Bernard Squarcini

Bernard Squarcini, né le à Rabat (Maroc), est un haut fonctionnaire français, ancien commissaire de police et préfet, consultant indépendant pour le groupe LVMH.

Il occupe les fonctions de directeur central du renseignement intérieur du au . Bernard Squarcini a été notamment chargé, au cours de sa carrière, du renseignement antiterroriste en Corse, au Pays basque et sur l'islam radical.

Biographie

Formation et débuts

Bernard Squarcini est le cousin de Michel Scarbonchi[1]. Après avoir passé sa jeunesse à Digne, Bernard Squarcini fait ses études supérieures à l'université Aix-Marseille III, où il obtient un diplôme en criminologie en 1976 et une maîtrise en droit public en 1977[2].

En 1983, il est adjoint au directeur régional des Renseignements généraux (RG) en Corse[3].

En 1988, il est directeur départemental des RG des Pyrénées-Atlantiques.

En 1989, il est chef de la division « enquêtes et recherches » à la Direction centrale des Renseignements généraux (DCRG).

En 1993, il devient sous-directeur des recherches à la DCRG, tout en étant parallèlement, à partir de 1994, directeur central adjoint des RG sous la direction d'Yves Bertrand.

En 1999, il devient le plus jeune inspecteur général de la police nationale[4], poste qu'il occupe jusqu'en 2004.

Arrestation d'Yvan Colonna

Bernard Squarcini fut notamment l'un des artisans de l'arrestation en 2003 d'Yvan Colonna, l'assassin présumé du préfet Claude Érignac, alors que Nicolas Sarkozy était ministre de l'Intérieur.

En , d'après certaines sources, le ministre de l'Intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, aurait souhaité nommer Bernard Squarcini au poste de directeur central des Renseignements généraux, mais Jacques Chirac préféra finalement nommer le préfet Pascal Mailhos.

En , il a été nommé préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur[5]. Il succéda à ce poste à Roger Marion, nommé préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais.

Directeur de la DST puis de la DCRI

Le , Bernard Squarcini a été nommé en Conseil des ministres Directeur de la surveillance du territoire (DST), en remplacement de Pierre de Bousquet de Florian[6],[7].

Le [8], il est nommé à la tête de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) née de la fusion, effective au , de la DST et de la DCRG.

Le , il est remplacé à ce poste par son ancien adjoint Patrick Calvar et devient préfet hors cadre[9].

Il quitte la police le et créé son cabinet Kyrnos Conseil. Il est aussi embauché par le cabinet d'intelligence économique Arcanum en juin 2013.

En , Bernard Squarcini publie avec Étienne Pellot un ouvrage intitulé Renseignements français : nouveaux enjeux, dans lequel il expose sa vision d'une feuille de route pour réformer les services de renseignement français[10] et créer une loi cadre pour l'activité du renseignement, ainsi que des infractions spécifiques afin de lutter contre l'islam radical[11].

Dans le secteur privé

Depuis 2013, il exerce les fonctions de consultant indépendant au sein de la société Kyrnos Conseil qu'il a créée[12]. Il a comme client principal le groupe LVMH, pour lequel il est officiellement chargé de la lutte contre l'importation de produits de luxe de contrefaçon[13],[14].

Il est également associé au cabinet de consultants Arcanum Global[3].

Affaires

Affaire Clearstream 2

Cité dans les listings de l'affaire Clearstream 2, Bernard Squarcini s'est constitué partie civile en . Parce que son nom figure sur le faux listing aux côtés de la chanteuse ajaccienne Alizée et de Laetitia Casta, il évoque à la barre un « racisme anticorse » au sommet de l'État[15].

Affaire Woerth-Bettencourt

Le , alors qu'il est toujours directeur de la DCRI, Bernard Squarcini est mis en examen par la juge Sylvia Zimmermann pour « atteinte au secret des correspondances », « collecte illicite de données » et « recel du secret professionnel », dans le cadre de l'« affaire des fadettes »[16].

Le , la cour d'appel de Paris annule deux des trois chefs de mise en examen de Bernard Squarcini. Il reste mis en examen pour « collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite »[17]. En , il est renvoyé en correctionnelle pour ce dernier chef d'accusation[18].

Le , il est condamné à 8 000 euros d'amende. Il ne fait pas appel du jugement[19].

Rapports avec LVMH

En 2012, peu après son départ de la direction de la DCRI, Bernard Squarcini demande à la section L2 de mettre en place un important dispositif de surveillance, destiné à identifier l'auteur d'un chantage visant Bernard Arnault, le propriétaire du groupe LVMH. Un salarié du groupe de luxe sera finalement identifié et licencié[20]. Le Canard Enchaîné fait le rapprochement entre cette opération clandestine aux frais de l'État[20] et le généreux contrat signé par LVMH avec Bernard Squarcini dès l'arrivée de la gauche au pouvoir[21].

En outre, l'enquête judiciaire ayant conduit à sa mise en examen révèle que peu de temps après son embauche par LVMH, Squarcini a fait suivre à sa hiérarchie une synthèse de la plainte déposée contre LVMH par Hermès, après l'avoir obtenue de Christian Flaesch, alors directeur de la police judiciaire[22].

Entre 2015 et 2016, il aurait supervisé l'espionnage de François Ruffin et des journalistes de Fakir pour le compte de LVMH[23].

En , la justice a élargi son enquête à des faits de "vol" après une plainte du député de la Somme François Ruffin et du journal Fakir[24]. Une enquête de police indique en 2021 que Bernard Squarcini a continué après son départ de la DCRI à solliciter ses services pour son intérêt personnel, notamment pour espionner François Ruffin et le journal Fakir pour le compte de la société LVMH[25].

Mise en examen multiple

Le , après deux jours de garde à vue[26],[27], Squarcini est mis en examen pour de nombreux chefs d'accusation tels que « violation du secret de l'enquête », « trafic d'influence », « détournement de fonds publics », « compromission », « entrave aux investigations », « faux en écriture publique et usage », « recel de violation du secret de l'instruction », « atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique »[28].

Un contrôle judiciaire strict lui interdit de paraître dans les locaux de la DGSI à Levallois-Perret, d’entrer en contact avec les autres protagonistes de l’affaire et avec tout fonctionnaire de la direction centrale de la police judiciaire et des services de renseignement. Ce contrôle l'empêche jusqu’à nouvel ordre d'exercer une activité privée de conseil en sécurité en lien avec la lutte contre la contrefaçon. Cette interdiction est directement liée aux activités que menait Squarcini pour le compte du groupe de luxe LVMH, dans le cadre d'une procédure judiciaire concernant un conflit opposant LVMH à la société Hermès.

Par ailleurs, il est reproché à Squarcini d'avoir transmis à Michel Gaudin, directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, des informations relatives à l’affaire Cahuzac, ainsi que d'avoir placé sur écoute un fonctionnaire du service des courses et jeux qui enquêtait sur le cercle de jeu Wagram, arguant de sa proximité supposée avec les services secrets algériens. L'enquête judiciaire a aussi mis en lumière les importants passe-droits obtenus de la DGSI par Squarcini après qu'il n'était plus en fonction, tels que la suppression de l'inscription au fichier « S » du milliardaire russe Andreï Skoch, des autorisations de séjour pour deux femmes russes proches d'Alexandre Djouhri, la recherche de dizaines de noms dans les fichiers confidentiels, ou encore une intervention en faveur de la femme de Bernard Arnault[22],[29].

En outre, des perquisitions à son domicile et dans un coffre de banque ont permis de retrouver des documents couverts par divers secrets, relatifs notamment à l'affaire HSBC, l’oligarque russe Dmitri Rybolovlev, l'affaire Cahuzac, la société Veolia, le dossier Bettencourt, l’affaire Merah, le dossier des Renseignements généraux sur Alexandre Djouhri, ainsi que l'appartement de Ségolène Royal cambriolé en 2008[30],[22],[31].

En , Mediapart publie sur son site internet des écoutes téléphoniques où Bernard Squarcini utilise la police et les renseignements au profit de LVMH[32].

En , Bernard Squarcini est mis en examen pour trois nouveaux chefs d’accusation, dont la complicité d’atteinte à la vie privée, pour l’espionnage de François Ruffin et de son journal « Fakir » au bénéfice de la multinationale LVMH[33],[34].

Au cinéma

Il apparaît dans le documentaire satirique de François Ruffin, Merci Patron !, où il est présenté comme étant responsable de la sécurité du groupe LVMH - Moët Hennessy Louis Vuitton.

Distinctions

Ouvrages

  • Bernard Squarcini et Étienne Pellot, Renseignement français : nouveaux enjeux, Éditions Ellipses, 19 novembre 2013, 312 pages, (ISBN 978-2-7298-83386)

Bibliographie

  • Olivia Recasens, Didier Hassoux et Christophe Labbé, L'espion du président : Au cœur de la police politique de Sarkozy, Paris, Robert Laffont, , 283 p. (ISBN 978-2-221-12983-8)

Notes et références

  1. Guisnel, Jean (1951-....)., Histoire secrète de la DGSE (ISBN 978-2-221-24028-1 et 2-221-24028-6, OCLC 1127907429, lire en ligne)
  2. Bernard Squarcini, Les Echos, 12 novembre 2010
  3. Patricia Tourancheau, « «J’ai bouffé froid, tous les jours» », Libération, (lire en ligne)
  4. Bernard Squarcini, l'atout antiterroriste de Sarkozy, Le Figaro, 27 juin 2007
  5. L'ancien patron des RG de Brest nommé préfet délégué, Le Télégramme, 27 février 2004
  6. « Bernard Squarcini à la tête de la DST », sur nouvelobs.com, (consulté le )
  7. « Bernard Squarcini est nommé à la tête de la DST », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  8. « Décret du 2 juillet 2008 portant nomination d'un directeur des services actifs de la police nationale - M. Squarcini (Bernard) », sur legifrance.gouv.fr (consulté le )
  9. « Valls remplace le trio de tête de la hiérarchie policière », Le Monde, 30 mai 2012
  10. Audrey Goutard, Mémoires du Squale, Blog France TV Info, 23 novembre 2013
  11. Bernard Squarcini livre sa vision du renseignement français, Parlons Info, 12 février 2014
  12. Squarcini: «Trop haut trop vite, trop corse», Corse Matin, 26 mai 2014
  13. Caroline Michel et Iannis Giakoumopoulos, « Le Clan des privés », L’Obs N°2692, , p. 24
  14. Avec Bernard Squarcini, dit le Squale, L'Opinion, 18 juin 2014
  15. Ariane Chemin, Bernard Squarcini, l'officier traitant de la Sarkozie, Le Monde, 18/10/2011
  16. « Affaire des «fadettes» : mise en examen du contre-espion Squarcini », Le Parisien, (lire en ligne)
  17. « Mise en examen de Squarcini en partie annulée », sur lefigaro.fr, (consulté le )
  18. « Fadettes : l'ex-patron de la DCRI, Bernard Squarcini, va être jugé », sur lefigaro.fr, (consulté le )
  19. Fadettes du « Monde » : Squarcini condamné à 8 000 euros d'amende, lemonde.fr, 8 avril 2014
  20. « L'affaire est dans le sac (Vuitton) », Le Canard Enchaîné, no 5007, , p. 3.
  21. « Bernard Squarcini, l'ex-patron de la DCRI, va travailler pour Bernard Arnault, le président de LVMH », sur challenges.fr, .
  22. Enquête sur Bernard Squarcini, le maître-espion des réseaux sarkozystes, Le Monde, 4 novembre 2016.
  23. « LVMH aurait espionné François Ruffin avec l'aide de Bernard Squarcini », sur Le Huffington Post,
  24. « Affaire Squarcini : la justice a élargi son enquête après une plainte de Ruffin », sur LExpress.fr, (consulté le )
  25. Fabrice Arfi, « La police met à nu le système d’espionnage de LVMH contre François Ruffin », sur Mediapart, (consulté le )
  26. L’ex-directeur du renseignement intérieur Bernard Squarcini placé en garde à vue, Le Monde, 26 septembre 2016.
  27. « L'ancien directeur central du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, placé en garde à vue », 20minutes.fr, 26 septembre 2016.
  28. L’ex-patron du renseignement intérieur Bernard Squarcini mis en examen, Le Monde, 28 septembre 2016.
  29. « Combines, passe-droits... Bernard Squarcini, l'ex-espion qui s'y croyait encore », sur nouvelobs.com, (consulté le )
  30. Pourquoi Bernard Squarcini a été mis en examen, Le Monde, 29 septembre 2016.
  31. Marc Endeweld, « Soupçons de financement libyen de Sarkozy en 2007 : mandat d'arrêt international contre Alexandre Djouhri », sur marianne.net, (consulté le )
  32. Fabrice Arfi et Pascale Pascariello, « Episode 2. Au service secret de LVMH », sur mediapart.fr, (consulté le )
  33. Fabrice Arfi, « Seize mises en examen pour Bernard Squarcini : le crépuscule de l’espion », sur mediapart.fr, (consulté le )
  34. « Soupçonné d'avoir surveillé François Ruffin, l'ex-patron du renseignement à nouveau mis en examen », sur lefigaro.fr, (consulté le )
  35. Décret du 31 décembre 2001 portant promotion et nomination.
  36. Décret du 14 novembre 2008 portant promotion et nomination.

Liens externes

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