Khanat bulgare de la Volga

Le Khanat bulgare de la Volga[1] est un des États héritiers du premier khanat bulgare ; il exista entre le VIIe siècle et le XIIIe siècle jusqu'en 1236-1238, date à laquelle sa capitale Bolghar (dénommée aussi Bolgar ou Boulgar) fut détruite par la Horde d'or.

Bulgarie de la Volga
(bg) Волжка България

VIIIe siècle  1236

Informations générales
Capitale Bolgar, puis Bilär
Langue(s) Protobulgare (en)
Religion Islam
Monnaie Som (en) et dinar
Histoire et événements
VIIe siècle Migrations des peuples Proto-Bulgares vers la vallée de la Volga
IXe siècle Unification politique, sous suzeraineté khazare
965 Indépendance de facto à la fin de l'empire khazar
1229 Première défaite face aux Mongols
1236 Intégration à l'empire mongol à la suite des raids de Batu

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Réuni jadis sous l'autorité d'un khan, son territoire est divisé de nos jours entre la république de Tatarstan et de Tchouvachie en Fédération de Russie.

Origine

Carte des peuples d'Asie centrale

Comme aucun des écrits proto-bulgares n'a été conservé, la plupart des informations sur la Bulgarie de la Volga proviennent de sources arabes, persanes, indiennes ou russes, même si certaines informations sont fournies par des fouilles archéologiques.

En raison de la toponymie, on pense que le territoire de la Bulgarie de la Volga fut principalement peuplé par des populations finno-ougriennes. Sous la pression des Khazars, les Proto-Bulgares septentrionaux partent de l'Ancienne Grande Bulgarie vers l'an 670, commandés par Kotrag, le fils de Koubrat. Ils remontent le Don puis la Volga et atteignent la région de l'Idel-Oural au VIIIe siècle, où ils devinrent peu à peu la population dominante, au siècle suivant. Simultanément, les Proto-Bulgares méridionaux se dirigent vers la région du bas-Danube où ils fondent la Bulgarie du Danube[2],[3].

Ibn Fadlān[4] parle en 922 du khan Almuch, fils de Selkey, comme du roi des Saqāliba, mot arabe dérivé du vocable grec désignant les Slaves. Le diplomate arabe emploie indifféremment l'expression « roi des Slaves » et « roi des Bulgares », peut-être par confusion avec la Bulgarie du Danube qui avait en effet une population principalement composée de Slaves méridionaux organisés en Sklavinies, dont elle a d'ailleurs adopté la langue, alors qu'entre le VIIe siècle et le XIIIe siècle, la Bulgarie de la Volga n'avait encore qu'un maigre peuplement slave, étant principalement turcophone et finno-ougrienne[5] ; quoi qu'il en soit, le nom Almukh et les autres noms cités par Ibn Fadlān sont tous d'origine typiquement turque[6].

D'une manière générale, les historiens estiment qu'Ibn Fadlān, par « Saqāliba », ne désignait pas tant une aire linguistique qu'une aire géographique située au nord-ouest de la steppe pontique (qui borde la mer Noire) et qui est le territoire où les Slaves sont le plus anciennement attestés[7].

La plupart des chercheurs conviennent que les Proto-Bulgares de la Volga restèrent vassaux des Khazars. L'unification politique de la région commença à la fin du IXe siècle, la capitale fut établie à Bolghar, à 160 km au sud de la ville moderne de Kazan. La plupart des chercheurs doutent, cependant, que l’État ait pu affirmer son indépendance avant l'anéantissement de l'empire des Khazars par Sviatoslav Ier en 965[3].

Apogée

L'établissement du khanat bulgare de la Volga, de religion tengriste, stabilisa la région ; sa situation commercialement favorable à la confluence de la Volga et de la Kama, aux confins de la forêt et de la steppe dans le sens latitudinal, de l'Europe et de l'Asie dans le sens longitudinal, et au carrefour de plusieurs routes commerciales, lui permit de prospérer et de rassembler une population bigarrée. On y trouvait des Proto-Bulgares, divers autres turcophones, des finno-ougriens (dont les Magyars qui ne tardèrent cependant pas à partir vers l'ouest), des Khazars, des Varègues, des Slaves orientaux, des Persans et des Arabes[3].

Ces deux derniers y introduisirent l'Islam qui devint religion d'État quand le khan Almuch s'y convertit, prenant le nom de Jaffar. Ibn Fadlân fut alors envoyé par le calife Abbasside Al-Muqtadir en 922-923 pour établir des relations et emmener avec lui des cadis et des professeurs de droit islamique aux Proto-Bulgares de la Volga, ainsi que pour aider à la construction d'un fort et d'une mosquée. Le tengrisme, le polythéisme slave, le christianisme orthodoxe et le judaïsme continuèrent cependant à être pratiqués. Ibn Fadlân a laissé une description détaillée du khanat, de la cour, des tribus, de la société et des pratiques religieuses[4],[8].

Outre la capitale Bolghar, les autres grandes villes des Proto-Bulgares de la Volga furent Bilär, Souar, Qaşan et Djükätaou. Les villes modernes de Kazan et d'Ielabouga furent créées en tant que forteresses aux frontières bulgares de la Volga[2].

Les principautés de Russie, à l'ouest de la Bulgarie de la Volga, montaient en puissance et constituèrent bientôt une menace militaire : en 969, le prince Svyatoslav mit Bolghar à sac. Au XIe siècle, le pays fut dévasté par plusieurs raids russes. Puis, au tournant des XIIe et XIIIe siècles, les souverains de Vladimir-Souzdal, notamment André Ier et Vsevolod III, pillèrent systématiquement les villes bulgares de la Volga. De par cette pression à l'ouest, les Proto-Bulgares furent obligés de déplacer leur capitale de Bolghar à Bilär[3].

Dissolution

En , après avoir battu les princes Rus' de Galitch, de Kiev, de Tchernikov, de Smolensk et les armées des Coumans à la bataille de la Kalka, une avant-garde de l'armée de Genghis Khan sous le commandement de Subötaï et Djebé, entre dans la Bulgarie de la Volga, près de Samara, mais est défaite à la bataille de Kernek, par des Proto-Bulgares, des Russes et des Mordves. Les Mongols reviennent en 1229, vainquent les Proto-Bulgares et occupent la vallée de l'Oural. Quelques années plus tard, en 1232, la cavalerie mongole occupe la partie sud de la Bachkirie et le sud de la Bulgarie de la Volga[2].

En 1236, les forces mongoles dirigées par le khan Batu assiègent et s'emparent de Bilär, Bolghar, Souar, Djükätaou. La Bulgarie de la Volga se fragmente en plusieurs principautés autonomes vassales de la Horde d'Or. Dans les années 1430, le khanat de Kazan émerge et devient la plus importante des principautés bulgares de la Volga, mais à ce moment, les deux aristocraties musulmanes et turcophones des boyards proto-bulgares et des mourzas tatars n'en font déjà plus qu'une, et ce khanat est en train de devenir un état tatar[9].

Lors de l'invasion mongole, la majorité de la population se regroupa le long de la rivière Kama et dans les zones adjacentes au nord, qui correspondent aux territoires modernes de la Tchouvachie et du Tatarstan. La zone autour de Kazan, occupée historiquement par les Maris quelques années auparavant, est devenue le nouveau centre de la culture proto-bulgare et aussi le noyau de la population des tatars. Les zones méridionales et steppiques de Bulgarie de la Volga sont occupées par un autre peuple cavalier, les Coumans ; l'économie agricole subit un déclin sévère. Au fil du temps, les villes de Bulgarie de la Volga ont été reconstruites et sont devenues des centres commerciaux et artisanaux de la Horde d'Or[2].

Notes et références

  1. Jane Burbank, « Souveraineté eurasienne : un régime, une proposition, un exemple », Histoire@Politique : politique, culture, société, Paris, Centre d'histoire de Sciences Po, no 27 (2015/3) : « Maurice Grimaud, un préfet dans le siècle », , 2e partie (« Vari@rticles »), p. 74-92 (ISSN 1954-3670, DOI 10.3917/hp.027.0074, résumé, lire en ligne [html], consulté le ), § 5 et 19 [consulté le 27 septembre 2017].
  2. Reza Bari(ev), (ru) Les Bulgares de la Volga, histoire et culture, ed. Agat, Saint Petersbourg 2005 - Волжские Булгары : история и культура
  3. Article (en), (ru) « La Bulgarie de la Volga » in Chuvash Encyclopedia, Chuvash Institute of Humanities 2016 -
  4. Richard Frye, (en) Ibn Fadlan's Journey to Russia, 2005, page 44
  5. Cf. Magyar Tudományos Akadémia, Acta ethnographica, vol. 2, , p. 118.
  6. Cf. András Róna-Tas, Hungarians and Europe in the early Middle Ages, Central European University Press, , p. 225.
  7. P. Bearman, Th. Bianquis, C.E. Bosworth, E. van Donzel et W.P. Heinrichs, Encyclopaedia of Islam., vol. 8, Leyde, Brill, , « al-Saḳāliba », p. 872–881
  8. Thomas Walker Arnold, (en) The preaching of Islam: a history of the propagation of the Muslim faith, p. 201-202
  9. Azade-Ayse Rolich, (en) The Volga Tatars, 1986, page 11

Voir aussi

Articles connexes

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