Apologie de Socrate (Xénophon)

L’Apologie de Socrate (titre complet : Apologie de Socrate devant le tribunal - Ἀπολογία Σωκράτους πρὸς τοὺς Δικαστάς / Apología Sôkrátous pròs toùs Dikastás) est un opuscule de Xénophon écrit en -395.

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Il décrit l'état d'esprit de Socrate — dont il a été l'étudiant de -404 à -401 avant de s'engager dans l'expédition de Cyrus le Jeune — lors de son procès et de son exécution, et en particulier son point de vue selon lequel il vaut mieux mourir avant que la sénilité ne le gagne plutôt que d'échapper à l'exécution en s'humiliant face à la persécution injuste dont il est l'objet.

Contexte de l'œuvre

Les spécialistes pensent que cette interprétation du procès par Xénophon fut écrite en réponse à une réaction littéraire généralisée après le procès, où des personnalités publiques et des écrivains d'Athènes utilisèrent le thème du procès de Socrate pour affirmer leur propre opinion sur sa culpabilité. La partie principale du texte est une réponse directe, point par point, à une attaque particulière sur le personnage de Socrate faite par l'un de ses adversaires.

Le texte donne des indications claires sur les accusations portées contre Socrate par Anytos, et il est souvent utilisé sur ce point en comparaison avec la version de Platon (elle aussi intitulée Apologie de Socrate). Xénophon était absent à l'époque du procès, engagé dans les événements de la marche des Dix Mille. Il cite Hermogène, autre disciple de Socrate, comme sa source pour les éléments factuels du procès. Manifestement, Xénophon a écrit son Apologie après qu'un certain nombre d'autres comptes-rendus du procès eurent été publiés, car il présente le sien comme étant le seul qui rende compréhensible la « manière fanfaronne de parler » (megalēgoria) de Socrate lors du procès (1-2). Outre l’Apologie de Socrate de Platon, ce compte-rendu de seconde main de Xénophon reste le seul autre témoignage contemporain du procès de Socrate. Même en supposant une certaine partialité de l'ouvrage, ce seul point justifie sa valeur historique.

Lien avec les Mémorables

Le dernier chapitre des Mémorables de Xénophon[1] contient quelques morceaux du même récit que les premières sections de l’Apologie de Socrate[2],[3] — dont certaines parties presque mot pour mot. Cela a conduit certains interprètes à penser que l’Apologie de Xénophon était la conclusion initiale des Mémorables ; compte tenu des données limitées sur le sujet, ceci ne peut toutefois être affirmé avec certitude.

Différences avec la version de Platon

Une différence entre le récit de Xénophon et celui de Platon, c'est que, dans celui de Xénophon, l'oracle de Delphes affirme que personne n'a été « plus libre, plus juste, et plus sain d’esprit » que Socrate[4], tandis que dans le dialogue de Platon il affirme seulement que « nul n'a été plus sage »[5]. Certains commentateurs[Lesquels ?] ont suggéré[Où ?] que cette différence dénotait la volonté de Xénophon d'éviter le mot explicite de « sagesse », un terme qui aurait en effet suggéré à un Athénien que Socrate était bien le philosophe naturaliste athée décrit par Aristophane dans les Nuées ; le Socrate de Xénophon prétend être « sage » au sens où à partir du moment où il a commencé à comprendre les mots, il n'a jamais cessé de chercher et d'apprendre chaque bonne chose qu'il pouvait[6],[7].

Une autre différence est que, dans l’Apologie de Xénophon, le « signal divin » (daimon) de Socrate est décrit comme donnant des indications positives sur ce qui doit être fait[8], tandis que le Socrate de Platon décrit systématiquement et explicitement le signal comme « me détournant de quelque chose que je m'apprête à faire », mais « ne m'encourageant jamais à faire quelque chose »[9],[10]

Une différence de plus entre Platon et Xénophon, c'est que, tandis que Platon fait proposer par Socrate à la fin du procès une indemnité de trente mines pour lui-même[11],[12], la version de Xénophon dit qu'il a refusé de proposer une peine, et qu'il a interdit à ses amis de le faire, en arguant que tout autre comportement impliquerait sa culpabilité[13],[8].

Alors que la décision de Socrate d'accepter la peine de mort est expliquée dans l’Apologie de Platon par l'engagement indéfectible de Socrate envers sa mission divine de continuer à philosopher à tout prix[14],[15], elle est expliquée dans la version de Xénophon par son affirmation selon laquelle il est préférable pour lui de mourir maintenant plutôt que d'affronter les douleurs et les limites de la vieillesse avancée[16], [17].

Tradition du texte[18]

Quatre manuscrits ont conservé l’Apologie :

  • B — Vaticanus 1355 (Xe – XIIe siècles), le meilleur, corrigé par une main du XIVe siècle (B²) et du XVIIIe siècle ;
  • A — Vaticanus gr 1950 (XIVe siècle), dérivé de B ;
  • Harl. — Britannicus Harleianus 5724 (XVe siècle), dérivé de B ;
  • C — Mutinensis 145 (XVe siècle), d’authenticité contestable selon François Ollier[19] (contra Ernst Kalinka, Innsbrucker Festgruss, 1909, p.  167 sq.).
Tradition indirecte
  • Athénée, Livre V, 218e = Apol., 14.
  • Stobée, Anthologie, III, 7 = Apol., 25-27 et 28-29.

Bibliographie

Références

  1. 4.8.1-4.8.8
  2. 1-8
  3. Ollier & Xénophon 2014, p. 102-104
  4. 2
  5. Platon, Apologie de Socrate [détail des éditions] [lire en ligne] (21a)
  6. 16
  7. Ollier & Xénophon 2014, p. 106
  8. Ollier & Xénophon 2014, p. 108
  9. Platon, Apologie de Socrate [détail des éditions] [lire en ligne] (31d)
  10. 2008 Brisson, p. 81
  11. Platon, Apologie de Socrate [détail des éditions] [lire en ligne] (38b)
  12. 2008 Brisson, p. 88
  13. 23
  14. Platon, Apologie de Socrate [détail des éditions] [lire en ligne] (29c-30c)
  15. 2008 Brisson, p. 79-80
  16. 6-8 ; 27 et 32
  17. Ollier & Xénophon 2014, p. 103-104, 109-111
  18. Ollier & Xénophon 2014, p. 98-99
  19. Ollier & Xénophon 2014, p. 7

Articles connexes

Lien externe

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