Directive anticipée

La directive anticipée (parfois utilisé au pluriel sous la forme : directives anticipées) est un document écrit, daté et signé par lequel une personne rédige ses volontés quant aux soins médicaux qu'elle veut ou ne veut pas recevoir dans le cas où elle serait devenue inconsciente ou elle se trouverait dans l'incapacité d'exprimer sa volonté.

Déclaration de Lisbonne

La déclaration de Lisbonne de l'Association médicale mondiale sur les droits du patient énonce que « si le patient est inconscient et si, en l'absence du représentant légal, il y a nécessité urgente d'intervention médicale, le consentement du patient sera présumé, à moins que sur la base d'une conviction ou ferme déclaration préalable, il ne soit évident et indéniable qu'il aurait, dans pareil cas, refusé l'intervention. »[1]

Ce document est appelé en anglais living will et « testament biologique » dans d'autres pays.

France

En France, la possibilité d'écrire des directives anticipées a été introduite dans la loi du 22 avril 2005 (dite loi Leonetti) et le décret du 6 février 2006[2]. Selon l'article L1111-11 du Code de la santé publique, dans sa version actuelle issue de la loi du 2 février 2016, "ces directives anticipées expriment la volonté de la personne relative à sa fin de vie en ce qui concerne les conditions de la poursuite, de la limitation, de l'arrêt ou du refus de traitement ou d'acte médicaux"[3]. Elles revêtent la forme d'un document écrit, daté et signé par leur auteur dûment identifié par l'indication de ses nom, prénom, date et lieu de naissance[4].

Toutefois lorsque l'auteur de ces directives, bien qu'en état d'exprimer sa volonté, est dans l'impossibilité d'écrire et de signer lui-même le document, il peut demander à deux témoins, dont la personne de confiance, d'attester que le document qu'il n'a pu rédiger lui-même est l'expression de sa volonté libre et éclairée. Ces témoins indiquent leur nom et qualité et leur attestation est jointe aux directives anticipées[4].

Une affaire a particulièrement marqué la France ces dernières années sur le sujet des directives anticipées : il s'agit de l'affaire Vincent Lambert, qui a particulièrement touché l'opinion publique et a permis à la majeure partie des Français d'entendre parler de directives anticipées. Par ailleurs cette affaire a suscité un ré-examen de la loi Leonetti du 22 avril 2005 qui s'est concrétisé par la nouvelle loi du 2 février 2016, qui consacre son article 8 aux directives anticipées[5].

D'après un sondage de l'IFOP d'octobre 2017, 14% des Français affirment avoir rédigé leurs directives anticipées. Parmi ceux qui ne les ont pas rédigées, 42% ignoraient leur existence[6].

Validité

La loi du 2 février 2016 a renforcé le caractère contraignant des directives anticipées. Le médecin doit les respecter, sauf dans deux cas de figure : "Les directives anticipées s'imposent au médecin pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement, sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale"[5].

Le contenu des directives anticipées prévaut sur tout autre avis non médical. Elles peuvent être à tout moment révoquées ou modifiées. Leur validité, qui était de 3 ans renouvelable entre 2005 et 2016, est désormais sans limitation de durée[7].

Toute personne admise dans un établissement de santé ou dans un établissement médico-social peut signaler l'existence de directives anticipées. Cette mention ainsi que les coordonnées de la personne qui en est détentrice sont portées dans le dossier médical[8],[9].

Conservation

Les directives anticipées doivent être conservées selon des modalités les rendant aisément accessibles pour le médecin appelé à prendre une décision de limitation ou d'arrêt de traitement dans le cadre de la procédure collégiale définie par l'article R. 4127-37 du Code de santé publique[10].

À cette fin, elles sont conservées dans le dossier de la personne constitué par un médecin de ville, qu'il s'agisse du médecin traitant ou d'un autre médecin choisi par elle, ou, en cas d'hospitalisation, dans le dossier médical[11].

Toutefois, les directives anticipées peuvent être conservées par leur auteur ou confiées par celui-ci à la personne de confiance ou, à défaut, à un membre de sa famille ou à un proche. Dans ce cas, leur existence et les coordonnées de la personne qui en est détentrice sont mentionnées, sur indication de leur auteur, dans le dossier constitué par le médecin de ville ou dans le dossier médical.

La loi du 2 février 2016 avait prévu la création d'un grand fichier informatisé pour conserver ces documents au niveau national[5]. Mais un rapport de l'IGAS d'octobre 2015 a proposé d’intégrer les directives anticipées au sein du Dossier Médical Partagé (DMP) [12]prévu dans la Loi Santé du 26 janvier 2016 et mis en œuvre par l’Assurance maladie. Selon l’IGAS, le « DMP est l’outil le plus adapté pour assurer à moindre coût l’identification des personnes, la conservation et la sécurisation lors de l’interrogation. (...) Aucun des autres opérateurs existants ne fera mieux, plus vite et à meilleur coût. »[13]

Modèles de formulaire

L'article 8 de la loi du 2 février 2016 dispose qu'un décret doit établir un modèle à proposer aux personnes qui souhaitent rédiger des directives anticipées [5]. Ce modèle a été établi et publié dans le cadre d'un décret et d'un arrêté en date du 3 août 2016[14],[15].

D'autres modèles ont été établis par divers organismes, hôpitaux ou associations et sont disponibles sur leurs sites, comme par exemple la Société de réanimation de Langue Française (SRLF)[16], la Société Française d'Accompagnement et de soins Palliatifs (SFAP)[17], l'Espace Éthique du Languedoc-Roussillon[18], l'Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD)[19], l'association SOS Fin de vie[20], le réseau Unicancer[21], etc.

Fin 2016, la Haute Autorité de Santé (HAS) a mis en ligne différents guides pour aider les professionnels de santé et le grand public à s'approprier les directives anticipées[22]. Le Centre National des Soins Palliatifs et la Fin de Vie (CNSPFV) met également à disposition de courtes vidéos pour répondre aux principales questions sur les directives anticipées et la personne de confiance[23].

Italie

Le 20 avril 2017, la Chambre des députés a adopté la loi dite sur le testament biologique, par 326 voix pour, 37 contre et 4 abstentions[24]. Pour valider la loi, le Sénat a également du approuver le texte, chose faite, le 14 décembre 2017, par 180 voix pour et 71 contre. La loi prévoit le droit à chacun de refuser tout traitement en phase terminale et accorde à toute personne majeure en fin de vie la possibilité de renoncer aux traitements médicaux, mais aussi à l'alimentation et à l'hydratation. Pour une personne mineure, un tuteur légal ou sa famille la plus proche pourront prendre une décision à sa place. Il est prévu que ce choix soit exprimé par anticipation via des dispositions anticipées de traitement, document révocable ou révisable (écrit ou vidéo) où chacun précise les traitements auxquels il souhaite renoncer s'il se trouvait un jour dans l'incapacité d'exprimer des préférences[25].

Notes et références

  1. « Prise de Position de l'AMM sur les Directives Anticipées ("Living Wills") », Association médicale mondiale, (consulté le 11 juin 2013)
  2. Décret n° 2006-119 du 6 février 2006 relatif aux directives anticipées prévues par la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires), (lire en ligne)
  3. France, « Code de la santé publique » (lire en ligne), art. Article L1111-11(version en vigueur : 11 juin 2013)
  4. France, « Code de la santé publique » (lire en ligne), art. Article R1111-17(version en vigueur : 11 juin 2013)
  5. « Loi du 2 février 2016 sur la fin de vie », sur Légifrance (consulté le 4 août 2018)
  6. « Les Français et les directives anticipées », IFOP, (lire en ligne)
  7. France, « Code de la santé publique » (lire en ligne), art. Article R1111-18(version en vigueur : 11 juin 201)
  8. « Santé : directives anticipées | service-public.fr », sur www.service-public.fr (consulté le 5 juin 2016)
  9. « Les directives anticipées | SFAP - site internet », sur www.sfap.org (consulté le 2 août 2017)
  10. France, « Code de la santé publique » (lire en ligne), art. Article R4127-37(version en vigueur : 11 juin 2013)
  11. France, « Code de la santé publique » (lire en ligne), art. Article R1111-19(version en vigueur : 11 juin 2013)
  12. « Dossier Médical Partagé - SI-Portail », sur www.dmp.gouv.fr (consulté le 4 août 2018)
  13. « Expertise sur les modalités de gestion des directives anticipées en fin de vie », sur IGAS, (consulté le 4 août 2018)
  14. Code de la santé publique - Article R1111-18 (lire en ligne)
  15. Arrêté du 3 août 2016 relatif au modèle de directives anticipées prévu à l'article L. 1111-11 du code de la santé publique (lire en ligne)
  16. « Directives anticipées 2018, la SRLF vous propose une aide dans cette démarche : relais dans les médias - SRLF », SRLF, (lire en ligne)
  17. « Les directives anticipées | SFAP - site internet », sur www.sfap.org (consulté le 4 août 2018)
  18. « Petit Guide d'éthique sur les directives anticipées », Espace Ethique Languedoc Roussillon ERRE, (lire en ligne)
  19. « Notre fichier des directives anticipées | ADMD », sur www.admd.net (consulté le 4 août 2018)
  20. « Ecrire ses directives anticipées : guide des démarches - Directives anticipées », sur Directives anticipées (consulté le 4 août 2018)
  21. « UNICANCER - Fin de vie : rédiger ses directives anticipées », sur www.unicancer.fr (consulté le 27 août 2018)
  22. « Haute Autorité de Santé - Les directives anticipées concernant les situations de fin de vie », sur www.has-sante.fr (consulté le 4 août 2018)
  23. « Des professionnels répondent à vos questions en vidéo | CNSPFV », sur www.spfv.fr (consulté le 4 août 2018)
  24. L’Italie se penche sur la fin de vie, La Croix, 21 avril 2017
  25. L'Italie adopte le «testament biologique», 24 heures, 14 décembre 2017

Voir aussi

Articles connexes

  • Loi Leonetti du 22 avril 2005 relative aux droits des patients en fin de vie
  • Soin palliatif
  • Euthanasie
  • Législation sur l'euthanasie et le suicide assisté par pays
  • Aide au suicide
  • Personne de confiance

Liens externes

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