Afin de protéger au mieux vos données personnelles, il peut vous être nécessaire de chiffrer vos données. Depuis Dapper, Ubuntu propose en standard les outils pour y parvenir. Cryptsetup propose de créer un conteneur chiffré qui, une fois déverrouillé, sera vu comme un volume (un fichier de blocs) et pourra accueillir votre système de fichier, un LVM, etc.
Dans article, nous verrons comment créer un conteneur chiffré au sein d'un environnement existant en utilisant soit une partition spécialement réservée soit en créant un fichier dans le système de fichier existant. En seconde partie, nous verrons comment installer un système sur un volume chiffré dans une configuration dite quasi-intégrale. Comme Truecrypt, cryptsetup propose la création de volume cachée qui permettent d'invoquer le déni plausible ; nous n'abordons pas cette fonctionnalité pour le moment.
Pour fonctionner, cryptsetup utilise un fichier de périphériques de blocs ; il s'agit de notre support. Un fichier régulier est un fichier qui se trouve dans votre système de fichier. Un fichier de périphérique de blocs se présente comme un fichier dans votre système de fichier. En réalité, il s'agit d'un à un périphérique de stockage réel (/dev/sdX, /dev/cdrom) ou virtuel (/dev/random). Pour être respectueux de l'état de l'art, un support doit présenter certaines propriétés pour être cryptographiquement sûr. Dans cette section nous verrons comment vous pourrez créer un fichier de périphérique de bloc virtuel (au cas où vous n'en n'aurez pas de réel qui soit disponible). Nous verrons ensuite comment rendre un fichier de blocs cryptographiquement sûr. Pour finir, nous verrons comment formater le support pour qu'il accueil un container chiffré.
Si vous n'avez pas prévu un périphérique de stockage (clef USB, partitions de votre disque-dur interne etc), vous pouvez toujours créer un bloc de fichier virtuel. Cette méthode offre un maximum de flexibilité, toutefois elle entraîne une diminution de performance qui peut être de négligeable à importante (par exemple, en cas de défaut d'alignement ou de nombreuses sur-couches). Contrairement à Truecrypt, la taille de ce fichier n'augmente pas en fonction de son utilisation. Les défauts cryptographiques introduit par de tels mécanismes sont en effet trop grand. Par conséquent, vous devez connaitre à l'avance la taille que vous allez allouer.
Dans un premier temps, on crée un fichier régulier dans votre système de fichier grâce à l'instruction dd. Dans un second temps, vous demanderez à Linux de créer un fichier de blocs pour accéder à ce fichier régulier. Ajustez la taille en Mio en modifiant la valeur count.
# Création d'un fichier 10Mio (bs x count) dd if=/dev/urandom bs=1M count=10 of=/chemin/du/fichier_regulier # Création d'un fichier de blocs losetup /dev/mapper/loop0 /chemin/du/fichier_regulier
Nous utiliserons la commande spécialisée shred qui fonctionne sur les fichiers de blocs et qui permet de réaliser plusieurs passes de nettoyage. Notez que les les fichiers de blocs créés avec la méthode présenté précédemment profitent déjà d'une passe de nettoyage. Adaptez le nombre de passe de nettoyage en fonction de la confidentialité de vos données mais sachez que une passe est suffisant.
# Nettoyage en une passe d'un fichier de bloc shred --iterations=N --verbose /dev/volume/a/nettoyer
Pour formater une partition ou un fichier de bloc sans autres particularité, utilisez cette commande (une phrase de passe vous sera demandée).
cryptsetup luksFormat --cipher=aes-xts-plain64 --hash=sha256 --key-size=256 /dev/fichier_de_bloc_a_utiliser
Cette section suppose que vous disposez d'un container chiffré. Dans un premier temps, nous observerons les opérations courantes associées à un container chiffré. Nous verrons ensuite comment automatiser certaines étapes pour rendre l'utilisation de votre container plus agréable.
Nous avons vu que cryptsetup utilise comme support des fichiers spéciaux appelés fichier de blocs. Lorsque l'on déverrouille un conteneur chiffré, cryptsetup crée un nouveau fichier de bloc (virtuel) mais au contenu déchiffré. Les conteneurs déverrouillés sont placés dans /dev/mapper/nom_du_container_deverrouille. Le verrouillage d'un container consiste simplement à faire disparaître le fichier de blocs en clair.
# Deverouille le container cryptsetup luksOpen /dev/fichier_bloc_chiffre nom_du_fichier_bloc_dechiffre # Fait disparaître le fichier de bloc déchiffré (verrouille) cryptsetup luksClose nom_du_fichier_bloc_dechiffre
Un container chiffré peut avoir jusque 8 clefs de déchiffrement. Voici les commandes qui permettent respectivement de connaitre le nombre de clefs utilisé, d'ajouter une clef et de retirer une clef.
sudo cryptsetup luksDump /dev/volume_securise sudo cryptsetup luksAddKey /dev/volume_securise sudo cryptsetup luksRemoveKey /dev/volume_securise
Cette partie n'est pas encore correctement rédigée. La configuration des paramètres du volume chiffré est dans le fichier /etc/crypttab et le montage du volume est de manière classique dans /etc/fstab. Vous pouvez trouver le UUID de votre partition chiffrée avec la commande blkid.
# <target name> <source device> <key file> <options> nom_du_volume_deverrouille UUID=uuid-du-volume-securise none luks
# <file system> <mount point> <type> <options> <dump> <pass> /dev/mapper/nom_du_volume_deverrouille /point/de/montage ext4 defaults 0 1
Si vous voulez installer Ubuntu sur un disque chiffré, quelques manipulations supplémentaire à la partie précédente sont necessaires. Il faut demander d'ajouter des modules à l'initramfs et le configurer pour nous demander de saisir un mot de passe et de déverrouiller le disque avant de lancer init. Pour cela nous allons ajouter un hooker pour y saisir notre mot de passe et un script de génération de configuration (pour dire ce qu'on déverrouille) à la configuration du générateur de l'initram-fs.
Commencez par vous chrooter dans votre d'installation :
mount /dev/volume/dinstallation /target mount --bind /dev /target/dev mount -t proc /proc /target/proc mount -t sysfs /sys /target/sys chroot /target/
Ajoutez les modules :
dm-crypt dm-mod serpent sha256 xts sd_mod blkcipher
Ajoutez les scripts :
ln --symbolic /usr/share/initramfs-tools/hooks/cryptroot /etc/initramfs-tools/hooks/ ln --symbolic /usr/share/initramfs-tools/scripts/local-top/cryptroot /etc/initramfs-tools/scripts/local-top/ touch /etc/initramfs-tools/conf.d/cryptroot
Le script de génération a quelques défauts :
Maintenant qu'on a bien détaillé au système la procédure de démarrage, on va appliquer nos modifications :
update-initramfs -k all -c
On peut grâce à LUKS monter automatiquement les partitions chiffrées au démarrage sans mots de passe à taper. Ceci est possible par l'intermédiaire d'une clé USB ou d'une carte SD ou MS : http://petaramesh.org/post/2007/11/29/Une-cle-de-contact-pour-votre-portable-chiffre
Suivre la procédure indiquée plus haut, mais modifier le fichier /etc/crypttab :
# <target name> <source device> <key file> <options> home /dev/hda7 /dev/sda:/keyfile:1 luks,keyscript=/lib/cryptsetup/scripts/passdev home /dev/hda7 none luks
De cette manière, le système va tenter de déchiffrer la partition /dev/hda7 au moyen du fichier clé “keyfile” se trouvant sur le périphérique /dev/sda (en FAT par exemple). Le “1” représente le temps d'attente avant de demander le mot de passe si le fichier clé n'est pas trouvé.
Les techniques exposées plus haut offrent un haut niveau de sécurité pour peu que la phrase-pass de LUKS ait été bien choisie. Cependant, elles sont également assez lourdes, dans la mesure où elles nécessitent que l'utilisateur rentrent à chaque démarrage sa pass-phrase (ou qu'il porte sur lui en permanence le support amovible permettant l'ouverture du conteneur chiffré). La méthode proposée ici va permettre d'ouvrir automatiquement le conteneur chiffré et de monter la partition chiffrée au démarrage de la session, sans que la pass-phrase ne soit saisie. La partition chiffrée n'est donc plus protégée que par le mot de passe d'ouverture de session.
La pass-phrase de la partition chiffrée et le mot de passe associé au compte doivent être les mêmes (PAM ne fait que “passer” le mot de passe de session pour le montage de la partition), cela a donc des implications lorsque le mot de passe de l'utilisateur doit être changé : il faut au préalable rajouter une pass-phrase (identique au nouveau mot de passe) dans un nouveau “slot” et une fois que cela est validé, supprimer l'ancienne passphrase.
Le niveau de sécurité est donc plus bas, mais le chiffrement devient parfaitement transparent pour l'utilisateur. Cette solution convient donc bien si vous souhaitez simplement protéger vos données personnelles en cas de vol de votre machine par un quidam quelconque, mais peut-être pas si vous avez des documents vraiment confidentiels à protéger.
Nous allons utiliser PAM, utilitaire habituellement utilisé pour le montage automatique de partitions sur des postes multi-utilisateurs.
La situation est la suivante: la partition /dev/sda2 est notre partition chiffrée. Elle doit être montée automatiquement au point /mnt/cryptodisk. Les opérations suivantes ont donc été effectuées au préalable:
#Création du containeur chiffré. Attention, la partition ne doit pas être montée. De plus, toute donnée présente sur cette partition sera perdue: sudo cryptsetup luksFormat /dev/sda2 #Ouverture du conteneur nouvellement créé, à qui on donne le nom de "cryptodisk": sudo cryptsetup luksOpen /dev/sda2 cryptodisk #Création du système de fichier ext3 sur cette partition chiffrée: sudo mkfs.ext3 /dev/mapper/cryptodisk #Création du point de montage: sudo mkdir /mnt/cryptodisk #Définition du point de montage: Dans le fichier /etc/fstab, notez l'option #"noauto" qui permet de faire apparaître la partition dans le fichier fstab #sans pour autant la monter automatiquement au démarrage /dev/mapper/cryptodisk /mnt/cryptodisk ext3 defaults,noauto 0 0 #Et on s'arrête là. Ne RIEN ajouter dans le fichier /etc/cryptab
Notre partition chiffrée est à présent créée, formatée, et un point de montage a été défini. Il ne reste plus qu'à indiquer à PAM de la monter automatiquement à chaque ouverture de session (sans demande de la pass-phrase donc).
#Installation de la librairie: sudo apt-get install libpam-mount
Indication à PAM de la partition à monter : éditer le fichier /etc/security/pam_mount.conf.xml. Au début du fichier, après la première balise <pam-mount>, ajouter la ligne suivante:
<volume user="*" mountpoint="/mnt/cryptodisk" path="/dev/sda2" fstype="crypt" />
La partition /dev/sda2 de type “crypt” (partition chiffrée) sera montée à l'ouverture de session sans demande de la phrase-pass sur le point de montage /mnt/cryptodisk, et ce quelque soit l'utilisateur qui se connecte.
Et pour finir, il suffit d'indiquer à gdm (dans le cas de Gnome) ou kdm (pour KDE) d'appeler PAM. Ouvrir ainsi dans le cas de Gnome le fichier /etc/pam.d/gdm, et ajouter à la fin de ce fichier la ligne
@include common-pammount
Remarque : ceci n'est plus utile depuis Jauty.
Et voilà! Il ne vous reste plus qu'à redémarrer votre machine, et à l'ouverture de session la partition chiffrée sera ouverte et montée automatiquement, sans que la pass-phrase ne vous soit demandée. Bien entendu, si vous avez au préalable désactivé l'authentification pour l'ouverture de la session, cela ne sert pas à grand chose d'avoir une partition chiffrée (car alors l'authentification étant désactivée, la session est ouverte automatiquement à chaque démarrage et la partition chiffrée est également ouverte et montée automatiquement et sans pass-phrase à chaque démarrage).
Remarque: méthode testée et approuvée sous ubuntu 10.04
Par défaut le niveau de priorité du démon de chiffrage est trop élevé et peu induire des ralentissements gênants. Vous pouvez modifier cette priorité à l'aide de la commande renice :
sudo renice 10 `pgrep kcryptd`
Pour exécuter cette commande à chaque démarrage, il faut la placer dans le fichier /etc/rc.local avant la ligne exit 0 sans sudo car c'est le système avec les droits administrateur qui l'exécutera.
#!/bin/sh -e # renice 10 `pgrep kcryptd` exit 0
Le fait de chiffrer votre dossier /home (par exemple) nécessite de taper la clef d'ouverture du volume chiffré lors de la séquence de démarrage de l'ordinateur, mais sous Edgy le système de boot n'est plus séquentiel comme sur Dapper, ce qui entraîne pour l'heure que le lancement de Xorg (le serveur graphique) n'attendra pas que vous ayez tapé votre clef d'ouverture du volume.
Une des solutions pour l'heure est d'installer sysvinit avec Synaptic au lieu d'Upstart (le nouveau système de démarrage, intégré dans Edgy).
Grâce au logiciel FreeOTFE, il est possible de monter de façon non permanente une partition luks encryptée par Cryptsetup sous Linux à partir de votre système Windows.
Pour monter et utiliser le même type de partition que celle décrite dans ce wiki, voici les étapes :
Une bonne référence : https://wiki.ubuntu.com/EncryptedFilesystemHowto