Biomasse (énergie)

Dans le domaine de l'énergie, la biomasse est la matière organique d'origine végétale (microalgues incluses), animale, bactérienne ou fongique (champignons), utilisable comme source d'énergie (bioénergies). Cette énergie peut en être extraite par combustion directe (ex. : bois énergie), ou par combustion après un processus de transformation de la matière première, par exemple la méthanisation (biogaz, ou sa version épurée le biométhane) ou d'autres transformations chimiques (dont la pyrolyse, la carbonisation hydrothermale et les méthodes de production de biocarburants ou « agrocarburants »). Trois modes de valorisations de la biomasse (co)existent : thermique, chimique et biochimique.

Pour l’article homonyme, voir Biomasse (écologie).

Unité de valorisation énergétique de la biomasse (Allemagne).
En Suède, pays froid, peu peuplé et très boisé, la biomasse est devenue la première source de chaleur urbaine (Source : Agence suédoise de l'énergie).

La biomasse intéresse à nouveau les pays riches, confrontés au changement climatique et à la perspective d'une crise des ressources en hydrocarbures fossiles ou uranium.

Sous certaines conditions, elle répond à des enjeux de développement durable et d'économie circulaire ; en se substituant aux énergies fossiles pour réduire les émissions globales de gaz à effet de serre, en restaurant aussi parfois certains puits de carbone (semi-naturels dans le cas des boisements et haies exploités). En quelques décennies des filières nouvelles sont apparues : agrocarburants, granulés de bois, méthanisation industrielle, créant des tensions sur certaines ressources, avec de nouveaux risques de surexploitation de la ressource et de remplacement de cultures vivrières par des cultures énergétiques. En France, une stratégie nationale de mobilisation de la biomasse (2018) vise à augmenter la quantité de biomasse collectée, en créant le moins possible d'effets collatéraux négatifs sur la biodiversité, les paysages et d'autres filières dépendantes de la même ressource.

En 2018, selon l'Agence internationale de l'énergie, la biomasse fournissait 1 327 Mtep d'énergie, soit 9,3 % environ de l'énergie primaire consommée dans le monde, 518,5 TWh d'électricité, soit 1,9 % de la production mondiale d'électricité, et 4 % environ des carburants routiers. La biomasse fournit 80 % environ du total des énergies renouvelables produites dans l'UE, et 8 % de l'énergie consommée. Selon un rapport de la Commission européenne, la bioénergie pourrait couvrir jusqu'à 13 % de la demande énergétique de l'UE.

Définition en Europe et en France

En Europe, une directive de 2001 définit la biomasse comme « la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l'agriculture (comprenant les substances végétales et animales), de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux (...) la définition de la biomasse utilisée dans la présente directive ne préjuge pas de l'usage d'une définition différente dans les législations nationales, à des fins autres que celles fixées par la présente directive »[1].

En 2009, il s'agit de « la fraction biodégradable des produits, des déchets et des résidus d'origine biologique provenant de l'agriculture (y compris les substances végétales et animales), de la sylviculture et des industries connexes, y compris la pêche et l'aquaculture, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et municipaux ».

En 2010, cette définition est précisée par une autre directive[2] qui dit que cette biomasse comprend « les produits composés d'une matière végétale agricole ou forestière susceptible d'être employée comme combustible en vue d'utiliser son contenu énergétique ; les déchets ci-après : déchets végétaux agricoles et forestiers ; déchets végétaux provenant du secteur industriel de la transformation alimentaire, si la chaleur produite est valorisée ; déchets végétaux fibreux issus de la production de pâte vierge et de la production de papier à partir de pâte, s'ils sont co-incinérés sur le lieu de production et si la chaleur produite est valorisée ; déchets de liège ; déchets de bois, à l'exception des déchets de bois qui sont susceptibles de contenir des composés organiques halogénés ou des métaux lourds à la suite d'un traitement avec des conservateurs du bois ou du placement d'un revêtement, y compris notamment les déchets de bois de ce type provenant de déchets de construction ou de démolition ».

En droit français la biomasse énergie est définie comme « la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l'agriculture, y compris les substances végétales et animales issues de la terre et de la mer, de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et ménagers »[3].

Une définition (sans valeur officielle) donnée en 2013 par un rapport parlementaire (Assemblée nationale) sur la biomasse au service du développement durable était « toutes les matières organiques qui peuvent dégager de l'énergie par combustion directe ou à la suite d'une étape de transformation. La biomasse représente donc aussi bien la fraction biodégradable des déchets industriels ou agricoles que le bois issu directement de la forêt »[4].

Typologies

Culture expérimentale de sorgho sucré [Sorgo commun (L.) Moench] au Royaume-Uni pour le « Réseau européen Sorgho » et l'université de Rochester. Adaptée au stress hydrique et riche en sucre, il a un potentiel pour le bioraffinage (bioéthanol...)[5],[6]). Les impacts de sa culture sur les sols et l'eau sont étudiés (dans diverses conditions) en Europe (du sud principalement).

La biomasse valorisée en énergie peut être de nature sauvage et/ou cultivée (CIVEs, agrocarburants, agrocombustibles[7]), et éventuellement provenir de gisements dits « fatals » (ex. : déchets industriels, boues d'épuration, etc.).

Selon son origine, sa production, son transport et sa combustion ont des coûts environnementaux plus ou moins élevés, mais son utilisation pour produire chaleur et électricité peut créer ou entretenir des emplois locaux et pérennes, de l’amont (approvisionnement) à l'aval de la filière (exploitation énergétique). Plus facile à stocker que les énergies intermittentes la biomasse-énergie contribue à sécuriser le réseau électrique (selon la Programmation pluriannuelle de l'énergie[8] elle reposera en France sur plusieurs scénarios de besoins énergétiques, et pour la 2de période « fixera des objectifs comprenant des options haute et basse, pour tenir compte des incertitudes »[8]), et à condition de disposer de stocks suffisants, car sa production reste très saisonnière et dépendantes de contraintes météorologiques).

Turbine à vapeur à biomasse de MW de puissance électrique. Entreprise Blohm & Voss, Allemagne.

Filières de production

Les principales filières sont structurées en deux catégories (bois-énergie/méthanisation) et par les origines de la biomasse :

État des lieux

Dans le monde

La biomasse énergie est utilisée depuis la préhistoire (maîtrise du feu). Elle reste la première énergie renouvelable utilisée dans le monde, pour le chauffage et la cuisson des plats de cuisine, mais essentiellement dans les pays peu industrialisés[9].

Selon l'Agence internationale de l'énergie, en 2018, « biomasse et déchets » ont représenté 1 327 Mtep (millions de tonnes d'équivalent pétrole), soit 9,3 % de la consommation mondiale d'énergie primaire. Sur ce total, 10,2 % sont utilisés pour la production d'électricité, 4,9 % pour la production combinée d'électricité et de chaleur (cogénération), 0,9 % pour les chaufferies des réseaux de chaleur et 76,3 % pour la consommation finale directe, en particulier 50,8 % par le secteur résidentiel (chauffage individuel, cuisine), 15,4 % par l'industrie et 6,8 % par les transports (agrocarburants)[10].

Part de la biomasse et des déchets dans la consommation mondiale d'énergie primaire (Mtep)
Source 1990 part % 2000 part % 2010 part % 2015 2018 part %
2018
var.
2018/1990
Inde133,543,7 %148,833,8 %178,325,7 %179,7185,120,1 %+39 %
Nigeria52,478,9 %69,781,0 %97,881,5 %111,5120,075,0 %+129 %
Chine200,522,7 %198,217,5 %133,35,3 %113,8116,83,6 %−42 %
États-Unis62,33,3 %73,23,2 %89,34,0 %101,4107,44,8 %+72 %
Brésil47,834,1 %46,624,9 %81,630,7 %86,590,031,4 %+88 %
Éthiopie16,994,9 %23,495,0 %31,093,0 %35,438,188,1 %+125 %
Pakistan18,843,6 %24,037,5 %30,435,6 %34,036,432,7 %+94 %
Indonésie43,544,1 %50,032,1 %46,022,8 %37,233,514,5 %-23 %
Thaïlande14,935,4 %14,620,2 %22,619,2 %25,325,718,9 %+72 %
...
France11,04,9 %10,84,3 %16,16,1 %16,517,757,2 %+62 %
Total904,210,3 %1 022,210,2 %1 221,89,5 %1 271,21 327,19,3 %+47 %
Source des données : Agence internationale de l'énergie[10]
part % = part de la biomasse dans la consommation intérieure d'énergie primaire.

La biomasse (hors déchets) assure 1,9 % de la production mondiale d'électricité en 2018. Avec 17,5 % du total mondial, la Chine est le premier producteur d'électricité à partir de la biomasse, devant les États-Unis (11,5 %), le Brésil (10,4 %), l'Allemagne (8,6 %) et l'Inde (8,5 %). La part de la biomasse dans la production d'électricité reste modeste : 9,6 % au Royaume-Uni, 1,3 % aux États-Unis, 1,3 % en Chine, 1,1 % en France[11].

Production d'électricité à partir de biomasse (TWh)
Pays 1990 2000 2010 2015 2016 2017 2018 % 2018 % mix pays
Chine-2,424,852,764,779,590,617,5 %1,3 %
États-Unis71,047,852,461,660,560,759,511,5 %1,3 %
Brésil3,97,831,549,450,952,553,910,4 %9,0 %
Allemagne0,42,529,244,645,045,044,78,6 %7,0 %
Inde-1,314,225,441,942,043,98,5 %2,8 %
Royaume-Uni0,53,110,727,428,029,131,96,2 %9,6 %
Japon8,79,815,218,615,120,021,54,1 %2,0 %
Italie0,011,07,417,117,117,016,83,2 %5,8 %
...
France1,21,42,54,55,45,66,11,2 %1,1 %
Monde105,4113,8277,7415,6460,2485,0518,5100 %1,9 %
source : Agence internationale de l'énergie[11]
% mix pays = part de la biomasse dans la production d'électricité du pays.

Selon l'Agence internationale de l'énergie, en 2060, la biomasse devrait couvrir près de 17 % de la consommation d'énergie finale contre 4,5 % en 2015. En 2016, les agrocarburants couvraient environ 4 % des besoins d'énergie du transport routier[12].

En Europe

Avec 60 % en 2013, la biomasse-énergie est la première source d'énergie renouvelable, devant l'énergie hydraulique (17 %)[13].

La Commission européenne a estimé que (si le changement climatique n'affecte pas négativement cette ressource) la bioénergie pourrait couvrir jusqu'à environ 13 % de la demande énergétique de l'UE (telle qu'elle était en 2018)[14].

Selon une étude du cabinet conseil Material Economics publiée en juin 2021, l'Union européenne mise beaucoup trop sur ses forêts et les cultures végétales pour produire de l'énergie verte et atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour atteindre les objectifs fixés par Bruxelles, il faudrait consacrer entre 350 000 et 400 000 km2 supplémentaires de terres à la production de biomasse d'origine végétale par des cultures énergétiques, soit une superficie équivalente à l'Allemagne tout entière ; il faudrait en plus prélever environ 340 millions de tonnes de bois par an dans les forêts, soit plus des trois-quarts de la croissance annuelle de tous les massifs européens. La biomasse est bien plus utile pour des usages matériels (construction, textile et chimie) que lorsqu'elle est brûlée ; l'utilisation de l'énergie tirée de la biomasse doit être « extrêmement sélective » et « concentrée sur quelques niches » : chauffage industriel, aviation et transport maritime[15].

Il existe en Europe :

  • une association European Biomass Association (AEBIOM) et
  • depuis 1996 une Association européenne des industries de la biomasse (European Biomass Industry Association, EUBIA), qui représente les forces du marché, les fournisseurs de technologie et les centres de connaissances, du secteur de la biomasse[16].
Ventilation de la production économique de l'UE-28 par groupe de cultures, exprimée en Mt de matière sèche par an. Valeurs moyennes sur la période de référence 2006-2015. Les cultures énergétiques sont le carré rouge en bas à droite.
Ventilation de la production économique de l'UE-28 ; culture par culture, exprimée en Mt de matière sèche par an. Valeurs moyennes sur la période de référence 2006-2015 (cliquer pour agrandir).

En France

Au sein du secteur en développement des énergies renouvelables, en France entre 2005 et 2013, la biomasse énergie est le secteur qui a grandi le plus vite. Il est encore encouragé par la PPE et par un projet de stratégie nationale de mobilisation de la biomasse[17].

Dans les années 2000-2010, la biomasse reste la première source d'énergie renouvelable (54,2 % en 2014), devant l'énergie hydraulique (24,3 %)[18] et elle compte parmi les secteurs en plein développement (cf. schéma ci-contre), au risque de voir apparaître des tensions sur la ressource.

En 2009 elle a fourni environ 9,6 Mtep (hors biocarburants et combustion de déchets urbains), essentiellement sous forme de bois énergie (9,1 Mtep en bois énergie dont 6,6 Mtep en bois « domestique »), le biogaz ne comptant que pour 0,5 Mtep environ.

Pour mieux organiser cette filière biomasse-énergie et limiter les risques de surexploitation ou de détournement de ressources, en application de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 une stratégie nationale de mobilisation de la biomasse a été lancée en 2016-2017, qui doit être déclinée dans chaque région, avec l'État, par un Schéma régional biomasse (SRB)[19], pour notamment contribuer à porter à 32 % la part des énergies renouvelables et de récupération dans la consommation d'énergie finale.

Limites et conditions de durabilité

L'énergie issue de la biomasse n'est renouvelable et durable qu'à certaines conditions :

À ces conditions, elle présente des avantages pour le développement local (ex : emplois non délocalisables pour les usages en filières locales, valorisation locale de déchets, etc.).

Mais elle peut aussi être polluante (CO, fumées, goudrons) si mal utilisée ou si la biomasse utilisée est polluée par des métaux lourds, métalloïdes toxiques, radionucléides, etc. (sachant que les ressources fossiles, en particulier profondes, sont également naturellement contaminées par des métaux (mercure notamment[20]) et radionucléides, souvent plus que le bois). La biomasse énergie est notamment la première source de pollution de l'air par les particules fines en France. La production de bois peut aussi entrer en concurrence avec d'autres activités pour l'usage des ressources (terres arables, eau, etc.).

Comme dans le cas des ressources fossiles, il s'agit d'une forme de stockage de l'énergie solaire par l'intermédiaire du carbone, provenant originellement du CO2 capté par les plantes ou le phytoplancton.
En brûlant, elle libère ce CO2, comme le charbon, le gaz ou le pétrole, mais avec une différence importante : ce carbone a récemment été extrait de l'atmosphère via la photosynthèse, et il peut - théoriquement - être à nouveau capté par des plantes, alors que ce processus a eu lieu il y a des millions d'années pour les ressources fossiles. Les plantes et algues marines ne suffisent cependant plus à absorber le carbone issu des hydrocarbures fossiles. Dans l'absolu, le bilan quantitatif CO2 d'une installation est nul quand toute l'énergie qu'il a fallu dépenser pour extraire du combustible de la biomasse provient elle aussi de la biomasse. En régime industriel établi, il est possible d'utiliser de la biomasse pour le fonctionnement de l'installation, en veillant à ne pas libérer d'autres gaz à effet de serre, comme le méthane (CH4) notamment qui a un pouvoir réchauffant environ 21 fois plus important que le CO2 à court terme, mais qui disparaît plus vite que celui-ci. Une fuite conséquente dans une installation de méthanisation rendrait son bilan GES très négatif.

Quatre chercheurs américains du National Center for Atmospheric Research, et de la Société Max-Planck, rappellent en 1979 dans la revue Nature que la combustion de biomasse est rarement neutre : elle est une source importante de CO2, et d'autres gaz polluants (plus ou moins selon la quantité et le type de biomasse, et selon le type de combustion) : CO, N2O, NO, CH3Cl et COS[21].

La culture et la combustion d'une quantité excessive de biomasse peuvent à la fois affecter la biodiversité, les émissions de gaz à effet de serre et la couche d'ozone[22] et émettre de nombreux autres polluants potentiels si le bois ou la biomasse brûlée étaient pollués par exemple par du sel, des pesticides, des métaux ou métalloïdes. Brûler de la biomasse (ou le bio gaz ou biocarburant qui en est extrait) peut « largement contribuer aux budgets de plusieurs gaz importants dans la chimie atmosphérique. Dans plusieurs cas, l’émission est comparable à la source technologique. La plupart des incendies ont lieu sous les tropiques à la saison sèche et sont causés par les activités de l'homme »[21].

Histoire

C'est par le feu que l'Homme a d'abord utilisé de l'énergie de la biomasse, pour cuire et se chauffer ou s'éclairer (torche, lampe à huile) depuis plusieurs dizaines de milliers d'années.

Depuis le XVIIIe siècle, des machines à vapeur et des aérostats sont alimentés par du bois. À la fin du XIXe siècle, Rudolf Diesel, ingénieur thermicien, conçoit un moteur fonctionnant à l'huile végétale (et non au fioul) pour remplacer la machine à vapeur.

De récentes crises ont relancé l'intérêt pour la biomasse ; des gazogènes gazéifiant du bois ont équipé de nombreux véhicules quand le pétrole a manqué durant les deux guerres mondiales. Les deux dernières grandes crises pétrolières ont relancé l'usage du bois de chauffage, voire de la tourbe (en Irlande par exemple). Depuis le sommet de la terre de Rio, l'objectif de développement durable, puis avec Kyoto celui de lutter contre le changement climatique entretiennent ou renouvellent cet intérêt. En 2015, selon la FAO, 53 % du bois coupé dans le monde l'était pour le chauffage et la cuisson. De manière plus détaillée, ce taux était de 8 % en Amérique du Nord, 21 % en Europe, 53 % en Amérique du Sud, 77 % en Asie et 90 % en Afrique.

La biomasse est parfois utilisée en « co-combustion » (ex. : déchets d'huileries mélangés à du charbon bitumineux)[23].

Prospective : l'INRA a annoncé en octobre 2014 avoir mis au point et breveté une « voie sèche » de préparation par fractionnement de la biomasse ligno-cellulosique de type paille de blé et paille de riz[24]. La matière est finement broyée puis un tri électrostatique la prépare pour la rendre plus accessible aux enzymes ou pour la valoriser en sous forme de lignine-hémicelluloses et/ou de minéraux. La méthode est applicable au bois/ligneux et aux sous-produits agricoles, aux cultures ligno-cellulosiques dédiée, qui pourrait servir à produire des agrocarburants, des molécules et matériaux biosourcés. Cette invention a été présentée dans deux revues scientifiques et techniques (Biotechnology for Biofuels et Green Chemistry)[24]. Cette méthode pourrait réduire les prétraitements chimiques polluants, consommateurs d'eau et générateurs d'effluents[24]. L'exportation de ces pailles prive cependant le sol agricole d'une protection naturelle et d'une source de carbone.

Constituants et mode de valorisation de la biomasse

On en distingue trois principaux, auxquels correspondent des procédés de valorisation spécifiques :

Biomasse lignocellulosique

Briquettes de paille.

La biomasse lignocellulosique, cellulose et lignine, est constituée par :

La valorisation se fait plutôt par des procédés par voie sèche, dits conversions thermochimiques.

Biomasse à glucide

La biomasse à glucide, riche en substance glucidique facilement hydrolysable :

La valorisation se fait plutôt par fermentation ou par distillation dits conversions biologiques.

Biomasse oléagineuse

La biomasse oléagineuse, riche en lipides :

Elle peut être utilisée comme carburant. Il y a deux familles de biocarburants : les esters d'huiles végétales (colza), et l'éthanol, produit à partir de blé et de betterave, incorporable dans le super sans plomb sous forme d'éther éthyle tertiobutyle (ETBE, voir bioéthanol).

Valorisation de la biomasse

Cas du bois

Bois sous forme de bûches pour chauffage. Le bois énergie est un type de bioénergie utilisant la biomasse.

L'énergie chimique du bois est libérée par combustion sous forme de chaleur utilisée pour le chauffage ou pour produire de l'électricité. Le bois de chauffage est utilisé à large échelle. La pyrolyse et la gazéification sont plus rares, et la carbonisation hydrothermale l'est encore plus. Les usines de pâte à papier fournissent une matière première pouvant produire en cogénération simultanément chaleur et électricité.

D'autres bioénergies découlent directement des déchets organiques, avec par exemple des déchets utilisés en cimenteries comme combustibles solides de substitution (CSS) pour économiser le pétrole.

Menaces et inconvénients

  • Les coûts et impacts du transport pour amener le bois là où la ressource manque,
  • Les risques de surexploitation et déforestation induites ou d'accaparement des terres pour y délocaliser une production de biocarburant pour les pays riches[25] (en Afrique, en 2010, 4,5 millions d’hectares de terres, l'équivalente du Danemark étaient en cours d'acquisition par des investisseurs étrangers pour y cultiver des agrocarburants, au détriment des cultures vivrières locales ou de la forêt[26].
  • Ce problème concerne aussi la combustion du bois dans les centrales électriques ; ainsi, la conversion de la centrale électrique de Drax (Royaume-Uni) à la biomasse est révélatrice de ce problème : son approvisionnement nécessite chaque année 13 millions de tonnes de bois soit, à elle seule, 120 % de la production totale de bois du Royaume-Uni. En quelques années, le Royaume-Uni a ainsi massivement augmenté ses importations de bois, notamment en provenance des États-Unis, alimentant une forte destruction des forêts naturelles de la côte Est[27],[28].
  • Les problèmes de pollution atmosphérique induits par la combustion mal maîtrisée du bois, combustible solide (concerne notamment les anciens systèmes de chauffage non automatiques, particulièrement en zone d'habitat rapproché). L'utilisation de bois ou de charbon de bois dans des foyers mal conçus ou mal ventilés peut entraîner des problèmes de santé pour les habitants et riverains.
    « Dans le contexte international de forte dépendance aux énergies quelles que soient leurs origines, comme le charbon, le pétrole et le nucléaire, l'énergie biomasse prend une place de plus en plus importante […] Bien que les énergies dites vertes soient une excellente solution parce qu’elles sont neutres dans le cycle du carbone, la biomasse engendre des problèmes d’émissions de particules. Les bioénergies sont donc vertes en CO2 mais peuvent être polluantes en dégradant la qualité de l’air »[29].
  • Le bois étant plus émetteur d'oxydes d'azote (NOx) que les combustibles fossiles de type gaz naturel et fioul, le développement de la biomasse énergie, dans le cadre du développement des énergies renouvelables, « joue un rôle prépondérant par rapport aux autres énergies dans l’évolution des émissions de NOx »[30].

Stratégies de réduction de ces inconvénients

Plusieurs solutions évitant la combustion directe sont :

  • la torréfaction de la biomasse. La biomasse torréfiée (aussi dénommée « Biocoal » ou « Biochar ») est allégée et brûle mieux et plus proprement. Elle peut servir à la production d’électricité et de chaleur (cogénération le cas échéant), au chauffage central...). Ce nouveau combustible offre de nouvelles perspectives aux énergies renouvelables. Plus précisément, en torréfiant la biomasse (bois par exemple) le PCI passe de 10−11 GJ/m3 à 18−20 GJ/m3 ce qui conduit à une économie de près de 50 % sur les coûts de transport. Une technologie émergente, encore plus performante en matière de bilan carbone et d'efficience énergétique est la carbonisation hydrothermale.
  • la conversion du bois en gaz naturel de synthèse. Si les surfaces dévolues aux forêts restent constantes, proches des lieux d'utilisation, et si la quantité prélevée correspond chaque année à la croissance annuelle des arbres, alors le bois-énergie ne contribue pas à la déforestation et a peu d'impact sur l'effet de serre (Cf. le bilan carbone du bois énergie).
  • un usage accru de combustibles à base de lignines (plutôt que de cellulose), mais leur valeur énergétique est très variable. Le miscanthus (ou herbe à éléphant) fait par exemple l'objet d'études, dont au Royaume-Uni, en Belgique[31] et aux États-Unis. Il a l'avantage d'un très bon rendement énergétique (proche de celui du charbon à poids égal) : proche de 10 kWh par mètre carré et par an.

Biogaz

On appelle biogaz les effluents gazeux, méthane essentiellement, issus de la fermentation de matières organiques contenues dans les décharges, les stations d'épuration des eaux ou des digesteurs construits à cet effet. Le méthane est un puissant gaz à effet de serre et sa captation est de toute façon hautement souhaitable. Il peut être considéré comme une ressource énergétique[32], souvent via sa combustion pour produire de la vapeur et de l'électricité ; son utilisation directe dans des moteurs à gaz pauvres peut aussi être envisagée. Le biogaz est un gaz combustible, composé en moyenne de méthane (CH4) à 60 % et de CO2 à 40 %.

Sous forme de carburant : les biocarburants

Il y a deux familles de biocarburants :

  • l'huile végétale brute, et les esters d'huiles végétales (colza...) ;
  • l'éthanol, produit à partir de blé et de betterave, incorporable dans le super sans plomb sous forme d'Ethyl Tertio Butyl Ether (ETBE, voir bioéthanol).

Comparaison des usages

Risques

Évaluer les différentes formes de valorisation nécessite de comparer les usages, ce qui suppose de mettre en place des méthodes d'évaluation et de traçabilité des filières intégrées.

La mise en place de la traçabilité en agroalimentaire fait l'objet de réglementations (notamment dans l'Union européenne). Elle est encouragée par des normes (ISO 22000).

La traçabilité permet également de réduire les risques, donc les coûts indirects pour la collectivité.

Gains en valeur carbone

La valeur de la tonne de carbone en 2006 est de l'ordre de grandeur de 100 euros. La valeur marchande de la tonne d'équivalent CO2 est très volatile : elle dépend (entre autres) du prix du pétrole, des décisions politiques de Bruxelles (nombre de quotas, politique énergétique à long terme de l'UE) et de la spéculation. Au 13 mars 2008, la tonne d'équivalent CO2 valait 22 euros. En 2014, elle vaut environ 5 euros.

Voir : Bilan carbone

Comparaison de filières

Pour fiabiliser ces évaluations, il est souhaitable de :

Soutien à cette filière énergétique

Dans le monde, de nombreux programmes soutiennent ou ont soutenu les filières biomasse énergie.

En Europe, l'UE, pour limiter le dérèglement climatique, a promu la biomasse comme source d'énergie renouvelable. La directive sur les énergies renouvelables (2009)[33] impose aux États membres qu'au moins 20 % du total de leur consommation d'énergie soit d'origine renouvelable, avant 2020. Depuis 2009, les fonds européens affectés à la biomasse-énergie ont plus que doublé (passant de 1,6 milliard d'euros pour 2007-2013 à 3,4 milliards pour 2014-2020[34]. Cette croissance, note la cour des comptes européenne (en 2018)[35], peut entraîner une croissance des taux de certains polluants de l'air émis. L'Agence européenne pour l'environnement a aussi noté que les politiques climatiques peuvent contredire celles en faveur de la qualité de l'air, si la biomasse est brûlée dans des installations qui polluent l'air, avec des effets nocifs sur la santé humaine[36].

En France, un plan biocarburant soutient depuis les années 2000-2010 les agrocarburants (biogazole + bioéthanol surtout basés sur le colza, le tournesol, la betterave et les céréales) et la filière bois. Les agrocarburant de seconde génération et biocarburant de 3e génération peinent cependant encore à décoller : voie sèche (thermochimique BTL) ou humide (éthanol). Une stratégie nationale de mobilisation de la biomasse (publiée le 26 février 2018)[37] vise à augmenter la quantité de biomasse collectée, en générant le moins d'effets collatéraux négatifs possibles sur la biodiversité, les paysages et d'autres filières dépendantes de la même ressource[38].

Notes et références

  1. Directive 2001/77/CE du 27 septembre 2001, relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité relative aux déchets (voir aussi art. 2 de la directive 2001/80/CE)
  2. directive no 2010/75 du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles.
  3. L'article 29 de la loi 2005-781 de programmation fixant les orientations de la politique énergétique dite « POPE », du 13 juillet 2005 ; « Article L211-2 du Code de l'énergie ».
  4. Rapport d'information déposé en application de l'article 145 du Règlement par la Mission d'information sur la biomasse au service du développement durable pour la Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, présenté par François Michel Lambert et Sophie Rohfritsch, voir p 9/117.
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  27. Six raisons pour lesquelles reconvertir les centrales à charbon d’EDF en centrales à biomasse est une mauvaise idée, Amis de la Terre, 12 octobre 2018.
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  32. voir l'article Ressource naturelle et l'article Ressources et consommation énergétiques mondiales
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  36. Air quality in Europe — 2016 report (p. 22).
  37. Arrêté du 26 février 2018 portant publication de la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse
  38. Biomasse énergie, Ministère de la Transition écologique et solidaire, 26 mars 2018.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

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