Armand Cuvillier (1887-1973) est un professeur de philosophie et journaliste français.

Manuel de Philosophie, tome 1 - Introduction générale, Psychologie, 1947


Renan avait écrit que l'esprit humain débute, chez le primitif, par un syncrétisme, c'est-à-dire par « une première vue générale, compréhensive, mais obscure et inexacte », où « tout est entassé sans distinction. (Avenir de la Science, 301). Les psychologues contemporains ont repris cette idée en l'appliquant à l'enfant. Ils ont montré que celui-ci commence par une « perception globale », une « vision d'ensemble » et ont donné de curieux exemples de ces perceptions syncrétiques »
  • Manuel de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Armand Colin, 1947, t. 1. Introduction générale, Psychologie, p. 427
l'état primitif de la pensée est un syncrétisme, c'est-à-dire un état confus, où les distinction sur lesquelles repose la pensée claire, ne sont pas encore formées
  • Manuel de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Armand Colin, 1947, t. 1. Introduction générale, Psychologie, p. 473
Mais l'étude de la perception nous a montré que, loin de débuter par la perception de l'individuel, nous débutons par une intuition confuse, globale, syncrétique des choses et que la perception individualisée est un progrès relativement tardif.
  • Manuel de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Armand Colin, 1947, t. 1. Introduction générale, Psychologie, p. 496

Manuel de philosophie, tome 2 - Logique, Morale, Philosophie générale, 1947

Logique

En résumé, la religion et la technique préparent le terrain à la pensée scientifique, mais ni l'une ni l'autre n'est encore la science. La science n'a pu naître précisément que le jour où la pensée humaine, opérant d'ailleurs ainsi une véritable « conversion » sur elle-même, est devenue capable de 'se libérer à la fois de la pensée mystique et de la pensée utilitaire'.
  • Manuel de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Armand Colin, 1947, t. 2. Logique - Morale - Philosophie générale, partie 1. Logique, chap. II. La science et l'esprit scientifique, p. 48

Philosophie générale

... la science n'est vraiment devenue elle-même que du jour où elle parvint à s'émanciper de la pensée technique aussi bien que de la pensée théologique (p.47, D.)
  • Manuel de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Armand Colin, 1947, t. 2. Logique - Morale - Philosophie générale, partie 3. Philosophie générale, chap. III. Les doctrines contemporaines, p. 532

Cours de philosophie, tome 1, 1954

L'« égocentrisme » enfantin (§40)

L'esprit du tout jeune enfant relève, lui aussi, de cette semi-inconscience. J. Piaget l'a qualifié, du terme équivoque, d'égocentrisme, voulant dire par là que l'enfant « ne dissocie en rien le moi et les choses ». [...] D'où un syncrétisme qui confond en un seul ordre de deux choses que l'adulte a appris à distinguer [...]; un réalisme pour lequel toute donné immédiate est réalité [ax ; le rêve]; un animisme ou un artificialisme qui voit dans toutes choses de la nature des êtres animés ou des objets fabriqués [...] par une non distinction de l'ordre naturel et de l'ordre humain; un finalisme enfin qui fait que l'enfant se représente choses et événements sous un aspect utilitaire aboutissant à lui-même [...]. Cet égocentrisme est particulièrement marqué dans cette « pensée de rêve » qui accompagne le jeu, l'enfant qui jour confond l'imaginaire et le réel. [...] Il fait de l'affabulation [...].
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie Introduction, chap. Les niveaux de conscience : l'inconscience et l'attention, p. 49

Analyse et Synthèse (§65)

« Tout connaissance, a-t-on dit, est une analyse entre deux synthèses » A vrai dire, la première phase ne mérite guère ce nom de synthèse. C'est plutôt, comme a dit Renan, un syncrétisme, c'est-à-dire une vue globale, mais confuse dans laquelle les éléments ne sont pas encore distingués.
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. Les différents types de connaissances, p. 103

Du syncrétisme aux objets distincts (§83)

Ce qu'on peut retenir de la théorie de la Forme, c'est que la perception ne part pas chez l'enfant, d'éléments isolés, mais de certains ensembles et ces éléments ne sont pas, primitivement, des ensembles analysées ni des ensembles construits : ils sont perçus syncrétiquement.
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. La perception sensible, p. 103
Ce syncrétisme n'est pas à proprement parler, une perception structurée, organisée, comme le voudrait le Gestaltisme. L'enfant ne prend pas conscience des rapports. Il est, commentait CLAPARÈDE, « dans le même état d'esprit qu'un adulte qui ignore et qui ne sait pas qu'il ignore. Il n'analyse pas ce qu'il a sous les yeux, si les parties du tout qu'il observe lui sont encore inconnues ou ne suscitent pas son intérêt d'une façon particulière. »
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. La perception sensible, p. 104
la loi du syncrétisme ne vaut pas également pour tous les sens. Ainsi comme le note J. Delay, [...] « ... il y a une différence fondamentale entre les "formes" optiques et les "formes" tactiles. Dans le domaine visuel, la perception du tout est aussi immédiate que la perception des parties même et même elle les précède. Dans le domaine tactile, le cmplexe ne naît que par synthèse active des formes élémentaires et partielles ».
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. La perception sensible, p. 104

Le syncrétisme du sujet et de l'objet (§102)

Le syncrétisme du sujet et de l'objet. - Il existe donc à l'origine de la pensée, une confusion initiale du sujet et de l'objet. Le genre d'existence que le tout jeune enfant attribue aux choses est de même nature que sa propre existence à lui : on peut aussi bien dire qu'il y a assimilation des choses au moi que, comme dit J. Piaget, « absorption du moi dans les choses par indifférenciation du subjectif et de l'objectif. »
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. L'idée d'objet et le réel, p. 142

Le syncrétisme primitif : le jugement comme analyse (§170)

Nous savons (§40 et 102) qu'une caractéristique de la pensée enfantine est son syncrétisme, c'est-à-dire la confusion en un seul tout mental du sujet pensant et de l'objet pensée et bien aussi des différents objets entre eux. D'où ces « contaminations» et ces « digressions » (§65) qu'H. Wallon comme J. Piaget signalent dans la pensée de l'enfant, par suite de l'insuffisance du « pouvoir discriminateur » de son intelligence, de son « inaptitude à dégager de la masse où il plongent les éléments qu'exigerait le processus intellectuel ». C'est à dire que la psychologie du développement de l'enfant est ici d'accord avec la psychologie de la Gestalt pour s'opposer au postulat de ces psychologues trop logiciens selon lesquels il y aurait antériorité psychologique des termes par rapport à l' aperception de la relation.
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. Le jugement, p. 261
Ajoutons-y ces « confusions syncrétiques » inhérentes à la « représentation concrète des choses » et qui interdisent à l'enfant l'accès du « monde des relations : « ...  » ((Wallon, l'origine de la pensée chez l'enfant). L'enfant est donc, primitivement du moins, incapable de poser un sujet' logique et un attribut ou un complément, conçu de façon objective, qui formerait les deux termes du rapport. L'un et l'autre sont englobés sans distinction dans l'acte perceptif, d'autant plus que la perception de l'enfant elle-même a elle aussi un caractère syncrétique (§83).
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1996  (ISBN 9782253040217), t. 1, partie La connaissance, chap. Le jugement, p. 261

Cours de philosophie, tome 2, 1954

Le moi de l'enfant (§73)

... la personnalité se développe en antithèse avec lui par toute une série de différenciations. Comme on l'a déjà vu,l'enfant part d'un état de syncrétisme, c'est-à-dire de confusion primitive, qui se manifeste ici : 1° comme un confusion du moi avec le non-moi (égocentrisme de Piaget)) ... ; . 2° comme une confusion du moi avec autrui monologue ») ... ; 3° comme une confusion du moi « avec le sujet » au sens philosophique (fabulation) ...; 4° une confusion du moi, en tant que pure existence psychique, avec le « je » (instabilité affective et intellectuelle) ... .)
  • Cours de Philosophie, Armand Cuvillier, éd. Le Livre de Poche, 1995  (ISBN 9782253040217), t. 2, chap. VIII. La personnalité et le caractère, p. 141-142
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