Bissu

Le terme Bissu, qui désignerait un « genre transcendant », s'applique, au sein des croyances des Bugis du Sulawesi du Sud en Indonésie, à un individu qui ne serait ni homme ni femme.

Le bissu Puang Matoa.

Description

Parfois intersexes, dans d'autres cas simplement travestis[1], seuls les bissu peuvent être les intermédiaires entre les hommes et les dieux. Selon la croyance de cette religion, les bissu étant les intermédiaires entre les deux mondes, ils se doivent de réunir les deux sexes opposés[2],[1]. C'est en particulier aux bissu que revient la charge de diriger les rites princiers.

Selon Sharyn Graham, chercheuse à l'université d'Australie-Occidentale à Perth, un bissu ne saurait être considéré comme un travesti, ne serait-ce que parce qu'il ne porte pas des vêtements du sexe opposé mais des costumes qui lui sont propres. Graham, qui rappelle que dans la croyance traditionnelle des Bugis, il n'y a pas deux mais cinq genres (féminin, gynandre, hermaphrodite ou transcendant (Bissu), androgyne et masculin), estime qu'un bissu devrait plutôt être considéré comme une combinaison de tous les sexes[3].

Les bissu sont reconnus comme un genre à part (en tant que méta-genre) par l'administration indonésienne[1].

L'existence des bissu dès le milieu du XVIe siècle est attestée par une lettre d'un voyageur portugais, Antonio de Paiva[4], datée de 1545[5].

Les bissu sont établis dans quatre régions : Pangkajene, Bone, Soppeng (en) et Wajo[6]. Ils sont peu nombreux : quatre ou cinq en 1976[4] ; sans doute moins de vingt en 2006[7]. Des bissu ont été assassinés lors de la rébellion de Kahar Muzakar dans les années 1960[7].

Les bissu sont des prêtres qui vivent parfois en confrérie très hiérarchisée[7]. Le Puang Matoa est au sommet de la hiérarchie ; le Puang Lolo, le deuxième rang ; les ana' bissu, le troisième rang[8].

Les bissus parlent un langage secret qui leur est propre[7] : le basa to ri langi (« langage des gens du ciel ») ou basa déwata (« langage des dieux »)[9]. Ils sont les détenteurs de récits ésotériques qui sont réservés aux seuls initiés[7].

En 2006, un groupe de bissu est venu à Paris pour exécuter une cérémonie, pour la première fois hors d'Indonésie[10],[11].

Notes et références

  1. Elodie Palasse-Leroux, « Un troisième genre? L'Indonésie, plus grand pays musulman, en reconnaît 5 », sur Slate, (consulté le ).
  2. Hamonic 1975.
  3. Graham 2001.
  4. Hamonic 1980, p. 307.
  5. Hamonic 1975, p. 124.
  6. Umar 2008, p. 12.
  7. Hamonic 2006, p. 10.
  8. Umar 2008, p. 14.
  9. Hamonic 1980, p. 308.
  10. Hamonic 2006, p. 9.
  11. Hamonic 2006, p. 12.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Sharyn Graham, « Sulawesi's fifth gender », Inside Indonesia, no 66, (lire en ligne, consulté le ).
  • (en) Sharyn Graham, « Sex, gender, and priests », The Newsletter of the International Institute for Asian Studies, no 29, , p. 27 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  • Gilbert Hamonic, « Travestissement et bisexualité chez les “Bissu” du pays Bugis », Archipel, vol. 10, , p. 121-134 (DOI 10.3406/arch.1975.1244, lire en ligne [fac-similé], consulté le ).
  • Gilbert Hamonic, « Du “langage des Dieux” au langage de l'Histoire : quelques remarques à propos de l'historiographie bugis de Célèbes-sud », Archipel, vol. 20, , p. 303-316 (DOI 10.3406/arch.1980.1609, lire en ligne [fac-similé], consulté le ).
  • Gilbert Hamonic, « Un corps oublié ? : à propos d'un cérémonial bissu présenté à Paris (2006) », Archipel, vol. 72, , p. 9-14 (DOI 10.3406/arch.2006.4024, lire en ligne [fac-similé], consulté le ).
  • (en) Umar Umar, Dancing with spirits : negotiating Bissu subjectivity through Adat (thèse soutenue en 2008 à l'université du Colorado à Boulder), , VIII-100 p. (ISBN 0-549-56255-9, OCLC 432292054, lire en ligne).

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