Bataillon du prince de Neuchâtel

Le bataillon du prince de Neuchâtel est une unité d'infanterie de ligne de la Grande Armée, en service sous le Premier Empire de 1807 à 1814.

Bataillon du prince de Neuchâtel

Artilleur du bataillon de Neuchâtel, 1810. Illustration de Job pour les Tenues des troupes de France.

Création 1807
Dissolution 1814
Pays Principauté de Neuchâtel
Allégeance Empire français
Branche Grande Armée
Type Bataillon
Rôle Infanterie de ligne
Effectif 1 050 hommes
Garnison Besançon
Surnom « Canaris »
« Serins »
Guerres Guerres napoléoniennes
Batailles Wagram
Ciudad Rodrigo
Dresde
Leipzig
Hanau
Commandant Jean-Henri de Bosset

Le bataillon est créé par décret du sur l'initiative du maréchal Louis-Alexandre Berthier, prince de Neuchâtel. Le recrutement, basé sur le volontariat, est efficace et permet d'étoffer rapidement les six compagnies prévues, auxquelles s'adjoint bientôt une batterie d'artillerie. Le baptême du feu a lieu en 1809 à la bataille de Wagram, où les Neuchâtelois sont affectés à la garde des ponts. Le corps prend ensuite la route de l'Espagne et enregistre des succès contre la guérilla dans la guerre de la péninsule. La campagne de Russie en 1812 ayant entraîné la disparition quasi complète des effectifs, le bataillon est réduit à la taille d'une compagnie qui participe aux dernières batailles de l'Empire, Dresde, Leipzig, Hanau en 1813 et enfin Vesoul en 1814. L'unité est dissoute à Chartres le 1er juin de la même année, après sept années d'existence.

L'uniforme jaune distribué au corps, très inhabituel, vaut aux Neuchâtelois le surnom de « canaris » ou de « serins ».

Historique

Contexte politique

Le maréchal Berthier, prince de Neuchâtel et Valangin. Portrait par Andrea Appiani.

Le , débarrassé des Russes et des Autrichiens au terme de la campagne d'Autriche, Napoléon signe un traité d'alliance avec la Prusse. Face au récent vainqueur d'Austerlitz, le roi Frédéric-Guillaume III est contraint de céder ses possessions de Clèves et de Neuchâtel à la France. Neuchâtel est occupé le par les troupes du général Oudinot, et quelques jours plus tard, le , la principauté passe officiellement sous contrôle français. Le 30, Napoléon signe un décret attribuant au maréchal Louis-Alexandre Berthier, major-général de la Grande Armée, le titre de prince de Neuchâtel et Valangin[1].

La décision de l'Empereur fait de Berthier l'un des rares dignitaires de l'Empire à bénéficier de la souveraineté d'un État. À propos de Talleyrand et Bernadotte, également dans ce cas, Frédéric Hulot note que « les lieux dont on avait assorti leurs titres étaient d'infimes bourgades italiennes (Bénévent, Ponte-Corvo) en rien comparable à Neuchâtel ». Le maréchal ne s'est toutefois jamais rendu dans la localité, déléguant la gestion des affaires à ses proches collaborateurs[2].

Quoique la principauté soit fort peu ancrée dans des traditions belliqueuses — « il faut laisser tranquille ce petit peuple » estime en 1808 le général Dutaillis[3] —, elle entretient tout de même des miliciens mais qui, de l'aveu d'Alfred Guye, « ne constituaient certainement pas une force apte à faire la guerre, tant par l'entraînement que par l'équipement »[4]. Or Berthier, justement intéressé par les questions militaires, a très vite l'idée de mettre sur pied un bataillon d'infanterie destiné à lui servir de garde personnelle[3].

Organisation et recrutement

Le capitaine Jean-Henri de Bosset, commandant le bataillon de Neuchâtel.

Le , Napoléon publie depuis le château de Finckenstein le décret donnant naissance au bataillon du prince de Neuchâtel. L'article 4 dispose que « le bataillon du prince de Neuchâtel sera composée de six compagnies, savoir : une compagnie de grenadiers, une compagnie de voltigeurs et quatre compagnies ordinaires ». Chaque compagnie comprend théoriquement 3 officiers, 6 sous-officiers, 2 tambours, 140 caporaux et hommes du rang, soit 160 hommes au total. Un petit état-major de 8 personnes, dont le chef de bataillon, porte l'effectif global à 648 hommes, nonobstant deux enfants de troupe par compagnie soit 660 hommes[5].

Le commandement du corps est confié au capitaine Jean-Henri de Bosset, officier suisse au service de la France chargé par le maréchal Berthier de procéder à l'organisation et au recrutement du bataillon. Comme prévu par le décret, seules sont admises les recrues en provenance de Neuchâtel, des cantons suisses ou du Valais[6]. Les sources sont ici contradictoires quant à l'enthousiasme de la population et à l'enrôlement des volontaires. Pour la Revue militaire suisse, « ce bataillon vit ses cadres se remplir rapidement par une jeunesse désireuse de se mêler à la grande armée, dont le prestige était à son apogée »[7], alors que Frédéric Hulot indique justement que le manque de volontaires oblige l'administration à recruter des Neuchâtelois « ayant servi dans l'armée prussienne et qui avaient été faits prisonniers en 1806 par l'armée française ! »[8]. Le , Napoléon adjoint au bataillon une compagnie d'artillerie forte de 83 hommes, qu'il dote de deux pièces de calibre 6 avec caissons et chariots de munitions[9].

Le dépôt du bataillon est fixé à Besançon, ce qui n'est pas pour plaire aux Neuchâtelois en raison de la concurrence horlogère[8]. De fait, en dépit des efforts du capitaine Bosset, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances : en 1807, il n'y a que 216 hommes sur les 660 escomptés[10]. Les six compagnies n'en sont pas moins formées pour répondre aux vœux de l'Empereur, mais leurs effectifs sont extrêmement réduits : « de trente à quarante et un hommes ! » relève Hulot[11]. Fin décembre, le bataillon est porté à 479 hommes, officiers compris[12]. L'entraînement, pourtant nécessaire à la formation des recrues pour la plupart inexpérimentées, est rapidement expédié par Berthier impatient de voir son unité rejoindre le front[8].

Du Havre à l'Autriche, 1808-1809

En , le bataillon de Neuchâtel fait route vers Le Havre[13]. Utilisé au service des garde-côtes, il doit à plusieurs reprises faire le coup de feu contre la flotte britannique stationnée à l'entrée du port[14]. Toutefois, à cette date, l'effectif a été réduit à quelque 300 hommes à cause de décès, maladies, désertions… Cet état de fait amène Berthier à envisager la fusion de son unité avec le bataillon valaisan, mais le projet n'a pas de suite[11]. En , le maréchal accompagne Napoléon pour sa campagne dans la péninsule Ibérique, mais curieusement les « Canaris » ne font pas partie de l'expédition[15].

Il faut attendre 1809 et la deuxième campagne d'Autriche pour voir les Neuchâtelois se distinguer sur un champ de bataille. Mis à la disposition du quartier-général de l'Empereur, le bataillon assure la protection des lignes de communication de la Grande Armée[11]. Le premier jour de la bataille de Wagram, le , il est chargé de protéger l'un des ponts sur le Danube aux côtés d'un contingent badois. Alors que les troupes françaises un moment repoussées repassent le fleuve en désordre, « le bataillon de Neuchâtel […] tint avec bravoure contre l'attaque forcenée des bataillons autrichiens, qui accouraient, sûrs de la victoire, et qui trouvèrent dans cette troupe, qui voyait le feu pour la première fois, une résistance imprévue »[16]. Cependant, comme l'indique Frédéric Hulot, aucune perte n'est à signaler lors de la bataille[11].

Campagne d'Espagne, 1810-1812

Le bataillon neuchâtelois stationne à Vienne jusqu'au mois de . En Espagne, la lutte continue et l'Empereur annonce à son frère Joseph la venue de 20 000 hommes de la Garde impériale. Les « Canaris », attachés à leur suite, sont du voyage et arrivent à Bayonne en . De là ils sont dirigés sur Vitoria puis Burgos.

Le bataillon participe aux combats en Espagne de 1810 à 1811, à la bataille de Smolensk en 1812, puis de Dresde et Leipzig en 1813. Le bataillon est dissous en 1814.

Uniformes

Ce bataillon est rapidement dit des Canaris à cause de la couleur jaune de son uniforme.

Notes et références

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Frédéric Hulot, « Le Maréchal Berthier », dans Les Grands Maréchaux de Napoléon, Pygmalion, , 1706 p. (ISBN 978-2-7564-1081-4).
  • E. Ruchonnet et E. Cuénod (dir.), « Le bataillon de Neuchâtel pendant l'Empire », Revue militaire suisse, Lausanne, no 17, .
  • Albert Guye, Le Bataillon de Neuchâtel : dit des Canaris, au service de Napoléon, 1807-1814, La Baconnière, , 254 p. (lire en ligne).
  • Gabriel Cottreau (ill. Job), « Artillerie du bataillon de Neuchâtel », dans Tenues des troupes de France : Armées de Terre et de Mer à toutes les époques, Paris, Combet et Cie, (lire en ligne), p. 25-26.
  • (en) David Greentree et David Campbell (ill. Gerry Embleton), Napoleon's Swiss Troops, Osprey Publishing, coll. « Osprey / Men-at-Arms » (no 476), , 48 p. (ISBN 978-1-84908-678-3).
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