Agustín Pedro Justo

Agustín Pedro Justo (né à Concepción del Uruguay, province d'Entre Ríos, le – mort à Buenos Aires, le ) est un militaire et homme politique argentin, qui occupa le poste de Président de la Nation du au , durant la période connue sous le nom de Décennie infâme.

Biographie

Il fut élu à la suite des élections du , appuyé par les secteurs politiques du pays qui avaient formé depuis peu la Concordance argentine, alliance formée par le Parti démocrate national, les radicaux de l’Union civique radicale (UCR) de tendance antipersonnaliste et le Parti socialiste indépendant. De lourdes accusations de fraude pèsent sur ces élections — appelée fraude patriotique, grâce à laquelle les secteurs conservateurs ont essayé de vaincre la popularité bien supérieure des radicaux yrigoyenistes—. Il y eut d'ailleurs durant tout son mandat une opposition persistante des radicaux personnalistes ou yrigoyenistes de l’UCR.

La plus grande réussite de son mandat fut le résultat du travail diplomatique de son canciller (ministre des affaires étrangères en Amérique espagnole), Carlos Saavedra Lamas. Pour le reste, ce mandat fut entaché de constantes accusations de corruption et, plus grave encore, d'avoir livré l'économie du pays aux capitaux étrangers, essentiellement britanniques, lors de la signature par son vice-président du pacte Roca-Runciman. À la fin du mandat présidentiel de Ramón Castillo, on cita beaucoup son nom comme candidat à un nouveau mandat, mais sa mort prématurée à l'âge de 66 ans, mit fin à ces attentes.

Sa jeunesse

Son père avait été gouverneur de la province de la province de Corrientes puis député au Congrès. À l'âge de 11 ans Justo entra au Collège militaire de la nation en artillerie. Comme cadet, avec beaucoup de ses condisciples, il participa à la révolution du Parc en 1890[1].

Il sortit comme ingénieur civil de l'université de Buenos Aires, diplôme homologué comme équivalent à celui d'ingénieur militaire en 1904. Il fut nommé professeur à l'école d'application pour officiers et eut diverses promotions académiques et militaires. En 1910, il avait atteint le grade de commandant d'une brigade d'artillerie.

Débuts en politique

En 1915, durant le mandat de Victorino de la Plaza, il fut désigné à la tête du Collège militaire, où il resta pendant sept ans. Il avait ainsi une charge très influente qui l'aida à tisser des liens dans les milieux tant politiques que militaires. Proche du rameau antipersonnaliste du radicalisme (opposé au leadership d'Hipólito Yrigoyen), il engagea de bonnes relations avec Marcelo T. de Alvear.

À l'arrivée d'Alvear à la présidence, en 1922 il occupa le poste de ministre de la Guerre. Promu général de brigade le , Justo sollicita l'augmentation du budget de la défense pour acquérir des équipements et améliorer les installations de l'armée de terre. Il suscita aussi la réorganisation des forces armées. Durant les années suivantes, il occupa de façon intérimaire les ministères de l'Agriculture et des Travaux publics, en plus de celui de la Guerre, qu'il n'abandonna qu'à la fin du mandat d'Alvear. En 1927 il avait été promu général de division.

En tant qu'antipersonnaliste, Justo appuya la candidature de Leopoldo Melo, de la ligne alvéariste de l'UCR. Face au triomphe de la formule opposée (Yrigoyen et Beiró), qui commença son second mandat en 1928 avec l'appui massif des votants et la majorité à la Chambre des députés, Justo reçut des avances de la droite nationaliste fascisante pour se joindre au groupe de choc contre le grand chef radical. Bien que proche des concepts que La Nueva República — dirigée par Ernesto Palacios et les frères Rodolfo et Julio Irazusta — et de La Fronda — sous la direction de Francisco Uriburu — exprimaient au sujet de la nécessité d'Ordre, Hiérarchie et Autorité, il n'adhérait pas complètement à ceux-ci. Le programme de suppression de la forme républicaine de gouvernement et son remplacement par un système corporatif à la Mussolini ou de type Espagne fasciste, ne plaisait guère à ce libéral.

Justo et le coup d'État de 1930

Autour de Justo une autre faction se rassembla, pas moins décidée à prendre les armes contre le gouvernement constitutionnel d'Yrigoyen. Elle était activement promue par le général José Luis Maglione, ami de Justo, et par le colonel Luis J. García — qui sera une des têtes du GOU (Groupe d'Officiers Unis profasciste) —, et s'exprimait dans les pages de La Nación et de Crítica. Des déclarations de Justo en juillet 1930, au sujet de l'inconvénient d'intervenir militairement afin de ne pas mettre en péril la « légalité constitutionnelle », témoignent de l'affrontement entre factions[2].

À la différence de la Marine, plus radicalisée, une bonne partie de l'Armée de terre appuyait l'option de Justo, à la très notable exception du noyau nationaliste qui ultérieurement formera le GOU (Groupe d'Officiers Unis, comprenant Ramírez et Juan Perón). Devant la promesse du putschiste José Félix Uriburu, tête du groupe des extrémistes, de maintenir l'ordre constitutionnel, Justo donna son accord au putsch, qui se produisit dans la matinée du 6 septembre, instaurant pour la première fois, depuis l'existence de la constitution, un gouvernement militaire. Il ne se joignit pas à sa direction ni, au début, au groupe gouvernant, qu'Uriburu dirigeait avec un cabinet composé en bonne partie des patrons locaux des multinationales pétrolières[3].

Bulletin électoral de 1931, Justo-Roca

Justo chercha à se distancier d'Uriburu, qui avait de nombreux partisans parmi les officiers, mais qui ne put rassembler l'appui des partis politiques, qui se divisèrent rapidement après la disparition d'Yrigoyen, foyer de leur antipathie commune. Il rejeta la vice-présidence qu'Uriburu lui offrait, et accepta seulement brièvement de commander les forces armées, y renonçant peu après. Lorsque l'échec d'Uriburu de mettre en œuvre le modèle corporatiste dans la province de Buenos Aires fut avéré, Justo refusa à nouveau les offres d'Uriburu de se joindre à un gouvernement de coalition. Il se présenta au contraire aux élections du comme candidat à la présidence, avec l'appui de ce qui sera la Concordancia, une alliance du Parti démocrate national (conservateur), du Parti socialiste indépendant et de la branche la plus antipersonnaliste des radicaux. L'yrigoyénisme était proscrit et avait lancé le mot d'ordre d'« abstention révolutionnaire ». Justo triompha donc facilement contre le binôme Lisandro de la Torre / Nicolás Repetto, bien que les soupçons de fraude fussent notoires. Il avait choisi comme vice-président Julio Argentino Roca fils, de la faction conservatrice.

La présidence

Justo assuma sa charge le . En plus des convulsions dues au putsch, le pays devait faire face à la Grande Dépression, qui avait créé un déficit commercial et une brusque montée du chômage. Le ministre du trésor, Alberto Hueyo, prit des mesures restrictives qui aggravèrent rapidement le problème (déflation). Le budget se réduisit, ainsi que la circulation monétaire. Les graves difficultés de cette politique convainquirent Justo d'adopter un modèle plus dirigiste. La Direction nationale des Routes fut créée pour l'amélioration du réseau routier. Un programme ambitieux de construction urbaine fut entrepris. Hueyo fut remplacé par le socialiste Federico Pinedo. L'interventionnisme gouvernemental se fit plus marqué. On créa la Junte nationale des Grains, celle des Viandes et aussi la Banque Centrale.

Relations avec le radicalisme (UCR)

L'opposition radicale fut très vive.

Notes et références

  1. Saguier, 2006
  2. Sarobe, 1957
  3. Gálvez, 1939
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