Alphasyllabaire tibétain

L'écriture tibétaine est un alphasyllabaire d'origine indienne, de la famille des écritures brahmiques, utilisé pour écrire le tibétain ainsi que le dzongkha, le ladakhi et parfois le balti.

  • La forme imprimée est appelée écriture uchen (tibétain : དབུ་ཅན་, Wylie : dbu-can, pinyin tibétain : Ujain ; utɕɛ̃ ; 有头体 / 有頭體, yǒutóutǐ ; littéralement : « avec une tête ») utilisée pour le tibétain classique.
  • La forme cursive manuscrite usuelle est appelé écriture umê (tibétain : དབུ་མེད་, Wylie : dbu-med, pinyin tibétain : umê ; umɛ̂] ; 无头体 / 無頭體, wútóutǐ ; littéralement : « sans tête »).

Tibétain

Mantra Om mani padme hum
Caractéristiques
Type Alphasyllabaire
Langue(s) Tibétain
Dzongkha
Ladakhi
Historique
Époque c. 650–present
Créateur Thonmi Sambhota
Système(s) parent(s) Alphabet linéaire [a]

 Alphabet phénicien [a]
  Alphabet araméen [a]
   Brāhmī
    Gupta
     Siddhaṃ
      Tibétain

Système(s) apparenté(s) Limbu
Lepcha
Système(s) dérivé(s) Phagspa
Codage
Unicode U+0F00-U+0FFF
ISO 15924 Tibt
Le texte polychrome à gauche est le premier mantra du bouddhisme tibétain, en sanskrit Oṃ Maṇi Padme Hūṃ (en tibétain : ༀམནིཔདྨེཧཱུྃ, Wylie : oMmanipad+mehU~M). Le texte monochrome à droite est en sanskrit "Oṃ Vajrasattva Hūm" (tibétain : ༀབཛྲསཏྭཧཱུཾ, Wylie : oM badzrasatwa hUM), une invocation à l'incarnation de la pureté originelle.

L'écriture est liée de près à la langue tibétaine au sens large. Ce système d'écriture a été aussi utilisé pour les langues tibétaines non seulement au Tibet, mais également d'autres régions de la Chine, elle y a également influencé l'écriture 'phags-pa, utilisé par les Mongols sous la dynastie Yuan. Elle est également utilisée dans d'autres pays, tel que le Bhoutan, ainsi que dans certaines parties de l'Inde, du Népal et du Pakistan (Chamberlain 2008).

L'écriture est romanisée de multiples façons[1]. Les plus utilisées sont la translittération Wylie, la phonétique simplifiée THL, ainsi que le pinyin tibétain (ou « Zangwen pinyin ») en République populaire de Chine.

Histoire

Thonmi Sambhota, thangka de 2015 dans le style Karma Gardri par l'artiste Sahil Bhopal et le calligraphe Tashi Mannox.

La tradition dit que l'alphasyllabaire tibétain fut créé au VIIe siècle par Thonmi Sambhota, un ministre du roi Songtsen Gampo (33e roi du Tibet), qui est envoyé par ce dernier en Inde en 632. Elle s'inspire d'un alphasyllabaire indien brahmique (la famille des écritures d'Inde), utilisé au Cachemire[2]

Le roi Songtsen Gampo est le père fondateur de la culture tibétaine impériale, qui perdurera jusqu'à la République populaire de Chine et au départ de Tenzin Gyatso en 1959 ; il est à l'origine, en 627 de la période expansionniste militaire du royaume qui deviendra l'Empire du Tibet, et dont l'apogée se situera entre 780 et 790.

Il s'est également marié avec deux princesses qui amenèrent le bouddhisme au Tibet ; la princesse Wencheng, de l'Empire chinois voisin de l'Est et la princesse Bhrikuti du Népal, voisin du Sud, formant ainsi des alliances stratégiques importantes. Le bouddhisme devint alors la religion officielle du Tibet, remplaçant le traditionnel Bön ancienne religion officielle spécifique à cette région, tout en en intégrant certains éléments. Pour mieux diffuser le bouddhisme dans son royaume, Songtsen Gampo envoya 17 étudiants tibétains en Inde pour maîtriser ses langues et par elles, le bouddhisme. Thonmi Sambhota, le plus célèbre de ces étudiants, retourna au Tibet après avoir maîtrisé le sanscrit et s'être initié au bouddhisme. Pourtant, Thonmi Sambhota semble être un personnage légendaire, son nom n'apparaît dans les textes tibétains qu'au XIIIe siècle. En se fondant sur des manuscrits en brahmi et gupta, il aurait conçu l'alphabet, établi la grammaire tibétaine, et traduit du sanscrit, pour la première fois dans l'histoire du Tibet, plusieurs textes bouddhistes importants[3].

Empire mongol

Empire sino-mongol de la dynastie Yuan en 1294
Billet de banque chinois et sa matrice en 1287, utilisant caractères han et phags-pa dérivé du tibétain.

Selon Hugues-Jean de Dianous, sous la dynastie Yuan (1279 — 1368), le Tibet est intégré à l'Empire mongol par Möngke en 1253. Kubilai Khan (1279 – 1294), fondateur de la dynastie sino-mongole Yuan demande au lama tibétain Drogön Chögyal Phagpa, d'adapter l'écriture carrée tibétaine à la langue mongole, jusqu'alors écriture dérivée de l'alphabet syriaque, via l'alphabet ouïghour. Il en ressortira l'écriture phags-pa. Cela permettra d'intégrer la langue mongole aux côtés des caractères chinois, dans l'impression des billets de banques et de divers documents officiels de la dynastie[réf. incomplète][4],[5].

Certains linguistes, tels Gari Ledyard pensent que l'écriture coréenne hangeul aurait été déduite de cet alphabet. L'arrivée de l'imprimerie en Corée, depuis la Chine, coïncide en effet à peu près avec la création de cette nouvelle écriture.

Le bouddhisme tibétain est intégré à la culture mongole sous le règne d'Altan Khan (1502 — 1582). Celui-ci crée le terme de dalaï-lama, qui deviendra alors le nom du chef du gouvernement du Tibet, en fusionnant le mongol dalaï (océan) et le tibétain lama désignant les pratiquants du lamaïsme tibétain[citation nécessaire][6].

Dans les derniers siècles du IIe millénaire, l'écriture tibétaine est utilisée, au monastère Gandan, à Oulan-Bator pour écrire des textes en langue mongole. L'alphabet n'a pas été modifié, les phonèmes de cet alphabet ont été utilisés tels qu'ils sont pour retranscrire la phonétique et grammaire mongole. Il reste aujourd'hui plusieurs dictionnaires tibétain-mongol de termes religieux écrits dans cette utilisation de l'écriture mongole[7].

Mandchous

Les cinq écritures de la dynastie Qing, mandchoue ; mongol, ouïghour, han, tibétain et mandchou.

Sous la dynastie Qing, mandchoue, le Tibet est de nouveau intégré à l'Empire chinois. L'écriture tibétaine est une des cinq écritures de l'Empire. On retrouve souvent sur les différents édifices impériaux, temples et monastères, ces cinq écritures côte à côte ; le mongol traditionnel, le ouïghour, les hanzi (caractères han), le tibétain et le mandchou.

Républiques de Chine

billet de 1956, 2e série des billets de la République populaire de Chine

Sous la République de Chine (1912-1949), les billets de banque, imprimés par différentes imprimeries, dont celles de l'American Bank Note Company, sont écrits en caractères chinois han et en anglais[8], mais sous la République populaire de Chine, on peut voir sur les billets de banque nationaux (depuis la seconde série créée en 1953 et diffusée le ) comportant l'écriture tibétaine, aux côtés de l'écriture ouïghoure, l'écriture mongole traditionnelle, l'écriture han et la transcription du mandarin en caractères latins appelé hanyu pinyin. Si le parlement chinois est sur le plus gros des billets, le billet de 100 yuans, le second, celui de 50, représente le palais du Potala, construit en 1645, au début de la période du Gaden Phodrang (1642 — 1959), rappelant ainsi l'importance de la culture tibétaine pour la Chine[9].

Description

L'écriture tibétaine fonctionne sur le principe d'un alphasyllabaire. Elle comporte 30 lettres de base pour les consonnes, également appelés radicaux.

ka /ká/ kha /kʰá/ ga /kà, kʰà/ nga /ŋà/
ca /tʃá/ cha /tʃʰá/ ja /tʃà/ nya /ɲà/
ta /tá/ tha /tʰá/ da /tà, tʰà/ na /nà/
pa /pá/ pha /pʰá/ ba /pà, pʰà/ ma /mà/
tsa /tsá/ tsha /tsʰá/ dza /tsà/ wa /wà/ (ne faisait pas partie de l'alphasyllabaire à l'origine)[10]
zha /ʃà/[11] za /sà/ 'a /hà/[12]
ya /jà/ ra /rà/ la /là/
sha /ʃá/[11] sa /sá/ ha /há/[13]
a /á/

Voir aussi

Notes

  1. Voir par exemple
  2. « Tibet », sur Larousse
  3. The Three Dharma Kings of Tibet
  4. Hugues-Jean de Dianous, « Le Tibet et ses relations avec la Chine », Politique étrangère,
  5. « Tibet — 3. La théocratie tibétaine (xie siècle-1950) », Larousse (consulté le )
  6. (en) L. Chuluunbaatar et McKay Alex (dir.), Political, economic and religious relations between Mongolia and Tibet, in Tibet and Her Neighbours: A History, Londres, Edition Hansjörg Mayer, , p. 149-155
  7. (en) « MONGOLIAN WRITING », Voice of Mongolia
  8. « Chinese Paper Money », Primal Trek (consulté le )
  9. « BILLETS DE BANQUE - PAPER MONEY - Chine », le site du collectionneur (consulté le )
  10. Tibétain classique ne possédait pas la lettre w, qui était à la place un digraphe pour 'w.
  11. Dans le cas de zh et sh, le h indique une palatalisation et seraient donc mieux notés ź et ś.
  12. Le h ou l'apostrophe (’) indiquent habituellement une aspiration.
  13. Le h isolé représente une fricative glottale sourde. Ces trois notes de bas de page montrent bien l'incohérence de cette transcription qui note de la même manière trois phénomènes différents.

Références

  • Beyer, Stephan V. (1993). The Classical Tibetan Langage. Reprinted by Delhi: Sri Satguru.
  • Chamberlain, Bradford Lynn. 2008. Script sélection for Tibetan-related langages in multiscriptal environments. International Journal of the Sociology of Langage 192:117-132.
  • Csoma de Kőrös, Alexander (1983). A Grammar of the Tibetan Langage. Reprinted by Delhi: Sri Satguru.
  • (1980-1982). Sanskrit-Tibetan-English Vocabulary. 2 vols. Reprinted by Delhi: Sri Satguru.
  • Sarat Chandra Das (1996). An Introduction to the Grammar of the Tibetan Langage. Reprinted by Delhi: Motilal Banarsidass.
  • Heinrich August Jäschke (1989). Tibetan Grammar. Corrected by Sunil Gupta. Reprinted by Delhi: Sri Satguru.

Liens externes

La plaque d'immatriculation d'une voiture du Jammu-et-Cachemire, en caractères romains et tibétains.
  • Portail de l’écriture
  • Portail du Tibet
  • Portail de la Chine
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.