Pierre-André Taguieff (né le à Paris) est un philosophe, politologue et historien des idées français.

Essais

La Couleur et le Sang, 2002

Si le racialisme de Gobineau n’a pas fait école en France, s’il n’y a pas été porté par un mouvement politique, c’est d'abord parce que les conclusions pessimistes de l’Essai interdisaient qu’on les traduisît en projet politique, c’est ensuite en raison de l’incompatibilité du nationalisme français, incarné par l’Action française (fondée en juin 1899), avec toute forme de matérialisme biologique, dont la « doctrine des races », attribuée à l’ennemi allemand, serait la version proprement germanique. La xénophobie anti-allemande de Charles Maurras s’est ainsi appliquée à Gobineau : le gobinisme a été dénoncé par l’Action française, dès le début du siècle, comme une variante particulièrement dangereuse et détestable de « germanisme », voire de « pangermanisme ».
  • La Couleur et le Sang (1998), Pierre-André Taguieff, éd. Mille et Une Nuits, 2002  (ISBN 2-84205-640-X), chap. I. Le racialisme pessimiste : la vision gobinienne de l’histoire comme décadence, p. 28

La Foire aux illuminés, 2005

Dans la nouvelle culture de masse, un œil quelque peu exercé discerne avec autant d'aisance que de stupeur la présence de motifs qui, jusque dans les années 1970, étaient l'apanage d'une extrême droite nourrie du grand mythe politique fabriqué par les penseurs contre-révolutionnaires à la fin du XVIIIe siècle, celui du complot international dirigé contre la civilisation chrétienne. Un complot maçonnique puis judéo-maçonnique, dont la légende des « Illuminés de Bavière »([…]), élargie en celle des « Illuminati », n'a cessé d'être l'une des principales composantes.
  • La Foire aux illuminés, Pierre-André Taguieff, éd. Mille et une nuits, 2005  (ISBN 2-842-05925-5), partie Introduction, p. 13
Ce qu'il est convenu d'appeler, d'une façon peu satisfaisante, la « théorie du complot » ([…]) désigne confusément diverses attitudes (sentiments ou perceptions), croyances (ou convictions), perspectives ou systèmes de pensée à prétention explicative.
  • La Foire aux illuminés, Pierre-André Taguieff, éd. Mille et une nuits, 2005  (ISBN 2-842-05925-5), partie Introduction, p. 17

Les Contre-réactionnaires, 2007

J'appelle contre-réactionnaires ceux qui recourent au progressisme pour mettre en accusation leurs rivaux, leurs adversaires ou leurs ennemis, en vue de les disqualifier totalement, en commençant par les exclure de l’espace des débats légitimes.
  • Les Contre-réactionnaires : Le Progressisme entre illusion et imposture, Pierre-André Taguieff, éd. Denoël, 2007  (ISBN 978-2-207-25321-2), partie Introduction, p. 11
À travers bien des avatars, le progressisme, né dans l’enthousiasme pour les Lumières, a fini par devenir une nouvelle orthodoxie et, à travers son instrumentalisation par le totalitarisme communiste, une doctrine de haine doublée d’un permis de haïr avec bonne conscience, bref, une machine à fabriquer des ennemis absolus. Le progressisme, c’est la foi dans le progrès sans l’esprit critique ni le sens de la tolérance, avec la conviction dogmatique de posséder la vérité et d’être installé dans le Bien.
  • Les Contre-réactionnaires : Le Progressisme entre illusion et imposture, Pierre-André Taguieff, éd. Denoël, 2007  (ISBN 978-2-207-25321-2), partie Introduction, p. 19
  • Citation choisie pour le 21 septembre 2019.


Il ne faut pas sous-estimer le risque d'une perversion de la démocratie, son possible retournement en son contraire lorsqu'elle devient un système dans lequel la majorité impose ses volontés ou son opinion aux minorités sans discussion, avec arrogance et mépris.
  • À propos de ce que l'auteur qualifie de « terrorisme intellectuel » ou de pensée unique « progressiste ».
  • Les Contre-réactionnaires : Le Progressisme entre illusion et imposture, Pierre-André Taguieff, éd. Denoël, 2007  (ISBN 978-2-207-25321-2), partie 1. Fabrication d’une légende : les « nouveaux réactionnaires », chap. 2. Le retour du spectre : « néoréacs » et nouveaux « fachos ». Haines abstraites et lynchage médiatique, p. 78
Croire au progrès technique sur fond de conviction scientiste, dès le dernier tiers du XIXe siècle, c'était croire au progrès de l'espèce humaine. C'était plus précisément croire que le progrès technique allait assurer le plus grand progrès possible de l'humanité vers la liberté et le bonheur. Il faut en effet tenir compte d'un clivage dans le champs des fins du progrès explicitement conceptualisées par les penseurs progressistes : d'une part, les finalités de l'ordre de la liberté, de la libération ou de l'émancipation (dont la condition nécessaire est le progrès du savoir); d'autre part, les finalités d'un tout autre ordre, résumable par le mot « bonheur », dont les conditions de possibilité (sécurité dans la paix et pleine satisfaction des besoins, d'où bien-être, plaisir, etc.) sont imaginées comme des effets de la maîtrise rationnelle ou théorico-pratique (par la science et la technique) de la nature (d'où l'éloge saint-simonien de l'exploitation sans limite de la terre), mais aussi de la société, d'où le souci commun à Saint-Simon, à Comte, à Renan et à Marx, de l'organisation et de la réorganisation de l'ordre social. L'humanité cesse d'être conçue « à l'image de Dieu », elle devient Dieu lui-même, elle s'y substitue en un sens, pour devenir le sujet de l'histoire universelle, dont le « progrès » est le moteur.
  • Les Contre-réactionnaires : Le Progressisme entre illusion et imposture, Pierre-André Taguieff, éd. Denoël, 2007  (ISBN 978-2-207-25321-2), partie 2. Au nom du Progrès : du progressisme à l’antifascisme, chap. 4. Progrès, « religion du progrès », progressisme et au-delà. Esquisse d’une généalogie, p. 270-271
L'antifascisme démocratique fut admirable, le pseudo-antifascisme stalinien effroyable, le néo-antifascisme est pitoyable. Une fois de plus, l'Histoire nous offre le spectacle de la répétition comique d'un épisode tragique. En l'absence de ses justifications historiques, un engagement héroïque est mimé d'une façon à la fois odieuse et burlesque.
  • Les Contre-Réactionnaires : Le Progressisme entre illusion et imposture, Pierre-André Taguieff, éd. Denoël, 2007  (ISBN 978-2-207-25321-2), partie 2. Au nom du Progrès : du progressisme à l’antifascisme, chap. 6. Les avatars de l’antifascisme. Mythologies de la « résistance », p. 484

Entretiens et articles

Sur le mythe du complot juif

L'essentiel c'est de bien comprendre que le complot juif ou judéo-maçonnique mondial a deux caractéristiques. Bon. Premièrement c'est un complot chimérique, parce que évidemment il y a des complots réels. Rien n'empêche qu'il y ait des complots mondiaux réels ! Mais il se trouve que le complot juif ou judéo-maçonnique mondial est une invention, c'est une construction mythique. C'est d'ailleurs même un des grands mythes politiques modernes, il n'y en a pas beaucoup. C'est, je dirais, le principal mythe politique moderne.
  • Pierre-André Taguieff, Les Protocoles des Sages de Sion (2005), écrit par Quélou Parente

Sur les relations entre Israël et le monde musulman

L’enracinement et l’expansion, dans l’imaginaire du monde musulman, d’un grand récit négatif sur Israël et le « sionisme » constituent l’un des principaux obstacles à l’établissement d’une paix véritable et durable au Proche-Orient.
  • « La question israélienne est la nouvelle question juive », Pierre-André Taguieff, Atlantico, 21 septembre 2011 (lire en ligne)
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