passion. Amboise Tardieu, en 1850, et Bouillet, en 1865, rétablissent la situation en ne mentionnant que la seule île de la Passion.

Intérêt stratégique

Intéressée non pas par le phosphate de l'île mais par sa position stratégique dans le Pacifique face à l'isthme de Panama dans la perspective d'un percement futur, Victor Édouard Le Coat de Kerveguen en prit possession au nom de la France, ce qui fut confirmé par un décret impérial en date du officiellement, et par publication dans divers journaux, sans qu'aucun État ne vienne contester cette possession à cette époque. Le projet était de faire de l'île un port de relâche pour les bateaux à vapeur, la construction d'un phare sur le « Rocher » (point culminant de l'île) qui serait visible à 30 miles nautiques, le percement de la passe près du « Rocher ».

États-Unis, Mexique et France se disputent la possession (1895-1931)

Les survivants de Clipperton.

En 1895, la Pacific Islands Company, une compagnie américaine, s'installe sur l'île pour y exploiter le guano[15]. En 1897, le Mexique l'occupe puis en 1906, y construit un phare et y laisse un gardien[19]. En 1907, le président mexicain, le général Porfirio Díaz, y dépêche une petite troupe d’une dizaine de soldats et leurs femmes placés sous les ordres du capitaine Ramón Arnaud, descendant d’une famille française, afin de revendiquer la souveraineté mexicaine[15]. La marine mexicaine devait venir les ravitailler environ tous les quatre mois[15].

Oubliés de Clipperton (1914-1917)

En , un cyclone détruit les potagers de la petite garnison[15] de onze soldats installés sur place avec femmes et enfants depuis . Le bateau de ravitaillement de n'arrive pas. À la fin du mois de , l'USS Cleveland (en) vient secourir l'île, mais le chef de la garnison refuse d'embarquer sur un navire ennemi[15]. La troupe est alors décimée par la famine et le scorbut. En , ils ne sont plus que trois hommes, six femmes et huit enfants[15]. Deux des hommes meurent en tentant de rejoindre un navire passant au large[15]. Le dernier homme survivant, gardien du phare, fait alors vivre un calvaire aux autres et se comporte en dictateur[19],[15]. Il est assassiné à coups de marteau par les femmes survivantes le . Le lendemain l'USS Yorktown (en) les sauve ; il était venu vérifier qu'aucun navire allemand ne s'y cachait[20],[15]. Certaines encyclopédies ont longtemps indiqué que l'île Clipperton avait une cinquantaine d'habitants, restant à ce chiffre de .

Arbitrage international de 1931

Bâtiment de débarquement de chars USS LST-563 (en) échoué sur l’île de la Passion en 1944.

Le , la France et le Mexique se décident à faire arbitrer leur désaccord sur la souveraineté de l'île.

Le Mexique n'a pu fournir de documents écrits prouvant l'antériorité de la découverte de l'île Clipperton par les Espagnols pas plus que les Anglais n'ont pu le faire à leur tour. En présence des seules preuves écrites fournies à l'arbitrage international, à savoir les journaux de bord du Havrais Michel Dubocage et du Rochelais Mathieu Martin de Chassiron contenant le premier relevé de l'île, et bien que l'îlot n'ait jamais eu de population française, la souveraineté de la France fut reconnue le par l'arbitrage de la Cour internationale et du roi Victor-Emmanuel III d'Italie[21]. La Cour reconnaît le caractère de terra nullius du territoire lors de la prise de possession française, et l'effectivité de celle-ci.

Le Mexique reconnaît définitivement la souveraineté française sur l'île en 1959[22].

En 1944, les États-Unis occupent l'île d'autorité. Ils ouvrent une passe dans la couronne (qu'ils refermeront en partant) et nivellent une piste d'aviation qui pourrait aisément être remise en service[23]. À la suite d'une protestation de la France qui vient tout juste d'être libérée, protestation conduite par le ministre français des Affaires étrangères Georges Bidault, les États-Unis rétrocèdent le territoire à la France le [24].

Accords de pêche avec le Mexique (2007-2027)

Avant 2007, les bateaux mexicains pêchaient dans la zone économique exclusive (ZEE) de manière illégale du point de vue français. La France et le Mexique ont signé un accord de pêche en 2007 pour une durée de 10 ans. L'accord a été signé à la suite de l'incident du qui a vu un navire de guerre français arraisonner et détruire l'armement d’un bâtiment de pêche mexicain pris par hasard en train de pêcher illégalement dans la zone économique exclusive française. L'accord de 2007 prévoit un volume maximum de pêche. Cependant, il apparaît qu'aucune vérification n'est effectuée, les navires mexicains pouvant refuser les contrôles[25].

L'accord a été reconduit dans les mêmes conditions en 2017[26].

Quel devenir pour Clipperton ?

Dans les années 2010, la situation de Clipperton a suscité des intérêts politiques et scientifiques relativement importants[27]. À la suite de l’expédition de Jean-Louis Étienne, la question de l’usage de Clipperton a fait débat. L’absence de toute présence humaine permanente contribue en effet à en faire un territoire proche de l’abandon puisque pas exploité économiquement ni scientifiquement. Le député Philippe Folliot, qui s’est spécialisé sur la question de Clipperton et s'est rendu sur l’île en 2015 lors de la seule visite d’un élu de la République sur ce territoire français, a rendu un rapport au gouvernement sur la valorisation de Clipperton[4].

Jusqu'à présent, la présence française ne se fait qu’au travers d’une visite annuelle par une frégate de la Marine nationale, en général le Prairial qui permet d’y entretenir la plaque et le drapeau français censé y flotter. Ceci s'avère nécessaire en vertu du droit international relatif au statut de la mer et le maintien de la zone économique exclusive française, qui permet notamment à la France d'être partie à plusieurs traités internationaux concernant cette zone de l'océan Pacifique, notamment pour les ressources halieutiques (l'île se situe dans une importante zone de ressources pour la pêche au thon), mais exige que la souveraineté soit justifiée par une occupation régulière[28]. Cette réaffirmation régulière de la souveraineté française reste toutefois limitée. L’atoll est en effet utilisé par les narcotrafiquants qui y jouissent d’une forme d’impunité. En 2008, des traces d’une utilisation récente de la vieille piste d’atterrissage ont été retrouvées et des pains de cocaïne sont régulièrement découverts. De même, des activités de pêche illégale sont probablement menées dans les eaux entourant l’atoll qui souffre d'une pollution non négligeable. Des déchets rejetés par la mer sont régulièrement retrouvés au gré des diverses expéditions. Cette présence réduite de la France a suscité des réactions de la part du Mexique, qui considère que l’atoll n’est qu’un simple rocher ne pouvant servir à des prétentions de ZEE sur la base de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM). Celle-ci indique en effet que seules les terres pouvant être occupées peuvent donner lieu à des ZEE[29].

Par conséquent, des pistes ont été tracées pour raffermir la présence de la France sur ce territoire. Des potentialités scientifiques y sont non négligeables, notamment en matière climatique. L’établissement d’une base permanente, potentiellement ouverte à des scientifiques étrangers, serait une manière d’assurer une présence constante et de renforcer le respect de la légalité sur l’atoll et ses alentours[30]. Des préoccupations comme les flux logistiques pour alimenter la future station scientifique à vocation internationale, éventuellement à partir des îles Marquises, la construction d'un abri paracyclonique, l'ouverture d'une passe ou encore la dératisation de l'île sont à l'ordre du jour du député[4]. Néanmoins, ces pistes n’ont toujours pas donné lieu à des mises en œuvre concrètes en raison des moyens humains et financiers qu’elles nécessitent.

Expéditions scientifiques

  • L'île a été visitée plusieurs fois au cours du XIXe siècle et a fait l'objet de plusieurs cartes et comptes rendus devant des académies. On trouve ainsi une description de l'île par Robert Evans Snodgrass et Edmund Heller lors de l'expédition « Hopkins Stanford Galapagos » (1898-1899), les deux savants y ayant fait relâche les 23 et [31].
  • De 1966 à 1969 se succédèrent par périodes de quatre mois les « Missions Bougainville » de la marine française qui réalisèrent des études très détaillées, notamment de l'hydrobiologie du lagon et de la faune[32].
  • Passage de l'équipe Cousteau en 1980[33].
Passage de l'équipe Cousteau sur l'île en 1980. À droite, Cousteau.
  • En 1980, une première bouée météorologique de Météo-France est ancrée dans le lagon, par l’équipage du TCD Ouragan. Cette bouée mesure la pression atmosphérique et la température de l’eau du lagon. Elle transmet ces données par satellite (via le système Argos). Deux autres bouées prendront la relève jusqu’en décembre 1982. À cette date, une station terrestre automatique transmettant de plus nombreux paramètres est installée à terre, lors d’une visite du porte-hélicoptère Jeanne d’Arc[34]. Cette station cesse de fonctionner après quelques mois d'activité à la suite d'un acte de vandalisme.
  • L'expédition mexicano-française Surpaclipp dirigée par Vivianne Solis-Weiss de l'UNAM (Mexique), l'équipe de chercheurs mexicains et le géographe français Christian Jost s'y rendirent en et firent un état des lieux. Ce fut la première fois que les Mexicains y retournaient officiellement depuis le drame des années 1914-1917.
  • C'est en l'an 2000 que des rats sont accidentellement introduits sur l'île, à la suite d'un naufrage[35]. Les dégâts qu'ils causèrent sur les écosystèmes sont considérables[36].
  • En 2001, visite de la frégate de lutte anti-sous-marine de la marine nationale française Latouche-Tréville. À son bord : 250 marins, la mission scientifique PASSION 2001 dirigée par Christian Jost du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et le reporter Stéphane Dugast. Cette mission appuyée par la marine nationale réalisa toute une série d'études sur le milieu terrestre et implanta pour l'Institut de recherche pour le développement (IRD) la première borne géodésique (10° 17′ 31,783″ N, 109° 12′ 26,018″ O )[37]. Elle réalisa un inventaire de la flore et de la faune et établit une nouvelle cartographie.
  • En 2003, la frégate Prairial déposa sur l'atoll l'explorateur polaire Jean-Louis Étienne, son assistant-charpentier Denis Comte et deux reporters : Stéphane Dugast et Xavier Gasselin.
  • Entre et , une équipe de scientifiques français (et mexicains) du CNRS, du Muséum national d'histoire naturelle, de l'IRD, de l'EPHE et de l'INRA, autour de Jean-Louis Étienne réalisa un nouvel inventaire de la faune et de la flore. Ils étudièrent la géologie de l'île. Ils étaient sponsorisés par GDF et Unilever. Ils ont essayé d'éradiquer les rats. L'objectif est de créer une base de données afin d'étudier par la suite l'évolution de la biosphère à partir des transformations de ce lieu clos et réputé peu visité[38].
  • En 2013, une nouvelle mission du programme PASSION, la mission PASSION 2013, conduit Christian Jost et J. Morschel de l'université de la Polynésie française à rejoindre à bord de la frégate Prairial l'expédition Cordell 2013 de radioamateurs qui les ramènera au Mexique après avoir réalisé des mesures précises de la côte SE dont l'érosion est susceptible de rouvrir une passe vers le lagon comme l'atoll était ouvert avant 1850.
  • En 2015 c'est l'expédition scientifique internationale PASSION 2015, organisée et dirigée par Christian Jost de l'université de la Polynésie française (UPF), qui débarque sur l'île pour quinze jours pleins 14 scientifiques en provenance de Polynésie, de Nouvelle-Calédonie, du Mexique, de La Réunion, et de France métropolitaine. Cette mission a notamment pour objectifs de réaliser un inventaire complet et une cartographie de la flore sous SIG (Système d'information géographique), de la faune et de la flore récifale, ainsi que le premier MNT (Modèle numérique de terrain), carte topographique précise complétant les mesures de la dynamique et de l'érosion côtière surveillée depuis vingt ans par Christian Jost. Une exposition photo de l'UPF est consacrée à cette mission. Cette mission scientifique bénéficia d'un appui logistique exceptionnel de la Marine nationale et notamment de la frégate FS 731 Prairial ainsi que de l'Armée de terre (RIMAPP de Polynésie française). C'est aussi la plus importante mission militaire française depuis les missions Bougainville des années 1960. Le député Philippe Folliot rejoint les chercheurs en fin de mission. Il est le premier élu de la République à venir sur l’île[39].
  • En , la société canadienne N2Pix obtient l'autorisation du haut-commissaire pour conduire une mission mi-touristique (14 touristes plongeurs), mi-scientifique (3 chercheurs dont un Français qui ne pourront rester que quelques heures sur l'atoll) [40]. Ils réalisent un inventaire des espèces marines pour mieux cerner la migration des grandes espèces pélagiques le long de la côte américaine [41].
  • En , National Geographic - Pristine Seas dirigé par Enric Sala, réalise l'expédition Clipperton Island Expedition destinée à réaliser un inventaire de la faune marine et un inventaire de la faune aviaire que réalisa Christian Jost qui resta cinq jours en solitaire sur l'atoll. Les énormes moyens qu'a mobilisés cette expédition (caméras de profondeurs descendant à plus de 1 100 m, caméras pélagiques, sous-marin) ont permis de réaliser un inventaire exceptionnel et de découvrir de nouvelles espèces. Un important rapport a été fourni aux autorités de l'État français et un film de 26' Clipperton - l'île de La Passion.
  • En 2018 l'expédition Tara Pacific, débutée en et organisée par la fondation Tara Expéditions dont la direction scientifique est assurée par le Criobe et le Centre Scientifique de Monaco, fait escale à Clipperton du 6 au 13 août. Tara Pacific se focalise sur la compréhension de la résilience des récifs coralliens face aux changements globaux actuels. Des prélèvements de coraux ainsi que des collectes d'eau océanique et côtière sont effectuées afin d'étudier la flore microbienne. Un axe secondaire de recherches est orienté vers la connectivité spatiale et génétique des requins au sein du corridor du Pacifique Tropical de l’Est. Enfin, un troisième axe d'étude est planifié sur l'observation des principaux indicateurs de l’évolution de la biocénose et du biotope propres à l’atoll[42].

Administration

Le ministre de l'Outre-Mer français est l'autorité désignée sur l'île Clipperton.

Depuis l'adoption en 1982 de la Convention internationale sur le droit de la mer, l'îlot confère à la France le droit de contrôler et d'exploiter tout autour de l'île une zone économique exclusive (ZEE) de 435 612 km2 (c'est-à-dire, sensiblement, un cercle de 200 milles nautiques de rayon). L'Académie des sciences d'outre-mer, dès 1981, a recommandé la mise en place sur l'atoll d'une base de pêche, avec réouverture du lagon et réhabilitation et extension de la piste aérienne existante.

Après avoir été sous la juridiction des Établissements français d'Océanie dès 1936 puis de la Polynésie française jusqu'au , l'île relève aujourd'hui du domaine public et est inscrite au tableau des propriétés domaniales de l'État français. Elle est, à ce titre, sous l'autorité du ministre chargé de l'outre-mer, autorité qu'il délègue au haut-commissaire de la République en Polynésie française, représentant de l'État, à qui il appartenait d'accorder des autorisations aux particuliers désirant aborder l'atoll ou y obtenir des concessions d'exploitation.

Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 complétant la révision du , l'île est mentionnée au dernier alinéa de l'article 72-3 de la Constitution de la République française : « La loi détermine le régime législatif et l'organisation particulière des Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton ».

De fait, cette possession française ne faisait pas formellement partie des anciens territoires d'outre-mer (TOM), ni des collectivités d'outre-mer (COM) qui leur ont succédé : elle n'est pas un département d'outre-mer, ni un territoire d'outre-mer, ni une collectivité territoriale à statut particulier. Depuis , l'île Clipperton est directement administrée par le haut-commissaire de la Polynésie française sous l'égide du ministre de l'Outre-Mer. Depuis la loi no 2007-224 du portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, l'île Clipperton est soumise au titre II de la loi no 55-1052 du portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île Clipperton.

La situation juridique de l'île n'a pas toujours été claire. Cependant, la loi no 2007-224 du 21 février 2007 a considérablement simplifié ces questions en plaçant l'île sous le principe de l'identité législative : les lois et règlements de la République s'y appliquent de plein droit[43]. Dès lors, « les juridictions de l'ordre judiciaire ayant leur siège à Paris » sont « territorialement compétentes » (selon les principes de la loi du et le décret du ).

Ce texte affirme enfin de façon claire que l'île ne fait pas partie de la Polynésie française (puisque cette dernière est administrée selon le principe de spécialité législative qui avait cours en tant que TOM et confirmé dans son nouveau statut actuel de COM), même si le ministre chargé de l'Outre-mer délègue encore, pour des raisons pratiques, l'administration de l'île au Haut-commissaire (délégué substituant un préfet) représentant l'État en Polynésie française, notamment pour les autorisations d'accès et l'octroi des droits de pêche dans la zone économique exclusive autour de l'île Clipperton[44].

Par cette même loi, l'île reste donc sous l'autorité directe du gouvernement. Elle n'est pas dotée d'une administration locale propre sur le plan exécutif, ni d'une réelle autonomie financière, mais seulement d'une ligne budgétaire dans les comptes publics du gouvernement, qui tient lieu de collectivité locale administrative pour ce territoire, le chef de gouvernement tenant lieu de préfet représentant l'État. Le code officiel géographique (COG) de l'Insee référençait ce territoire sous le code 98799 (correspondant à l'ancien rattachement à la Polynésie française, codée 987, comme s'il s'agissait d'une commune séparée) jusqu'au , mais depuis le ce rattachement artificiel a été supprimé et le territoire est dorénavant codé 989 (ou 98901 pour les applications comptables ou statistiques nécessitant un découpage au niveau communal avec un code à cinq chiffres)[45].

Forces de souveraineté à Clipperton

La Marine nationale projette régulièrement sur zone des bâtiments en vue d'affirmer la souveraineté française sur l'île et sur sa zone économique exclusive.

Déploiements successifs (liste non exhaustive)
  • La frégate Prairal du 2 au dans le cadre de la mission « Passion 2013 ».
  • La frégate Prairal du 1er au [46] dans le cadre de la mission « Passion 2015 ».
  • Le B2M d'Entrecasteaux du 25 au pour une mission de déminage de munitions[47].
  • Le B2M Bougainville en [47].
  • Le B2M Bougainville du 25 août au [48] dans le cadre de la mission « Passion 2017 ».

Écosystèmes

Atoll formé à partir d'une île volcanique aujourd'hui en grande partie disparue, Clipperton n'a jamais été en contact avec le continent américain ni avec aucune autre terre. Sa faune et sa flore sont donc entièrement importées, soit naturellement, soit par l'action humaine.

Une cocoteraie sur l'île Clipperton.

Le lagon, de 5 mètres de fond en moyenne, 55 mètres au maximum (mesures bathymétriques effectuées lors de la mission Passion 2015[14]), dont l'eau de surface est faiblement salée, est clos (ni passe ni hoa). L'eau marine y entre par les vagues qui franchissent le cordon lors des tempêtes, mais il se dégrade : nombreux récifs et coraux morts au sud (sur quatorze espèces de coraux encore présentes en 1958, il n'en restait que huit en 1994). Aujourd'hui, une vingtaine d'espèces sont répertoriées et les récifs sont globalement en très bonne santé.

On a aussi assisté à une dégradation de l’herbier à Ruppia maritima (angiosperme) qui couvrait 45 % du lagon, eutrophisation exacerbée par un apport de guano estimé à 650 t/an, par de nombreux oiseaux marins qui y trouvent une escale, puisque l’île est la seule terre émergée entre le continent et les plus proches archipels polynésiens (la présence de ces nombreux oiseaux rend délicate l'utilisation de la piste d’atterrissage sur l'île, ou les transbordements par hélicoptère depuis un navire).

Le paysage terrestre uniforme n’offre qu’un petit nombre d’habitats. La flore, qui occupe un peu moins de la moitié de la surface émergée de l'atoll, consiste en une quinzaine d'espèces poussant sur un sol exposé à une forte insolation et aux cyclones sur un substrat pauvre et peu diversifié (sables et graviers coralliens) qui — dans la région nord-ouest de l’île — a été dégradé par l'exploitation du limon phosphaté (de 1892 à 1917). À la suite d'un naufrage daté de l'an 2000, des rats ont été introduits dans cet écosystème fragile qui s'en est trouvé profondément bouleversé.

Une zone de protection du biotope est créée en dans les eaux territoriales de Clipperton[49].

Faune

Malgré des ressources limitées, l’île possède une faune composée de nombreuses espèces :

Chilopodes et insectes

La présence de scolopendres d'une dizaine de centimètres et de nombreux cafards, actifs dès la tombée de la nuit, a été observée sur l'atoll ainsi que des fourmis et des mouches[42].

Crustacés

Crabe endémique.

Des crabes : 11 millions de crabes orange (Crabe rouge de Clipperton (Johngarthia planata)) avant l'arrivée des rats, en 2000, qui en a fait drastiquement baisser le nombre. Le dernier recensement précis de 2005 indique un chiffre de 1,25 million d'individus, mais il semblerait que la population ne soit plus que de l'ordre de quelques centaines de milliers de ces crustacés. Une tendance étayée par l'observation de la flore rampante, aujourd'hui très vivace et par la présence de nombreuses jeunes pousses de cocotiers qui avant étaient consommées par ces crabes[42].

Reptiles

Un lézard (Emoia cyanura) est répertorié, et un gecko (Gehyra mutilata) y est peut-être présent, selon l'IUCN. En 1825, des tortues vertes venaient pondre sur l'île. Elles n'ont pas été signalées depuis[50]. Le serpent marin noir et jaune (Pelamis platurus) est encore présent[réf. souhaitée].

Poissons

Au moins deux espèces de poissons étaient jadis présentes dans le lagon (disparues en 1980), mais 112 espèces sont répertoriées hors du lagon, dont cinq ou six endémiques comme le poisson ange de Clipperton (Holacanthus limbaughi), le mérou de Clipperton (Epinephelus clippertonensis), les demoiselles de Clipperton (Stegastes baldwini) et le labre de robertson (Thalassoma robertsoni). On trouve également des mérous cuir (Dermatolepis dermatolepis), des mérous à points blancs (Epinephelus labriformis), des carangues à gros yeux (Caranx sexfasciatus), des carangues noires (Caranx lugubris), des carangues bleues (Caranx melampygus), des murènes (en particulier des murènes à petits points Gymnothorax dovii), des chirurgiens bagnards (Acanthurus triostegus), des chirurgiens à points blancs (Ctenochaetus marginatus), des chirurgiens à queue blanche (Acanthurus nigricans), des fusiliers rouges (Paranthias columnus), des lutjans (Lutjanus viridis), des poissons cochers (Zanclus cornutus), des poissons-pincette jaunes (Forcipiger flavissimus), des poissons épervier mouchetés (Cirrhitichthys oxycephalus), des poissons perroquet lie de vin (Scarus rubroviolaceus) et des tétrodons à points (Arothron meleagris). Deux nouvelles espèces de poissons jamais observées à Clipperton ont récemment été identifiées : le poisson ange royal (Holacanthus passer) et le poisson perroquet étoilé (Calotomus carolinensis)[42].

La population des eaux en requins est en hausse sensible. On observe une augmentation de la densité et de la taille des individus notamment en ce qui concerne l'espèce dominante qui est le requin à pointe blanche (Carcharhinus albimarginatus). On trouve aussi des requins des Galapagos (Carcharhinus galapagensis) ainsi que des requins corail (Triaenodon obesus) et des requins marteaux à feston (Sphyrna lewini)[42].

Coraux

La diversité corallienne du biotope sous-marin est faible. Seulement une vingtaine d'espèces sont répertoriées mais les récifs sont en très bonne santé avec un taux de couverture totale des fonds en corail vivant de l'ordre de 85 % (70 % en moyenne). On note toutefois la présence de quelques colonies blanchies ou en cours de blanchissement. Les édifices coralliens prédominent largement et les espaces sans coraux sont très rares. On trouve principalement trois genres : Porites (coraux massifs), Pocillopora (coraux à branches très courtes) et Pavona (coraux encroûtants). On observe également la présence de Millepora platyphylla (corail de feu en plaques) récemment répertorié à Clipperton. Présence qui étend la distribution de ce dernier dont l'implantation la plus proche est la Polynésie française[42].

Mammifères

Les dauphins sont fréquents autour de l'atoll, dont le dauphin à long bec (Stenella longirostris), le dauphin tacheté pantropical (Stenella attenuata), mais aussi le grand dauphin (Tursiops truncatus), le dauphin bleu et blanc (Stenella coeruleoalba) et le dauphin commun à bec court (Delphinus delphis).

Les mammifères introduits sont à l'origine de graves atteintes à l'avifaune nicheuse[51] :

  • Des porcs domestiques furent introduits accidentellement en 1897 probablement lors du naufrage du navire britannique Kinkora. La présence de l'espèce est mentionnée par le naturaliste américain Kenneth Stager en 1958, qui souligne que quelques centaines d'oiseaux sont visibles (contre des centaines de milliers d'après les témoignages du XIXe siècle). Avec son équipe, il procède à leur éradication totale. Grâce à cette intervention, l'effectif de fous masqués et de fous bruns de Clipperton passe pour la première espèce de 150 individus à 112 000 en 2003, et pour la seconde de 500 à 25 000 en 1980. Une seconde introduction accidentelle eut lieu ultérieurement et donna lieu à une seconde éradication en 1968.
  • Des rats noirs auraient été introduits en 1998 ou 1999, à la suite de deux naufrages. L'espèce est un prédateur pour la faune locale et son éradication est à l'étude.

Oiseaux

L’atoll de Clipperton est la seule terre émergée à des centaines de kilomètres alentours. Elle représente donc un lieu d’étape idéal pour les oiseaux marins. Les premières observations scientifiques font état d’une densité exceptionnelle du nombre d’oiseaux marins mais celui-ci a fortement chuté au début du XXe siècle avec l’introduction de cochons par les exploitants de phosphate. En 1958, les cochons sont éradiqués, permettant une reconstitution importante des colonies d’oiseaux. S’il est difficile d’estimer précisément le nombre d’espèces présentes sur l’atoll, les études récentes font mention de treize espèces se reproduisant à Clipperton et vingt-six oiseaux migrateurs pouvant y faire étape[52].

Aujourd'hui, l’atoll abrite la plus importante colonie au monde de fous masqués (Sula dactylatra), même si leur nombre est en diminution dans les années récentes, passant de 100 000 individus au milieu des années 2000 à moins de 40 000 lors du dernier recensement. Les fous bruns (Sula leucogaster), les fous à pieds rouges (Sula sula) et les fous de Grant (Sula granti) sont aussi présents. La frégate du Pacifique (Fregata minor) est aussi recensée sur l’île avec près de 1 500 individus. La sterne fuligineuse (Onychoprion fuscatus) est régulièrement observée sur Clipperton avec des variations sensibles puisque certaines expéditions n’en ont parfois croisé aucune. La foulque d’Amérique (Fulica americana), disparue depuis les années 1980, est apparemment revenue sur l’atoll puisque cent cinquante individus ont été vus en 2016. Le noddi brun (Anous stolidus) connaît quant à lui une diminution de sa présence depuis quelques décennies mais reste présent sur Clipperton[53].

D’autres espèces peuvent être croisées plus sporadiquement comme la gallinule poule-d'eau (Gallinula chloropus), la paille-en-queue à brins rouges (Phaethon rubricauda), le puffin du Pacifique (Puffinus pacificus) ou la sterne Gygis (Gygis alba), en plus d'espèces migratrices qui y font étape.

Flore

Cinquante-quatre espèces d'algues sont répertoriées sur l'atoll. Les herbiers aquatiques se dégradent. La flore de graminées et de vivaces est dominée par quatre espèces. Elle était en 2007 composée de vingt-six phanérogames, trois mousses, quelques lichens et champignons identifiés, pour l'essentiel probablement introduits par les êtres humains. Le tapis d'Ipomoea pes-caprae encore présent en 1958 était déjà relictuel en 1980 (à la suite d'un excès d’apport azoté par les oiseaux ?). Quelques vasières, mares et fossés abritent près du lagon des Cypéracées (en régression). Une espèce de cocotier a été introduite, actuellement[Quand ?] en expansion sous forme de quelques bosquets. La flore est extrêmement sensible aux aléas climatiques : la faible altitude de l'île la rend au moins partiellement submersible lors des très grandes tempêtes, ce qui a pour effet la suppression de la végétation dans les zones touchées par la mer.

Une cartographie fine sous système d'information géographique de la couverture végétale de l’île, qui a été réalisée pour la première fois en 2015, a mis en évidence qu'une quinzaine d’espèces de plantes occupait 46 % de la surface émergée de l'atoll alors qu'en 2001 aucune couverture n'existait. Cette absence de végétation était sans doute le fait de la surconsommation des crabes qui pullulaient alors et dont la population s'estimait en millions individus. Le nombre de crabes ayant considérablement diminué avec l'arrivée des rats, les jeunes pousses végétales s'en sont trouvées nettement moins prédatées et ont pu se développer. En 2016 les observations ont confirmé cette tendance au dynamisme. En 2018, 1 405 cocotiers de plus d'un mètre de haut ont été inventoriés (865 en 2016 et 847 en 2015). La végétation rampante s'est beaucoup développée également, en particulier les prairies d’Ipomoea triloba et d’Ipomea pes-caprae qui montrent une extrême vivacité et ce malgré une submersion régulière de certaines zones par la mer. On trouve aussi les espèces suivantes : Achyranthes aspera, Corchorus aestuans (Tiliaceae), Heliotropium curassavicum, Nicotiana glauca, Salvia occidentalis (Lamiaceae), Sida rhombifolia (Malvaceae) et Portulaca oleoraceae (Portulacaceae)[42],[54].

Pollution

Les écosystèmes de l'île Clipperton (bosquets, sols dénudés, lagon et fonds marins proches) sont également régulièrement recouverts par des déchets dérivants, qui forment une pollution inquiétante.

Il reste, éparpillées sur l'île, des munitions vides et de nombreuses carcasses de moteurs laissées après l'occupation américaine de 1944 et par l'ancienne exploitation du guano au début du XXe siècle. Les anciennes baraques sont en état de délabrement. Toutefois ces déchets constituent des abris artificiels pour les populations de crustacés aux heures les plus chaudes.

L'île a été recommandée par l’Oceania Program de l’Asian Wetland Bureau pour inscription en zone humide Ramsar en 1994[réf. souhaitée]. Elle est toujours sur la liste des sites susceptibles d’être désignés au titre de la Convention de Ramsar.

Le , le chimiquier Sichem Osprey de la compagnie norvégienne Eitzen Group (en) s'échoue sur les récifs entourant l'île avec dans sa cale notamment 10 000 tonnes de xylène et des huiles animales et végétales. Des opérations de pompage doivent être mises en place pour prévenir d'éventuelles fuites de xylène (le navire est toutefois à double coque) et alléger le navire qui trois semaines plus tard est toujours échoué[55]. Le navire est remis à flot le sans qu'il y ait eu de pollution à déplorer[56].

Lors d'une escale sur l'atoll en , les membres de l'expédition Tara Pacific (2016-2018)[57] font le point sur l'état du récif qui l'entoure et constatent qu'il est normal et qu'il y a beaucoup de corail vivant avec une faible diversité mais qu'il est très dynamique. Par contre, sur terre, c'est un désastre, les déchets sont partout, incessamment rejetés par les courants. Les Fous masqués et le Fous bruns passent le plus clair de leur temps au large, à la recherche de nourriture, mais à l'heure de la nidification, les femelles cherchent refuge sur des îles comme Clipperton. Serge Planes, directeur scientifique de l'expédition indique que « tous les nids sont faits à partir de déchets plastiques (...) quel triste lieu de naissance que nous offrons à nos jeunes fous, là où ils devraient découvrir une nature pure »[58].

Ressources

Des ressources intérieures inexistantes

Le phosphate a été exploité de 1898 à 1917. Les ressources de guano sont également épuisées. Aujourd'hui inhabité, l'îlot n'abrite même plus de station météorologique.

Une ZEE très vaste

Le thon serait une des richesses de Clipperton.

L'intérêt actuel réside dans la zone économique exclusive française de 435 612 km2 qui l'entoure[59] (ce qui représente un disque de 201 milles de rayon, soit à 200 milles d'un atoll qui fait sensiblement un mille de rayon), permettant à la France d'être membre de la Commission thonière tropicale inter-américaine (en anglais, Inter-American Tropical Tuna Commission, IATTC])[60] et de pouvoir pêcher le thon. Cette zone représente l'une des plus riches au monde en thonidés[61].

La mission océanographique mexicano-française Surpaclip a aussi découvert en 1997 la présence de nodules polymétalliques riches en nickel et en cuivre.

Par ailleurs, dans le cadre de son programme Extraplac, la France n'aurait pas voulu en 2009 faire valoir auprès de l'ONU ses droits de possession à Clipperton[62] en relation avec une zone de 40 000 km2 de plateau continental, perdant ses droits de manière définitive[63],[64].

Aspects culturels

Philatélie

Timbre de $ de Clipperton (1895).

La compagnie américaine qui exploita le guano de l'île Clipperton fit imprimer dix timbres en « Clipperton Island Postage » à San Francisco avec les valeurs faciales de 1, 2, 3, 4, 5, 8, 10, 25, 50 cents et 1 dollar. Ces timbres furent utilisés en 1895 et 1896 pour le courrier de la compagnie[65].

Pendant l'occupation mexicaine, des timbres mexicains de 1, 2, 3, 4, 5, 10 centavos et 1 peso avec une surcharge diagonale « CLIPPERTON » ont été utilisés jusqu'en 1914.

Un timbre de la poste française est émis en 2011 pour commémorer la découverte de l'île. D'une valeur faciale de 1 euro, il est dessiné par Marie-Noëlle Goffin. L'émission de ce timbre est à l'initiative d'Alain Duchauchoy, vice-président chargé de la communication et des relations publiques de l'association Clipperton, projets d'Outre-Mer et responsable de l'expédition scientifique et radioamateur de 2008. D'un point de vue officiel, les timbres de la Polynésie française sont censés y être utilisés mais il n'y a ni bureau de poste, ni courrier sur l'île. Cependant, le code postal 98799 est attribué à l'île.

Presse

Le journaliste Gabriel Macé a souvent parlé de l'île Clipperton dans Le Canard enchaîné et est devenu un spécialiste de l'îlot au sein de la rédaction de l'hebdomadaire[66].

Benoît Gysembergh a passé une semaine, en , seul sur l'ile pour un reportage publié dans Paris Match[67].

Le reporter Stéphane Dugast a effectué trois séjours sur l'île et publié de nombreux reportages sur cette île, notamment dans Cols bleus, le journal de la Marine nationale[68].

Littérature : Le Roi de Clipperton, roman, de Jean-Hugues Lime, éditions Le Cherche midi, 2002, raconte la tragédie mexicaine.

Musée de Clipperton

Le site « Bienvenue sur l'île de la Passion… Clipperton ! »[69] a développé un musée virtuel sur Clipperton, permettant de parcourir l’histoire de l’île en moins de 3 minutes[70].

Références

  1. Commission nationale de toponymie et Conseil national de l'information géographique, Pays indépendants et capitales du monde : Entités géopolitiques dépendantes au 01.09.2007, , 10 p. (lire en ligne), p. 4.
  2. Distance from Clipperton Island to
  3. Hellduck, « La Collection Cousteau 71/90 - Clipperton île de la solitude (1980) », (consulté le ).
  4. Folliot 2016
  5. Christian Jost, « Musée Clipperton | Bienvenue sur l’île de la Passion…Clipperton! | Christian Jost », sur www.clipperton.fr (consulté le ).
  6. O. Gargominy, Biodiversité et conservation dans les collectivités françaises d’outre-mer, Paris, Comité français pour l’UICN, coll. « Planète Nature », , X-246 p. (lire en ligne).
  7. « Le seul atoll du Pacifique nord-oriental » (consulté le ).
  8. « Les atolls et presqu’atolls des Marquises (Un pavé dans le lagon) » (consulté le ).
  9. Folliot 2016, p. 30
  10. L'Est Républicain 12/06/2016 Clipperton, l'île oubliée de la République.
  11. « La Collection Cousteau 71/90 - Clipperton île de la solitude (1980) » (consulté le )
  12. « Les mystères de Clipperton 4/6 - Vidéo dailymotion », sur Dailymotion (consulté le )
  13. « Mission PASSION 2015 », sur UMR 241 - Ecosystèmes Insulaires Océaniens (consulté le )
  14. « Le lagon | Bienvenue sur l’île de la Passion…Clipperton! | Christian Jost », sur www.clipperton.fr (consulté le )
  15. Christophe Forcari, « Clipperton, un destin noir au milieu de nulle part », Libération, (lire en ligne, consulté le ).
  16. Bibliographie de l’île de Clipperton - Île de La Passion (1711-2005) par Christian Jost, site Internet de la Société des Océanistes.
  17. Revue historique de l'armée, ministère des armées, 1965, p. 151, [lire en ligne], consulté le 1er novembre 2008.
  18. Annales de l'Institut océanographique de Monaco, vol. 40, 1963, p. 6, [lire en ligne] consulté le 1er novembre 2008.
  19. Daniel Pardon, « Carnet de voyage - Victoriano Alvarez, le“roi” violeur de Clipperton », Tahiti Infos, (lire en ligne).
  20. « L’incroyable histoire des naufragés de Clipperton », sur Infos et reportages sur le Mexique, (consulté le ).
  21. Affaire de l’île de Clipperton (Mexique contre France). Recueil des sentences arbitrales, volume II, p. 1105-1111, 28 janvier 1931.
  22. Rapport du Sénat français : mission effectuée au Mexique du 20 au 28 février 1999.
  23. Folliot 2016, p. 55
  24. januel, « Un député en mission pour Clipperton », sur Les cuisines de l’Assemblée, (consulté le )
  25. Denis Sergent, « Que veut faire la France de l'îlot de Clipperton ? », La Croix, (lire en ligne, consulté le ).
  26. Emre Sari, « Clipperton, petit bout de France délaissé dans l'océan Pacifique », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
  27. Jacques Nougier, « îles-fantômes et récifs de nulle part », Jeune Marine, , p. 38-40 (ISSN 2107-6057).
  28. Question écrite no 9607 de Christian Cointat (sénateur des Français établis hors de France), sur le site du Sénat français.
  29. « Clipperton : petit bout de France délaissé dans l'océan Pacifique », Le Monde, (consulté le ).
  30. http://www.clipperton.fr/actualite-2.html.
  31. (en) Robert Evans Snodgrass et Edmund Heller, « The Birds of Clipperton and Cocos Islands », Proceedings of the Washington Academy of Sciences, vol. 4, , p. 501–520 (lire en ligne).
  32. « Histoire | Bienvenue sur l’île de la passion…Clipperton! | Christian Jost », sur www.clipperton.fr (consulté le )
  33. Clipperton île de la solitude La Collection Cousteau (1980) sur YouTube.
  34. « Clipperton, lointaine terre française, et la météorologie », Revue Met Mar de Météo-France, no 121, , p. 41-46 (ISSN 0222-5123, lire en ligne).
  35. « Scorbut, rats et trésors naturels…. Le destin tragique de l'île de Clipperton, petit bout de France au milieu du Pacifique », sur Franceinfo, (consulté le ).
  36. Folliot 2016, p. 19
  37. Christian H. Jost, « Clipperton - Île de la Passion : Une aire française du Pacifique à protéger ! », dans Jean-Michel Lebigre (dir.) et Pierre-Marie Decoudras (dir.), Les aires protégées insulaires et tropicales, Pessac, Centre de recherches sur les espaces tropicaux (CRET), coll. « Îles et archipels » (no 32), , 304 p. (ISBN 2-905081-45-7, lire en ligne), p. 226 (colloque de Nouméa, 30-31 octobre 2001).
  38. Jean-Louis Étienne : cap sur Clipperton. Fabrice Nodé-Langlois. Le Figaro, 13 novembre 2004.
  39. Un député français à bord de la FS Prairial Cols bleus (12/05/2015).
  40. Clipperton Expedition - Scuba dive and tag sharks.
  41. Rapport de mission.
  42. « Mission sur l'atoll de Clipperton-La Passion du 6 au 13 août 2018 dans le cadre de Tara Pacific », sur http://thalassa-env.com/, (consulté le )
  43. Un nouvel article 9 ajouté à la loi statutaire du 6 août 1955 — actualisée et rebaptisée « Loi portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton » — comportera un alinéa 3 qui précise « Les lois et règlements sont applicables de plein droit dans l'île de Clipperton. ».
  44. La Législation applicable au récif de Clipperton, par André Oraison, professeur de droit public à l'université de La Réunion (université française et européenne de l'Océan Indien).
  45. Définition et méthodes de nomenclature dans le code géographique officiel de l'Insee.
  46. « https://www.defense.gouv.fr/marine/a-la-une/polynesie-francaise-le-prairial-en-mission-a-clipperton », sur www.defense.gouv.fr (consulté le ).
  47. Digidust Corp, « Déminage de munitions sur l’atoll de Clipperton | colsbleus.fr : le magazine de la Marine Nationale », sur www.colsbleus.fr (consulté le ).
  48. « https://www.defense.gouv.fr/marine/actu-marine/retour-de-mission-passion-2017-pour-le-bougainville », sur defense.gouv.fr (consulté le ).
  49. Arrêté du 15 novembre 2016, JORF du 23 novembre 2016..
  50. (en) B. Morrell, A Narrative of Four Voyages to the South Sea, North and South, Pacific Ocean, Chinese Sea, Ethiopic and Southern Atlantic Ocean, Indian and Antarctic Ocean from the Years 1822 to 1831, New York, J. & J. Harper, , 492 p.
  51. In O. Lorvelec, D. Fourcy, M. Pascal, L'île de Clipperton : un paradis pour les oiseaux, menacé par les introductions de mammifères, Ornithos 19-4, juillet-août 2012, p. 251-264.
  52. Loïc Charpy, « Clipperton : environnement et biodiversité d'un microcosme océanique », IRD Editions, .
  53. Jost et Friedlander 2016, p. 13-19.
  54. « Flore | Clipperton – Projet d'Outre-Mer » (consulté le ).
  55. Échouage du Sichem Osprey à Clipperton : Aucune pollution à ce jour. Dans Tahiti presse le 26 février 2010.
  56. Clipperton : Déséchouement du navire chimiquier Sichem Osprey. Agence Tahitienne de Presse.
  57. https://oceans.taraexpeditions.org/m/environnement/ocean-climat-arctique/nouvelle-expedition-tara-pacific/.
  58. Marielle Court, « Clipperton, un atoll français paradisiaque noyé sous les déchets plastiques », Le Figaro, (lire en ligne)
  59. La ZEE, bien que contestable selon le droit international de la mer car inhabitée et non localement administrée, a été créée par le décret no 78-147 du 3 février 1978, elle est effective au plan international depuis le 1er janvier 1983.
  60. Présentation du ministère français de l'outre-mer.
  61. Christian Jost, « Intérêts | Bienvenue sur l’île de la Passion…Clipperton! | Christian Jost », sur www.clipperton.fr (consulté le ).
  62. Programme français d'extension du plateau continental. La ZEE de Clipperton s’étend partout jusqu’à la haute mer. Les côtes du Mexique sont situées à un peu moins de 700 milles au nord-est.
  63. Le Programme français d'extension du plateau continental : une action structurée. En 2004, l’Ifremer a constitué une liste des zones d’extensions pouvant représenter un intérêt, 24 zones sont concernées, dont 11 partagées avec un autre État… Pour y prétendre il faut déposer, avant le 13 mai 2009, un dossier technique et juridique devant la Commission des Limites du Plateau Continental qui implique de nombreuses campagnes océanographiques.
  64. « Avec ses immenses fonds marins, la France est parée pour l’avenir », sur Capital.fr, (consulté le )
  65. (en) Wolfgang Badius, « The Stamps of Clipperton Island », The Postal Gazette, (lire en ligne)
  66. Frédéric Pagès, « Enfin on reparle de Clipperton », Le Canard enchaîné, .
  67. Benoît Gysembergh, « Vivre sur une île déserte », Paris Match, (lire en ligne, consulté le ).
  68. Stéphane Dugast, « Principes de base », Cols bleus, (lire en ligne, consulté le ).
  69. http://www.clipperton.fr/.
  70. http://www.clipperton.fr/musee-clipperton.html.

Voir aussi

Filmographie

Bibliographie

  • Chistian Jost, Alan Friedlander et al., L’atoll de Clipperton (Île de La Passion) – Biodiversité, menaces et recommandations pour sa conservation, Paris / Washington, Université de la Polynésie française / National Geographic – Pristine Seas, , 98 pages, et Références à l’appui du rapport, 998 p. (lire en ligne)
    Rapport au Gouvernement français
  • Chistian Jost et E. Sala, Clipperton, l’île de La Passion. Une opportunité unique pour la France. Une proposition de réserve marine pour Clipperton, Paris / Washington, Université de la Polynésie française / National Geographic – Pristine Seas, , 4 p.
  • Chistian Jost, « Risques environnementaux et enjeux à Clipperton », Cybergéo, revue européenne de géographie, (lire en ligne)
  • H. Juet, Clipperton, l'île Passion, Éditions Thélès, Paris, 258 p., 2004.
  • Jacqueline et Claude Briot, Dubocage de Bléville, découvreur de Clipperton. Recueil de l'Association des Amis du Vieux Havre no 48 - 1989.
  • (de) Ivo Mansmann, Clipperton, Schicksale auf einer vergessenen Insel, roman (ISBN 3-354-00709-5).
  • Michel Dubocage, Journal de Navigation fait par le capitaine Dubocage commandant la frégate La Découverte présenté, transcrit et annoté par Jacqueline et Claude Briot, Books on Demand, avril 2010. Sous-titré par les transcripteurs Voyage à la Chine par le Cap-Horn — Découverte de Clipperton 1707-1716.
  • Collectif, Dubocage de Bléville, Clipperton et la Chine, Cahiers Havrais de Recherche Historique. Numéro spécial hors série 2011 en quadrichomie, Actes du colloque du même nom à l'occasion du tricentenaire de la découverte de l'île de la Passion. Textes recueillis et mis en page par Claude Briot. CHRH, le Havre, décembre 2011.
  • (en) Jimmy M. Skaggs, Clipperton : A History of the Island the World Forgot, New York, Walker & Co, , 318 p. (ISBN 978-0-8027-1090-1)
  • Philippe Folliot, Valoriser l’île de La Passion (Clipperton) par l’implantation d’une station scientifique à caractère international, (lire en ligne)
    Rapport parlementaire rédigé par le député du Tarn
  • Philippe Folliot et Christian Jost, La Passion - Clipperton - L'Île Sacrifiée, La Bibliotèca, 2018 (ISBN 9782955495032)

Articles connexes

Liens externes

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