XVIIIe siècle av. J.-C.

Évènements

  • 1800-1700 av. J.-C. : déclin de la civilisation de la vallée de l'Indus (inondations provoquées par les changements du cours des fleuves, invasions de tribus chalcolithiques d’Inde centrale et méridionale, déclin du commerce avec le Proche-Orient ?). Les grandes cités sont remplacées par de grosses bourgades au rayonnement plus local[1]. Dans le territoire correspondant à la civilisation de l’Indus, le processus de régionalisation s’accentue avec la disparition des éléments les plus caractéristiques de l’unité harappéenne : l’écriture, les sceaux ou les poids. De nombreux éléments survivent pourtant au long du IIe millénaire dans les régions orientales et méridionales de la zone. À Pirak, les figurines féminines et de taureau à bosse du IIIe millénaire disparaissent au profit de statuettes de cavaliers, de chevaux et de chameaux à deux bosses, ce qui suggère l’apparition de nouveaux courants idéologiques, centrés sur la nouvelle mobilité apportée par ces animaux[2]. L’âge d’or du commerce interiranien, marqué par la présence de nombreux « trésors » et riches métropoles (coupe sur pied et bol tronconique) semble prendre fin vers 1800/1700 av. J.-C., au moment même où les textes mésopotamiens cessent de parler du commerce oriental. Les grandes agglomérations de Turkménie orientale (Altyn-depe et Namazga-depe) sont abandonnées[3]. Les échanges entre la vallée de l’Indus et le pourtour oriental de l’Iran cessent : le Golfe, la Bactriane, la Turkménie et la plaine de Gorgan sont tour à tour durement affectés et l’ensemble de la vie urbaine s’effondre dans ces régions. L’État élamite subsiste dans sa dualité et Suse reste une grande ville, mais il est possible qu’Anshan, tout en formant le point d’équilibre du royaume, ait connu une éclipse en tant que centre urbain[4].
  • 1800-1700 av. J.-C. : âge du bronze moyen II en Grèce[5].
  • 1800-1600 av. J.-C. : la terre de Canaan connaît une période de prospérité marquée par de grandes maisons patriciennes, la céramique, les armes en bronze et les bijoux en or retrouvés dans une quinzaine de sites comme Hazor, Tel Taanak, Megiddo, Sichem, Jéricho, Tell Beit Mirsim, Tell ed-Duweir. C'est probablement à cette époque (XIXe siècleXVIIIe siècle) que des tribus sémitiques de Chaldée (Ur, selon la tradition), sont conduites par Abraham, vers Harran, en pays araméen, puis vers la terre de Canaan. Selon la tradition biblique, les descendants d’Abraham se sédentariseront dans la montagne de Juda, près d’Hébron.
  • 1800-1200 av. J.-C. : début de l’âge du bronze récent en Anatolie. Civilisations des Hittites et des Hourrites[6]. Les Hourrites, originaires du Caucase et attestés dès le milieu du troisième millénaire, créent des royaumes au nord de la Mésopotamie. Ils adoptent l’écriture cunéiforme et la langue akkadienne. Chez les Hourrites, les crimes ne sont sanctionnés que par des amendes. La femme occupe une position privilégiée et jouit de droits très étendus. Ils parlent une langue agglutinante très différente des parlers sémitiques ou indo-européens.
  • Vers 1796 av. J.-C. : Shamshi-Adad Ier prend Mari et fonde l’éphémère royaume de Haute-Mésopotamie (fin en 1775 av. J.-C.)[7].
Carte du royaume de la Première dynastie de Babylone depuis le début du règne de Hammurabi jusqu'à la chute de Babylone en 1595 av. J.-C..
  • Avant 1780 av. J.-C. : émergence du royaume de Yamkhad ou Iamhad en Syrie sous Sumu-epukh (avant 1780) et son fils Iarim-Lim (1781-1650 av. J.-C.)[8]. Le royaume de Iamhad, avec pour centre Alep, maîtrise la Syrie du Nord : à l’est jusqu’à la boucle de l’Euphrate où des villes comme Emar acceptent une sorte de protectorat, vers l’ouest jusqu’à la Méditerranée, et dans la plaine de l’Amuq (Alalakh/Tell Atchana). Il s’édifie au carrefour des relations commerciales entre l’Anatolie, la Méditerranée, la Mésopotamie et la Syrie méridionale. Sa puissance est réelle comme l’indique à la fois l’expédition qu’il mène contre Dêr en Mésopotamie, sa politique active contre Eshnunna et le fait qu’il domine une vingtaine de rois vassaux[4].
  • Vers 1750-1500 av. J.-C. : culture du Kerma classique en Nubie[9]. Les troubles dus à l’arrivée des Hyksôs favorisent le royaume de Kerma en Nubie qui contrôle la zone allant d’Assouan à la IVe cataracte. Il fait alliance avec les Hyksôs contre les rois de Thèbes et les administrateurs égyptiens de Basse-Nubie se rallient à son autorité. La capitale est transférée à Bouhen, quelques kilomètres au sud de la IIe cataracte.
  • 1710-1540 av. J.-C. : Deuxième Période intermédiaire. La Basse-Égypte tombe aux mains des Hyksôs, originaires de Canaan[10].

Société

  • À l’époque d’Hammourabi, les terres se répartissent entre le roi, les temples et les particuliers qui semblent pouvoir en disposer librement. Plusieurs catégories de personnel travaillent sur les terres royales :
    • des hommes au service du roi, qui reçoivent comme rétribution un bénéfice (ouilku, en général de 1 à 6 bur, soit de 6 à 36 ha environ) qu’ils n’ont pas le droit de vendre mais qu’ils peuvent transmettre à leurs enfants ;
    • des fermiers auxquels était assuré l’approvisionnement en eau ;
    • des colons qui payaient une redevance contre une avance permettant la mise en valeur de la terre ;
    • des hommes de corvée auxquels on concédait des terres pour leur subsistance[4].
  • Le dieu de Babylone, Marduk, est promu au sommet du panthéon mésopotamien aux côtés d’Anu et d’Enlil, par Hammourabi. Il prend le titre de bêl (seigneur) et assimile des attributs d’autres dieux[11]. Il y a là une évolution très nette vers un syncrétisme, amorcé réellement dans la deuxième moitié du IIe millénaire av. J.‑C.. La pratique cultuelle va tendre vers la monolâtrie, première étape vers le monothéisme[12].
  • Selon l’étude de Dominique Charpin, le clergé d’Ur à l’époque d’Hammourabi vit dans des maisons privées, souvent à proximité du grand sanctuaire dont ils dépendent. Il existe une hiérarchie et les fonctions sont très spécialisées (échansons, musiciens, chantres, purificateurs, intendants). Plutôt que de distinguer un personnel cultuel, administratif ou domestique, il semble préférable d’envisager une répartition entre prêtres qui se transmettent leurs charges de père en fils et les prébendiers titulaires de « charges divisibles dans le temps et négociables ». Le clergé forme une caste fermée qui jouit de réels privilèges et qui pour une grande part se coopte[13].

Inventions, découvertes, introductions

Liste royale sumérienne retrouvée à Larsa, vers 1800 av. J.-C.
  • Liste royale sumérienne, dont la principale version est rédigée au XVIIIe siècle av. J.-C. par les scribes pour justifier les prétentions de la dynastie d’Isin sur le pays sumérien[14], en la replaçant dans une tradition qui conduit à la dynastie d’Agadé et au-delà aux prestigieuses villes de Sumer qui confèrent, comme Kish, la royauté. Bien qu’incomplètes et tendancieuses, elles donnent les durées des règnes, ce qui permet le cas échéant d’évaluer des séquences assez précises, sauf pour les dynasties d’avant le déluge.
  • Vers 1800 av. J.-C. : rédaction de la tablette Plimpton 322 dans la région de Larsa, un des spécimens les plus connus des mathématiques mésopotamiennes[15].
  • Innovations dans l’armement au Proche-Orient : char de guerre à deux roues, bélier et tour de siège[16], glacis défensif.
  • Les progrès de l’astronomie sont suffisants pour permettre à Hammourabi d’instituer un calendrier unique dans son empire en remplacement des anciens calendriers agraires. À la base, un mois lunaire de 29 ou 30 jours, divisé en semaines de sept jours selon les phases de la Lune ; l’année comporte 354 jours et commence au printemps. Pour compenser l’écart entre année lunaire et année solaire, un mois supplémentaire est inséré dans le calendrier tous les deux ou trois ans[17]. Les journées sont divisées en veilles de durées variables tout au long de l’année, trois pour le jour et trois pour la nuit.
  • La langue akkadienne atteint sa perfection classique sous le règne d’Hammourabi[7].

Notes et références

  1. Alexandre Astier, Petite histoire de l'Inde, Éditions Eyrolles, , 212 p. (ISBN 978-2-212-86213-3, présentation en ligne)
  2. Henri Paul Francfort, Nomades et sédentaires en Asie centrale : apports de l'archéologie et de l'ethnologie, Éditions du CNRS, , 240 p. (ISBN 978-2-222-04427-7, présentation en ligne)
  3. (en) Jane McIntosh, The ancient Indus Valley : new perspectives, Santa Barbara, Calif, ABC-CLIO, , 441 p. (ISBN 978-1-57607-907-2 et 1-57607-907-4, présentation en ligne)
  4. Jean-Claude Margueron, Le Proche-Orient et l'Égypte antiques, Hachette Éducation Technique, , 416 p. (ISBN 978-2-01-140096-3, présentation en ligne)
  5. Jean-Claude Poursat, La Grèce préclassique : Des origines à la fin du VIe siècle, Points, , 225 p. (ISBN 978-2-7578-4500-4, présentation en ligne)
  6. Corinne Julien, Histoire de l'humanité : 3000 à 700 av. J.-C, UNESCO, , 1402 p. (ISBN 978-92-3-202811-2, présentation en ligne)
  7. Georges Roux, La Mésopotamie, Seuil, , 600 p. (ISBN 978-2-02-008632-5, présentation en ligne)
  8. Trevor Bryce, Ancient Syria : A Three Thousand Year History, OUP Oxford, (ISBN 978-0-19-100293-9, présentation en ligne)
  9. David N. Edwards, The Nubian Past : An Archaeology of Sudan, Routledge, , 360 p. (ISBN 978-1-134-20087-0, présentation en ligne)
  10. Florence Maruéjol, 100 Questions sur l’Égypte ancienne, La Boétie, , 256 p. (ISBN 978-2-36865-028-8, présentation en ligne)
  11. Collectif, Les religions. Des origines au IIIème millénaire, Sciences Humaines, , 612 p. (ISBN 978-2-36106-404-4, présentation en ligne)
  12. Théophane Nicolas, Les images : regards sur les sociétés, Publications de la Sorbonne, , 256 p. (ISBN 979-10-351-0004-9, présentation en ligne)
  13. Dominique Charpin, Le clergé d'Ur au siècle d'Hammurabi : (XIXe-XVIIIe siècles av. J.-C.), Librairie Droz, , 519 p. (ISBN 978-2-600-03321-3, présentation en ligne)
  14. Hatice Gonnet, Catherine Breniquet-Coury, Jean-Marie Durand, Paul Garelli, Le Proche-Orient asiatique. Des origines aux invasions des peuples de la mer, vol. 1, Presses Universitaires de France, (ISBN 978-2-13-073719-3, présentation en ligne)
  15. Jean-Pierre Escofier, Histoire des mathématiques, Dunod, , 128 p. (ISBN 978-2-10-052984-1, présentation en ligne)
  16. Yaqqim-Addu, Maurice Birot, Zimrilim, Šunuḫraḫalû, Archives royales de Mari, vol. 14, Librairie orientaliste P. Geuthner, (présentation en ligne)
  17. Corinne Julien, Histoire de l'humanité : 3000 à 700 av. J.-C, UNESCO, , 1402 p. (ISBN 978-92-3-202811-2, présentation en ligne)
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