Armée de libération nationale (Colombie)

L'Armée de libération nationale (espagnol : Ejército de Liberación Nacional, Unión camilista-Ejército de Liberación Nacional, ELN) est le deuxième groupe rebelle en importance impliqué dans le conflit armé colombien après les FARC-EP. Elle est composée de 2 000 combattants en 2016 selon les autorités, auxquels s'ajoutent 7 500 « miliciens » (militants civils)[1].

Pour les articles homonymes, voir ELN, Armée de libération nationale et ALN.

(es) Ejército de Liberación Nacional
ELN

Idéologie Marxisme-léninisme
Théologie de la libération
Bolivarisme
Objectifs Prise du pouvoir en Colombie.
Statut Actif
Site web www.eln-voces.com
Fondation
Pays d'origine Colombie
Fondé par Fabio Vásquez Castaño (en)
Actions
Mode opératoire Guérilla
Zone d'opération Colombie
Période d'activité 1964 - présent
Organisation
Chefs principaux Comando Central :
Nicolás Rodríguez Bautista
Antonio García
Pablo Beltrán
Ramiro Vargas
Pablito
Membres 4 000 guérilleros
7 500 miliciens
Financement Enlèvements, impôt révolutionnaire, narcotrafic (selon le gouvernement, contesté par l'ELN), exploitation minière.
Répression
Considéré comme terroriste par Canada, États-Unis, Union européenne
Conflit armé colombien

L'organisation est placée sur la liste des organisations terroristes des États-Unis, du Canada et de l'Union européenne[2].

Origines, fonctionnement et idéologie

Inspirée par l’exemple de la révolution cubaine avec la victoire de Fidel Castro à Cuba en 1959, l'ELN a été fondée en 1964 dans le département de Santander par Fabio Vásquez Castaño. Au contraire des FARC - qui constituaient alors un mouvement d'autodéfense de paysans marqués par la Violencia, dont l'objectif était de protéger les villages locaux des paramilitaires et non de renverser le gouvernement - l'ELN proclame dès sa fondation, dans son manifeste de Simacota (du nom d'un village d'où les forces de police venaient d’être expulsées par un groupe de guérilleros, la première action militaire de l'ELN) son ambition de prendre le pouvoir pour établir un « gouvernement démocratique et populaire ». Parmi les douze points énoncés dans son manifeste, la guérilla revendique :

  • Une redistribution des terres aux paysans qui les travaillent ;
  • La nationalisation des ressources minières et des transports ;
  • Un programme de construction de logements décents pour permettre le relogement des habitants des bidonvilles ;
  • Rendre l’éducation gratuite et obligatoire et la mise en œuvre des moyens suffisants pour éradiquer l'analphabétisme ;
  • Le respect des droits et revendications des indigènes tout en favorisant leur intégration dans la nation colombienne, la séparation de l’Église et de l’État, la restitution aux femmes de leurs « droits légitimes », encourager l'accès à la culture et au sport, rejeter les discriminations raciales ;
  • Axer la politique extérieure de l’État sur « l'opposition à toute forme d’oppression et de domination impérialiste et la solidarité avec la lutte des peuples opprimés »[3].

Elle regroupe dans les années qui suivent sa fondation davantage d'étudiants et de jeunes militants issus des villes que de paysans. Une composition sociale qui la distingue de la guérilla des FARC, essentiellement soutenue par des paysans. En matière idéologique, elle trouve à ses débuts une influence majeure dans la figure du prêtre Camilo Torres Restrepo - qui rejoignit le mouvement guérillero en 1965 - qui contribue à donner à l'idéologie du mouvement des allures de christianisme social, combinées aux principes marxistes-léninistes initiaux. Ainsi, selon Currea Victor Lugo, professeur à l'Université nationale de Colombie, les influences du mouvement se puisent auprès de Jésus-Christ, de Karl Marx et de Che Guevara. Il continue aujourd'hui encore d'entretenir des relations avec l’Église, qui constitue l'un de ses interlocuteurs privilégiés dans le cadre de négociations, dont notamment l'archevêque de Cali[4],[5],[6].

En 1969, le prêtre espagnol Manuel Pérez rejoint l'ELN, et en assumera la direction politique de 1983 jusqu'à sa mort en février 1998.

L’ELN fonctionne davantage comme un parti politique en armes que comme une organisation de type purement militaire. Le groupe privilégie la participation de la population dans les instances de décision plutôt que la construction d’une armée[7]. Chaque front possède son porte-parole et fonctionne de manière autonome. Selon l'analyste Camilo Echandia, de l'université Externado de Colombie, toutes les décisions sont préalablement sujettes à des débats et réunions, ce qui peut néanmoins affecter sa cohésion interne. L'ELN marque également une défiance plus prononcée que les autres guérillas colombiennes envers le système parlementaire et lui préfère la démocratie directe[8].

Activités

Principal mouvement de guérilla en Colombie durant les années 1960, il est vigoureusement combattu avec l'appui des forces spéciales américaines et est sévèrement affaibli en 1973 par l'opération Anorí. Il réapparaît de temps à autre tout au long des années 1970 et se rend responsable de nombreuses attaques de banques, assassinats et enlèvements.

En 1987, l'ELN fusionne avec le petit groupe de guérilla Movimiento de Integración Revolucionaria - Patria Libre pour constituer officiellement l'UC-ELN[9].

Le refus de la compagnie pétrolière Ecopetrol de s'acquitter de l'impôt révolutionnaire a conduit l'ELN à inaugurer une forme de terrorisme économique en s'attaquant à l'oléoduc Caño Limón-Coveñas. Entre 1982 et mars 1999, il a fait l'objet de 691 attaques et son maintien en activité devient prohibitif en termes de coûts. Depuis 1992, la Colombie, productrice de pétrole, est ainsi devenue importatrice.

L'ELN recourt fréquemment aux prises d'otages, la plus marquante étant celle de l'église de la María au cours de laquelle plus de 100 personnes ont été prises en otage pendant une messe à Cali[10],[11].

Début 2008, le gouvernement colombien annonçait la capture d'un haut commandant de l'Armée de libération nationale (ELN), Gustavo Adolfo Giraldo Quinchía, alias « Pablito ». Le ministre de la Défense Juan Manuel Santos estimait qu'il s'agissait de « la plus importante arrestation » d'un chef de l'ELN à ce jour. Gustavo Adolfo Giraldo Quinchía s'est évadé en octobre 2009 lors d'un transfert entre deux prisons[12].

Pourparlers

Logo de l'UCELN.

En 1984, l'ELN se distingue des autres mouvements rebelles colombiens en s'opposant à tout cessez-le-feu. C'est sur l'intervention de Fidel Castro que l'ELN se ralliera finalement à la signature d'un cessez-le-feu temporaire. Plusieurs factions se sont créées au sein du mouvement :

  • Le Front Domingo Lain, qui refuse toute négociation de paix
  • Le Courant de Rénovation Socialiste, qui a cessé la lutte en 1994, à la suite d'une négociation avec le gouvernement.

En août 2001, les négociations avec l'ELN sont suspendues par le gouvernement colombien, aucun accord ne pouvant être conclu sur les propositions du gouvernement concernant l'établissement d'une zone contrôlée par l'ELN. Lorsque le dialogue a repris en novembre de la même année, la proposition de zone démilitarisée a été abandonnée.

Une phase exploratoire de discussion a été engagé en 2014 avec le gouvernement de Juan Manuel Santos parallèlement aux négociations officielles avec les FARC-EP mais semble progresser péniblement, l'ELN exigeant un cessez-le-feu bilatéral et le gouvernement un cessez-le-feu unilatéral de la guérilla et la libération de ses prisonniers sans contreparties[13]. À la suite des accords de paix conclus à La Havane entre les représentants respectifs du gouvernement et des FARC, l'ELN en exprime sa désapprobation mais souligne sa « fraternité » avec les Farianos (les guérilleros de l'ELN sont eux nommés les Elenos) et leur souhaite les meilleurs succès dans le « nouveau chemin emprunté »[14]. Les négociations sont finalement officialisées en octobre 2016 et devraient se dérouler à Quito avec le soutien de l’Équateur et du Venezuela[15]. L'ELN annonce un cessez-le-feu à partir du 1er octobre 2017[16].

En 2018, d'anciens membres des FARC démobilisés rejoignent l'ELN face à l'abandon par l’État de certaines réformes prévues dans les accords de paix, notamment sur la question agraire[17].

En janvier 2019, un attentat de la guérilla à Bogotá fait 21 morts et 68 blessés dans les rangs de la police. En réaction, le gouvernement annonce l’arrêt définitif des négociations[18].

Notes et références

  1. « Radiografía militar del Eln | Colombia 2020 », sur colombia2020.elespectador.com
  2. http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2007:340:0109:0114:FR:PDF
  3. « Cedema.org - Viendo: Manifiesto de Simacota », sur www.cedema.org
  4. « Tan cerca y tan lejos: diferencias entre las Farc y Eln »
  5. (es) Aldia, « 8 diferencias entre el ELN y las FARC que todo colombiano debería conocer »
  6. « ¿Cómo es la guerrilla del ELN y qué la diferencia de las FARC? », sur www.semana.com
  7. « Après les FARC, l’ELN s’incorpore au processus de paix en Colombie - Mémoire des luttes », sur www.medelu.org
  8. « Polémicos editoriales de las AGC y el ELN en torno al plebiscito por la paz », sur El Espectador
  9. « Cedema.org - Viendo: Acta de constituci�n de la UC-ELN », sur www.cedema.org
  10. (es) Sobre la toma de rehenes ocurrida en la Iglesia de la María, Barrio Ciudad Jardín, de la ciudad de Cali, Communiqué du HCR, 30 mai 1999
  11. (es) Colombia: la guerrilla tomó una iglesia y se llevó a 100 personas, Clarín, 31 mai 1999
  12. (es) « Principales Noticias de Colombia y el Mundo. », sur El Espectador (consulté le ).
  13. « ELN-PAZ | 2015 », sur www.eln-paz.org
  14. teleSUR - AC, « ELN desea éxitos a las FARC-EP, a pesar de no compartir acuerdo »
  15. lefigaro.fr, « Colombie: l'ELN et le gouvernement vont négocier pour la paix », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le )
  16. « Colombie : cessez-le-feu avec l’ELN, dernière guérilla du pays », sur Le Monde,
  17. « Ivan Duque succède à Juan Manuel Santos à la tête de la Colombie », sur Le Monde.fr (consulté le )
  18. Guillaume Long, « Colombie : vers une nouvelle situation de guérilla ? », sur IRIS, (consulté le )

Liens externes

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