Âge du bronze danois

L’âge du bronze danois (daté par Montelius entre et ) ne commence que tardivement ; en effet, l'ensemble de la Scandinavie ne possédait pas, dans la période antérieure (de la culture de la céramique cordée à l'âge du bronze scandinave), les matières premières nécessaires à la production de l'alliage du bronze. L'âge du bronze danois aurait donc débuté avec l'ouverture commerciale de la Scandinavie au reste de l'Europe. Ces matières premières devaient être importées des îles Britanniques pour l'étain et des Alpes concernant le cuivre ; en outre, celles-ci devaient être probablement commercialisées contre de l’ambre ou d’autres biens (fourrures, peaux et animaux). Les témoignages archéologiques de cette culture s'étendent jusqu'en Estonie[1].

Extension de la culture de l'âge du bronze vers

Cette civilisation est généralement regardée comme la culture originelle des Germains, mais cette théorie fut remise en question notamment du lien entre Âge du bronze danois et culture de Jastorf. Elle marque la transition entre l'ère de la céramique cordée et la culture proto-germanique de l'âge du fer. La langue des peuples issus de cette culture est appelée proto-germanique.

Économie

Pétroglyphes scandinaves (Häljesta, Västmanland en Suède). Ces signes de l'âge du bronze ont été repeints pour une meilleure visibilité, quoiqu'on ignore s'ils étaient peints à l'origine.

Même si les peuples scandinaves ne connurent l'âge du bronze qu'assez tard par rapport au reste de l'Europe, les sites nordiques offrent de beaux spécimens bien préservés d'objets en laine, en bois et en métaux (bronze et or) importés d'Europe centrale. Au cours de cette période, la Scandinavie connut sa première révolution technique après l'âge de la pierre. Les Scandinaves adoptèrent le symbolisme celtique et méditerranéen pour créer un art spécifique et propre à leur civilisation. Parmi les possibles sources d'inspiration de cet art nordique, on a cité la civilisation mycénienne, la culture de Villanova, les Phéniciens et l'Égypte ancienne. Cette influence étrangère a pu se diffuser par le commerce de l'ambre, car les bijoux retrouvés dans les tombes mycéniennes provenaient de la mer Baltique. Plusieurs pétroglyphes dépeignent des bateaux, et les alignements mégalithiques en forme de bateaux témoignent aussi de l'importance de la navigation pour ces peuples. La forme des bateaux représentés a parfois été rapprochée des navires de Méditerranée de l'époque.

Les bronziers nordiques créent des types originaux : épées à manches incrustés, boucliers décorés de spirales, casques à cornes, rasoirs, boîtes de ceintures, boutons, fibules à lorgnons, lur (grandes trompes), témoignent d’une parfaite maîtrise de la fonderie, surtout de -800 à -450. Des objets en pierre continuent à être fabriqués sur le modèle des objets de bronze.

Les Scandinaves de cette période pratiquent la culture du froment, de l’orge, de millet (araires de bois conservés dans les tourbières), et mettent en œuvre des pâturages. Vers -1000, le cheval est domestiqué. La culture du seigle et de l’avoine se répand.

Art et culture

Des vêtements de laine noire, féminins comme ceux de la Femme d'Egtved (jupe courte à franges et pull ou longues pièces nouées à la taille et retombants par-dessus la ceinture) et masculins (capeline formée d’une pièce d’étoffe ovale retenue par une épingle, péplum serré à la taille par une ceinture, bonnets rond, sandales de cuir à lacets), ont été retrouvés presque intacts dans des tourbières.

De nombreuses gravures rupestres de l’âge du bronze (hällristningar) ont été retrouvées au Danemark, dans le Holstein, en Suède et en Norvège : elles représentent des processions, des guerriers au combat, des laboureurs, des rameurs sur des navires, des chars vides, des traces de pas, des cupules creusées dans le rocher.

Religion

On considère le char solaire de Trundholm tiré par un cheval comme une figure mythologique centrale de l'âge du bronze danois.

On sait peu de choses sur la religion scandinave de l'âge du bronze, faute de sources écrites. Mais les nombreuses découvertes archéologiques permettent d'esquisser les contours de leur croyance, ou du moins celles de certaines tribus. Les plus riches témoignages nous viennent des nombreuses inscriptions retrouvées sur des rochers à travers l'Europe du Nord.

La plupart des chercheurs s'accordent pour dire que la religion de l'âge du bronze était organisée autour d'un culte solaire. Le soleil était supposé porté à travers le ciel sur un char tiré par un cheval. Les inscriptions de cette période représentent souvent une roue solaire (généralement une croix latine dans un cercle) brandie par un personnage masculin (avec un pénis protubérant). Toutefois, si le soleil a indiscutablement été adoré comme une figure masculine au cours de l'âge du bronze, les croyances païennes scandinaves ultérieures représenteront le soleil comme une déesse (Sunna chez les Vikings), et le mot « Soleil » est généralement de genre féminin dans les langues germaniques (cf. isl. sól ~ sunna, all. Sonne, got. sauil). On ignore quand cette transition eut lieu ; la réponse est sans doute qu'un mélange de cultures est intervenu entretemps.

  • Les dieux jumeaux indo-européens (appelés Alcis d'après Tacite) semblent avoir fait l'objet d'un culte, ce qui se reflète dans la dualité de nombreux objets sacrés : chaque fois que des artefacts cultuels ont été inhumés, on les retrouve par paire. Alcis rapparaît dans les chroniques des invasions sous les formes de : Raos et Raptos, chefs frères des Astinges gotiques ; Agio et Ibor, chefs frères lombards, ainsi qu'Aggi et Ebbi, chefs danois ; Hengist et Horsa anglo-saxons.
  • Une déesse-mère a été partout vénérée (voir à Nerthus, Njörðr).

Les sacrifices (animaux, humains) ou les consécrations (armes, bijoux) étaient liés au culte de l'eau ; ils étaient pratiqués dans de petits lacs ou des marais et l'on a retrouvé plusieurs objets dans de tels endroits. Des rites de type hieros gamos étaient courants. Des objets rituels comme les lurs en bronze ont été consacrés et ont servi dans des cérémonies.

Tumulus de l'âge du bronze (Gårdstånga, Skåne en Suède).

Les inscriptions gravées dans la pierre à l'âge du bronze comportent peut-être les premières représentations de dieux connus de la mythologie nordique. Une figure récurrente de ces pierres gravées est un personnage masculin tenant un objet qui ressemble à une hache ou un marteau. D'autres personnages masculins tiennent une lance : comme une des gravures représente un personnage privé d'une main, ce personnage se rattacherait à Týr, qui est associé à cette arme. Un autre personnage tenant un arc pourrait être une préfiguration de Ullr.

On retrouve des échos de ces croyances de l'âge du bronze dans les mythologies nordique et westique, par exemple Hrímfaxi et Skínfaxi, ou Nerthus.

Les sépultures du Danemark sont des tumulus construits sur les lieux de passage où le corps repose dans un cercueil creusé dans un tronc d’arbre.

Au Xe siècle av. J.-C., l’usage de l’incinération se généralise. Les rites d’inhumation évoluent vers l’ensevelissement individuel, en particulier dans des sarcophages de pierre (stenkistor). Un culte rendu à une divinité solaire et aux dieux de la fertilité-fécondité (Freyr et Freya, Vanes) est attesté dans les représentations des grands pétroglyphes (hällristningar). Certaines tombes sont particulièrement riches (armes très ornées, bijoux).

Effets climatiques

L'expansion des Germains à la fin de l'âge du bronze danois (à partir de )

Il semble qu'une transition climatique survenue vers soit à l'origine de l'âge du bronze danois. Un climat chaud (comparable à celui de la Méditerranée actuelle) permit une forte croissance de la population et favorisa le rendement des cultures : on sait par exemple qu'on cultivait le raisin en Scandinavie à cette époque. Mais un changement de climat entre -850 et -760 et un refroidissement prononcé vers -650 (auquel on a rattaché la légende du Fimbulwinter précédant Ragnarök) dégradèrent sérieusement les conditions de vie.

Il est probable que cette transition climatique du VIIe siècle avant notre ère ait poussé les tribus germaniques vers le sud et l'Europe centrale. Il y avait déjà à ce moment des tribus scandinaves dans l'est de l'Europe ; un millénaire plus tard, les nombreuses tribus germaniques se réclamant d'origine scandinave (par ex. les Lombards, les Burgondes, les Goths et les Hérules) appelaient la Scandinavie (Scandza) la matrice des peuples[2]. L'influence scandinave en Poméranie et dans le nord de la Pologne à partir de -1300 paraît même avoir été si forte que ces deux régions sont incluses dans la culture de l'âge du bronze danois (Dabrowski 1989, p. 73).

L’âge prospère du bronze danois disparaît vers , peut-être à cause de la détérioration subatlantique du climat : les pays nordiques connaissent alors un déclin millénaire. Vers 400 ap. J. Chr., cependant, une nouvelle civilisation (une civilisation de l'âge du fer, cette fois) devait naître sur ces mêmes terres, celle de Vendel.

Références

  • Émilienne Demougeot, La formation de l'Europe et les invasions barbares., Aubier, (OCLC 863320922).
  • Oscar Montelius, Om tidsbestämning inom bronsåldern med särskilt avseende på Skandinavien (1885)
  • Lucien Musset, Les invasions : les vagues germaniques, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Histoire et ses problèmes », , 3e éd. (1re éd. 1965), 329 p. (ISBN 978-2-13-046715-1, OCLC 299457554)
  • Dabrowski, J. Nordische Kreis un Kulturen Polnischer Gebiete. (1989) Die Bronzezeit im Ostseegebiet. Ein Rapport der Kgl. Schwedischen Akademie der Literatur Geschichte und Alter unt Altertumsforschung über das Julita-Symposium 1986. Éd Ambrosiani, B. Kungl. Vitterhets Historie och Antikvitets Akademien. Konferenser 22. Stockholm
  • (en) Ingemar Nordgren, The well spring of the Goths : about the Gothic peoples in the Nordic countries and on the Continent, New York, iUniverse, , 652 p. (ISBN 978-0-595-33648-7, OCLC 185726177, lire en ligne)
  • (en) Anders Kaliff, Gothic connections : contacts between eastern Scandinavia and the southern Baltic coast 1000 BC-500 AD, Uppsala, Department of Archaeology, coll. « Occasional papers in archaeology » (no 26), , 70 p. (ISBN 978-91-506-1482-4, OCLC 441846075).

Source

  1. (en) « http://www.bronzeage.net/page10.html »(ArchiveWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), sur bronzeage.net (consulté le )
  2. Selon le chroniqueur Jordanès dans ses Getica.

Voir aussi

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