Élections du Parlement européen

Les élections du Parlement européen, ou élections européennes, sont des élections multinationales destinées à élire les délégations de députés du Parlement européen pour des mandats quinquennaux fixes. Elles se tiennent depuis 1979[1].

L'hémicycle du Parlement européen à Strasbourg.

Le mode de scrutin doit être, depuis 1999, proportionnel. Presque tous les pays utilisaient déjà auparavant le scrutin proportionnel plurinominal, dont la France, qui n'y était pourtant pas habituée. Les Britanniques étaient ainsi les seuls concernés par la directive de 1997[2]. Malte et l'Irlande utilisent une variante plus éloignée, le scrutin à vote unique transférable. Les autres modalités (seuils de voix, circonscriptions, panachage) sont libres.

Différents groupes se forment après chaque élection : les chrétiens-démocrates et partis populaires (PPE), les socialistes et sociaux-démocrates (PSE), les libéraux (ALDE) ; sur les ailes, les eurosceptiques et conservateurs, les nationalistes, la gauche unitaire, les écologistes. À ceux-là s'ajoutent de nombreux non-inscrits.

Les trois premiers groupes sont les plus puissants car presque tous les gouvernements formant le Conseil européen sont de ces partis.

Le nombre de députés est fixé à 751 par le dernier traité en vigueur, le Traité de Lisbonne[alpha 1]. La proportion nationale est fixée d'après ce traité selon une règle de « proportionnalité dégressive » ; les pays les plus peuplés, comme l'Allemagne et la France, ont donc le plus d'eurodéputés, et les pays les moins peuplés, comme le Luxembourg, Malte et Chypre, en ont le moins, mais ont cependant davantage d'eurodéputés par habitant. Cette « proportionnalité dégressive » correspond au concept mathématique de fonction croissante et concave, mais n'est pas strictement respectée : par exemple, la France ou l'Espagne ont le droit à légèrement moins d'eurodéputés par habitant que l'Allemagne, par exemple, alors que celle-ci est plus peuplée.

Les élections se tiennent début juin tous les cinq ans, du jeudi au dimanche (selon les habitudes nationales). Ainsi les dernières élections européennes ont eu lieu du 23 au .

Modalités du scrutin depuis 1979

L'élection se fait au suffrage universel direct, tous les cinq ans, selon un scrutin proportionnel plurinominal (en France, en suivant la méthode d'Hondt) avec un seuil qui ne peut dépasser 5 % des suffrages exprimés. Néanmoins cette règle du seuil n'existe pas en Allemagne qui l'a déclarée anti-constitutionnelle en 2014. Elle n'existe pas non-plus en Espagne, au Portugal, au Royaume-Uni, en Belgique et aux Pays-Bas parmi les pays qui envoient plus de 20 députés. La France applique le seuil de 5 %, ce qui a ainsi conduit à ignorer 19,7 % des scrutins exprimés lors des élections de 2019[3].

Chaque État membre choisit le jour de l'élection suivant ses règles et usages dans une période qui court du jeudi au dimanche soir, 22 heures. Les votes sont en revanche décomptés simultanément dans les pays membres de l'Union européenne et les résultats sont communiqués en même temps.

Les élections sont réalisées au niveau d'une circonscription nationale unique sauf en Belgique, en Irlande, en Italie, en Pologne et au Royaume-Uni.

Électeurs

Critères d'éligibilité

Les conditions que le candidat doit remplir sont[4],[5] :

  • être citoyen de l'Union européenne[4] ;
  • être âgé d'au moins :
    • 18 ans, dans la plupart des pays membres[4] ;
    • 21 ans[4] en Belgique, en Bulgarie, à Chypre, en République tchèque, en Estonie, en Irlande, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne et en Slovaquie ;
    • 23 ans[4] en Roumanie ;
    • 25 ans[4] en Italie et en Grèce ;
  • résider dans l'État membre du lieu de vote ou de candidature ;
  • satisfaire aux dispositions de l'État de résidence relatives au droit de vote et d'éligibilité et applicables aux nationaux. Ainsi l'âge minimum varie selon les pays.

Cas particuliers

  • Arrêt de la Cour européenne de justice concernant le droit du Royaume-Uni à étendre le droit de vote et d'éligibilité pour les élections européennes aux résidents étrangers et citoyens du Commonwealth (en), y compris autres que Malte et Chypre (membres de l'Union européenne), notamment à Gibraltar : « en l’état actuel du droit communautaire, la détermination des titulaires du droit de vote et d’éligibilité aux élections au Parlement européen ressortit à la compétence de chaque État membre dans le respect du droit communautaire, et que les articles 189 CE, 190 CE, 17 CE et 19 CE ne s’opposent pas à ce que les États membres octroient ce droit de vote et d’éligibilité à des personnes déterminées ayant des liens étroits avec eux, autres que leurs propres ressortissants ou que les citoyens de l’Union résidant sur leur territoire. »[6]
  • Arrêt de la Cour européenne de justice concernant la discrimination à Aruba, où seuls les électeurs originaires des Pays-Bas ont le droit de voter aux élections européennes, et pas les Néerlandais originaires d'Aruba : « Des personnes qui possèdent la nationalité d'un État membre et qui résident ou sont domiciliées dans un territoire faisant partie des pays et territoires d'outre-mer, visé à l'article 299, paragraphe 3, CE, peuvent invoquer les droits reconnus aux citoyens de l'Union dans la deuxième partie du traité CE. En l'état actuel du droit communautaire, si rien ne s'oppose à ce que les États membres définissent, dans le respect du droit communautaire, les conditions du droit de vote et d'éligibilité aux élections au Parlement européen par référence au critère de la résidence sur le territoire dans lequel sont organisées les élections, le principe d'égalité de traitement fait toutefois obstacle à ce que les critères choisis aient pour effet de traiter de manière différente des ressortissants se trouvant dans des situations comparables, sans que cette différence de traitement soit objectivement justifiée. »[7]

Changements depuis 2004

La Bulgarie et la Roumanie qui ont adhéré au 1er janvier 2007 à l'Union européenne ont élu au suffrage universel direct au cours de l'année 2007 leurs représentants au sein du Parlement européen. Le mandat de ces derniers prend fin, comme celui des autres députés européens, après les élections européennes de juin 2009 organisées pour la première fois dans 27 États membres.

Nombre de sièges par pays

Lors des élections européennes de 2004, les États membres étaient assurés d'avoir un nombre de sièges fixe jusqu'à l'élection suivante. Avec l'admission de la Bulgarie et de la Roumanie, la répartition a été modifiée.

Compte tenu de l'impossibilité de voir le traité de Lisbonne ratifié à temps, les élections européennes de 2009 se sont faites sur la base des règles imparties par le traité de Nice. 736 députés européens ont ainsi été élus dans un premier temps (contre 785 dans l'assemblée sortante). Une fois le traité de Lisbonne ratifié, un nombre provisoire de 754 députés a été prévu[8], en attendant la mise en œuvre des dispositions définitives du traité (750 + le président). En attendant que cette ratification entre en vigueur, 18 députés « élus » (en ) mais sans droit de vote, avec le statut d'observateurs, ont été rétribués par le Parlement européen[9] et ont siégé en tant que membres à part entière à partir de .

Changements au niveau des effectifs des représentants par pays
État membre 2007 2009
Nice
2009
Lisbonne
     État membre 2007 2009
Nice
2009
Lisbonne
     État membre 2007 2009
Nice
2009
Lisbonne
Allemagne 99 99 96 Tchéquie 24 22 22 Slovaquie 14 13 13
France 78 72 74 Grèce 24 22 22 Irlande 13 12 12
Italie 78 72 73 Hongrie 24 22 22 Lituanie 13 12 12
Royaume-Unia 78 72 73 Portugal 24 22 22 Lettonie 9 8 9
Espagne 54 50 54 Suède 19 18 20 Slovénie 7 7 8
Pologne 54 50 51 Autriche 18 17 19 Chypre 6 6 6
Roumanie 35 33 33 Bulgarie 18 17 18 Estonie 6 6 6
Pays-Bas 27 25 26 Finlande 14 13 13 Luxembourg 6 6 6
Belgique 24 22 22 Danemark 14 13 13 Malte 5 5 6
a Y compris Gibraltar, mais pas les BOT, SBA ou dépendances de la Couronne
b Le Président du Parlement n'est pas officiellement compté, ce qui ramène le nombre total à 750
En italique : pays utilisant un découpage électoral en circonscriptions.
Total: 785 736 751b

Résultats des différentes élections

  1. Élections européennes de 1979
  2. Élections européennes de 1984
  3. Élections européennes de 1989
  4. Élections européennes de 1994
  5. Élections européennes de 1999
  6. Élections européennes de 2004
  7. Élections européennes de 2009
  8. Élections européennes de 2014
  9. Élections européennes de 2019


Taux de participation

Taux de participation par pays pour 100 électeurs inscrits Total
Année DE
AT
BE
BG
HR
CY
DK
ES
EE
FI
FR
EL
HU
IE
IT
LV
LT
LU
MT
NL
PL
PT
RO
UK
SK
SI
SE
CZ
2019[10] 61,4 59,8 88,5 32,6 29,9 45,0 66,0 64,3 37,6 40,7 50,1 58,8 43,4 49,7 54,5 33,5 53,5 84,2 72,7 41,9 45,7 30,7 51,1 36,9 22,7 28,9 55,3 28,7 50,6
2014[11] 47,9 45,7 90,0 35,5 25,0 44,0 56,4 45,9 36,4 40,9 43,9 58,2 28,9 51,6 60,0 30,0 44,9 90 74,8 37,0 22,7 34,5 32,2 36,0 13,0 21 48,8 19,5 43
2009[12] 43,3 46,0 90,4 37,5
20,8
(2013)
59,4 59,5 46 43,9 40,3 40,5 52,6 36,3 57,6 66,5 52,6 20,9 91 78,8 36,5 24,5 37 27,4 34,3 19,6 28,2 43,8 28,2 42,9
2004 43 42,4 90,8
27,7
(2007)
72,5 47,9 45,1 26,8 39,4 42,8 63,2 38,5 58,6 71,7 41,3 48,4 91,4 82,4 39,3 20,9 38,6
29,5
(2007)
38,5 17 28,4 37,8 28,3 45,5
1999 45,2 49,4 91 50,5 63 30,4 46,8 70,2 50,2 69,8 87,3 30 39,9 24 38,8 49,5
1994 60
60,3
(1996)
90,7 52,9 59,1 52,7 73,2 44 73,6 88,6 35,7 35,5 36,4
41,6
(1995)
56,7
1989 62,3 90,7 46,2 54,7 48,8 80 68,3 81,1 87,4 47,5 51,1 36,4 58,5
1984 56,8 92,1 52,4
68,5
(1987)
56,7 80,6 47,6 82,5 88,8 50,9
72,4
(1987)
32,6 59,0
1979 65,7 91,4 47,8 60,7
78,5
(1981)
63,6 85,6 88,9 58,1 32,4 62,0
Source : Parlement européen

Nota bene : Il faut prendre en compte trois pays où le vote est obligatoire. Au Luxembourg, ne pas voter entraîne une lourde amende, tout comme en Belgique (quoique dans les faits les amendes soient devenues très rares, hormis pour les responsables de bureau de vote qui ne se présentent pas). En Grèce, jusqu'en 2001, les administrations publiques requerraient des preuves de vote[Quoi ?], tout comme en Italie, jusqu'en 1993.

De plus, de nombreux pays organisent le même jour d'autres élections, comme, la Belgique, avec ses élections régionales et communautaires depuis 1999.

Projet de réforme avorté

En 2011, le député européen Andrew Duff a proposé de remanier en profondeur le système électoral. Certains députés européens (25 originellement, rapport Duff numéro 1)[13] seraient élus sur la base de listes transnationales établies par les partis politiques européens, et non par les partis nationaux. Cette réforme est perçue comme un moyen de donner une dimension réellement européenne aux élections du Parlement européen, galvaniser ces dernières et donner plus de poids aux partis politiques européens. En parallèle, Andrew Duff propose la création d’un registre électoral unique, une réattribution des sièges régulière afin de tenir compte de l'évolution démographique à l’intérieur de l’Union européenne, et une rationalisation du moment de l'élection. Cependant, du fait d’un manque de soutien au sein du Parlement européen et de l’hostilité des États membres, l’eurodéputé Duff a retiré son projet afin de le retravailler au sein de la Commission des affaires constitutionnelles. Les modifications proposées par cette même commission furent adoptées en , mais le projet n'est jamais revenu par la suite en session plénière.

Préparation des élections de 2019

Le Conseil de l'UE s'est accordé le pour proposer au Parlement que les prochaines élections européennes se tiennent du 23 au . Comme les Français sont habituellement appelés aux urnes le dimanche, c'est donc le que le scrutin aura lieu en France[14],[15]. Les élections de donneront naissance à un Parlement recomposé, après le départ des 73 eurodéputés britanniques, qui réduira le nombre total de sièges de 751 à 705. Une partie des sièges libérés sera répartie entre les Etats membres qui étaient jusqu'à présent sous-représentés.

En , le Parlement européen réuni en session plénière à Strasbourg a pris position sur le nombre de sièges à pourvoir compte-tenu du départ des eurodéputés britanniques, a rejeté l'idée de listes transnationales avancées par la France et a réitéré son soutien au processus dit des « Spitzenkandidaten » pour le choix du président de la Commission européenne[16].

En réunion informelle du Conseil européen le 23 février 2018, les chefs d'État ou de gouvernement ont soutenu la nouvelle composition du Parlement européen à 705 sièges, mais ne se sont pas montrés favorables pour la majorité d'entre eux au système des « Spitzenkandidaten ». Cette question reste donc à trancher, dans la mesure où le TUE ne fixe pas dans le détail l'élection du président de la Commission[17].

Notes et références

Notes

  1. Le nombre a beaucoup évolué : 732 (en 2004), 785 (en 2007), 736 (en 2009), 754 (en 2010-2011). Leur nombre exact dépend de l'entrée en vigueur d'un acte mettant en œuvre les dispositions du traité de Lisbonne et la prise en compte des députés Croates.

Références

  1. « Droit de vote et d’éligibilité aux élections du Parlement européen », sur eur-lex.europa.eu (consulté le ).
  2. Marion Schmid-Drüner, « Fiches techniques sur l'Union européenne – Le Parlement européen : modalités d'élection » [PDF], sur europarl.europa.eu, (consulté le ).
  3. « Élections européennes : Le Conseil constitutionnel valide le seuil de 5 % de voix pour obtenir un siège », sur 20minutes.fr, 20 minutes, (consulté le ).
  4. « Le Parlement européen: modalités d’élection », sur europarl.europa.eu, Parlement européen (consulté le ) : « À part l’exigence de citoyenneté d’un État membre, qui est commune à tous les États membres, les conditions d’éligibilité varient d’un État à l’autre. Nul ne peut être candidat dans plus d’un État membre lors d’une même élection (article 4 de la directive 93/109/CE du Conseil). L’âge minimal pour se présenter aux élections est de dix-huit ans dans la plupart des États membres, sauf en Belgique, en Bulgarie, à Chypre, en République tchèque, en Estonie, en Irlande, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne et en Slovaquie (21 ans), en Roumanie (23 ans), et en Italie et en Grèce (25 ans). ».
  5. Loi no 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen.
  6. Arrêt de la Cour (Grande chambre) du 12 septembre 2006 - Royaume d'Espagne / Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Affaire C-145/04)
  7. Arrêt de la Cour (Grande chambre) du 12 septembre 2006 (demande de décision préjudicielle du Nederlandse Raad van State — Pays-Bas) — M.G. Eman, O.B. Sevinger/College van burgemeester en wethouders van Den Haag (Affaire C-300/04)
  8. Décision du Conseil de décembre 2008 visant à ne pas faire diminuer le nombre de députés pour chaque État membre, avant les élections de 2014.
  9. Revue de presse du gouvernement italien, du 30 mai 2009, ().
  10. Steven Kakon & Vincent Lequeux, « Elections européennes 2019 : une participation en hausse dans l'ensemble de l'Union », sur touteleurope.eu, (consulté le )
  11. « Résultats des élections européennes 2014 : taux de participation », sur resultats-elections2014.eu,
  12. « Européennes 2009 : l'abstention dans l'Union européenne », sur touteleurope.eu,
  13. http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+COMPARL+PE-440.210+03+DOC+PDF+V0//FR&language=FR
  14. « Le Conseil convient des dates pour la tenue des élections au Parlement européen de 2019 », sur Consilium, (consulté le )
  15. « Date des élections européennes: le scrutin aura lieu le 26 mai 2019 », sur Huffingtonpost, (consulté le )
  16. « Européennes 2019 : le Parlement européen fixe ses conditions et rejette les listes transnationales », sur Toute L'Europe https://www.touteleurope.eu, (consulté le ).
  17. « Infographie - L'élection du président de la Commission européenne », sur consilium.europa.eu, Conseil européen, (consulté le ).

Compléments

Lectures approfondies

  • Yves Déloye (dir.), Dictionnaire des élections européennes, Economica, , 705 p. (ISBN 978-2-7178-5055-0)
  • (en) Richard Corbett, Francis Jacobs et Michael Shackleton, The European Parliament, John Harper Publishing, , 480 p. (ISBN 978-0-9934549-5-0)
  • (en) Juliet Lodge, The 2004 Elections to the European Parliament, Palgrave Macmillan, (ISBN 978-1-4039-3518-2)
  • Christophe Réveillard, « Les Partis français au Parlement européen », dans Guillaume Bernard et Éric Duquesnoy (dir.), Les Forces politiques françaises, Coll. Major - rapport Anteios 2007, PUF, 2007, p. 375 et sq.
  • Michel Heintz et Fabrice Serodes (préf. Martin Schulz), Le Parlement européen, Paris, Nane Éditions, .

Lien externe

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