Césaire d'Arles

Césaire d'Arles (latin : Cæsarius Arelatensis), né vers 470 à Chalon-sur-Saône et mort le à Arles, fut évêque de cette cité de décembre 502 jusqu'à sa mort en 542.

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Césaire d'Arles

Césaire d'Arles, statue dans l'église
Saint-Césaire d'Arles.
Saint, archevêque, auteur
Naissance v. 470
Chalon-sur-Saône,
Empire romain d'Occident
Décès 27 août 542 
Arles, royaume des Francs
Vénéré par Église catholique
Église orthodoxe
Fête 26 août

Moine de Lérins, puis évêque d'Arles pendant quarante ans, Césaire s'affirma comme un chef dont l'influence s'exerça sur la Gaule méridionale et l'Espagne. Il sut à la fois protéger son peuple contre les exactions des Barbares et l'enseigner par des sermons simples et vivants. Mais il parla aussi en docteur dans les conciles qu'il présida. Il est un saint chrétien et honoré le 26 août[1],[2].

Biographie

Sa jeunesse

Né en territoire burgonde de parents chrétiens et probablement gallo-romains, Césaire est reçu comme clerc, à l'âge de dix-huit ans, dans sa ville natale par l'évêque saint Silvestre (484-526). Il devient ensuite moine au monastère de Lérins à l'âge de 20 ans ; il y est l'élève de Julien Pomère.

Obligé de sortir de Lérins en raison de l'état de sa santé, il s'établit en Arles, où l'évêque Éon, avec qui il est apparenté, l'ordonne diacre, puis prêtre en 499, et lui confie la direction d'un monastère situé en face de la cité, soit à Trinquetaille, soit sur une île du Rhône (probablement l'île de la Cappe). C'est dans ces circonstances qu'il rédige la Regula ad monachos.

Évêque d'Arles

Participants au concile d'Agde présidé par Césaire.

Après la mort d'Éon[3] en 501 ou 502, il devient évêque d'Arles probablement en , mais continue à vivre comme un moine, exigeant que le clergé soit exemplaire. Suspect aux rois ariens wisigoths (Alaric II jusqu'en 507) et ostrogoths (Théodoric et ses successeurs), il doit se justifier à Bordeaux en 505 et à Ravenne en 513[4], mais gagne à deux reprises la confiance du roi. À son retour de Ravenne, il s’arrête à Rome où le pape Symmaque lui remet le pallium.

En 506 il préside le concile d'Agde dont il a préparé les travaux et suggéré les décisions. C'est également en 513 qu'il fonde, aux Alyscamps, le premier monastère de femmes, transféré à l'intérieur des murs d'Arles en 524 et appelé monastère Saint-Jean. Il rédige pour ce monastère la Regula ad virgines, qui sera par la suite adoptée entre autres par sainte Radegonde pour son monastère de Poitiers.

Nommé vicaire du Siège apostolique pour la Gaule et l'Espagne en 514[5], il convoque et préside plusieurs conciles, celui d'Arles en 524[6], de Carpentras en 527, de Vaison en 529 et le deuxième concile d'Orange en 529, sans doute le plus important, qui condamne le semi-pélagianisme et donne une formulation théologique de la grâce telle qu'elle avait été prônée par Augustin, contre ceux qui, comme Jean Cassien, donnaient un rôle plus important au libre arbitre. Les conciles de Valence (en 530), d'Orléans (en 533, 538 et 541) auxquels il n'assiste pas, et celui de Clermont (en 535), où il se rend, adoptent ses idées.

Il règle également des problèmes de discipline comme lors du concile provincial de Marseille du où il fait condamner un certain Contumeliosus, évêque de Riez, qui avait dilapidé l’argent de l’église. Cet épisode est évoqué par Malnory[7] et probablement représenté sur une peinture sur bois exécutée à la fin du XVIe siècle visible dans l'ancienne cathédrale Saint-Trophime d'Arles[8]. Toutefois après la mort de Jean II, pape qui avait souhaité une condamnation sévère, Contumeliosus fit appel fin 535 ou début 536 auprès du nouveau pape Agapet Ier qui ordonna qu'on accordât à l'accusé un nouveau procès devant les délégués du pape.

Concile provincial représentant probablement la condamnation de l'évêque Contumeliosus, le sixième à partir de la gauche.

Après l'annexion de la Provence par les Francs en 536, les relations entre l'archevêque et la royauté chrétienne deviennent très chaleureuses. Ainsi vers 540, un acte de donation de Childebert Ier, fils de Clovis, donne les pêcheries situées au sud de l'étang de Caronte[9] dans le quartier actuel de Jonquières à Martigues.

Il meurt après 40 années d'épiscopat, le [10].

Œuvres principales

  • Césaire d'Arles est l'auteur d'homélies et de sermons, au nombre de 238, fortement inspirés par la théologie d'Augustin. Au Moyen Âge certains furent d'ailleurs attribués à Augustin lui-même. Ces sermons, très concrets, nous renseignent sur la vie quotidienne des arlésiens du début du VIe siècle ; on y voit en particulier que les pratiques païennes sont encore très vivaces[11].

On lui doit également des traités dogmatiques, notamment le De mysterio Sanctæ Trinitatis contre les ariens et les pélagiens.

Les deux règles monastiques : pour les moniales (regula ad virgines) et pour les moines (regula ad monachos) sont ses écrits les mieux connus aujourd'hui[12].

Écrits

Buste-reliquaire de saint Césaire, église abbatiale Saint-Césaire, Maurs, Cantal.

Moine de Lérins. Ce guide courageux a écrit : « Il ne faut pas rester la bouche close dans l'Église, comme les chiens muets de l'Écriture »[13].

La culture de l'âme

« Le soin de notre âme, frères, très chers, est en tout point semblable à la culture de la terre. En effet, de même que dans une terre cultivée, on arrache d'un côté, on extirpe de l'autre jusqu'à la racine pour semer le bon grain, de même doit-on faire dans notre âme : arracher ce qui est mauvais et planter ce qui est bon.
Il existe deux sortes de champs : l'un est le champ de Dieu, l'autre celui de l'homme. Tu as ton domaine, Dieu aussi a le sien ; ton domaine, c'est ta terre ; le domaine de Dieu, c'est ton âme. Est-ce que Dieu mérite de nous que nous négligions notre âme qu'il aime tant ? Si tu te réjouis en considérant ton domaine cultivé, pourquoi ne te lamentes-tu pas en considérant ton âme en friche ? Des champs de notre domaine nous avons à vivre peu de jours en ce monde ; de la culture de notre âme nous aurons à vivre sans fin dans le ciel ; c'est donc là, c'est-à-dire à propos de notre âme, que nous devons toujours dépenser le plus de zèle.
Dieu a daigné nous confier notre âme comme son domaine, si bien que nous devons mettre tout notre zèle à bien la cultiver ; travaillons donc de toutes nos forces avec l'aide de Dieu pour qu'au moment où Dieu voudra venir dans son champ, c'est-à-dire dans notre âme, il le trouve entièrement cultivé, entièrement arrangé, entièrement ordonné ; qu'il y trouve une moisson et non des ronces ; qu'il y trouve du vin et non du vinaigre ; du blé plutôt que de l'ivraie »

 Sermon 4, 4, trad. M.-J. Delage, Sources chrétiennes 175, Cerf, Paris, 1971, p. 325-329.

Sortir de soi-même

« « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père », dit le Seigneur. Tout cela, mes frères, se trouve réalisé en nous par le sacrement du baptême : nous le croyons et nous parvenons à quitter notre pays quand nous nous détournons des habitudes charnelles pour suivre les traces du Christ.
D'ailleurs, cela ne vous réjouit-il pas de le voir quitter son pays, c'est-à-dire sortir de lui-même, l'orgueilleux qui se fait humble, le coléreux qui se fait pacifique, le débauché qui se fait chaste, l'avare qui se fait généreux, l'envieux qui se fait bienveillant, le cruel qui se fait doux ? Et précisément, mes frères, celui pour qui quitter son pays est une réussite est celui en qui une telle transformation s'opère pour l'amour de Dieu. J'ajouterai enfin que nous avons coutume de dire, entre nous, à propos de quelqu'un de mauvais qui se mettrait subitement à faire des bonnes actions : « Cet homme-là est sorti de lui-même. »
Nous quittons donc notre parenté quand, par la grâce du baptême, nous faisons le vide en nous de tous nos vices et nos péchés ; cela suppose néanmoins qu'ensuite nous conjuguions tous nos efforts, avec l'aide de Dieu, pour nous couvrir de vertus, une fois nos vices expulsés. N'espérons pas, en effet, être lavés de tous nos maux par le baptême tout en restant paresseux et indolents. »

 Sermon 81, trad. M.-H. Stébé, Paris, Migne, Les Pères dans la foi 22, 1982, p. 123-125.

De l'humilité

« Où faut-il suivre le Christ sinon là où il est allé ? Nous savons en effet qu'il est ressuscité, qu'il est monté au ciel : voilà où il nous faut le suivre. Et il ne faut certes pas désespérer d'y parvenir, parce que c'est lui qui l'a promis, non parce que l'homme y peut quelque chose.
Mais que celui qui désire suivre le Christ écoute la parole de l'Apôtre Jean : Celui qui déclare demeurer dans le Christ doit marcher lui-même dans la voie où lui, Jésus, a marché (1 Jn 2, 6). Tu veux suivre le Christ ? Sois humble quand le Christ a été humble ; son humilité, ne la méprise pas, si tu veux parvenir à son élévation.
Certes, la voie est devenue rocailleuse, le jour où l'homme a péché ; mais elle est unie, depuis que le Christ l'a foulé dans sa résurrection et qu'il a fait de ce sentier très étroit la voie royale. Sur cette voie, on court avec ses deux pieds : c'est-à-dire l'humilité et la charité. Par le fait, l'élévation charme tout le monde, mais l'humilité en est le premier degré. Pourquoi tendre le pied plus loin que toi-même ? Tu veux donc tomber, non pas monter. Commence par le premier échelon, c'est-à-dire par l'humilité, et déjà tu es monté »

 Sermon 159, trad. du lectionnaire pour chaque jour de l'année, 4. Solesmes, Cerf, Paris, 2005, p. 98-99.

Tradition populaire

Césaire d'Arles apparaît comme l'un des saints prophètes figurant dans le Mirabilis Liber, un recueil de prophéties anonyme du XVIe siècle[14].

Reliques

Deux pallia en laine, qui sont les premiers de l'Occident chrétien, trois sandales en cuir, une tunique funéraire, une ceinture en cuir et sa boucle en ivoire sculpté : ces étoffes sont considérées comme les plus anciens tissus liturgiques conservés en France. Ces reliques sont conservées au musée de l'Arles antique dans une salle du cloître Saint-Trophime. L'ensemble a été exposé à Arles en 2001 et 2002, en 2012 à Paris au musée du Louvre, et en 2017 au musée Pio Cristiano à Rome[15].

Le musée d'Art sacré du Gard expose également un reliquaire dit « de Saint Césaire » contenant diverses reliques. Elles ont été trouvées par un ermite, Dominique de Germayo, sous l'autel de la chapelle Saint-Accurse des Alyscamps en 1428 durant des travaux. Des moniales du monastère Saint-Césaire les ont ensuite placées avec d'autres fragments dans un coffret reliquaire portatif, sans doute confectionné par un orfèvre montpelliérain[16]. En forme de livre ouvert, il comporte des petites niches où sont logées les reliques et deux statuettes, l'une de l'archevêque d'Arles, et l'autre de l'évêque de Sébaste saint Blaise. C'est le plus ancien reliquaire conservé d’Arles[17].

La cathédrale saint-Trophime conserve également quelques fragments d'ossements du saint évêque arlésien dans un reliquaire placé à la chapelle absidiale dédiée aux reliques.

Notes et références

  1. Nominis : saint Césaire d'Arles.
  2. Saint Césaire d'Arles : fêté le 26 août en France et le 27 août dans l'Église universelle, site L'Évangile au Quotidien.
  3. Ce point est discuté, notamment par William E. Klingshirn, Cæsarius of Arles: The Making of a Christian Community in Late Antique Gaul, Cambridge University Press, 1994 (ISBN 0521528526), pages 84 et suivantes [lire en ligne] qui place Johannes entre Éon et Césaire.
  4. À la fin août ou début septembre 513, il est assigné à comparaître à Ravenne devant Théodoric II, par Gemellus, le Vicaire qui réside à Arles. Cf. Malnory, Arthur. Saint Césaire, évêque d'Arles, page 101 [lire en ligne].
  5. Il reçoit le pallium en 513. De retour en Gaule, il a des démêlés avec l'évêque d'Aix au sujet des droits de l'église d'Arles. Césaire charge l'abbé Aegidius et le prêtre Messin d'aller les défendre à Rome ; en juin 514, Symmaque déclare que l'archevêque d'Arles sera vicaire apostolique en Gaule et en Espagne.
  6. Louis de Mas Latrie, Chronologie historique des papes, des conciles généraux et des conciles des Gaules et de France, 1836, page 324 [lire en ligne].
  7. [lire en ligne].
  8. Ce panneau est classé au titre objet par les Monuments Historiques depuis le 6 juin 1902Notice no PM13000288, base Palissy, ministère français de la Culture.
  9. La donation des bourdigues de l’étang de Caronte par Childebert à Césaire, archevêque d’Arles - Naissance et développement d’une ville polynucléaire en milieu lagunaire : Martigues de Pierre Costes, p. 100
  10. Saint Césaire, Évêque d'Arles, Père de l'Église (+ 542).
  11. J. Delage (traduction de), Sermones, I, 12, 36 :
    « Et ceci aussi, qui ne peut le dire : nul ne doit rendre un culte aux arbres, observer les augures, s’adresser aux enchanteurs ; nul ne doit s’enquérir auprès des magiciens et des devins, nul ne doit, à la façon sacrilège des païens, prendre garde au jour où il part en voyage et au jour où il rentre chez lui, mal auquel, non seulement les laïcs, mais même un certain nombre de clercs, je le crains, succombent à cause d’une coutume sacrilège ».
  12. Fondation du monastère Saint-Jean d'Arles et première application de la règle pour les moniales de saint Césaire.
  13. Sermon 83, trad. M.-H. Stébé, Les Pères dans la foi 22, Migne, Paris, 1982, p. 128-132.
  14. la célèbre prophétie attribuée à saint Césaire d'Arles (en 540, éd. 1525), considérée comme annonçant la Révolution française.
  15. Franck Chevalier, « Dilectissimo fratri cæsario », Archéologia, no 553, avril 2017, p. 4.
  16. Le reliquaire de Saint-Césaire d'Arles - musees.gard.fr.
  17. Les saints arlésiens : diffusion cultuelle et iconographique de Michel Baudat et Claire-Lise Creissen, p. 75

Annexes

Bibliographie

  • « Vie de Césaire d’Arles », introduction, révision du texte et traduction par Marie-José Delage et Marc Heijmans, coll. Sources chrétiennes, no 536, Paris, 2010.
  • Joël Courreau, « Saint Césaire d'Arles et les Juifs », dans Bulletin de littérature ecclésiastique, 1970, tome 71, no 2, p. 92-112 (lire en ligne)
  • Arthur Malnory, Saint Césaire Évêque d'Arles (503-543), (présentation en ligne), Éditions : G. Morin, Corp. christ. 103-104 (1953). Traductions françaises : A. de Vogüé - J. Courreau, Sources chrétiennes 345 (1988, * Œuvres monastiques, M.-J. Delage, Sources chrétiennes 175, 243 (1971, 1978, Sermons au peuple).
  • (en) William E. Klingshirn, Cæsarius of Arles: The Making of a Christian Community in Late Antique Gaul, Cambridge University Press, 1994 (ISBN 0521528526).
  • Omer Englebert, La Fleur des Saints (ISBN 2-7028-1634-7).
  • D. Bertrand, M.-J. Delage, P. Février, J. Guyon, A. de Vogüé, « Césaire d'Arles et la christianisation de la Provence », Actes des journées « Césaire » [3-, ], Éditions du Cerf, 1994 (ISBN 978-2204050302).
  • Marie-Laure Chaieb, Césaire d'Arles : Evêque d'hier et d'aujourd'hui ?, Parole et silence, , 126 p. (ISBN 978-2-8895-9143-5)

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