Éloi de Noyon

Éloi de Noyon (Eligius en latin, l'« élu », Noviomensis) (v. 588 - ), est un évêque de Noyon, orfèvre et monnayeur français, qui eut une fonction de ministre des Finances auprès de Dagobert Ier. Saint Éloi pour les catholiques est fêté le 1er décembre. À Paris, on commémore le 25 juin la translation d'un de ses bras en la cathédrale Notre-Dame de Paris en 1212.

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Éloi de Noyon
Saint catholique

Vitrail de saint Éloi dans l'église Sainte-Anne de Gassicourt, à Mantes-la-Jolie.
Biographie
Naissance v. 588
Chaptelat
Décès
Noyon
Évêque de l’Église catholique
Évêque de Noyon
Autres fonctions
Fonction laïque
Orfèvre
Ministre et monnayeur de Dagobert Ier

Biographie

Saint Éloi et les fiancés, tableau de Petrus Christus, 1449. New York, collection Lehman. Giraudon.

Éloi est né à Chaptelat près de Limoges, en Limousin, vers 588, de parents portant des noms gallo-romains ; son père s'appelait Eucher et sa mère Terrigie. On ne sait que peu de choses sur cette famille qui possédait sans doute quelques biens près de Limoges et était chrétienne. Le fait que Chaptelat se trouve dans une zone aurifère du Limousin et que saint Éloi fut orfèvre et monétaire a conduit certains historiens à envisager que la famille d'Éloi pouvait avoir des intérêts dans les exploitations aurifères du Limousin, sans qu'aucune preuve ne puisse en être apportée. Les mines d'or limousines sont d'ailleurs très mal documentées pour l'époque mérovingienne.

Il fut placé par son père, en apprentissage à Limoges auprès d'Abbon, orfèvre réputé, qui fabriquait de la monnaie. Selon saint Ouen, au cours de son apprentissage, il « assistait fréquemment aux offices de l'église, où il écoutait avec une grande avidité tout ce qu'on disait des divines écritures. »

« Cependant, peu d'années après, des circonstances que Dieu, dans sa providence, avait sans doute amenées, le déterminèrent à quitter sa patrie et sa famille pour se rendre seul en France »[1]. C'est-à-dire au Nord de la Loire, et plus précisément à Paris.

Saint Éloi remet au roi Clotaire II deux selles. Un artiste du XVe siècle a traduit le mot sella, « siège », de manière erronée, conduisant à représenter le saint donnant deux selles à Clotaire II. Triptyque du XVe siècle, Église de Crocq (Creuse).

Éloi entra au service de l'orfèvre Bobbon, qui reçut une commande du roi Clotaire II pour la fabrication d'un trône d'or orné de pierres précieuses.

Clotaire II donna à Bobbon la quantité d'or nécessaire à la fabrication du siège, qui fut transmise à Éloi. Celui-ci fabriqua deux trônes en évitant la fraude sur la quantité d'or en ne prenant pas « prétexte des morsures de la lime, ou celui de la trop grande ardeur du feu ».

Ce qui fit que jusqu'à la révolution de 1789, on chanta un hymne dans l'église de Noyon, qui fut son évêché :

« Dum vas regi Clotario
Ex auri massa fabricat
Aurum in fabri studio
Summus faber multiplicat. »

Le divin ouvrier (summus faber) aurait multiplié l'or tandis qu'Éloi fabriquait le trône.

L'honnêteté d'Éloi paya, Clotaire II le garda dans son entourage. La confiance que porta le roi envers lui s'accrut lorsque Clotaire II voulut qu'Éloi prête serment, par la pose de ses mains, sur de saintes reliques. Éloi, redoutant Dieu, refusa. Devant l'insistance du roi, Éloi pleura pour son offense envers Clotaire II, et redouta sept fois plus de porter la main sur de saintes reliques.

Ordination de saint Éloi à l'évêché de Noyon. XVe siècle.

L’orfèvre Éloi devint contrôleur des mines et métaux, maître des monnaies[2], puis grand argentier du royaume de Clotaire II, puis trésorier de Dagobert Ier avant d’être élu évêque de Noyon en 641.

Il fonda des monastères à Solignac (631 ou 632) et à Paris (631, monastère Saint-Martial, avec Aure de Paris comme première abbesse, devenu par la suite couvent Saint-Éloi). La fondation de l'abbaye du mont Saint-Éloi près d'Arras lui a été également attribuée, mais cette attribution - insuffisamment fondée - est aujourd'hui contestée.

Saint Éloi est réputé fondateur de l'église de Dunkerque. Il y aurait, selon la légende, pacifié le géant Allowyn, pour protéger Dunkerque des invasions et pillages des Vikings.

Quoiqu'étant encore laïc, il fut élevé en 640 sur le siège de Noyon. Après son élection comme évêque de Noyon, saint Éloi a passé vingt ans à convertir la population druidique des Flandres et des Pays-Bas au christianisme. Son compagnon saint Ouen le relate dans sa Vita d'Eligius.

Investi de toute la confiance de Dagobert Ier, il remplit les missions les plus importantes et réussit notamment à amener Judicaël, duc des Bretons, à faire sa soumission en 636.

Saint-Éloi sauve de l’incendie l’église Saint-Martial et guérit un paralytique dans l’Abbaye de Saint-Denis (enluminure du XIIIe siècle)

Il aurait accomplit des miracles, tels que le sauvetage de l'incendie de l'église Saint-Martial dans l'île de la Cité à Paris et la guérison d'un paralytique dans l'abbaye de Saint-Denis.

En 657, il accueillit sainte Godeberthe (vers 640-vers 700) comme moniale à Noyon.

Éloi porta l'art de l'orfèvrerie à un degré de perfection extraordinaire pour son temps : les plus remarquables de ses ouvrages étaient les bas-reliefs du tombeau de saint Germain, évêque de Paris ; un grand nombre de châsses destinées à renfermer des saintes reliques ; les deux sièges d'or enrichis de pierreries, qu'il exécuta pour Clotaire II ; on pouvait voir encore plusieurs de ces ouvrages en 1789. Il contribua aussi pour une grande part à l'érection de plusieurs monuments religieux.

Éloi avait un disciple, saint Tillon (Thillon) - vulgairement Til ou Théau -, fils de l’un des chefs saxons écrasés par Clotaire II et vendu comme esclave, qu'il avait racheté de l'esclavage et formé à la vie chrétienne et qui fut abbé de Solignac avant de se retirer comme ermite à Brageac[3].

Saint Éloi est généralement considéré comme le saint patron des ouvriers qui se servent d'un marteau, et plus précisément des orfèvres, joailliers, graveurs, forgerons, mécaniciens, chaudronniers, cheminots (en Belgique), horlogers, mineurs, taillandiers, batteurs d'or, doreurs, tisseurs d'or, monnayeurs, serruriers, cloutiers, fourbisseurs, armuriers, balanciers, épingliers, aiguilliers, tireurs de fils de fer, ferblantiers, fondeurs, lampistes, loueurs de voiture, voituriers, cochers, vétérinaires, selliers, bourreliers, maréchaux-ferrants, charrons, carrossiers, charretiers, éperonniers, maquignons, fermiers, laboureurs, valets de ferme, pannetiers, vanniers, bouteillers, mais également du matériel et des militaires logisticiens.

Signature de saint Éloi (Eligius), financier et ministre de Dagobert Ier ; provenant de la charte de la fondation de l'Abbaye de Solignac (Mabillon, Da Re Diplomatica).

Légendes autour de saint Éloi

Tiers de sous d'or de Dagobert Ier. À droite, la croix ancrée est accostée des lettres ELI-GI, désignant son chancelier saint Éloi.

Le maréchal-ferrant

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De nombreuses légendes ont couru en Allemagne, en Belgique et dans le Nord de la France sur l'évêque-orfèvre. L'une d'elles, d'origine allemande, voudrait expliquer pourquoi Éloi fut le patron de tant de corporations[Note 1].

Au dire de cette légende, Éloi, simple maréchal-ferrant, s'était installé à son compte et avait accroché à sa porte une enseigne ainsi conçue : « Éloi. Maître sur maître. Maître sur tous ». Considérant que ce « Maître sur tous » était un défi à la puissance céleste, Jésus-Christ résolut de donner à Éloi une bonne leçon d'humilité.

Le Christ s'habilla donc comme un simple et pauvre forgeron et vient demander de l'embauche à l'atelier d'Éloi.

  • Que sais-tu faire ? demande celui-ci.
  • Je sais forger et ferrer aussi bien que qui que ce soit au monde.
  • Que dis-tu de ce fer que je viens de forger ?
  • Pas mal, mais on peut faire mieux.
Hospices de Beaune, Bourgogne, France. Tapisserie de Guigone de Salins, représentant saint Éloi.

Là-dessus, et sans attendre, Jésus forge un fer bien mieux fini, bien plus élégant que celui d'Éloi. Mais il ne s'arrête pas là. Ayant vu à la porte de la forge un cheval en attente d'être ferré, Jésus lui coupe la jambe, la met sur l'enclume, pose le fer, puis rattache la jambe au cheval qui paraît ne s'être aperçu de rien. Colère d'Éloi qui, pour relever ce défi, coupe une autre jambe du cheval et s'apprête à y poser un fer. Mais le cheval, cette fois, saigne, hennit de douleur, s'abat, et mourrait bientôt si Jésus n'arrêtait miraculeusement l'hémorragie avant de remettre la jambe en place. Du coup, Éloi capitule. Il prend son marteau et brise son enseigne en disant :

  • Qui que tu sois, c'est toi le maître et c'est moi le compagnon.

Alors le Christ :

  • Heureux celui qui s'humilie.

Éloi comprend enfin à qui il a affaire et se prosterne.

  • Je te pardonne, dit le Christ, car je te crois guéri. Reste « Maître sur maître » ; mais souviens-toi que je suis seul « Maître sur tous ».

Il monte en croupe derrière le cavalier propriétaire du cheval dont deux jambes avaient été coupées. Et ils s'en vont. Éloi, qui n'est décidément pas au bout de ses surprises, comprend alors que ce cavalier était saint Georges.

Cette légende tente d'expliquer pourquoi Éloi apparaît sur de très anciennes gravures, tenant une jambe de cheval à la main. Mais elle ne peut être que postérieure au IXe siècle, époque où l'usage de ferrer les chevaux apparut en Occident. (Histoire du Fer à cheval)

La fondation de Dunkerque

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Une autre légende lie Éloi à la fondation de Dunkerque, et à Allowyn - ou Hallewyn -, un géant des Flandres à qui l'on prête beaucoup d'aventures :

Elle se passe au temps du bon roi Dagobert. Dunkerque, à l'époque, n'est rien. Ou presque : une petite église dans les dunes (Duine kercke : l'église des dunes) et quelques huttes au milieu d'une région marécageuse souvent recouverte par la mer (la côte ne fut vraiment fixée dans cette région qu'au XIIIe siècle, ce qui n'interdit pas d'autres inondations, parfois volontaires, pour raison de défense contre l'envahisseur, les dernières ayant été pratiquées lors de la Seconde Guerre mondiale). La ville importante, alors, en ces lieux durs et sauvages, était Mardyck, riche d'un port qui commerçait avec tous les pays du Nord. De l'Escaut à la Somme, on ne connaissait aucun port qui pût rivaliser avec Mardyck. Or, un beau matin, les habitants de Mardyck virent la mer couverte d'étranges barques à l'avant recourbé, où s'agitaient des guerriers immenses et chevelus.

Hélas, ces guerriers étaient affamés. À peine débarqués, ils se mirent à dévorer les enfants. Ils tuaient aussi les parents - ceux du moins qui n'avaient pu s'enfuir -, mais n'appréciaient pas leur chair qu'ils jugeaient sans doute trop dure. Ils n'accordèrent grâce qu'aux jolies filles, pour les raisons que l'on devine. Ces guerriers étaient des Vikings que les habitants désignaient par le vocable « Reuzes[Note 2] », de hardis marins venus de très lointains pays du Nord. Ils jugèrent le site de Mardyck agréable, les maisons des bourgeois confortables, quoiqu'un peu étroites, et les provisions de leurs caves succulentes. Quelques habitants, réfugiés dans le château de la ville, faisaient mine de résister. Mais les Reuzes, qui n'avaient pas réussi à les vaincre, finirent presque par les oublier. Jusqu'au jour où, les meilleures choses ayant une fin, les provisions vinrent à manquer. Les Reuzes, après une nouvelle attaque infructueuse contre le château, décidèrent d'effectuer des razzias dans le plat-pays d'alentour. Les voilà partis sous la direction d'un géant redouté, un féroce, un avide dont le seul nom glaçait de terreur tous les habitants de la région. Il s'appelait Allowyn.

Chaque semaine, des commandos de Reuzes menés par Allowyn allaient faire provision, de victuailles, d'enfants dodus et de jolies filles dans les quelques bourgades qui avaient résisté à leur fureur et à celle des flots : Wattanum (aujourd'hui Watten), Burg-in-Brock (aujourd'hui Bourbourg), et enfin Duine Kercke.

La route de Duine Kercke allait être pour Allowyn une sorte de chemin de Damas. Un beau matin, alors qu'il y débarquait, il se prit les jambes dans les cordages de son navire et tomba sur le visage. Ce qui eut pour effet de lui faire entrer son épée dans la poitrine. Tout le monde le crut mort, à commencer par les pêcheurs dunkerquois qui, réconfortés par ce coup du sort, se jetèrent sur les Reuzes. Ceux-ci, catastrophés, privés de leur chef, cherchèrent le salut dans la fuite. Les pêcheurs s'approchèrent ensuite du corps d'Allowyn : ainsi, c'était donc lui, le géant, le monstre qui avait fait périr leurs enfants et pleurer leurs femmes.

Saint Éloi, justement, passait par là. Il aimait cette toute petite bourgade dont il avait converti les habitants et où il avait fait construire la première église. Il y venait assez souvent et, le jour où Allowyn se transperça malencontreusement la poitrine, l'évêque-orfèvre venait de prendre un bain. Il se trouvait donc sur la côte. Voyant les pêcheurs affairés, il se précipita, les écarta, bénit Allowyn et le fit porter dans sa demeure.

On ne les revit plus de quinze jours. Personne n'osait rien dire ou demander, tant était grande l'autorité d'Éloi. Le seizième jour enfin, saint Éloi fit sortir le géant, guéri, et l'amena à l'église, où il le baptisa et le maria à la plus belle fille du pays. Allowyn s'y installa à demeure, devint le chef des habitants à qui il fit construire des remparts, des tours et des bâtiments.

Ainsi, selon la légende, naquit Dunkerque.

Cette légende ajoute que le géant, par sa force, par sa ruse, par sa piété, ainsi que par ses relations avec les Reuzes, ses anciens compagnons, réussit à écarter de la nouvelle ville les fléaux qui s'abattaient sur tout le pays. Il vécut longtemps : cent ans, un mois, une semaine, un jour et une heure. Le dernier jour, il monta sur une tour, resta longtemps silencieux à regarder vers le nord d'où il était venu, puis il vida une coupe de vin, la lança dans les flots et s'affaissa. En souvenir de lui, les habitants fabriquèrent un grand mannequin d'osier et construisirent une immense tour, à peu près de la même hauteur près de la principale église de la ville.

Cette église fut dédiée à saint Éloi.

Saint Éloi et la métallurgie

En tant qu'orfèvre et monnayeur, saint Éloi est d'abord devenu le saint patron des gens du métier des métaux dont les orfèvres, les chaudronniers et les dinandiers puis, par extension de tous les métiers de la métallurgie et de la mécanique. Les dinandiers de Villedieu-les-Poêles ont choisi saint Hubert, partout ailleurs saint patron des chasseurs. La croix du maître-autel de la basilique de Saint-Denis, qui est visible sur le tableau La messe de Saint-Gilles, aurait été réalisée par saint Éloi[4],[5], de même que le Sceptre de Dagobert, aujourd'hui disparu.

Dans de nombreuses localités des Pyrénées-Orientales, zone de montagne et jadis d'importante activité métallurgique, les mules et chevaux sont encore bénis le 25 juin, jour de la Saint-Éloi d'été. À Serralongue dans les années 1880, lors des festivités de cette date, on faisait danser le contrapàs aux mulets sur l'air de La Marseillaise[6].

Saint Éloi et les dictons

Saint populaire, il fait l'objet de nombreux dictons :

  • « Si, à la Saint-Éloi tu brûles ton bois, tu auras froid pendant trois mois », « Saint-Éloi, de soleil gourmand, nous donne trois jours de beau temps. »
  • « À la Saint-Éloi, la nuit l'emporte sur le jour qui luit » et « Quand arrive la Saint-Éloi, laboureur, tu peux rester chez toi. »
  • « À la Saint-Éloi, les jours allongent du cri d'une oie. » (dicton du Hurepoix).
  • « Saint Éloi le gourmand, sa fête arrive deux fois par an. » (fête le 1er décembre - St Éloi « des boudins » et le 25 juin - St Éloi « des fraises »).

Ces dictons concernent la « Saint-Éloi d'hiver » appelée aussi la « Saint-Éloi des pauvres » ; la « Saint-Éloi d'été » ou « Saint-Éloi des riches » étant fêtée le 25 juin (Saint patron des maréchaux-ferrants, forgerons, puis par extension, des charretiers, laboureurs et cultivateurs)[7].

En Basse-Bretagne, la confusion avec saint Alor

Ploudaniel : la chapelle Saint-Éloi et son calvaire

Le journal La Croix du écrit :

« Bien que concurrencé par saint Herbot, saint Hervé, saint Gildas, le bienheureux Charles de Blois, voire à Plonéour-Lanvern (qui a aussi son « Pardon de chevaux ») par les saints Côme et Damien, saint Éloi est presque universellement prié pour les chevaux en Bretagne. À quelle époque a-t-il pris la place du principal patron, saint Thélo et celle de saint Alar (ou saint Alor), parce qu'en breton Éloi se prononce Elar, Alar, celle de saint Alain, prié à Scaër, de saint Alor, à Ergué-Armel et à Plobannalec, qui souvent se confondent[8]? »

Un ancien évêque de Quimper est saint Alor. Sa vie étant très peu connue, il fut localement assimilé pendant le Moyen Âge à saint Éloi, et le culte de ce dernier est du coup très répandu dans le Finistère et dans les Côtes-d'Armor.

« Pour ce qui est de la protection des chevaux, c’est saint Éloi qui domine tous les autres. Dans le seul diocèse de Saint-Brieuc-Tréguier, il est le patron de 16 églises ou chapelles, et sa statue est présente dans 60 édifices religieux. Plus on va vers l’ouest, plus la dévotion à saint Éloi est grande. Dans le Finistère, plus de 70 paroisses sur 246 sont touchées par ce culte, et on y dénombre au moins une centaine de statues du saint, beaucoup d’entre elles en bois polychrome. Certaines paroisses en ont même plusieurs comme à Plougastel-Daoulas où il n’y en a pas moins de cinq. (...) En Bretagne, la démarche de recours aux saints protecteurs des chevaux ne date pas d’hier. Les archives nous apprennent que vers 1470, le seigneur du Traon, de Morlaix, faisait conduire ses chevaux en pèlerinage à la chapelle de Saint-Éloi, en Bothoa. Les plus anciennes statues qui représentent saint Éloi avec le cheval au pied coupé sont également du XVe siècle. On pourra les voir par exemple à Plougastel-Daoulas, à [la chapelle] Saint-Claude et à Feunteun-Wenn ou encore sur un vitrail de la chapelle de Notre-Dame du Crann à Spézet daté de 1550[9]. »

Des « Pardons aux chevaux » se déroulaient traditionnellement dans de nombreuses chapelles consacrées à Saint-Éloi, par exemple à Ploudaniel, ou encore à Plouarzel et à Ploudalmézeau:

« À Plouarzel et à Ploudalmézeau, le jour du pardon de Saint-Éloi, on fait faire aux juments un saut par-dessus l’eau qui s’écoule ainsi de la fontaine. C’est le Lamm Sant-Alar, le « saut de Saint-Éloi ». La symbolique du saut par-dessus l’eau traduit encore des espoirs de fertilité et de fécondité. Le jour du pardon était tellement propice que certains cultivateurs procédaient à des saillies comme l’observa Soaig Joncour à Plouyé en 1913 : Dans le champ précédant l’oratoire, derrière un talus, un paysan faisait saillir sa jument, coutume assez fréquente, paraît-il, surtout pour les juments réputées stériles, par confiance en l’action bénéfique du saint[9]. »

Un autre exemple est le Pardon de Saint-Eloy à Plérin dont Jean-Baptiste Ogée fait à la fin du XVIIIe siècle la description suivante :

« Après leurs prières faites à la chapelle, ils vont à la fontaine, y puisent de l’eau avec une écuelle, la jettent dans la matrice et sur les oreilles de leur jument, et en arrosent les testicules de leur cheval dans la persuasion que cette eau a des vertus prolifiques. Cette opinion est si gravée dans l’esprit de ces bonnes gens qu'il serait impossible de l’en déraciner. Le pardon des chevaux était une sorte de fête de fiançailles. Les jeunes fermiers célibataires s'empressaient au retour d'offrir à leur douce, sur la croupe de leur monture, une place toujours acceptée avec plaisir. Et on revenait en chantant, mêlant l'éloge du grand saint Éloi aux récits de toutes sortes : marchés, querelles, raccommodements, remarques plus ou moins charitables, projets d'avenir[10]... »

Hommages et postérité

Notes et références

Notes

  1. Elle a été reprise par Louis du Broc de Segange dans Les Saints Patrons des corporations, Paris, 1887.
  2. Le géant de Dunkerque, un grand mannequin d'osier habillé en légionnaire romain et qui occupe une place importante dans le folklore local, s'appelle « Reuze Papa».

Références

  1. François-Joseph Parenty, Vie de saint Éloi, évêque de Noyon et de Tournai. précédée d'une introduction et suivie d'une monographie de l'abbaye du Mont-Saint-Éloi (2e édition, ornée de deux belles gravures sur acier) par saint Ouen, Lille, J. Lefort, (lire en ligne)
  2. Gildas Salaün, « La Monnaie aux temps mérovingiens », Monnaie magazine, , p. 44-49 (ISSN 1626-6145).
  3. « Saint Tillon ou Théau », sur Nominis (consulté le ).
  4. Wyss (Dir.), Atlas historique de Saint-Denis : des origines au XVIIIe siècle.
  5. Blaise de Montesquiou-Fezensac, Une épave du trésor de Saint-Denis, (lire en ligne).
  6. Fabricio Cardenas, « Danse des mulets à Serralongue en 1881 », sur Vieux papiers des Pyrénées-Orientales, (consulté le ).
  7. Gabrielle Cosson, Almanach des dictons météorologiques, Éditions Larousse, Paris, 2003
  8. Marthe Le Berre, Le culte des fontaines en Bretagne dans ses rapports avec les animaux, journal La Croix n° 17 552 du 12 avril 1940, consultable
  9. Daniel Giraudon, Pardon des chevaux en Bretagne et saints guérisseurs, compte-rendu d'un séminaire tenu à Gaillac (Tarn) du 9 au 11 décembre 2005, consultable
  10. Jean-Baptiste Ogée, Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne, nouvelle édition, tome 2, Rennes, 1843

Bibliographie

Sources primaires

  • Ouen, Vita Eligii, éd. MGH, SRM 4, p. 643 sqq. (dMGH)

Études

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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