Agnes Meyer Driscoll

Agnes Meyer Driscoll (1889-1971) est une cryptanalyste américaine, pionnière du décryptage des trafics radio japonais, entre les deux guerres mondiales.

Biographie détaillée

Née en 1889 dans l’Illinois, Agnès May Meyer, diplômée de l’État de l’Ohio, enseigne d’abord les mathématiques et la musique au Texas.

Débuts

En 1918, Agnes entre dans la Réserve de la marine américaine. Son goût et sa pratique des langues, des mathématiques et de statistiques la vouent tout naturellement à une carrière de cryptanalyste. D’abord chargée de secrétariat, elle grimpe rapidement les échelons, jusqu’au niveau de Chief Yeoman (premier maître secrétaire militaire), à l'époque la plus haute qualification ouverte aux femmes. En juillet 1919, à la fin de son service actif, elle décroche un emploi de sténographe auprès du directeur des services secrets de la marine, à Washington.

Agnes est reléguée à des tâches sans envergure, sa véritable carrière démarre quand elle accepte de rallier le département du chiffre de Geneva, Illinois, près de Chicago. Également connu sous le nom de Riverbank, Geneva est le lieu de résidence d'Élisabeth et William Friedman, éminents cryptologues. C'est ailleurs à travers les recherches et les ouvrages des Friedman que Meyer aiguise son don pour la cryptanalyse.

OP-20-G

Agnes quitte l’Illinois en 1921 pour réintégrer la Navy ; là, au sein de la Code and Signal Section, elle s’impose comme une cryptanalyste de tout premier ordre. Dans cet univers machiste, et en dépit des quolibets (Agnes est surnommée « Madame X », en français), rien ne détourne Meyer de son travail. En 1924, elle épouse Michael Driscoll, procureur de Washington ; la surprise est grande pour ses collègues, persuadés d’avoir affaire à une célibataire endurcie. Driscoll a chargé de la formation d’officiers de marine, Joseph Rochefort et Laurance Safford, entre autres, deux futures personnalités de la cryptologie de la Seconde Guerre mondiale.

En 1926, Agnes Driscoll effectue les tout premiers déchiffrements, grâce au vol d'un répertoire de codes japonais, baptisé RED BOOK par les cryptanalystes américains. Nouveau coup d’éclat en 1931 lorsqu’elle parvient à casser le répertoire suivant, baptisé BLUE BOOK. En 1935, elle identifie un trafic de chiffres générés par une machine. Il s'agit de la machine M1, baptisée ORANGE par les cryptographes américains, qui sert aux échanges des attachés navals japonais. Driscoll met alors au point un procédé manuel capable de déchiffrer les messages interceptés. Travaillant sur papier millimétré à la variabilité des séquences codées, et finit par isoler la combinaison to-mi-mu-ra. Elle découvre que cette séquence signifie « Thompson », nom fréquemment employé dans les transmissions de représentants japonais à l’étranger.

En 1936, sur la base de ces déchiffrements, le contre-espionnage de la marine met un terme aux agissements de traîtres démasqués sur les deux côtes américaines. Harry Thompson, opérateur radio de la flotte du Pacifique, et J. S. Farnsworth (ou agent K), ex-officier de la Navy, livrent des informations sur les armes-équipements américains à des agents japonais. Condamnés, les deux hommes sont incarcérés.

JN-25

En 1939, Driscoll participe à la reconstruction d'un des chiffres de la marine japonaise, le JN-25. Il s'agit d'un code désordonné d’à peu près 45 000 groupes de 5 chiffres, surchiffré par une clé additive. L’analyse minutieuse des nombres et mots-codes sous-jacents aboutit en septembre 1940. Dès lors, certains messages JN-25, les plus simples, sont décryptés.

Les radio-interceptions, l'analyse des trafics ennemis et le décryptage partiel de JN-25 contribuent à deux victoires navales, la bataille de la mer de Corail et la bataille de Midway. Les premiers déchiffrements du JN-25 serviront de base au décryptage de ses évolutions (JN-25b, JN25c), mais aussi à la pénétration des autres codes JN spécifiques à la marine impériale.

Driscoll avait temporairement participé à la cryptanalyse d'Enigma mais ce travail avait été entièrement pris en charge par les cryptanalystes de Bletchley Park.

Après-guerre

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Agnès Driscoll entre au service de la nouvelle agence nationale de cryptologie, qui devint l'Agence de Sécurité des Forces Armées (Armed Forces Security Agency) en 1949, puis la NSA (National Security Agency) en 1957, pour y rester jusqu’à sa retraite deux ans plus tard, en 1959. À partir de là, on ne sait rien de ses activités. Elle décède, oubliée de tous, en 1971.

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